@Leandro

C'est curieux, vraiment, vraiment curieux. Il est plus que l'heure que je me sustente et je n'ai pas faim. Je ne me suis pas levé plus tard que d'habitude, je n'ai décalé ni l'heure de mon petit déjeuner, ni celle du déjeuner, ni celle de mon quatre heures. Oui, parce que même les grands et vieux gaillards comme moi ça goûte, pas forcément tous les jours mais au moins de temps en temps quand l'envie me prend. C'est pas de la gourmandise, non du tout, c'est pour ma santé, pour ma survie. Ou c'est juste l'habitude de manger dès que j'ai un petit creux, et à ce moment-là ça s'appelle grignoter. Tous les nutritionnistes et les messages du ministère de la santé vous diront que c'est mal, mais c'est tellement chouette le goûter en vrai. Que des trucs trop sucré ou trop salé pour l'apéro. Si on pouvait manger que de ça ce serait le paradis, mais on mourrait tous relativement jeunes, hm, et l'espère humaine ne ferait sans doute pas long feu. Je suis un gars très positif dans la vie sinon, moi, faut pas croire. Comme j'ai toujours pas faim je continue de me promener dans le jardin, des fois que marcher m'ouvre l'appétit. Peut-être que j'aurais dû rester près de la cuisine où quelqu'un se serait bien dévoué pour mijoter un bon petit plat, l'odeur aurait put réveillé mon estomac. Mais maintenant que je suis là, près du salon de thé, autant s'installer et se servir. L'appétit vient en mangeant parfois, même en buvant. Ça coûte rien d'essayer. Je commence donc à préparer l'eau, les trucs à infuser. Pas sûr que ce soit bien fait, je suis plus café, ou chocolat chaud encore à mon âge, c'est mon ex qui était branché thés, infusions et conneries dans ce genre. Je l'ai déjà vu faire mais c'est pas évident de copier, je suis loin d'être un singe savant. Je vois passer quelqu'un rapidement, mais j'ai pas trop le temps de distinguer de qui il s'agit. Je prends une espèce d'accent british à couper au couteau, déjà que mon accent normal c'est pas un cadeau. « Vous prendrez bien une petite tasse de thé, très cher ! » On m'aura probablement pas entendu, mais c'est pas grave, je peux boire mon eau chaude au goût de chaussettes tout seul et taper la causette à mes amis imaginaires dans les fauteuils, j'aurais pas l'air plus fou ou idiot que d'habitude.

Je viens de finir de manger. Un gratin de pommes de terre. Pfff, je suis repu. C’est que ça pèse sur l’estomac. Mais au moins j’ai bien mangé. C’est moi qui l’ai fait, il y en avait assez au moins pour 8 personnes, alors ça à fait plaisir à certains, forcément. C’est qu’il y en a beaucoup qui rodent près des cuisines, dans l’espoir qu’une âme charitable lui fasse à manger. Au bout du coup, c’est souvent les mêmes qui font la cuisine. Moi ça ne me dérange pas. Bon, je ne suis pas un grand chef cuistot, mais je me débrouille. Jusqu’ici je n’ai empoisonné personne, alors c’est déjà ça. Après le diner, je décide d’aller à l’extérieur pour une petite balade. Puis ça m’aidera à digérer. Finalement j’arrive non loin du salon de thé. Je passe devant la porte, sans faire attention à l’intérieur, quand j’entends une voix, avec un accent…hm…je ne saurais trop dire…C’est à moi qu’on parle ? Je fais demi-tour, pour repasser devant l’embrasure de la porte. Je regarde à l’intérieur, et j’y trouve Cecil, en train de boire du thé, apparemment tout seul. « C’était quoi cet accent ? Me dis pas que t’essayais d’imiter celui des british ? » Que je demande amusé. Parce que bon, ce n’était pas trop ça quand même. Je décide de m’installer à ses côtés. « Mais ouais, je prendrais bien un thé très cher. » que je réplique, imitant moi-même à mon tour l’accent british. Et j’ai tendance à penser que je le réussis plutôt bien. Peut être que je me trompe. « Je suis content que tu sois resté…surtout que je voulais te demander un service. Que tu deviennes mon coach sportif. Parce que bon, j’ai un peu de boulot à faire de ce coté là comme tu as pu le constater… Et j’ai dû mal à me motiver, mais je suis sur qu’avec quelqu’un pour me pousser, ça le ferait mieux. » Parce que tout seul, ma motivation a tendance à se barrer très rapidement. « Bon, par contre, j’ai rien pour te payer…Mais la satisfaction d'aider une âme en détresse devrait suffire non ? »

Je n'ai pas faim, mais quand je passe près du salon à thé, j'ai tout à coup bien envie de m'en boire un petit. Je ne suis pas un grand amateur de cette boisson, peu importe le parfum exotique que ça peut avoir, mais je me dis qu'il se pourrait que boire m'ouvre l'appétit, et comme ça je n'aurais plus qu'à rentrer pour profiter de ce que quelqu'un aura préféré - à moins que personne n'est rien cuisiné, ou que tout ait déjà disparu, dans ce cas j'essayerais de me faire quelque chose moi-même mais me laisser seul dans une cuisine est très souvent plus dangereux qu'on ne le croit. Comme il me semble remarquer que quelqu'un se promène dans les environ, je propose une tasse de thé en espérant une réponse qui ne tarde pas à parvenir à mes oreilles, bien que ce ne soit pas celle à laquelle je pouvais m'attendre. Le jeune Leandro me demande si j'essayais bien d'imiter l'accent british. Je le toise du regard comme s'il venait de dire une énormité et que j'en étais vexé, mais c'est juste pour rester dans le personnage de l'anglais un poil susceptible, parce qu'en fait je suis tellement pas doué que je me moquerais presque de moi-même en m'entendant. « Si, très cher. » Je réplique simplement. J'apporte le thé sur la petite table et il me répond finalement qu'il prendrait bien une tasse. « Oh, je ne suis pas sûr que vous le méritiez. » Vu qu'il s'est gentiment moqué de mon accent. Je dois tout de même reconnaître que le sien est mieux, mais c'est pas une raison, chacun fait comme il peut. Moi je suis plus doué en sport qu'en langue, lui c'est l'inverse, certainement. D'ailleurs, sur ce terrain que m'entraîne le jeune homme, qui aimerait que je devienne son coach sportif, parce que tout seul il a du mal à se motiver, ce qui est, en gros, le problème de la plupart des gens qui engagent un coach. Je souris, consentant à la servir après cette requête inattendue. Il ajoute cependant qu'il n'a pas de quoi payer mais que la satisfaction de l'aider devrait être suffisant. Je me mets à rire. « C'est vrai que tu fais peine à voir, je pourrais faire une exception, va. Mais attention, faudra que tu te prépares mentalement avant qu'on commence, ça sera pas de la tarte, genre remise en forme à la cool. Je vais te concocter un programme de champion ! Si tu te rends compte que t'as pris du poids après l'émission, crois-moi, ce sera que du muscle, parole de Cecil ! » Si c'est pas du discours d'encouragement ça, je sais pas ce que c'est. Bon, j'avoue, j'en fais un peu beaucoup, parce qu'il risque pas de sortir d'ici avec une carrure comme la mienne, mais devrait y avoir du mieux par rapport à ce à quoi il ressemble là. On dirait une crevette, enfin je veux pas être méchant, mais c'est sûr que lui et moi on joue pas dans la même catégorie, quoi. De toute façon, sans vouloir me vanter, depuis l'élimination de Ronan, plus aucun candidat ne joue dans ma catégorie. Enfin c'est peut-être pas plus mal. « Allez, bois ton thé petit. » Je lui approche sa tasse. Il va en avoir besoin, hm.