@Diego

Cela va bientôt faire une heure que je reste là, à ne rien faire. Je n'ai envie de rien faire, pour une fois que l'ennui ne m'écrase pas au point de me voler jusqu'à la moindre goutte de volonté. Je reste assis au bas de l'escalier, puis je fais les cents pas et j'attends que le temps passe en pensant que j'attends que le temps passe. En pensant à ma fille aussi, un peu. Je me demande ce qu'elle fait, ce qu'elle a eu comme cours aujourd'hui, si c'était bien, pas bien, voire chiant, si elle a eu des notes, bien mangé, discuté avec ses copines, de garçons, de fringues, de la prof d'Histoire qui s'habille comme un vieux sac à patates ou de l'émission d'hier de Fake Lover. Peut-être qu'elle l'a vu et que je l'ai faite rire, ou rouler des billes tellement je la désespère et lui fait honte. J'aimerais mieux savoir qu'elle a rit, mais si j'avais l'occasion de lui demander je suis presque sûr qu'elle me mentirait pour me faire comprendre que je suis lourd et absolument pas drôle comme j'aime à la croire.En réalité, je sais que je suis surtout lourd et pas vraiment marrant, enfin en tout cas pas hilarant. A la rigueur on s'autorise un petit rire nasal, un petit souffle comme ça, amusé. Mais qu'est-ce que j'en sais après tout. Et puis c'est pas comme si c'était ma vie de faire marrer les gens, à la rigueur tant que je fais rire ma petite fille, ça me va. Et là ce serait pas femme qui rit à moitié dans ton lit, ou des conneries dans le genre, mais plutôt fille qui rit, t'es un papa accompli, ou un dérivé du genre, mais c'est le seul qui me vient à l'esprit. Je suis debout planté dans le hall à attendre de trouve l'inspiration divine pour une rime plus recherchée, mais rien ne me vient. Je perds tout espoir quand un jeune homme fait son apparition. Parfait, quelqu'un avec qui discuter pour éviter de penser à des conneries. « Jeune homme, ceci est un test : je te prie de raconter une blague bien drôle que le vieux que je suis est susceptible de ne jamais avoir entendu de sa vie. » C'est pratiquement impossible, je lui souhaite bien du courage. Mais non, ce n'est pas du tout étrange de demander cela au premier venu, pas du tout. « Naturellement, je te laisse, hm, disons trois chances. » Comme le Génie a accordé trois voeux à Aladdin, je suis trop bon, je sais. Mais bon, ça ne m'étonnerait pas s'il se barrait en courant sans me prêter plus d'attention que cela.

Il est tard, j ai faim, u fond je n'avais même qu'une envie c'était foncé dans les cuisines, me prendre de qoi me mettre quelque chose sous la dent puis retourner dans ma chambre afin de finir cet excellent roman policier qui me tenait en haleine depuis le début de soirée. Je traversai donc le hall a pas pressés en direction des escaliers quand je tombais sur Cecil qui me demandait quelque chose de fort étrange. Le faire rire avec une blague qu'il ne connaissait pas encore, mais il me prenait pour qui Papy… Comme si je n'avais que cela à faire. Je souriais donc et lui disais :

Et si je n en ai pas envie ?

C'était un peu la première question à se poser, papy m'ayant interpellé sans me demander mon avis… En attendant je cherchais malgré tout à me justifier. Histoire de paraitre ne serais-ce un minimum crédible :

C'est juste que je ne suis absolument pas drôle et que là j'ai d'autres envies, que te raconter une blague que j'aurais surement tiré d'une quelconque conversation, qui aura surement déjà entendu dix milles-fois et qui nous fera surement plus perdre tu temps qu'autre chose. À toi comme à moi…

Je n'avais depuis le début de l'aventure trouvé aucun intérêt à parler à Cecil que je trouvais pls ridicule qu'autre-chose. Cette semaine, vu qu'elle allait surement être ma dernière au sein du nid. J'avais fait des efforts, même si j'en avais tout sauf envie.