assuming your stupid ideas
ft. Eryk & Andreja

Dans la mesure du possible Andreja essayait de se tenir éloigné de la cuisine quand il n'avait rien à y faire, et même de préférence il attendait de trouver quelqu'un de motivé à cuisiner pour deux pur se décider à manger, parce que la cuisine n'était assurément pas un de ses talents à lui. Disons qu'il était capable de se nourrir tout seul si les circonstances l'imposait, mais ce n'était clairement pas un truc pour lequel il était doué ... Ces trois dernières années il n'avait plus eu à se poser de questions, depuis qu'il vivait au consulat il profitait comme tous les autres employés du cuisinier attitré du consulat, et même lors de son séjour derrière les barreaux, celui-là même que le détecteur de mensonges l'avait forcé à dévoiler mais pour lequel dieu merci personne n'avait eu la mauvaise idée de lui poser la moindre questions, il n'avait pas eu à se poser la question, la bouffe était peut-être dégueulasse mais sans doute pas autant que s'il avait été derrière les fourneaux. Alors autant dire que s'il était dans la cuisine à cet instant précis ce n'était pas pour essayer de se préparer quoi que ce soit à manger, il avait encore en tête sa dernière mésaventure culinaire la semaine précédente, lorsque pris de l'envie soudaine de se faire des pâtes il s'était mangé une avalanche de casseroles sur la tête pour avoir ouvert le placard de manière un peu trop brusque. Mais il avait soif, horriblement soif même, et cela n'avait rien d'étonnant puisqu'il faisait depuis le début de la semaine une chaleur à crever ; Plus que jamais Andreja avait du mal à se faire au fait que dans cette région du monde l'été approchait à grands pas, lui pour qui décembre rimait avec retour des températures polaires. Presque polaires, d'accord. Il avait soif et dans le frigo pratiquement rien qui faisait l'affaire ; Des bières et une carafe d'eau. De l'alcool ou un truc sans le moindre goût. Faillir à la promesse faite à Lou, ou se contenter de la boisson la plus fade de l'univers. Sa seule réaction avait été un soupir théâtral tandis qu'il se décidait tout de même à sortir la carafe d'eau du frigo pour la poser sur la table d'un air maussade. A cet instant là seulement il avait remarqué la présence d'Eryk, probablement entré dans la cuisine alors qu'il avait le nez dans le frigo. « Un revenant ! » avait-il alors lancé, tentant de reprendre un semblant de motivation. Oh bien sûr il avait vaguement pu saluer Eryk en même temps que les autres, à son retour dimanche, mais il n'avait pas vraiment eu l'occasion de retomber sur lui depuis, alors cela ne comptait qu'à moitié, de son point de vue. « Tu prendre une bière ? Comme ça je te regarde boire et je faire comme si je boire aussi. » Comment ça c'était totalement ridicule ? Il faisait avec ce qu'il pouvait, peut-être que regarder boire quelqu'un d'autre c'était une façon de boire par procuration, et jusqu'à dimanche soir il ne pouvait se contenter que de cela. C'était bien la seule raison pour laquelle il avait hâte d'être dimanche, à vrai dire. « Ça va, toi ? Tu faire quoi dehors, tu retrouver tes enfants ? Tu revenir pour ton secret ou pour Jessica ? » Quoi, il se renseignait, il lançait la conversation. Et puis il était légitime que lui se pose la question de ce qui les attendait dehors, Eryk devait lui bien se douter de ce qu'ils avaient tous fait ici depuis son départ. Ce n'était pas comme si le nid avait changé ces dernières semaines, quoi que ses habitants peut-être un peu.

Le serbe était un peu perdu, entre les départs et les retours au sein du nid il n'était plus certain de qui était là et qui ne l'était plus. Il faut dire que depuis le dernier prime cela donnait un peu l'impression qu'hormis les dix demi-finalistes, tout le monde pouvait rentrer et sortir d'ici comme dans un moulin ... Mais qu'on ne s'y trompe pas, Andreja n'avait pas l'intention d'échanger sa condition de demi-finaliste, lui qui redoutait tellement le moment de retrouver un extérieur qui ne lui manquait finalement pas tant que cela. Et puis s'il était sorti il n'était pas certain qu'il aurait pu se libérer pour revenir expliquer son secret, et il tenait véritablement à le faire lui-même. Pour l'heure en tout cas il avait affaire à Eryk, un "revenant" comme il venait de le lui faire remarquer, tentant ainsi d'imiter une expression qu'il avait déjà entendu dans d'autres bouches mais qui ne fit pas l'effet escompté « Où ça, où ça ? Si c’est toi mamie, manifestes toi ! » Ahah. Mais c'était pour blaguer là, rassurez-le ? « Aaaaaaaah mais non tu parles de moi. » Ouf, oui. Secouant la tête d'un air faussement désespéré, l'air de dire mais mon pauvre vieux qu'est-ce qu'on va bien pouvoir faire de toi, il ne pouvait pas nier que cela ne faisait pas de mal, ce genre de caractère dans le nid. C'est que ces quinze derniers jours avaient été du genre maussades, pour un peu tout le monde. Enfin, puisqu'il était là il lui avait proposé une bière, il n'y avait pas de raison que les autres se privent et puis il aurait l'impression de boire par procuration, comme ça. Oui, il en était à ce niveau de désespoir. « J’en veux bien une, mais pourquoi t’en prends pas ? Attends non ! Me dis pas que t’es enceinte toi aussi ? » C'était plus fort que lui, c'était tellement nul qu'il avait éclaté de rire tout en rouvrant le frigo pour attraper une bière et revenir la poser devant Eryk. Il avait failli la lui lancer, et puis au dernier moment il s'était dit que si ses réflexes étaient aussi mauvais que son humour la bouteille finirait sans doute sa course sur le carrelage. « Non, je faire un marché avec Lou. Akela nous prendre pour des alcooliques, alors on pas boire pendant un mois pour prouver c'est n'importe quoi. » Et qu'on se le dise, c'était bien la première fois qu'Andreja restait une aussi longue période sans boire, cela lui semblait plus long qu'une éternité. Chacun ses vices, dirons-nous. « Hvala, ça être terminé dimanche. » Et heureusement, parce qu'il ne serait pas cotre un verre, ou deux, ou six, après les révélations. Bref, puisqu'il avait Eryk sous la main il en avait profité pour lui demander un peu des nouvelles, la vie dehors, ses gosses, tout ça ... C'est qu'il avait un peu l'impression que le faux-britannique était sorti il y a une éternité. Sûr qu'ils avaient beaucoup moins rigolé depuis. « Écoute ça va super bien ! Personne ne m’a lancé de tomates quand je suis sorti. A vrai dire j’ai plutôt été bien accueilli. Bon je ne suis pas aimé suffisamment au point qu’on dépense du fric pour moi, mais quand même les gens répondent plutôt bien à ma personne. Je reçois des lettres d’amour maintenant plutôt que des lettres de menace, ça me change. » Sans pouvoir s'en empêcher Andreja avait ouvert deux yeux ronds, avant de commenter d'un air dubitatif « De menace ? » Il avait un peu de mal à s'imaginer quelqu'un menaçant Eryk, en fait ... Parce que bon, il avait certes un humour un peu douteux, que quelques-uns pourraient même qualifier de lourd, mais de là à le menacer, fallait vraiment manquer de second degré. Enfin bon qu'est-ce qu'il en savait après tout, il ne connaissait même pas encore son secret, à Eryk. « Je suis rentré en Angleterre, j’ai retrouvé mes proches, et mes enfants oui. Toujours deux petites terreurs, ils n’ont pas changé. Je ne suis pas revenu spécialement pour Jessica non…Pour vous tous. Puis franchement, comment dire non à un voyage en Australie au soleil quand il fait 2° chez toi ? » Le serbe avait laissé échapper une légère grimace. Il l'avait presque oublié, que ce n'était pas parce que l'été arrivait doucement ici que l'hiver avait disparu de l'autre hémisphère, et il avait presque froid rien qu'à l'idée de retrouver la neige dès qu'il rentrerait à Chicago. « Puis vous aviez clairement besoin que j’apporte un peu de bonne humeur … Parce que bon les gars, j’ai pas l’impression que ça a été l’éclate ces dernières semaines. » Ah ouais, lui aussi il avait remarqué. Peut-être même que cela paraissait encore vu de l'extérieur. « Ouais, non ça pas être trop ... joyeux. » Difficile de dire pourquoi, peut-être que l'enfermement commençait tous à leur peser un peu, et puis les uns après les autres ils avaient assisté à l'élimination de candidats auxquels ils s'était attachés, aussi. « Mais bon, je suis sûr tu déjà avoir plein des idées pour par laisser le prime déprimant dimanche. » Et franchement ça ne serait pas de trop, parce qu'un paquet de secrets semblaient du genre à casser l'ambiance. Andreja ne jetait pas la pierre, le sien en faisait résolument partie, mais enfin. Reprenant en tout cas le candidat lui avait demandé « Alors ... tu réalises que t'es à deux doigts de la finale ? » Comme il allait vite en besogne, lui. A vrai dire Andreja réalisait encore à peine qu'il avait échappéà l'élimination la semaine précédente, lui qui pensait n'avoir aucune chance face à Ghika. « Deux doigts ? Plutôt dix. » Dix comme le nombre de demi-finalistes, et à ce stade-là il ne pensait pas que la partie soit jouée pour qui que ce soit, même si comme tout à chacun Andreja avait ses préférences et ses pronostics, bons ou mauvais il verrait bien. « Tu déjà avoir ton idée, sur qui aller en finale ? » Que ce soit ses préférences, ou bien le regard d'un type qui avait eu l'occasion d'être aussi spectateur ; Andreja était curieux. Peut-être curieux de confronter le quatuor qu'il avait en tête à celui de quelqu'un d'autre.