Les premiers rayons du soleil commençaient à faire leur apparition et j'étais déjà debout. L'excitation due à mes premiers instants de le nid avait eu raison de mon sommeil et je pouvais déjà annoncer que je serai d'humeur ronchonne aujourd'hui. Ne souhaitant pas réveiller la chambre hivernale, je me fis aussi discrète qu'une petite souris prenant au passage mes affaires de dessins pour immortaliser ces premiers moments sur la belle terre australienne. Le jardin était fabuleux, quoiqu'encore très marqué par la splendide bataille de bouffe organisée par mes petits camarades, et offrait des possibilités infinies. Mes yeux s'attardèrent sur un petit coin fleuri et idyllique, idéal pour un artiste ou un amoureux de la nature.

Très vite, les premières esquisses furent tracée, je ne risquais pas de manquer d'inspiration dans un endroit aussi splendide. Je savourais ce moment de solitude et de cohésion avec mon environnement mais très vite des bruits de grognements vinrent interrompre le calme ambiant et un petit chien surgit des buissons. Enfin si on pouvait appeller ça un chien parce qu'il ressemblait plus à un rat passé à la machine à laver plutôt qu'à un spécimen canin. Je déteste les chiens, je dirais même que j'en suis allergique. Leur simple vue me file la nausée comme si j'avais un polichinelle dans le tirroir. Je ramasse un caillou sur le sol avant de le lancer dans sa direction pour le faire dégager. « Barre toi » . Que cette immonde bête aille retrouver Paris Hilton par pitié. Un rire se fit entendre et chamboula encore ce petit havre de paix. Trop c'est trop. « Eh monsieur le voyeur, tu peux sortir de tes buissons et venir me rejoindre sauf si tu es le Big Foot dans ce cas-là reste dans ton coin ». Je n'étais pas d'humeur à rire surtout après cette nuit de non-sommeil que je trainais derrière moi.

Dormir c'était pour les faibles. Voilà ce qu'avait été son modus vivendi depuis qu'il avait commencé à aller à la fac et à servir dans les bars la nuit. Dormir c'était bon quatre ou cinq heures par nuit rien de plus. Mais quand on vient de rentrer dans le nid d'amour de Cupidon, dormir c'était pas vraiment une priorité, surtout pas pour Ghika qui était arrivé dernier et qui avait qu'une envie découvrir tous les moindres recoins du nid aussi rapidement que possible. Ce matin, les gens dormaient et il les comprenait, entre l'excitation, l'alcool, la bataille de bouffe, même lui commençait à piquer du nez. Il avait un peu parlé avec Clémentine, mais ils se retrouveraient plus tard dans la journée pour discuter plus longuement. Allongé dans l'herbe, derrière une sorte de bosquet il regardait le ciel savamment peint d'un bleu azur qui lui ne lui rappelait définitivement pas le toit du monde d'Oxford toujours gris. Il s'était peut-être légèrement assoupi, rien de bien méchant une micro-sieste de cinq minutes quand il entendit une voix féminine engueuler quelqu'un et lui dire de se barrer. Ouvrant un œil, à la façon d'un enfant qui joue à cache-cache, il vit détaler une bestiole assez laide ressemblant à un croisement entre un rongeur et un canidé, ce qui lui tira un rire franc de la gorge. L'injonction suivante était pour lui ce qui le fit sourire. Un voyeur ? Vraiment ? Lui espionner une fille ? Non mais fallait pas trop déconner hein ! Ils étaient dans une maison de rêves mais fallait pas croire aux miracles non plus ! Péniblement il se releva et sortit de son buisson. Ses jambes le portèrent sur quatre ou cinq mètres avant qu'il ne se laisse retomber à un mètre tout au plus d'une fille brune au style plutôt rock'n'roll. Ouais, il se souvenait d'elle, c'était celle dont trois indices avaient été révélés la veille. Son nom par contre ? Aucune idée, Martine ou Sabrina peut-être. En tout cas elle avait un accent américain ce qui lui faisait bien plaisir, une compatriote. « Big foot, big foot, j'fais du quarante-quatre c'est pas non plus la mort. » lâcha-t-il à moitié sérieux à moitié amusé avant de la regarder de profil. Non vraiment son prénom ne lui revenait pas. C'était pas très agréable de devoir demander aux gens leur prénom à chaque fois qu'il les rencontrait, mais en dehors d'une dizaine de personnes dont il avait retenu les identités pendant le casting ou pendant le prime -qu'il avait passé à attendre son entrée rappelons-le – la majorité lui restait totalement inconnue. « Moi c'est Ghika et je ne suis pas un voyeur, juste un dormeur en extérieur. Et toi ? » précisa-t-il histoire de laver de tout soupçon sa réputation pour l'instant immaculée. Attendez qu'il prenne une douche à côté de Lou ou d'Auguste avant de le traiter de voyeur. Faut être cohérent ! « Au fait c'était quoi cette bestiole que tu m'as envoyé dessus ? » demanda-t-il légèrement circonspect par l'aspect relativement dégoûtant de la bête féroce.

Un moment de répis c'était tout ce qu'il me fallait mais le repos n'était peut être pas au programme de l'aventure Fake Lover. Ils auraient dû mettre un panneau signalétique pour les passages d'animaux dangereux parce que cette bestiole venait de me faire une sacrée peur avec ces grognements qui venaient du plus profond des enfers. Ne souhaitant pas que ce chien continue à me déranger dans un moment où la concentration est de rigueur, ke m'empare d'un caillou et le lance dans sa direction en prenant soon de ne pas le toucher. Je ne tenais pas à l'assommer et de me retrouver avec toute la SPA collée au cul. Le chien détale à toute vitesse mais bientôt un nouvel élément perturbateur vient à nouveau me deranger. J'invite ce mystérieux inconnu à me rejoindreez histoire de ne pas rester caché derrière des buissons. À première vue, ce jeune inconnu n'a rien à voir avec le Big Foot : il n'est pas assez poilu et ses pieds sont ridiculement petit face à ce monstre des forêts. « 44 ? C'est plutôt grand pour des pieds, tu restes quand même un suspect potentiel, qu'est-ce qui peut me prouver que tu n'es pas le Big Foot ? » J'avoue le taquiner quelque peu mais rien de bien méchant, après tout j'aimais bien m'amuser. Je laisse de côté mes affaires de dessin puisque le jeune homme n'a pas l'air très décidé à partir. « Je suis Felice. Enchanté monsieur le dormeur en extérieur mais ne refais plus jamais ça parce qu'entre toi et le chien mon coeur va finir par lâcher » . Je préfère le prévenir tout de suite pour qu'il n'ait pas ma mort par arrêt cardiaque sur la conscience. « Ça c'est un sextoy pour bimbo» dis-je tout en designant du menton le petit chien qui était en train de se soulager dans un parterre de fleurs. « Je suis désolée que cette bête féroce et sauvage t'ai foncé dessus. Je peux demander à Cupidon qu'il ouvre une cellule psychologique pour toi si ça peut te faire du bien » plaisantais-je même si j'étais extrêmement sérieuse dans mes propos. Un chihuahua n'allait quand même pas semer la zizanie dans le nid.

« Eh insulte pas mes pieds ils sont sensibles ces petits ! » rigola Ghika en caressant ses chaussures en toile comme pour consoler ses deux extrémités à la fragilité émotionnelle reconnue. Et puis d'abord 44 c'est bien le minimum pour un homme de sa taille, sinon il ne pourrait pas tenir en équilibre, le moindre coup de vent se transformerait en cyclone que ses pieds ne pourraient réguler parce que la surface d'appui et de friction avec le sol serait trop petite par rapport à l'amplitude de mouvement de son corps. Enfin peut-être, Ghika n'y connaissait rien en physique mais il se disait que c'était logique qu'un mec grand ait des grands pieds. « Big foot il est gigantesque et il est super poilu, j'suis grand mais je suis pas du tout fourni en fourrure ! » plaisanta-t-il en caressant son visage et en soulevant son tee-shirt pour montrer son ventre dépourvu du moindre poil. Parfois il aurait préféré en avoir un peu, ça faisait viril et comme il souffrait par moment d'une manque de virilité -surtout les mardis soirs quand c'était soirée genderfluid au bar- un peu de pilosité aurait pas été de refus. Quoiqu'il aurait fini par s'épiler comme tous les mecs du nid ou presque -bien qu'aucun ne l'avouerait sûrement-. Lorsque Felice lui répondit à propos du caniche, il explosa de rire. C'était le chien d'Elin s'il se souvenait bien et il ne la voyait pas du tout utiliser l'animal pour satisfaire des pulsions sexuelles. Un chat à la limite ça a la langue rappeuse mais un chien même pas, alors pour un cunnilingus ça serait juste étrange. « Un sextoy de poche alors ! » Ouais la petite queue du chihuahua qui frétille pendant qu'elle caresse derrière ses oreilles, quelque chose comme ça. « J'en aurais besoin si cette bête reste trop longtemps dans le nid pour sûr... » répondit-il enfin à la proposition d'un centre de soutien psychologique de Felice. « Tu penses que Cupidon accéderait à ta demande ? T'as ce genre de pouvoir ? » Peut-être que Felice était une sorcière, ils avaient eu des indices sur elle la veille, elle avait des rouages dans le crâne et faisait des dessins au feutre vert. Vert comme les pustules d'une sorcière et ses potions magiques. Qui sait ?

Ces pieds sont sensibles, c'est bon à savoir. En tout cas je suis ravie de l'apprendre moi qui ai une sacro-sainte horreur des pieds. « Tant qu'ils restent dans tes chaussures et que tu me les mets pas dans la gueule, je les critiquerai plus tes petits petons ». A vrai dire je ne sais pas d'où me vient cette répulsion pour cette partie de l'anatomie. Il faut quand même se rendre à l'évidence : les pieds c'est totalement dégueulasses limite vomitifs.  Autant qu'il l'apprenne maintenant mais s'amuser avec ma phobie des pieds signera à coup sûr son arrêt de mort. J'espère qu'il comprendra mon avertissement. Maintenant qu'il a réussi à me prouver qu'il n'étais pas le méchant Big Foot du nid je pense qu'il a mérité le droit de s’asseoir à côté de moi.  Il a même donné de sa personne en soulevant son tee-shirt pour me montrer sa non-pilosité corporelle. « Bas alors tu as pas encore fait ta puberté mon grand ? » ricanais-je. En lui ébouriffant les cheveux. De toute façon ce n'est pas comme si ses cheveux n'étaient pas déjà  en bordel à la base. Pour ma part les miens sentent encore le champagne, il va falloir que je pense à remercier mon partenaire pour ça. Ma tentative d'humour concernant le chien semble avoir marché puisque Ghika explose de rire. Je ne voyais pas d'autres utilité utilité à ce chien. Trop petit pour monter la garde et pas assez imposant pour chasser, il ne restait plus que le poste de  sextoy pour lui. Quant aux moyens d'éprouver du plaisir en compagnie d'un chihuahua je laissais le loisir à mon voisin de les imaginer. « Tu peux le caser dans ton sac et personne ne se doutera jamais que tu te fais plaisir avec une fois la nuit tombée. Mais c'est génial comme idée, on devrait déposer un brevet pour l'invention du chihuahua sextoy ! ». J'espérais juste qu'il n'y ait pas encore d'oreilles indiscrètes pour m'écouter parce que se faire surprendre en train de causer zoophilie ça serait vraiment plus que bizarre. J'espérais juste ne jamais à avoir à croiser ce chien dans le reste de mon aventure. « Au fait il est à qui ce clébard ? » que je demande curieuse de savoir le nom de la personne qui a eu la brillante idée de ramener ce truc ici. J'irai la remercier d'ailleurs. Si j'ai le pouvoir de demander à Cupidon s'il peut ouvrir une cellule de soutien psychologique ? Pas vraiment mais peut être qu'avec quelques battements de cils on pourra s'arranger.   « Je considère qu'une attaque de chihuahua c'est bien plus traumatisant qu'une tuerie dans les écoles alors je pense que Cupipi accédera à ma demande »  Il fallait pas déconner non plus, on aurait dit que la bête était sous acide. Que quelqu'un fasse quelque chose pour calmer ce grand fauve avant qu'il y ait des morts.  

Ghika n'a jamais compris les gens qui ont des répulsions pour des parties corporelles, mais il n'a jamais compris non plus les gens qui ont des adorations pour certaines parties du corps bien particulières. Les fétichistes et lui ne ne sont jamais vraiment pas entendus. « Les trips podophiles c'est vraiment pas mon truc. » Ni aucun autre trip en général. Il doit bien l'avouer, sexuellement parlant il est assez traditionnel, une bonne défonce avec type différent tous les mois et on repart. Elle lui touche les cheveux et il lutte contre le réflexe de se détourner, Ghika n'aime pas qu'on le touche par surprise, à moins que ce soit dans un endroit très plaisant et qu'on ait un six-pack à la fois sur son ventre et de bière à la main et si possible une langue bien avisée. « Oh j'ai fait ma puberté correctement, j'ai juste gardé mes poils dans des zones auxquelles les gens n'ont pas accès sans mon consentement. » Il ne le précise pas, mais par les gens, il entend les filles. C'est évident pour lui, il pense que c'est évident pour tout le monde, surtout pour ceux qui ont pu voir son portrait. Felice semble vraiment être une fille cool pas du tout le genre prise de tête et son humour est franchement du goût de Ghika, à la limite entre ce qui est et n'est pas acceptable moralement. La société est bien trop conventionnelle pour qu'on ne la défie pas avec un peu d'humour de toute façon. « Ouais, mais va falloir trouver un nom vendeur parce que ça fait trop zoophilie et que les gens veulent du glamour. » déclare-t-il tout en réfléchissant de plus belle au nom adéquat. Voilà ! Il l'a ! « Chixtoy ! Le mélange entre chihuahua et sextoy ! Chixtoy ! Et en plus ça sonne un peu comme chic, donc ça fait illusion ! A nous les millions ! » L'idée de faire de l'argent dans l'industrie du sexe ne lui serait jamais venu naturellement, parce qu'il n'est pas la personne la plus libérée du monde et parce qu'il n'a jamais été à fond dans le matage de porno sur son ordinateur ou de l'utilisation de sextoys. Mais après tout si ça peut lui payer sa retraite, who cares ? Le chien semble devenu la pierre angulaire de la situation et leur dégoût envers l'animal leur premier point en commun. « A Elin, elle l'a gagné à la tombola pendant les castings. » Ce qui fait surgir un doute dans son esprit quant aux capacités, étendues il en est sûr, de Felice à obtenir un centre de soutien pour les personnes traumatisées par le caniche miniature. « Même Cupidon prend parfois de désagréables décisions. Il a décidé que ce chien serait dans l'aventure, il ne va pas nous filer une cellule de crise pour supporter le chien. Je pense même que c'est une sorte de test. » finit-il par lâcher avec une pointe d'amertume dans la voix.