+Ghika

J'attends devant les portes pendant quelques secondes, pour rejoindre ma chambre. Pas que j'ai spécialement la flemme de prendre les escaliers, mais j'étais plus prêt de l'ascenseur donc tant qu'à faire, je le prends, simplement. C'est le temps que mets Ghika pour me rejoindre, attendant lui aussi l'ascenseur. On n'a pas eu le temps d'échanger un mot que les portes s'ouvrent, je m'y engouffre le premier et appuie sur le bouton du premier étage. Un silence s'installe, mais pas pesant pour autant. En tout cas, je ne le vis pas comme ça, je supporte plutôt bien le silence même. Peut-être que je devrais ouvrir le dialogue, je ne sais pas. J'ai pas grand chose à lui dire, surtout après le prime où j'ai appris quelques trucs. J'ai un peu l'impression que Ghika me voit d'un mauvais oeil, mais je m'en porte très bien si vous voulez tout savoir. En fait, je me dis que ce n'est pas à moi de prendre la parole, parce que de mon côté, j'ai aucun problème. C'est lui qui en a un, visiblement. Sauf que la montée qui ne devaient durer qu'une poignée de secondes s'éternise, hm.. « Pas bon signe ça. » Je souffle, plus pour moi-même, lorsque je sens l'ascenseur s'arrêter. Je soupire doucement, ne sachant pas vraiment quoi faire dans cette situation.

Pourquoi il a pris ce putain d'ascenseur ? Il s'est déjà retrouvé coincé une fois dedans et c'était déjà chiant la première fois. Mais être enfermé avec Aaron c'est vraiment pas le pied. Ghika n'a rien contre lui, au fond si ce mec a chaud au cul et c'est son problème pas celui de Ghika. Qu'il ait eu un peu de mal à accepter qu'Auguste préfère passer du bon temps avec Aaron plutôt que de traîner avec lui après le prime il y a plus d'une semaine de ça, il l'admet. Mais Aaron n'est en rien responsable. Ce qui est encore plus problématique maintenant, c'est que Ghika a appris lors du prime qu'Adnan, croyant bien faire ou jouant les commères on ne le saura jamais, est allé dans son dos dire à Aaron qu'il devrait venir lui parler. Comme si Ghika avait besoin que quelqu'un arrange ses conversations avec les gens et leur donne un sujet à propos duquel discuter... C'est navrant. Il n'en veut plus à Auguste, il n'en veut pas à Adnan et il n'a absolument rien contre Aaron. On ne peut pas plaire à tout le monde, tout le monde ne peut pas nous plaire. C'est comme ça. Pour l'instant ils ne se connaissent pas, voilà tout. Et le fait qu'Aaron l'ait qualifié de « folle » quand on lui a demandé deux adjectifs pour définir Ghika ne lui a pas vraiment donné envie d'apprendre à le connaître. Enfin, maintenant qu'ils sont là, ils ont pas le choix. « Je m'étais pourtant promis de plus jamais monter dans cet ascenseur... » a fortiori avec toi, aurait-il pu ajouter, mais c'était pas la peine de pousser le bouchon. Dans un si petit espace, se prendre la tête serait très pénible, alors Ghika s'assoit par terre, il hésite une seconde et puis... « C'est parce que j'porte des jupes que tu penses que je suis une folle ? » lui demande-t-il finalement très directement. Après tout, autant crever l'abcès non ?

J'aurai pu tomber sur quelqu'un de pire pour être bloqué dans l’ascenseur, comme quelqu'un qui paniquerait, qui pèterait un câble. Ah, je n'aurais pas été d'une grande aide pour rassurer cette personne, et je pense même qu'au bout d'un moment, mes nerfs auraient lâché non pas à cause de l'ascenseur, de l'attente, mais de sa crise. Ghika est serein lui, c'est cool, en plus de ça il a déjà connu cette situation apparemment. « Je m'étais pourtant promis de plus jamais monter dans cet ascenseur... » J'esquisse un léger sourire. Moi, ça ne m'est jamais arrivé mais maintenant que je sais qu'il a tendance à dérailler souvent cet ascenseur, j'y réfléchirais aussi à deux fois avant de le prendre. Il va même jusqu'à s'assoir. Ah oui, quand on est bloqué c'est si long que ça ? Soit, je fais de même alors, dos appuyé et jambes tendues. « C'est parce que j'porte des jupes que tu penses que je suis une folle ? » Je mets quelques secondes à comprendre, parce que ça date de loin pour moi. Pour lui seulement au prime, mais moi ça fait bien longtemps que j'avais donné cet adjectif à la volée, en donnant les premiers mots qui me passent par la tête. Il m'arrache un rire. « Oui, ça doit être pour ça ! » Je me moque gentiment, au second degré parce que je n'imagine pas que sa question puisse être sérieuse. Non attendez, il veut une réponse vraiment sérieuse ? Roooh, c'était pas pour le vexer si j'ai dis ça, je pensais qu'il avait plus d'humour pour prendre la mouche comme ça. « Bah je sais pas quoi te dire, t'es excentrique, t'as un côté drama queen, un côté provoc', et ouais, tu portes aussi des jupes tiens, alors je me suis dis que ce mot t'allais bien. » Je lâche un nouveau rire après avoir haussé les épaules. Lui qui tient tant que ça à se faire remarquer pendant les primes, j'aurais plutôt pensé qu'il allait apprécié ce mot, passons. « D'autres choses à demander ? Parce que j'ai réponses à tout moi. » Je dis malicieusement.

Ce qu'il y a de bien avec les gens qui pensent qu'on ne leur demandera jamais de compte, c'est qu'ils ne préparent pas de speech à l'avance. De cette façon la réponse est toujours plus sincère quoique souvent plus bordélique. Excentrique, dramaqueen, provoc'... Si Ghika ne voit d'objection à ce qu'on le considère comme quelqu'un d'excentrique, il ne se sent pas une âme de dramaqueen. Déjà parce que c'est terriblement péjoratif comme formulation et qu'il ne se pense jamais en des termes aussi fortement connoté, et puis... parce qu'il n'est tout simplement pas une dramaqueen. Certes il a un goût pour la mise en scène, mais il ne fait pas des montagnes d'un rien. Même avec cette histoire entre Aaron et Auguste, il n'a pas l'impression d'avoir particulièrement dramatisé. Il avait été dans son bon droit d'attendre de son partenaire un peu de compassion. Aaron aurait-il pris la grosse tête ? Le fait d'être une star du petit écran lui monterait-il au crâne ? Voilà qu'il se la joue starlette en plein entretien avec un magazine répondant aux questions les plus intéressantes qui soient. Ghika est un peu irrité quoiqu'amusé par le comportement de son compagnon d'ascenseur. « C'est la fin de l'interview désolé, merci pour ton temps. » le nargue-t-il. Ghika n'a pas envie de jouer au chat et à la souris, surtout pas avec Aaron qu'il ne connaît pas assez pour pouvoir mettre en place une stratégie efficace. Et il n'y a rien que Ghika déteste plus qu'avancer à l'aveugle, alors, exceptionnellement, il prend le temps de la réflexion se taisant pour laisser l'autre placer ses pions. Peut-être qu'une décennie de pratique des échecs va enfin s'avérer utile.

« C'est la fin de l'interview désolé, merci pour ton temps. » Oh, ben, finalement, Ghika n'avait plus de questions, c'est pourtant pas faute de lui en avoir donner l'occasion, vous en êtes témoins. Puisqu'il n'en a aucune, tans mieux ! Enfin moi ça m'aurait pas du tout dérangé de répondre à des questions, parce que j'ai toujours une réponse à tout, comme je lui ai dis. Mais c'est très bien qu'il ne me pose pas de questions au final, comme ça je peux continuer à me vanter d'avoir réponses à tout. « Mais de rien, c'était avec plaisir ! » Je joue le jeu, avec une certaine arrogance provocante à souhait, puisque c'était une interview apparemment. Je n'étais même pas au courant à vrai dire, mais puisqu'il le dit. « Moi j'aurais plusieurs questions... » En fait je dis ça comme ça, parce que je n'avais pas de questions en tête mais puisqu'on est coincé dans cet ascenseur et qu'il m'a donné une idée, je vais en profiter ! Et puisque j'ai si gentiment répondu à son interview, ce ne serait pas poli qu'il ne me rende pas la pareille non ? Ouais, il ne peut pas refuser. « Donc donc donc... Ghika, j'ai pu comprendre que tu appréciais bien Auguste. T'as envie de lui ? » Ah bah forcément, vous me connaissez, mes questions vont porter sur le cul.

Ghika ne voit pas l'intérêt de poser des questions à Aaron, pour commencer il ne pense pas qu'Aaron ait très envie de lui répondre autre chose que ce qu'il a envie d'entendre ou au contraire de minimiser la part de vérité dans le but de piquer sa sensibilité. Il n'y a pas de bonne réponse, il n'y a rien qu'Aaron puisse lui dire qu'il ne sache déjà. En fin de compte, Ghika n'a jamais eu de problème avec Aaron, donc il n'a pas très envie d'écouter ses déblatérations. Mais ils sont coincés, alors... a-t-il le choix ? « Shoot me ! » lui lance-t-il avec un sourire quand son interlocuteur dit avoir plusieurs interrogations. Ghika n'a pas de doute quant au caractère de ce qu'il va devoir endurer. Auguste, bingo, un point pour le manque d'originalité. « Je veux pas paraître méprisant mais je ne suis pas comme toi. Pour avoir envie de quelqu'un j'ai besoin de plus que de l'attraction physique. Donc non, je n'ai pas envie d'Auguste. » répond-il sans aucune émotion. Il sait bien que la première partie de sa réponse n'était pas le plus sympa, mais c'est la vérité, depuis le début de l'aventure Aaron c'était fait une petite réputation de don juan. Auguste, Lou, la rumeur voulait qu'il avait tenté d'accrocher Jaheim à son tableau de chasse aussi. Quant à la véracité du reste de sa réponse, il laisse Aaron en juger, il se fiche un peu qu'il le croit ou non à vrai dire. Ghika est en paix avec lui-même. « Question suivante ? » interroge-t-il du regard, espérant que l'ascenseur ne laissera pas à Aaron le temps de lui poser deux cent questions supplémentaires.

« Je veux pas paraître méprisant mais je ne suis pas comme toi. Pour avoir envie de quelqu'un j'ai besoin de plus que de l'attraction physique. Donc non, je n'ai pas envie d'Auguste. » Hm, j'arrive à noter quelques trucs rien que par cette première réponse. D'abord, il en profite pour me lancer une petite pique, un petit tacle qu'il aurait pu éviter puisque bon, il l'avoue lui-même, que pour lui ça pouvait être 'méprisant'. Il aurait pu éviter la première phrase s'il l'avait vraiment voulu, parce que concrètement, ça apportait quoi de plus, à part essayer de me tacler ? Je dis bien essayer en tout cas, parce que franchement, je suis pas vexé pour un sous. Deuxième note que je fais, c'est qu'il ment. Il me ment effrontément parce qu'au prime, il a bien avoué à Paloma qu'il serait bien allé avec Auguste dans la love room, j'étais à côté, au cas où hein. Troisième truc, il dit qu'il a besoin de plus que de l'attraction physique, sauf que mon coco, ça fait trois semaines que vous vous connaissez, y a pas de honte à avoir envie de quelqu'un à ce stade. Il a besoin de quoi de plus pour ressentir ça, connaitre par coeur son parcours scolaire depuis la maternelle c'est ça ? C'est vrai que c'est tout de suite plus attirant. « Ah bah ça tombe bien alors. » Parce que je doute qu'il attire physiquement Auguste, hm. Je réponds avec un sourire malicieux, presque provocant, lourd de sous entendus. Je plaisante évidemment... « Question suivante ? » D'accord, pas de problème. Franchement, ça ne me dérange absolument pas, ça me divertit et je peux mieux le cerner comme ça, même si je pense l'avoir déjà très bien cerné.  « Tu penses que tu vas nominer qui cette semaine ? » C'est une question comme une autre après tout.  « Tu te sens en danger ?  » Je demande ensuite, par curiosité.

Il n'y a rien que Ghika trouve plus triste au monde que la prétention. Les gens sont toujours en train de présumer de leurs forces, de leurs connaissances, de leurs chances. Être rationnel semble être un défaut pour beaucoup alors que c'est une qualité qui permet de ne pas se fourvoyer. Il voit dans les yeux d'Aaron qu'il ne le croit pas, c'est amusant. Il doit se penser tellement plus malin que les autres, tellement au-dessus du lot. Ghika n'y voit aucun inconvénient, ce n'est pas comme s'il accordait à l'opinion d'Aaron une quelconque importance. Ils sont radicalement différents, probablement trop pour se comprendre, même si Ghika met un point d'honneur à comprendre chaque personne, c'est un peu sa raison d'être. Ça tombe bien ? Vraiment ? Ghika laisse échapper un petit rire. Si ce n'est pas de la provoc' de base étage il ne voit pas ce que c'est. Les questions fusent, banales, on est redescendu d'un niveau. Ghika suppose que c'est là l'exemple même de la profondeur du raisonnement d'Aaron, il n'avait en réalité qu'une chose en tête. Découvrir s'il voulait d'Auguste, probablement dans le but de lui rappeler qu'il l'avait eu en premier, ou pour, dans le cas inverse, lui assurer qu'il ne l'aurait jamais... Ce petit jeu n'était finalement pas si inintéressant. « Je suis pas encore fixé. Probablement les couples avec lesquelles j'ai le moins d'affinités, ou alors je réfléchirais de façon plus stratégique, en fonction de qui est déjà sur le banc, qui je pense être les plus dangereux. » Son explication est légèrement sibylline, mais il ne se voit pas balancer quatre noms sans y avoir réfléchi à l'avance, donc il expose simplement sa façon de penser. Nominer les couples dont il est le moins proche, ou les adversaires qu'il estime les moins redoutables. Histoire d'avoir plus de chances s'il est nominé. « Je me sens en danger toutes les semaines. On ne sait jamais exactement comment les gens nominent. Et puis c'est là qu'être en binôme craint, si trois personnes me détestent, et que trois personnes détestent Auguste, on se retrouve avec six voix contre nous dès le départ. » C'est logique, c'est sincère, il ne voit pas vraiment ce qu'il pourrait ajouter de plus de toute façon. Il est lui-même, autant que possible, dans le nid, si les gens décident que ça ne leur plaît pas... qu'est-ce qu'il peut y faire ? « J'ai le droit de te retourner les deux questions, même si tu mènes l'interview ? » demande-t-il d'une voix lointaine, encore pris dans un tourbillon de pensées, de statistiques et de probabilités. Plus le temps avance, plus l'étau se resserre. Il est inévitable qu'il soit bientôt nominé.

Mes questions sont banales certes, mais je suis vraiment curieux d'en connaitre les réponses. Qui il va nominer cette semaine ? Ghika ne me répond pas de noms spécifiques, me dévoile plutôt sa façon de penser quant aux nominations, et en l’occurrence celles de cette semaine. Même là, il est incapable de me donner une seule idée, puisqu'il m'en expose deux. Soit voter par affinité, soit stratégique selon le banc de nominé. A l'effigie de la question, la réponse est aussi banale, et je suis même déçu finalement, parce que sa réponse est loin d'être intéressante. Puis à mon autre question, s'il se sent menacé cette semaine, il me répond que oui, comme chaque semaine en fait. Même sans immunité, j'aurais aucune honte à dire que je ne me sens pas menacé si je le pense. Là cette semaine, vu que j'ai trois voix contre moi, je vais pas le dire, mais sans, je pense que j'aurais pu l'avouer oui. Par contre son raisonnement concernant comment les gens pourraient voter m'interpelle. « Tiens, intéressant comme vision... » Je souffle, plus pour moi-même en réalité. Lui, son premier réflexe, c'est de dire que si des personnes te détestent, t'auras automatiquement des voix contre ton binôme, faisant l'addition de toutes les personnes qui pourraient 'détester' une des deux personnes du couple. Moi je l'aurais plutôt vu positivement, même si je ne plais pas à untel, le fait que Felice soit dans mon binôme va dissuader la personne de me nominer et inversement. En tout cas c'est comme ça que je nomine moi, j'écarte les binômes où il y a une personne que j'apprécie en priorité, même si l'autre part du binôme ne me plait pas tant que ça. Vous savez, c'est un peu comme voir le verre à moitié-vide ou à moitié-plein. « J'ai le droit de te retourner les deux questions, même si tu mènes l'interview ? » Oh, tiens, il veut que je réponde à ses questions maintenant ? Je pensais qu'il n'en avait plus. J'esquisse un sourire.  « Trop tard ! Et vu comment tu t'es mouillé, j'ai pas franchement envie d'y répondre. » Je l'aurais fais avec plaisir et sans aucune gêne s'il avait joué le jeu, mais vu qu'il s'est dérobé, je ne compte pas lui répondre. Parce que soyons honnête, qu'il ne me dise pas qu'il n'a pas déjà des idées, des noms qui ressortent. Je regarde vers le haut et soupire, l'ascenseur devrait bientôt ouvrir ses portes, je suppose.