Vagabondant dans l'hôtel comme une âme en peine, Nymphaea ne savait quoi faire. Le lendemain de prime, elle avait l'impression que tout le monde avait le cerveau ramolli. Elle, la première. Et elle n'appréciait pas vraiment le fait d'être inactive, elle avait besoin de bouger, de faire quelque chose. Ses jambes la portèrent jusqu'au jardin, dans un froid glacial, qui lui fit regretter de rien n'avoir de plus chaud que son pull, qui était, certes, en laine. Alors qu'elle pensa à redescendre pour se couvrir un peu, si elle voulait rester, une voix douce l'appela. En tournant la tête, elle s'aperçut que c'était Ilyanna, une bonne rencontre de la semaine passée. Un sourire aux lèvres, elle sautilla jusqu'au banc, où se trouvait la jeune femme, et s'allongea dessus, posant sa tête sur les genoux de son amie, soufflant un « Coucou ! » amical durant la manœuvre . Elle n'ouvrit pas la bouche pendant quelques secondes, avant de finalement demander : « Tu crois qu'il y a un homme fait pour moi dans ce jeu ? Tu crois que c'est possible de réellement pouvoir trouver l'amour dans un jeu de télé-réalité ? » Ilyanna ne lisait sûrement pas l'avenir dans une boule de cristal et Nymphy se doutait bien qu'elle ne pourrait pas vraiment répondre à cette première question avec certitude. Et loin d'elle, l'idée de se plaindre, mais parfois, on a juste besoin de s'entendre dire des choses gentilles pour aller bien.

Nymphaea n'en avait pas attendu autant, mais Ilyanna se révéla totalement attendrissante grâce à sa réponse. Une pluie de compliments tomba sur la belle, mais ce n'était pas sur-dosé, ni trop valorisant pour l'égo, c'était juste ce à quoi elle ne s'attendait pas, c'était ce dont elle avait eu besoin, le temps d'un instant, d'une amie pour la rassurer. « T'es vraiment gentille comme fille Ily, tu sais. C'était adorable, merci. » souffla-t-elle, reconnaissante. N'allait pas croire qu'elle ne vivait que pour soutirer des compliments, non, elle en était loin, c'était juste agréable de voir qu'il y avait quelqu'un, ici, pour la voir comme une fille bien.

Ilyanna parla ensuite des nominations, cette étape horrible qui faisait partie intégrante du jeu. Elle comprenait totalement comment elle pouvait se sentir à ce sujet. Être à peine arrivé dans le jeu et déjà voir sa place menacée ne devait pas être facile. «  C'est vrai que ça doit pas être facile. Le pauvre, il a toute la semaine pour cogiter sur ça, en plus. Peut-être qu'on devrait lui faire un cadeau surprise ? Je suis presque sûre qu'il ne refuserait pas que deux jolies filles viennent le chouchouter ! » rigola-t-elle pendant que son amie s'amusait avec ses cheveux. Eh oui, quelque chose lui disait que cela plairait beaucoup à Gabriel, de voir Ilyanna et Nymphaea débarquer, pour le distraire durant ses longues heures de réflexion sur cette nomination... Et puis quoi encore !
La jeune femme s'enquit alors de lui demander si quelqu'un commençait à l'ennuyer. Elle réfléchit quelques secondes avant de finalement répondre. Puisque oui, sans le vouloir, elle comprenait toujours les choses de travers. «  M'ennuyer des autres, je sais pas, j'ai plutôt l'impression que c'est l'inverse. D'abord cette histoire avec Liam, je remets ça avec Keane. Grand quizz 2011, qui sera le prochain avec qui je me prendrais le bec ? Si déjà, les hommes n'acceptent pas mon caractère, ils n'accepteront jamais mon secret ! Je vais finir seule ! » déprima la belle, sérieusement. « Et je vais devenir pleurnicheuse en plus ! » s'exclama-t-elle, outrée de sa propre personnalité. Elle n'était pas du genre à se plaindre. Pas du tout même. D'habitude, elle voyait la vie du bon côté, elle était le genre à voir les bonnes choses et à laisser les mauvaises derrière elle. Même pas deux semaines dans ce jeu, et elle commençait à se plaindre. Pas génial.

Rigolant à son tour de la déclaration de Ilyanna, l'Irlandaise ne lâcha pas l'affaire et conclu, toujours dans un esprit plaisantin. « J'espère que tu sais dans quoi tu t'engages en disant que t'es partante, hein ? Parce que j'en suis plus que capable, et que je n'hésiterais pas une seconde à t'embarquer dans cette histoire ! »

« D'accord, tu gagnes celle-ci ! » Elle n'avait pas tort, mieux vaut être seule que mal accompagnée. « Je sais pas, j'ai peut-être trop misé sur l'émission. Je veux vraiment ressortir avec quelqu'un de ce jeu. Je sais, c'est stupide de vouloir trouver l'amour dans une télé-réalité où tout le monde cache un secret, tout ça... Et de commencer à perdre espoir au bout d'une semaine ! Bref, je parle trop. Et je te prends au mot, je deviendrais lesbienne rien que pour toi ! » termina-t-elle sur un ton plus joyeux, plus enfantin. Elles n'allaient quand même pas se mettre à parler de grands sentiments, la larmichette à l'œil et tout le bordel, n'est-ce pas ? Elles étaient bien plus rigolote que ça, c'était certain.
Puis Ily parla des nominations. Elle avait l'air réellement stressée par cette partie du jeu et ça se tenait totalement. Non, seulement, tu es nominée, ce qui veut dire que tu es sur la sellette, que tu peux quitter le jeu, comme ça, en un claquement de doigt. Mais en plus de ça, tu dois te dire que les autres candidats t'ont nominé, que les autres candidats ne t'apprécient pas assez pour te sauver des nominations. Dur. « Je sais pas du tout. J'espère qu'on me nominera pas, c'est sûr. Allez, rassures-toi, tu sais déjà que je te nominerais pas, c'était un bon point, non ? » Un sourire doux aux lèvres, elle leva les yeux vers la demoiselle, cherchant à être rassurante. Elle espérait que l'une comme l'autre, elles ne seraient pas nominés. Nymph' avait été assez chanceuse pour se trouver une amie, quelqu'un de bien à qui parler, avec qui rigoler. Alors non, elles ne pouvaient pas être nominées, pas déjà. D'un mouvement rapide, elle se releva, s'assit en tailleur sur le banc, la regarda fixement et la bombarda de questions. « Bref, parlons de toi. Tu viens d'où ? Tu fais quoi dans la vie ? C'est quoi ton plus grand rêve ? La chose sans laquelle tu ne peux pas passer une journée ? La personne que t'aimes le plus au monde ? Le meilleur souvenir de ta vie ? » Toujours ce même sourire sur le visage, elle n'attendait plus que les réponses de la jeune femme.

« C'est une bonne façon de voir les choses. Je n'avais jamais vu ça sous cet angle ! » s'exclama la belle après les quelques paroles de Ilyanna. Nymphy s'étonna d'ailleurs de ne pas avoir penser comme ça plus tôt. Au moins, après ça, vous pouvez être sûr – ou presque – que la personne avec qui vous êtes ne vous cache plus grand chose. C'était plutôt rassurant. Puis, elle lui lança un sourire chaleureux lorsqu'elle parla des nominations. Sourire qui, bien entendu, insinuait qu'elle lui retournait la chose. Elle était vraiment gentille. Elle méritait d'aller loin dans cette aventure.

Nymphaea acquiesçait à chaque réponse que la belge délivrait, essayant d'imprimer les informations dans sa mémoire, n'aimant pas oublier ce qu'on lui avouait. Ilyanna avait une belle vie, incontestablement. Du moins, du peu qu'elle en avait dit, la jeune Irlandaise pensait qu'elle était heureuse dans sa vie, hors de ce jeu. Et elle se rendait aussi compte qu'elles s'étaient plutôt trouvées : la nature semblait les attirer l'une comme l'autre. Et elle n'avait aucun doute, la vie sous-marine devait être magnifique, vu de près. Un sourire s'étendit progressivement sur ses lèvres, heureuse d'en apprendre plus sur son amie, avant qu'elle ne lui renvoie la pareille, l'incitant à répondre à ces mêmes questions. « D'accord, à mon tour ! Mais arrête-moi si je suis trop bavarde, il m'arrive de l'être ! » plaisanta-t-elle en repensant aux questions qu'elle avait posé quelques minutes plus tôt. « Je viens d'une petite ville côtière d'Irlande qui s'appelle Skerries. Je ne travaille pas en ce moment. Je n'ai d'ailleurs pas de domaine de prédilection, j'enchaine les petits boulots. Je ne peux pas passer une journée sans... je sais pas, je tiens pas tellement aux objets, Je crois que je peux pas me passer de rire, de plaisanter, de vivre tout simplement. Mon plus grand rêve serait de partir loin, très loin des constructions humaines, de ce monde. Avec l'homme que j'aime à mes côtés, le voyage pourrait se faire et notre amour compterait plus que tout. Oui, je veux aller en pleine nature et découvrir des choses que je n'aurais jamais l'occasion de voir si je reste ici. C'est d'ailleurs ce que j'espère faire en sortant de ce jeu. Après avoir fait de la plongée sous-marine avec toi, bien sûr ! Ça doit être vraiment magnifique. » Ses yeux se perdirent dans le vide quelques secondes, imaginant sa vie future, la beauté de la chose et le bonheur qu'elle ressentirait. Un fin sourire passa sur son visage, puis elle reprit le fil de la conversation. « Ma famille, c'est eux qui comptent le plus pour moi. Grady encore plus, je dirais. Il est mort quand j'avais pas loin de treize ans. Il était comme moi, je me rappelle encore l'énorme sourire qui s'affichait sur son visage quand il venait de faire une bêtise ! C'est affreux comme il me manque. Et mon meilleur souvenir, c'est sans aucun doute quand j'avais neuf ans – ou peut-être dix – mes parents avaient acheté cette nouvelle voiture, qui sentait bon le neuf et qui avait surtout assez de place pour loger toute la famille. Le lendemain, ils nous ont réveillé à quatre heures du mat' et nous ont dit de faire un sac pour la journée. J'ai mis des trucs totalement inutiles dans le mien : du nougat, ma peluche préférée et mes devoirs d'école ! Pas de brosse à dents ou de vêtements de rechange, juste... des trucs qui n'étaient vraiment pas nécessaire. On a fait les fous jusqu'au petit matin dans la voiture... Et on s'est endormi pour le reste de la journée. Mes parents nous ont réveillé seulement dans l'après-midi, on est resté une heure - peut-être plus - dans cet endroit désert de monde. C'était un endroit magnifique, on a pu courir dans tous les sens, on rigolait, on criait, on s'amusait. Et c'était de loin, la meilleure journée de ma vie. J'étais avec ma famille et c'était parfait. C'est le genre de moment que tu peux pas expliquer, il faut juste l'avoir vécu pour comprendre... » A nouveau, ses yeux s'égarèrent dans un endroit qu'Ilyanna ne pouvait pas apercevoir, revivant cette journée intérieurement.