Aure ne sait plus vraiment à quelle heure elle était convoquée, mais est-ce vraiment important? Les candidats sont assez nombreux et ils doivent certainement passer à la chaîne comme vont les vaches à l'abattoir, pour ne pas faire attention à ce retard évident. Très peu pressée - non pas par le stress de passer elle-même à l'abattoir, mais parce qu'elle ne voit pas l'importance d'être pressée pour ça -  elle entre dans la salle lentement. Sa robe moulant parfaitement ses courbes, elle libère ses cheveux blond très clair de son chapeau large d'un mouvement de main, ses lunettes remontées sur le dessus de son crâne. Une slave de confiance en elle s'échappant de tout son être venant fouetter toutes les têtes tournées vers elle, pourtant elle ne leur porte aucune attention. Non, elle ne porte que très peu d'attentions à un jeune homme coincé dans son coin, la bouche légèrement entrouverte d'avoir vu la créature de rêve qu'elle est. Ou alors il a la mâchoire bloquée, mais ça serait une sacrée coïncidence. Généreuse, Aure lui offrit un large sourire toutes dents dehors, avant de s'arrêter au beau milieu de la pièce. Alors qu'elle comptait fureter après une place libre, elle remarqua la présence d'un jeune homme proche de la porte. Proche est un euphémisme, puisque celui-ci a littéralement l'oreille collée sur la porte. Sans crainte d'être repoussée et alors qu'elle aurait pu s'asseoir elle-même dans son coin, elle s'approcha de lui. Un sourire plus charmeur sur le bout de ses lèvres, elle se pencha légèrement posant ses mains sur ses genoux, à côté du jeune homme, à quelques centimètres à peine de lui. "Tu sais que ce n'est pas très poli d'écouter aux portes?" Sa voix grave tranche avec l'angélisme de son teint de porcelaine, alors que son sourire dénote avec tout le sexy de son aura. "On pourrait te dénoncer, tu sais..." Qu'elle ajoute, le plus sérieusement du monde.

Ghika était de ces narcoleptiques discrets, de ceux qui avaient un cerveau possédant la fonction « sommeil éveillé ». Alors qu'il s'était laissé aller à s'appuyer contre le mur, une coupure de courant dans son système neuronal avait entraîné une sorte de transe, pendant laquelle ce qui se passait autour de lui n'avait guère d'importance. Il n'avait même pas conscience de la position dans laquelle il s'était fourré, ce n'est qu'au moment où une voix suave s'adressa manifestement à lui qu'il retrouva la conscience et le contrôle de son corps. Ses yeux, encore un peu dans le flou mirent une ou deux secondes à faire le point sur le visage de la jeune femme qui s'adressait à lui avec cet accent britannique très prononcé.

Dans ce genre de situation il y avait deux options, soit on se sentait attaqué, à la recherche d'un conflit ou victime d'une agression, soit on décidait de prendre les choses avec le sourire, de rétorquer sur le ton de la plaisanterie. Ghika n'était pas vraiment un garçon de conflit, il préférait observer les gens autour de lui se battre, en déduire la meilleure stratégie à adopter pour faire avorter les prochaines attaques, ou bien pour anéantir l'ennemi en moins de temps qu'il n'en faut pour le dire. C'est donc après avoir baillé qu'il se permet un sourire et d'une voix fraîche, entre l'acier de la lame et l'ironie du misanthrope il déclare : « T'as aucune preuve, c'est pas moi, j'ai un alibi, j'étais en train de jouer au billard. » Avant de croiser les bras sur sa poitrine, l'air boudeur, portrait craché d'un enfant de six ans qu'on aurait pris sur le fait. « De toute façon, personne ne te croira, c'est ta parole contre la mienne et les gens verront de suite que tu es une opportuniste cherchant à évincer la compétition. » Il lui aurait presque tiré la langue, mais ç'eut été un peu trop infantile, même pour lui.

Aure ne peut s'empêcher de s'approcher de ce phénomène. C'est plus fort qu'elle. Elle est le papillon. Il est le lampadaire. Sans rire, elle est plus belle encore qu'un monarque et lui plus grand et maigrichon qu'un lampadaire (parce que l'on ne peut pas dire qu'il ait l'air si brillant que ça). Elle s'approche, lui parle, dans la même position que lui, qui semble débarqué là sans même le savoir. Aure sourit. Elle sourit tout le temps. Elle se tait aussi. Elle aime beaucoup discuté avec tout le monde, mais elle sait également se taire lorsqu'il le faut. Ce qu'il dit est plutôt intéressant, voir marrant. Elle ne parlait pas d'elle. Il s'excite tout seul. Elle le laisse parler, ses prunelles roulant vers le haut. Puis il parle de parole contre parole, ce qui la fait se redresser presque immédiatement. Un rire grave, comme sa voix, sort de sa bouche pulpeuse, avant de feindre un certain sérieux. "Hm c'est pas certain." Elle mime une mine boudeuse. "Opportuniste ou pas, il est prouvé que les femmes sont toujours prise plus au sérieux que les hommes dans les enquêtes. Nous discours dominons toujours sur les histoires belliqueuses de... garçonnets dans ton genre." Elle sourit en coin, consciente que cette échange ne nécessitait pas forcément autant de blabla. Délicatement, elle prend le bras du jeune homme pour l'éloigner du mur et faire quelques pas dans la salle. "Tu as de la chance, je n'allais rien dire... Mais franchement, je m'incline devant toi ! Que de courage et de répartie !" Ironie à peine dissimulée par ce sourcil relevé et le large sourire quelle arbore depuis toujours. Ce genre de sourire qui ferait perdre son sang-froid à n'importe qui, mais elle est femme et personne ne peut se placer assez haut pour cogner une femme. Aure lâche un peu son bras, pour s'incliner justement devant lui.

Elle était jolie, sans plus, un peu trop bon-chic bon-genre à son goût. Il se dégageait d'elle une suffisance que Ghika avait toujours considéré être la signature des gens riches, ceux qui pensaient que leur portefeuille pouvait leur acheter une décence. Sa remarque, et l'emploi du terme belliqueux, firent tiquer le jeune américain. « C'est parce que vous avez l'expérience de la guerre, vous la faites à chaque période de soldes. » lança-t-il sans vraiment faire attention à ce qu'il venait de dire. Sans s'en rendre compte, parfois, Ghika pouvait se montrer un peu trop intense pour les gens qui l'entouraient, parce qu'il n'avait pas vraiment de filtre et qu'il disait ce qui lui passait par la tête, sans vraiment réfléchir aux conséquences. Il était de toute façon assez grand pour les assumer.

Courage et répartie... il lui fit un de ces sourires que l'on voit dans les films, ceux qu'on sait être un peu surjoué. L'ironie ne lui échappait pas mais il s'en fichait pas mal. Elle n'avait pour l'instant pas vraiment fait preuve de beaucoup de répartie et son courage ne s'était manifesté qu'au moment où elle s'était adressée à lui alors qu'il faisait une pause neuronale. Soudain, alors que son esprit n'était plus du tout concentré sur la situation, lui revint un fait intéressant, à propos et qui méritait d'être partagé. « Tu sais qu'une étude scientifique a montré que si les femmes étaient aussi meurtrière que les hommes, elles se faisaient moins souvent pincer, pour la simple et bonne raison qu'elles savent mieux faire disparaître les tâches de sang... En fait on vous prend plus au sérieux parce que vous faites mieux le ménage. Je trouve ça misogyne pas toi ? » Question purement rhétorique, ça l'était sans l'ombre d'un doute, mais sous couvert de scientificité, les chercheurs avaient réussi à mettre en lumière le fruit de l'asservissement des femmes pendant des siècles.

Le jeune homme n'est pas tant réceptif physiquement, qu'il ne l'est verbalement. Il est même très ennuyeux dès que sa bouche est fermée. Alors elle lui répond. Elle se trompe dans sa phrase, mélange ses mots. Comme il le lui fait savoir pas si méchamment, elle se met à rire. La guerre du shopping, il n'en survivra jamais lui. Il ne saurait pas se relever sur ses talons si haut. "C'est à peu près ça, oui." Elle rit et de bon coeur. Contrairement à ce que l'on peut penser aux premiers abords, elle est foncièrement gentille et c'est loin d'être genre qu'elle se donne que ses grands airs. Il n'est pas irrespectueux. Pas même lorsqu'il parle et que son absence de réelle réaction l'ennuie toujours un peu. "Misogyne? Totalement oui... Tellement vieille école, parce que de nos jours beaucoup d'hommes font très bien le ménage et même mieux que certaines femmes et beaucoup de femmes sont dans de haut postes, dans de grandes entreprises... Mais pas assez tu me diras, parce que pour le coup, jamais les femmes ne seront assez prises au sérieux par leur homologues masculins toujours enclin à croire qu'ils sont supérieurs intellectuellement... Ce qui n'est clairement pas le cas, puisqu'il est aussi prouvé scientifiquement que les hommes ont plus de chance d'échouer durant leurs études que les femmes." Elle se taît, se rendant compte qu'elle était allée peut-être loin. C'est peut dire que de dire qu'elle aime échanger et qu'elle sa contient bien plus de choses que l'on pourrait le croire. Petit sourire amusé en coin, elle attrape la main du jeune homme qu'elle sert fermement, pour avancer les présentations. "Aure, enchantée."

Elle a l'air bien plus agréable quand elle sourit et que son visage perd son aspect sévère. Il n'aime pas les personnes trop austères, ça lui rappelle sa mère, l'ennui, la mort. Ghika ne lui dira pas qu'elle fait des généralités, alors qu'elle en dénonce, il ne lui dira pas que lors des soldes il est prêt à tuer pour un bon tuxedo ou un blouson en cuir. Il n'est pas là pour lui faire la leçon, elle a de toute façon le droit à ses opinions.

Quand elle répète le mot misogyne, il croit un instant qu'elle n'en connaît pas le sens, homme de peu de fois qu'il est, mais l'explication que développe la jeune femme par la suite suffit à le convaincre qu'elle n'est pas complètement stupide et qu'elle peut même se montrer plutôt maligne. Il ne tique pas vraiment quand elle brosse le portrait des hommes comme des tyrans monstrueux et dictateurs. C'est qu'il a l'habitude d'entendre des propos féministes à longueur de soirée dans les bars.« Enfin, mon expérience des études m'a quand même montré quelque chose, les femmes sont très bonnes pour apprendre et réussir aux examens, mais elles manquent d'esprit d'initiative dans le monde du travail. Mais, je te l'accorde, vous êtes bien plus scolaires. » Ce n'est pas une insulte, c'est une vérité comme une autre, les hommes sont souvent plus instinctifs quand il s'agit de leur survie dans le monde réel, les femmes elles ont tendance à plus suivre les règles qu'on leur a enseigné à la lettre, qu'elles s'appliquent ou non dans le monde réel.

Aure... il se demande un instant si c'est un diminutif ou non, mais après tout il est mal placé pour juger, et puis après douze saisons de Fake Lover à la télé, il pense avoir entendu les prénoms les plus originaux en vigueur dans le monde. « Ghika, ça doit vouloir dire oreille qui traîne dans une langue slave. » plaisante-t-il gentiment, en rappel au premier contact qu'elle a instauré.

"Hm certes... Mais tu y connais quelque chose au monde du travail, toi?" Qu'elle lui répond, sourire railleur. "Tu n'as pas dix-huit ans, un truc dans ce goût-là?... Même si c'est vrai, des jeunes travaillent déjà à cet âge-là..." Qu'elle souffle à la fin, presque à elle-même. Elle se moque un peu, parce que ce débat ne l'intéresse pas vraiment et partit comme ils sont partit, il y resterait pour des heures. Ce qui l'importe, c'est qu'elle parle à un peut-être futur concurrent et que c'est assez grisant l'idée d'être baignée déjà ainsi dans la compétition. Elle aime la compétition. Naturellement, elle se présente à lui. Aure, tout simplement, sans signification, sans rien. Il ne lui manque pas une lettre - Laure - et n'est ni une coquille - Aude - ni un diminutif de rien du tout. C'est un prénom qui existe, pas plus orginal qu'un autre, fêté le quatre octobre tout comme Saint François d'Assise, à l'initiative de l'ordre des frères mineurs. Elle n'est pas croyante pour autant. Si elle le sait, c'est parce qu'elle sait tout. Point. Il se présente à son tour, son prénom n'obtenant aucune réaction de la part de la blonde. Quoiqu'elle se met tout de même à sourie, plutôt amusée par ce qu'il lui dit. "Ca te va bien... Comme une prophétie que l'on t'as donné à ta naissance et qui se réalise enfin. J'ai pleinement conscience de la chance que j'ai d'avoir été à tes côtés en ce moment-là." Elle sourit encore, doublement amusée. Le sourire et la dérision sont ses armes. Peu de personnes savent en user pourtant, elles sont tellement à la portée de toutes et de tous. De sa démarche lente, elle se détache de lui, pour finalement s'asseoir à une place libre. Sa main délicate tapote la place à côté d'elle, l'invitant explicitement à le rejoindre. "Je suppose que tu n'es pas venu ici que pour ça...?"

Sa voix, sa façon de s'exprimer et son côté un peu moqueur lui plaisent immédiatement. Probablement parce qu'en plus d'être méprisante elle est dans le faux. Son dédain pour le monde du travail soulève la question de son statut social. L'idée d'une autre petite princesse élevée par papa et maman qui n'a jamais eu a travailler s'impose immédiatement à Ghika qui répond, un peu mollement mais sans en perdre un brin de flegme. « J'ai vingt-six ans en fait... et je bosse depuis que j'ai dix-huit ans et que je suis arrivé en Angleterre. J'ai appris deux trois trucs sur le monde du travail. » Il se retient d'ajouter que vu son attitude elle doit faire partie de ces gens qui ont fait tellement d'études qu'ils passent leur vie à regarder le monde et à imaginer qu'il tourne comme dans les livres scientifiques.

Il la regarde pendant qu'elle débite sa petite phrase bien placée sur le commentaire amusant qu'il a fait quelques secondes plus tôt. Ghika pourrait laisser passer les approximations mais il sait se montrer perfectionniste quand il le veut, ce qui n'est pas la majorité du temps mais tout de même. « Cela n'a rien d'une prophétie, c'est parce que c'est la signification de mon prénom que je me permets d'agir ainsi. Mais c'est bien, une femme doit toujours savoir à qui elle tient compagnie. » fait-il en souriant clairement taquin, et ne pensant pas un mot de ses derniers propos teinté d'un machisme feint. Ghika la regarde se déplacer avec, à son goût, plus de théâtralité que nécessaire. « Je ne suis pas un chien tu sais, il suffit pas que tu tapotes sur un siège pour que je vienne réclamer des caresses. » nargue-t-il la jeune femme en s'asseyant en face d'elle. Il ne comprend pas exactement ce qu'elle entend par « venu ici » mais dans le doute il préfère répondre de manière évasive. « Je suis là pour l'expérience, l'argent et dieu seul sait si j'ai de la chance peut-être même l'amour ! Et toi tu viens pour quelles raisons ? Tu n'as pas l'air de manquer d'argent. » Cela lui avait échappé, mais c'était la vérité, elle paraissait riche, elle sonnait comme une riche, ce n'était pas une insulte ou un jugement, juste un constat. Après tout les gens riches qu'il côtoyait lui payaient son loyer grâce aux tournées qu'ils avalaient sans compter.

Elle fait un "o" avec sa bouche en l'écoutant. Jamais elle ne lui aurait vingt-six ans, vraiment, elle n'aurai jamais su dire qu'il est plus vieux qu'elle. Il ne doit même pas se rendre compte que toutes les filles pourraient le jalouser, à faire beaucoup plus jeune que son âge. Pour elle, c'est le contraire. Aure a toujours faire plus vieille, malédiction s'il en est sauf lorsqu'elle passait aisément les contrôles devant les boîtes de nuit. "Moi aussi je suis venue en Angleterre à dix huit ans..." Qu'elle se contente de répondre. Ce qui est vraiment le cas, puisqu'elle est venu là pour ses études universitaires. Il continue. Elle lui parle de prophétie, pour rigoler. Il la reprend. Elle ne dit rien. Elle garde son sourire en coin. Il est vraiment du genre à reprendre tout ce qu'elle pourra dire, le répéter, le corriger. Il ne sait pas qui elle est, mais il pense l'avoir cerné au premier coup d'oeil, bien. Il a de la chance qu'elle ne s'énerve pas vite, bien que le mot s'énerver précisément ne convient pas à la blonde. Elle ne s'emporte jamais, elle montre simplement son mécontentement, mais il faut du temps pour ça. Là, elle se contente de s'asseoir, l'invitant à en faire de même sans méchanceté derrière la tête. "Et je suis pas stupide. Ce n'est pas la peine de me reprendre après chacune de mes interventions." Qu'elle lui répond, sourire plus affirmé sur les lèvres. Ils sont quitte non? Elle l'espère tout du moins, parce qu'elle aime trop parler et lui le lui rend bien, pour l'ignorer totalement. Alors elle ne balaye ça d'un coup de main mental, passant à une question terriblement banale, mais intéressante tout de même. Certains sont venus tenter leur chance pour retrouver ou trouver l'amour, d'autres pour l'argent, d'autres encore pour la merveilleuse expérience que cela puisse apporter. Alors lui, il est là pour quoi? Les trois. Elle sourit. Puis fait une petite moue. "Les même raisons que toi. En enlevant dieu dans tout ca..." Elle marque une pause, avant de continuer. "Hm je n'ai pas l'air de manquer d'argent?... Et qu'est-ce qui peut bien te faire dire ça? J'ai peut être été méprisante avec toi? Je m'en excuses..." Elle est sérieuse. Elle n'est jamais méprisante que sans le faire exprès, sans préméditation. Elle n'est pas narcissique, mais parfois elle pourrait le laisser croire. "Puisque tu es du genre à juger facilement, qu'est-ce que tu peux me dire d'autre sur moi?" Elle s’assoit mieux son fauteuil. Elle attend ça avec impatience qu'elle dissimule tout de même, en croisant ses jambes élégemment.

Il la voit s'étonner, il sait bien qu'on le prend souvent pour un minet fraîchement sorti des jupons de sa mère alors qu'il les a quittés il y a près de dix ans de cela. L'assertion d'Aure quant à son débarquement en Angleterre le laisse un peu de marbre, ils ont au moins un point commun. « Tu viens d'où, à l'origine ? » demande-t-il légèrement curieux parce qu'il ne lui trouve aucun accent particulier. Ce n'est pas tant qu'il veuille à tout prix connaître tout de sa vie, mais il aime bien se renseigner, cela fait la conversation.

Ghika doit bien l'avouer, il est un peu déstabilisé par ce qui sort alors de la bouche d'Aure. Ce n'était pas une preuve de stupidité que de ne pas énoncer les choses avec une parfaite clarté, juste une absence de constance, il ne pensait pas l'insulter, juste éclaircir une ombre laissée sur le tableau. Mais il ne lui en tient pas rigueur car, se connaissant plutôt bien Ghika sait qu'il peut parfois être offensant, sans le vouloir. Le conflit ne lui fait pas peur, quand il l'estime nécessaire.

Décidément elle prend tout du mauvais pied. Ils vivent dans un monde où « avoir de l'argent » semble être devenu une insulte, à ce compte là Ghika aimerait pouvoir se faire insulter plus souvent parce que ce n'est pas son petit salaire de barman en plus de sa bourse d'études qui lui font connaître les joies de la vie de châtelain. Mais alors qu'elle termine sa phrase, il voit là l'opportunité de rire de la situation. « Je vais devoir te reprendre une dernière fois. Mon commentaire n'avait rien à voir avec le fait que tu aies été méprisante, tu as juste une certaine prestance et une confiance en toi qui résonnent comme celles que les gens n'ayant pas connu les galères des fins de mois ont. En soi c'était presque un compliment. Mais si tu préfères je peux dire que tu as l'air de crever la faim sous un pont. » lâche-t-il en riant, parce qu'il a toujours pu constater que si les gens prenait ombrage d'être associés à l'élite -parfois jugée un peu superficielle- de la nation, ils exècrent encore plus l'idée de passer pour des pauvres sans le sou. Paradoxale espèce humaine.

Juger rapidement fait partie intégrante des traits de caractères que les gens décrient le plus tout en sachant parfaitement l'hypocrisie de la situation. Tout le monde juge tout le monde, en un clin d'oeil et c'est pour ça que bien souvent les gens qui se ressemblent s'assemblent spontanément en rejetant les outsiders qu'ils pensent trop différents d'eux. Ghika embrasse cet aspect de sa personnalité, il lui a permis plus d'une fois de se tirer de relations un peu déplaisantes parce que la clairvoyance permet de prendre la poudre d'escampette avant de se faire avoir. « Je n'ai rien de plus à dire sur toi, mais laisse-moi encore cinq minutes et je devrais bien trouver. » dit-il franchement, le sourire aux lèvres.