Cette patinoire, qu'on se le dise, c'était quand même une sacrée blague. Le lieu bien louche par excellence, aux yeux de Mado. Parce que déjà, elle n'en saisissait pas bien l'utilité. Glisser sur de la glace, hm, c'était susceptible de plaire à qui ? Au Candeloro du pauvre, assurément. Mais pas à elle, ça c'était certain. Parce qu'autant l'eau sous son état liquide était comme qui dirait son élément, autant la glace ne lui avait jamais trop inspiré confiance. En réalité, elle avait toujours cette horrible image en tête : celle d'un enfant jouant sur la glace, en toute inconscience, et passant à travers celle-ci. Là dessous, ce devait être l'horreur. Et le fait d'imaginer, qu'en plus, la glace pouvait se reformer aussitôt et donc emprisonner sa victime à l'intérieur, disons que c'était encore pire. Ce genre de scènes, on en voyait dans quelques films. Elle, ça l'avait relativement traumatisée, c'est vrai, déjà qu'elle ne portait globalement pas la glace dans son cœur. Cette patinoire-ci, clairement, elle ne s'y rendait que bien rarement. En fait, c'était aujourd'hui la seconde fois qu'elle y allait, s'y étant déjà rendue une fois en tout début d'aventure. Sauf qu'elle n'en gardait pas un souvenir fameux, étant donné qu'elle y avait connu une désagréable mésaventure. Et heureusement qu'Enora avait été là pour l'aider, car peut être serait-elle encore assise au beau milieu de la glace, sans doute morte de froid et à moitié gelée. Elle se trouvait alors un tantinet maso de s'y rendre à nouveau en ce jour, mais il est vrai qu'elle partait toujours du principe qu'il ne fallait pas rester sur une mauvaise expérience et qu'il valait mieux retenter le coup, se laisser une chance de faire mieux, sait-on jamais que ce soit possible. Alors c'est assez déterminée qu'elle s'était vêtue pour l'occasion puisqu'elle s'était rendue sur place. Mais à peine fut-elle arrivée qu'elle nota la présence de Nadan, visiblement en pleine hésitation. « Tu attends quoi ? Qu'elle vienne jusqu'à toi ? » s'amusa-t-elle, pour le taquiner. Ouais non hein, c'était à lui de venir à la glace et non à la glace de venir à lui. Logique. « Pitié, dis-moi que tu es balèze en patinage. Parce que je n'ai aucune envie de me retrouver le cul sur la glace une seconde fois, moi. » Parce que c'était froid, ce bordel. Bah ouais, un peu quand même quoi.

Allez savoir pourquoi, Mado avait tendance à partir du principe qu'il ne pouvait pas y avoir pire patineuse qu'elle en ce monde. Peut être parce qu'elle gardait un très mauvais souvenir de la fois où elle avait voulu prendre son courage à deux mains et se lancer sur la glace, hm. Cette chute, bon sang, elle l'avait marquée. Mais Mado semblait décidée à retenter sa chance, à faire plus attention à où mettait les pieds, sans se lancer comme une inconsciente qu'elle avait été ce fameux jour. Nadan était là, lui aussi. Qu'attendait-il ? Elle n'en savait trop rien, honnêtement. Est-ce qu'il savait patiner ? Oh, c'est ce qu'elle espérait, dans la mesure où il serait tout de même bien que l'un d'eux, au moins, ne se démerde pas trop mal sur des patins. Disons que s'il pouvait lui éviter une malheureuse chute, histoire qu'elle n'ait pas à en repasser par la case humiliante du viandage sur glace, ce serait franchement une bonne chose. Il lui confia alors, justement, être tout à fait disposé à se débrouiller comme un chef. Enfin, disons que ce qu'elle interpréta de ses vagues propos. Sans doute essayait-elle à tout prix de se rassurer, aussi. Mais de toute manière, elle n'avait aucune raison de mettre en doute sa parole, alors il va de soi qu'elle le croyait. Lui adressant un franc sourire, elle ne manqua alors pas d'exprimer le fait qu'elle soit franchement rassurée par cette confession. Elle galérerait moins avec quelqu'un comme lui, c'était certain. Ah, il précisa pourtant devoir décliner toute responsabilité si les choses tournaient mal. Un rire s'échappa alors des lèvres de la jeune femme qui, peut être un peu trop naïve pour le coup, mouva vivement la tête de droite à gauche. « Mais y'a pas de raison que je me rétame, vu que tu seras là pour m'éviter ce genre de problèmes, justement » renchérit-elle alors, en un sourire satisfait. Bah ouais, maintenant elle se croyait avec Brian Joubert, hein, clairement. Tous deux chaussés, elle commença à poser un patin sur la glace, progressivement, se tenant bientôt à la rambarde, peu rassurée. « Alors hm, jusque là ça va toujours. Mais la dernière fois, j'ai voulu faire la maligne en m'élançant comme une tarée. Résultat, j'ai compris ma douleur, donc hm, je vais avoir besoin de toi là. » Bah oui, lui il devait pouvoir patiner sans se viander au bout d'un mètre, non ? Assurément. Donc ouais, s'il pouvait l'aider à combattre son foutu traumatisme, disons qu'elle lui vouerait une reconnaissance éternelle.

Vraiment, ce serait particulièrement cool si Mado pouvait éviter de se gameler aujourd'hui encore. Non pas que l'idée de se ramasser à nouveau sur la glace lui soit particulièrement dérangeante, mais disons qu'elle aimerait ne pas passer pour une cruche cette fois encore, hein. Donc oui, il était certain qu'elle fondait présentement tous ses espoirs en Nadan, qui lui avait alors fait savoir qu'il s'y connaissait. Honnêtement, elle n'avait même pas envie de douter de sa parole, tant elle avait besoin de le croire sincère. Elle était d'ailleurs certaine qu'en sa compagnie, elle ne risquait tout simplement rien. Non, elle ne tomberait pas, puisqu'il était là pour l'en empêcher. Et d'ailleurs, la seule raison pour laquelle il avait du hésiter à se lancer était probablement le fait que, par modestie, il n'avait pas forcément eu envie de l'éblouir avec son talent. Qu'il ne s'en fasse pas, elle ne lui en voudrait pas, tant qu'il s'en servirait pour l'aider. Il y avait du boulot, hm. Car Mado revenait de très loin. La dernière fois, étalée au beau milieu de la glace, elle avait songé à glisser sur les fesses jusqu'à la rambarde mais avait heureusement pu compter sur l'intervention d'Enora. Autant dire qu'aujourd'hui, elle préférait tout simplement éviter d'en passer par là. Ouais disons qu'une chute n'était pas tellement prévue dans son programme de la journée, hein. Mais avec Nadan, de toute façon, elle se sentait clairement en sécurité. Encore traumatisée par la dernière fois, la française se cramponnait comme elle pouvait, attendant sans doute que son camarade se décide à se lancer, et à la lancer par la même occasion. Il lui tendit son bras, et elle ne se fit par prier pour entreprendre de le saisir. Mais là, ce fut le drame. Car ce qu'elle cru être un appui fiable se révéla être plus fragile que prévu. En effet, son camarade eut le malheur de glisser, puis de se tenir à elle - inversant ainsi les rôles, en quelques sortes - pour finalement l'entrainer dans une improbable chute. Oh non, pas encore ! Surtout que ce coup-ci, ils étaient tombés à deux, ce qui était encore moins confortable que sa gamelle en solitaire. Donc là, elle avait tendance à douter du prétendu talent de son camarade, inévitablement. Sauf qu'elle voulut lui offrir le bénéfice du doute, étant même prête à partir du principe que ce genre d'accidents arrivaient aussi aux meilleurs. Mais finalement, ce fut lui qui lui avoua n'avoir jamais patiné. QUOI ?! Alors, il lui avait menti ? Elle se sentait trahie. Oh oui, clairement. « Mais pourquoi avoir prétendu t'y connaitre ? Tu m'as prise en pitié ou quoi ? » Et clairement, la pitié, elle n'aimait pas ça. Elle aurait grandement préféré qu'il brise ses illusions. Car le mensonge non plus, elle ne cautionnait pas. « Bon, il va falloir qu'on se relève. Mais je préfère te prévenir que la dernière fois, j'ai failli coucher là. » Car oui, elle gardait en tête que sans Enora, elle serait peut être toujours ici, en fait. Alors elle tâcha de prendre appui sur ses mains, sans succès, puis sur l'un de ses genoux, sans rien de concluant non plus. « T'as prévenu quelqu'un que tu venais ici ? » Parce qu'elle, non. Très rassurante la Mado, oui. Toujours.

D'accord, peut être Mado avait-elle parfois tendance à en faire un peu trop, à dramatiser certaines situations et à faire preuve d'un pessimisme déroutant. Mais bon, ça n'était pas si fréquent que cela non plus, hein. Même si ici, pour le coup, elle avait effectivement tendance à en faire des tonnes pour pas grand chose, un peu comme si c'était la chute de toute une vie, celle dont elle ne se relèverait jamais. Le pire, probablement, c'était d'apprendre que toute cette conversation n'était basée que sur des mensonges. Nadan lui avait fait croire qu'il s'y connaissait en patinage, alors que visiblement, il patinait aussi bien qu'une quille de bowling. Et pour le coup, ils étaient deux. Sauf que Mado, elle, n'avait jamais laissé croire qu'elle était experte en la matière, bien au contraire, vu qu'elle avait attendu de son camarade qu'il l'aide à dépasser son traumatisme de la dernière fois. Elle se sentait profondément trahie, qu'on se le dise. Qu'importe qu'on pense d'elle qu'elle était dans la démesure, le fait est qu'elle n'aurait probablement plus jamais confiance en lui. Oh non, plus jamais ! D'ailleurs, si elle avait été fichue de se remettre sur ses pattes, elle aurait naturellement tentée une sortie dramatique, au ralenti, sur fond musical made by Céline Dion. Ouais, clairement. Il disait donc qu'elle regardait trop de films. Même pas. Elle était simplement du genre à tout exagérer. Mais ça faisait son charme, n'est-ce pas ? Hm. Sourcils froncés et moue boudeuse, oui, Mado l'eut mauvaise lorsqu'il se ficha d'elle au moment où elle tenta de se relever. « Ce n'est pas drôle » ronchonna-t-elle immédiatement. Elle essayait de se remettre sur ses pattes, et lui, il ne l'encourageait pas du tout. Le petit saligaud. Et maintenant, il tentait d'être rassurant. Bah voyons. « Et si la glace ne supporte pas notre charge, hein ? Tu n'y as pas pensé, à ça. Moi, je ne le sens pas du tout. » Mais bon, elle ne sentait pas grand chose, généralement. Disons qu'elle partait toujours du principe que le pire était à redouter. Donc bon, là il avait beau dire qu'ils n'étaient pas condamnés, elle avait quand même du mal à le croire. Il tenta alors à son tour de se relever et ... échoua. Alors ça, c'était bien fait pour lui, clairement. D'ailleurs, elle sourit de façon amusée, d'autant plus qu'il évita son regard, honteux comme il devait être. Alors, c'était si facile que ça, peut être ? Bah non, hein. Mais voilà qu'il se laissa glisser jusqu'à la rambarde et finit par se redresser. Eh merde, il était plus malin que prévu. Donc ouais, effectivement, l'espoir lui était revenu. Quoi que ... qu'attendait-il pour l'aider, là ? Le dégel, peut être ? Il n'avait quand même pas l'intention de la laisser ici, dites ? Ah non, il n'avait pas intérêt. « Tu ne vas pas m'abandonner ici, hein ? Ce serait franchement cruel. Et tu aurais ma mort sur la conscience ... Je doute que tu te le pardonnes un jour. » Mais s'il était du genre à n'avoir aucun scrupule, c'était déjà un peu plus problématique, hm. « Ais pitié d'une femme faible et frigorifiée. » Son ton était suppliant, parce que vraiment, elle vivrait mal qu'il se barre comme un lâche. Et non, ça n'était pas le retour de sa tendance à tout exagérer. Absolument pas.

Ah d'accord, alors en fait, Nadan était une sacrée fripouille. Car non content de se foutre un tantinet de sa gueule quand elle avait tendance - c'est vrai - à dramatiser un tantinet la situation, voilà qu'il trouva bon de rire de sa lamentable tentative de remise sur pattes, pour ensuite se moquer du fait qu'elle en fasse naturellement trois tonnes au sujet de la glace. Bah oui, bien sûr qu'inconsciemment elle savait qu'il était quand même peu probable que la glace se brise, mais bon, elle avait bien le droit de se laisser aller à un peu d'auto-dérision, non ? De toute manière, Nadan avait décidé de se payer sa tête aujourd'hui, et il est vrai qu'il s'y prenait comme un chef. « Oui mais elle ne m'aime pas cette patinoire, figure-toi. Je la sens fourbe, et ça ne me rassure pas. » Donc oui, pour le coup, elle préférait encore rester dans son bon gros délire, parce qu'elle n'avait simplement aucune envie de retrouver tout son sérieux. Elle se connaissait, elle serait capable de s'emporter pour un rien, alors oui, il valait vraiment mieux qu'elle continue sur sa pitoyable lancée. Par contre, elle n'apprécia vraiment pas qu'il lui dise qu'elle lui faisait de la peine, parce que ça sonnait un peu comme un « Grosse nouille, tu me fais pitié, t'as même pas idée. » Alors oui, pour le coup, elle l'avait un peu mauvaise. Pas au point de le prendre véritablement mal, mais suffisamment pour le fusiller du regard, l'air de dire qu'il valait quand même mieux qu'il se calme, sinon elle serait forcée de lui baisser son pantalon, comme ça, sans prévenir. Oh oui, la menace était implicite, et elle était terrible. T-e-r-r-i-b-l-e, même. « Eh oh, n'en deviens pas désagréable ! » Bah ouais, ça n'était pas du tout sympa, quand même. Il pouvait bien se moquer d'elle, en attendant, il finissait quand même par lui tendre un bras. Bras que la jeune femme s'empressa naturellement de saisir, alors tentée de lui faire un sale coup. Mais bon, nulle comme elle était, ça risquait de foirer et de se retourner contre elle au final. Alors elle se contenta de se hisser difficilement sur ses jambes, finissant par plaquer énergiquement ses mains sur les épaules de Nadan. « Plus question de te lâcher, canaille. Maintenant, fais en sorte de nous ramener à la rambarde s'il te plait, et en un seul morceau, de préférence. » Autant dire qu'aucune chute n'était plus envisageable. Alors qu'il se débrouille comme il veut, tant qu'il leur évitait toute humiliation supplémentaire, hm.