La réalité m’a rattrapée comme une tonne de brique, alors que je tournais, sans trop d’attente, la roulette russe. Dès la première fois, elle s’était montrée peu coopérative en retirant 5000€ à ma cagnotte actuelle. Mais j’avais été assez gentille pour lui octroyer une seconde chance, et voilà qu’elle me trahissait de plus belle, preuve que l’on ne pouvait pas lui faire confiance. Nominée, dès le début de l’aventure, avec à peine une journée de jeu.  Pathétique. Voilà de quoi me miner le moral pendant un petit moment, juste le temps de me ressaisir et d’être prête à me battre pour ma place dans cette aventure. Mon refuge du moment? La salle de bain, et plus particulièrement le grand bain à remous, où, après l’avoir rempli d’une eau chaude et réconfortante, je m’étais installée, un air boudeur sur le visage. Tout était silencieux dans les environs, il faut dire que vu l’heure avancée de la nuit, je n’en prévoyais pas moins. Me plongeant tout entier dans la baignoire, je laissais mes cheveux s’imprégner de l’eau, le voyant voltigé tout autour de ma tête alors que des bulles remontaient doucement à la surface de celle-ci, prouvant à quiconque que je respirais bel et bien et que je n’avais aucune intention d’attenter à ma vie. Je revins vite à la surface, mes poumons réclamant vivement de l’air, et je constatais qu’une figure familière m’observait, un tantinet inquiète. « Je ne suis pas suicidaire, je t’assure. » laissais-je savoir à une Ariadne soucieuse. « Et plutôt que de m’observer comme ça, viens me rejoindre. Il y a suffisamment de place pour deux. » Que ce soit dans ce bain ou sur le banc des nominés, par ailleurs. Son partenaire lui avait fait l’infime honneur de la nominée, elle aussi, merci à la roulette russe, encore une fois.

Je ne dormais pas encore. Je faisais un petit tour du propriété pour s'approprier les lieux à ma façon. Le château était digne d'un palace. Autant d'ostentation me sidérait. Venant d'un milieu modeste, je n'aurai cru atterrir dans des endroits aussi luxueux tels que celui-ci. La production y avait mis le paquet pour cette saison. Je ne prenais pas encore tout à fait mes aises. Je ne me sentais pas encore totalement chez moi. J'avais du mal à m'y faire, je ne savais pas si je m'y ferai un jour. La veille, j'apprenais ma nomination d'office suite à la roulette russe grâce à mon crétin de partenaire. J'étais plus qu'excédée par ce coup du sort. Un jour à peine notre entrée officielle. C'était vraiment ironique. Un bon bain ne me ferait pas du mal. J'avais vraiment besoin de me détendre. Je débarquais dans la salle de bain en peignoir. Quelqu'un était déjà là. Submergée dans l'eau, je reconnus les traits éthérés de la belle Simone. Elle remontait à la surface, voyant mon inquiétude. Elle m'assura qu'elle n'avait nullement l'intention de mettre fin à sa vie. Je soufflai, soulagée. Elle m'invita à la rejoindre dans la baignoire. « Avec plaisir, ma belle. » Je me le délestai rapidement de mon peignoir qui atterrit sur le carrelage froid. Je me glissa dans le bain en face de la blonde. A l'aide d'une pince, je coinçais mes cheveux derrière mon crâne. « Allez, fais pas cette tête. » Je posai mon regard sur la jeune femme. Elle boudait encore. J'approchai ma main vers son genoux que je caressai en douceur pour la consoler un peu. Elle semblait chagrinée par la nouvelle. Qui ne le serait pas ? « Arrêtons de penser à ça. » Pensons positif. On était nominées et ce n'était pas la fin du monde. Je ne m'inquiétais pas pour elle. Quant à moi, je ne préférais pas savoir ce que le soir me réserverait ce dimanche. « Tu viens Louisiane, toi aussi, non ? » La liste de points communs commençaient à s'allonger. On finirait par croire qu'elles étaient âmes sœurs. Chose que je ne trouverais pas absurde car on s'entendait plus que bien.

Je considérais la vie comme un joyau des plus précieux, et même dans les moments les plus noirs de mon existence, je n’avais jamais songé un seul instant à cesser de vivre. Au contraire, je me battais à chaque instant afin de la vivre telle que je l’entendais. Ce n’était nul le moment pour baisser les bras. Cette aventure m’offrait tellement de possibilités et avant tout, une pause pour souffler avant de repartir à la conquête de ma liberté personnelle. Ainsi, les inquiétudes qui avait naquis sur le visage d’Ariadne n’avait pas lieu d’être, et je chassais bien vite ses sombres pensées en des paroles rassurantes, l’invitant plutôt à venir me tenir compagnie dans les remous réconfortants de ce bain moussant. Ce qu’elle accepta sans grande hésitation, ce que j’aurais pu prévoir puisque je commençais doucement à cerner la personne qu’elle était. Plusieurs éléments manquaient encore au collage que j’avais en tête pour qu’il soit complet, et le plus important du lot risquait d’être l’une de mes nombreuses quêtes au sein de mon épopée dans cette émission, mais, je l’espérais, j’avais encore du temps devant moi. La sombre pensée que je me mentais à moi-même assombri un court instant mon regard, assez pour faire naître un élan de sollicitude chez la jeune femme. Ses paroles et cette simple petite caresse sur son genou réussir à me convaincre de changer d’air, afin de ne pas m’embrumer l’esprit de pensées négatives. Ça ne servait strictement à rien, outre qu’à ruiner mon moral, et j’avais mieux à faire. Changeant le sujet de la discussion, elle s’interrogea quant à mes origines. « Oui, je suis une pure sang louisianaise, née et élevée à Winnfield jusqu’à la fin de mes études. J’ai emménagé à Lafayette après ça. » Plusieurs raisons m’avaient d’ailleurs poussée à quitter mes terres natales, mes études, notamment, mais ce n’était qu’une excuse parmi tant d’autres. « J’ai cru comprendre que tu étais aussi du coin. » Un détail plutôt amusant, sachant que, déjà, plusieurs points communs nous unissaient. « Tu parles un peu français? » ajoutais-je même, sachant que cette langue occupait une place importante dans la communauté de cet état. Tout ça m'étonnait tout de même. La vie aurait pu nous mettre sur la route de l’une et l’autre bien avant aujourd’hui, mais c’est à Fake Lover que nos routes avaient décidé de se croiser. Je ne croyais pas toujours au destin, mais ma rencontre avec Ariadne me donnait un peu plus espoir qu’il existait peut-être bien.