Les abysses, un lieu qu'elle avait maudit pendant les sept jours où elle y avait résidé, un semaine interminable qui avait laissé des traces dans son esprit. Il y avait d'abord eu ce prime ou du moins cette parodie de prime qui n'avait été qu'un prétexte pour envoyer des candidats pomponné comme jamais dans un environnement hostile sans prévenir. Elle se souvenait avoir lu de la panique dans les yeux de ses camarades, certaines candidates avaient même pleuré en apprenant la nouvelle. Elle avait donc jugé bon de ne pas trop traîner près du belvédère depuis le début de l'aventure au cas où la simple vue des abysses suffise à réveiller chez elle un profond sentiment d'amertume. Et pourtant la voilà, le regard dans le vide accoudée au belvédère comme si la vue qu'il lui offrait était la chose la plus surprenante dans ce nid. Le paysage en devenait presque charmant, ce n'était qu'une plaine et une parcelle forestière après tout, pourtant une petite part d'elle ne pouvait pas oublié qu'ils avaient dû passer une semaine sans le moindre confort confinés avec plus de trente autres potentiels candidats dans les abysses. Adélie a peut être le goût de l'aventure mais passé une semaine dans les mêmes vêtements sans prendre une douche digne de ce nom elle appelait plus ça de la survie. La jeune femme reste ainsi de longues minutes, perdue dans ses pensées ne se souciant même pas du monde qui l'entoure. Un autre candidat pourrait très bien faire son apparition pour la pousser dans le vide qu'elle ne l'aurait même pas entendu arriver. Cette vue la fatigue au bout d'un moment, un retour dans le nid s'impose. La jeune femme fait volte-face encore un peu perdue dans ses pensées, sans prendre garde la française heurte un autre de ses camarades. La jeune femme a un mouvement de recul pendant lequel elle va se confondre en excuse. « Oh mince, je … pardon, j'ai pas fait exprès ». Elle s'excuse de façon un peu maladroite, elle a du mal à réaliser qu'elle ait pu être distraite au point de ne pas entendre son camarade arriver. La française relève enfin la tête pour découvrir l'identité de sa malheureuse victime qui n'est autre que Sayid. « Excuse moi Sayid ». Elle reprend de plus belle cette fois-ci d'une voix beaucoup plus assuré, des excuses en bonne et due forme bien loin de sa tentative ridicule il y a de ça quelques secondes. La jeune femme ne peut s'empêcher de rougir de honte en imaginant une alternative beaucoup plus dramatique à cette bousculade, elle aurait pu le faire tomber et être obligé de demander de l'aide à une idiote tête en l'air pour se relever. Oh non, ça elle ne veut pas y penser. « Je … j'étais perdue dans mes pensées. Je ne t'ai pas fait mal au moins ? ». Elle se hasarde à demander même si elle doute d'avoir pu lui faire un quelconque mal toute menue qu'elle était.    

Il n'était pratiquement pas sorti aujourd'hui, et c'était bien une première pour lui qui s'évertuait à faire chaque matin sa promenade en forêt. Sayid avait besoin de ses habitudes, pas uniquement par caprice mais parce que c'était ce qui lui permettait de ne pas laisser ses angoisses - et elles étaient nombreuses - prendre le dessus. Et pourtant ce matin là il n'était pas sorti, parce qu'il avait mal dormi, et qu'il s'était levé beaucoup plus tard que ce à quoi il était habitué ... et une fois qu'un grain de sable était venu enrayer la machine de ses habitudes il était incapable de rattraper le coup, et se sentait à côté de la plaque pour tout le reste de la journée. Rien d'étonnant donc au fait qu'il ait erré dans l'hôtel toute la fin de matinée et tout l'après-midi, sans vraiment trouvé comment se sentir un peu mieux. En début de soirée il avait donc retrouvé l'extérieur et décidé d'aller se balader, à défaut de l'avoir fait le matin, poussant finalement sa marche jusqu'au belvédère. Il venait rarement jusqu'ici, il n'avait pas passé une mauvaise semaine dans les abysses et était même relativement dans son élément là-bas, mais il n'était pas nostalgique non plus, et en terme de vu il préférait mille fois celle offerte par la terrasse. Bien que de dos il n'avait pas tardé à reconnaître Adélie, lui tournant le dos et semblant captivée par la vue qui s'étendait sous leurs pieds, à tel point qu'elle n'avait pas pensé un seul instant se retrouver face à Sayid lorsqu'elle s'était retournée, et lui était littéralement rentrée dedans. « Oh mince, je … pardon, j'ai pas fait exprès. » Oh ça, il voulait bien croire qu'elle ne l'avait pas fait exprès en effet, Adélie n'avait pas vraiment la tête de la candidate qui bousculait et écrasait les pieds des autres pour le plaisir. « Excuse moi Sayid. Je … j'étais perdue dans mes pensées. Je ne t'ai pas fait mal au moins ? » A s'excuser avec autant d'insistance elle devrait peut-être faire équipe avec Allen, et heureusement dans un cas comme dans l'autre le britannique savait prendre le recul nécessaire pour ne pas s'en offenser ; Il lui suffisait de garder son air calme, son air habituel. Mais sans cependant résister à l'envie de lui faire remarquer « Non. L'avantage avec moi c'est que je ne sens rien quand on m'écrase les pieds. » Ce n'était rien de plus que la vérité, et ce n'était en rien dit comme un reproche déguisé puisque Sayid avouait cela sur le ton de la conversation. Mais c'est vrai, à mesure qu'il remarquait comme une réflexion innocente concernant son handicap avait tendance à mettre certaines personnes mal à l'aise il avait tendance à se faire un peu plaisir ... Qu'on ne vienne plus dire que Sayid ne s'amusait de rien, ses sources d'amusement étaient simplement un peu atypiques. « Les abysses te manquent ? » avait-il finalement questionné pour changer de sujet, s'avançant à son tour vers la balustrade pour jeter un coup d’œil en bas. C'était un peu étrange, parce que lorsqu'ils étaient dans les abysses pratiquement aucun n'avait remarqué ce morceau de terrasse au dessus de leur tête. « C'est décevant, pour ton partenaire. » Capacité de Sayid à passer du coq à l'âne en permanence. Et il n'avait pas vraiment conscience que sa réflexion pouvait être assimilée à un reproche, lui se contentait de dire les choses comme il les pensaient, et en l'occurrence un abandon était pour lui une déception, parce que cela ne faisait pas partie de son vocabulaire ... Sayid était bien trop hargneux pour ça, en son for intérieur.

Adélie a parfois ses absences, ses petits moments privilégiés où elle ne pense plus à rien et rien ni personne ne peut l'en déloger. C'est une pause, une parenthèse dans sa vie où elle se contente juste de fixer l'horizon des heures durant parfois sans bouger. La rouquine ne fait attention à rien si bien que lorsqu'elle décide de retourner dans le nid elle heurte de pleins fouet un corps étranger. Elle ne réfléchit même pas et s'excuse un peu maladroitement encore un peu chamboulée d'être rentré dans un de ses camarades. Elle n'a même pas encore vu le visage de son camarade qu'elle est déjà en train de s'excuser, elle a un geste de recul essayant de restaurer l'espace vital que les deux candidats avaient perdus quand elle l'a bousculé. La française relève la tête, ses prunelles azurées se posent sur le visage de Sayid et elle ne résiste pas à l'envie de s'excuser à nouveau cette fois-ci avec beaucoup plus d'assurance. Elle est désolée vraiment, elle sait que le mal est moindre mais elle ne peut pas s'empêcher de penser qu'elle aurait très bien pu le faire tomber au sol si elle n'avait pas eu tout de suite un geste de recul. Elle savait qu'avec son handicap il aurait été obligé de lui demander de l'aide pour se relever et elle a honte à la simple idée d'y penser. La jeune femme s'enquit de savoir si elle a fait mal à son camarade, une question à laquelle il répond avec humour. On ne le soupçonnerait pas mais Sayid réussit à arracher un sourire amusé à la française. « Oui, bon, c'était stupide de te demander ça ». Elle avoue dans un léger sourire, il y avait eu plus de peur que de mal. Il s'en était fallut de peu pour qu'un drame se produise mais ils étaient encore tout deux sur leurs pieds alors il n'y avait pas de quoi en faire un drame. Sayid s'approche du belvédère, jette un coup d'oeil en bas avant de lui demander si les abysses lui manquent. « Non, c'était un peu catastrophique les abysses. ». Elle répond instantanément, il n'y avait pas besoin de réfléchir des années sur la question. Son expérience dans les abysses avait été quelque peu chaotique à plus de trente dans un petit lopin de terre. « Mais la nature me manque oui c'est certains » . Elle ajoute, nostalgique de ses escapades dans la forêt et de ses expéditions en haute montagne. Elle voulait revoir le Mont-Blanc, l'observer de tout en haut comme elle avait pu le faire l'été dernier. Des envies de voyages, de découverte loin des cités construites de la main de l'Homme. Sayid décide d'évoquer le départ de son partenaire qualifiant celui-co de décevant, un terme dur qui ne manque pas de la faire grimacer. « Tu ... tu trouves ? » . Parce qu'elle n'a jamais osé se confronter à l'avis des autres sur l'abandon de Clarke et comme Sayid ne semblait pas y aller par quatre chemins, il allait à coup sûr expliciter le fond de sa pensée. « Je trouve ça dommage, regrettable même. » . Et encore le mot était faible pour exprimer le fond de sa pensée, au delà de sa déception et de son amertume personnelle, elle le voyait déjà aller plus loin dans le jeu. Peut être une finale, et voilà qu'il avait pris l'initiative de mettre fin brutalement à son aventure. « Tu t'y attendais toi ? » . Elle l'interroge, son regard s'ancrant dans le sien. De son côté, elle n'a rien vu venir mais elle a très bien pu être aveuglé par ses propres histoires au point de ne rien remarquer.