L’heure n’est plus aux longues journées le cul au soleil. Je n’ai même pas eu de vacances cet été pour dire de partir un petit peu et profiter du soleil. Je ne vais pas m’en plaindre pour autant, le spectacle auquel j’ai participé a tellement cartonné à Broadway que nous avons joué les prolongations pendant deux mois, deux mois à se produire quatre fois par semaine c’est de l’argent en plus de mes poches, à partir de là je ne pouvais pas refuser. Et puis bon, contrairement à mes camarades blancs, je n’ai pas besoin de soleil pour être naturellement bronzée si vous voyez ce que je veux dire. En temps normal je me sers de l’été comme un prétexte pour sortir de mes placards les plus beaux maillots de bain que j’ai pu acheter, parce que je n’ai jamais assez de vêtements, et cette année… On ne va pas se mentir, ils sont tous restés dans mon dressing à attendre bien sagement une occasion de ressortir de cet enfer mal rangé et fouillis. Le jour est venu, j’ai pensé à emporter avoir moi quatre ou cinq pièces différentes histoire de ne pas me lasser, aujourd’hui ce sera le bikini rose, parce qu’il me met en valeur et qu’il se marie plutôt bien à ma peau. Un bon petit cocktail et une bouteille de champagne gentiment empruntée à Cupidon et me voilà sur le bord de la piscine, les pieds dans l’eau, à boire en solitaire. Plus pour longtemps puisque j’entends des bruits de pas, je ne suis finalement pas la seule à avoir pensé à un bain de minuit, rassurant… Je ne passerais pas pour une alcoolique si j’ai quelqu’un avec qui partager tout cet alcool. « Cap ou pas cap de sauter tout habillée dans l’eau ? » Je la questionne, d’humeur à jouer un petit peu.

Après une journée bien remplie, rien de telle qu'un petit aller-retour en crawl dans la piscine intérieur pour se remettre les idées en place. Vêtu simplement d'un maillot de bain une pièce noire et d'un petit paréo, je débarquais dans la piscine que j'imaginais déserte assez surprise de voir la mama du nid, Greta, en mode diva installée sur le bord cocktail et bouteille de champagne à ses côtés. Sa demande me faisait sourire vu le peu de que je portais sur moi et puis de toute manière ce paréo en avait déjà vu des vertes et des pas mures. Retirant juste mes tongs, je rigolais un bon coup, courrais, puis sautais dans l'eau; En sortant je m'esclaffais comme une enfant.
Je suis toujours partante pour ce genre de bêtises.
Je rejoignais le bord péniblement puisque gêné par le paréo qui collait maintenant à ma peau, une fois sur la terre ferme, je retirais le tissu, prenais une serviette et commençais à me sécher tout en m'approchant de Greta :
C'est pour tenter d'oublier ta nomination que tu te noie dans l'alcool ? Ce n'est pas la meilleure des solutions tu sais…
Sincèrement, je n'avais jamais été très doué pour faire la morale à quelqu'un, mais bon… Là, je faisais comme je pouvais. Si elle voulait, j'étais d'accord pour l'accompagner pour 1 ou 2 verres mais pas plus. La soirée cocktail de la semaine précédente, n'ayant pas laissé chez moi que de bons souvenirs du lendemain, mais plutôt des rappels constant de mal de crâne et de nausée. Là, n'était pas la question. Je ne comptais pas trop boire ce soir-là de toute manière. Juste soutenir quelques-instants Greta et pourquoi pas, par la même occasion, essayer d'en apprendre plus sur elle.

Boire toute seule ce n’est pas ce que je préfère, j’aurais même tendance à avoir cette idée stupide qu’à partir du moment où tu commences à boire en solitaire du t’exposes à l’alcoolisme. Je dois pourtant reconnaitre qu’un bon verre de vin ou une coupe de champagne ne font pas de mal, j’estime même qu’il est moins nocif de consommer un ou deux verres d’alcool plutôt que d’enchainer les cigarettes à un rythme ahurissant. Ce soir j’ai peut-être prévu de boire un troisième verre pour le plaisir d’être un petit peu pompette mais je n’irais surement pas plus loin, pas en restant aux abords de la piscine en tout cas. J’ai déjà bien trop lu de faits divers stupides impliquant une noyade à cause de l’alcool, je serais déjà capable de me noyer en pleine possession de mes moyens alors imaginez avec beaucoup trop d’alcool dans le sang ? Non, je ne me taperais définitivement pas une cuite à la piscine, pas ce soir, pas toute seule. Zélie arrive et la donne pourrait donc potentiellement changer mais je n’y pense pas vraiment, je ne suis pas dans l’optique de trouver un compagnon de boisson. A la place, je la défie de sauter dans la piscine tout habillée, très facile puisqu’elle ne dispose que d’un paréo. Son sourire laisse peu de place à l’imagination et elle ne tarde pas à plonger, de quoi pleinement me satisfaire. « Bravo, tu avais presque l’air divine ! » Il ne faut pas déconner non plus, il lui manque quelques notions de grâce mais ça viendra avec le temps, elle m’a l’air jeune. Boire pour noyer mon chagrin face à ma deuxième nomination ? « Quelle drôle d’idée, je pourrais mais non. J’essaye de voir le bon côté des choses, ça me motive à me dépasser ! » On se rassure comme on peut ! « Tu es française toi, je me trompe ? » Son accent anglais est terrible, il me fait penser à ce danseur français avec qui j’ai partagé le même numéro de danse contemporaine l’année dernière sur mon dernier spectacle régulier.

Lady Greta, puisque oui en plus d'être la super mamy du nid, elle était assez excentrique avec des allures de Lady Gaga black. Donc dans ma tête, les connexions se faisant très vite, elle était pour moi devenue Lady Greta. J'aimais bien sa manière d'être, de voir les choses en conservant le sourire.
Presque, presque… Tu aurais des petits conseils à me donner pour que la prochaine fois je sois divine.
Je disais cela avec ma voix de princesse casse pied, le genre de petite mimique qui ne faisais rire que moi. En même temps j'étais loin d'avoir de grands talents de comédienne et mes quelques efforts étaient très souvent beaucoup plus risibles qu'autres chose. Mais bon, passons, je m'installais aux côtés de Greta ravie d'entendre qu'elle ne comptait pas se saouler ce soir. Cela m'évitait de devoir le faire aussi pour l'accompagner.
De toute manière, tu n'as pas beaucoup de soucis à te faire. Je suis persuadé que tu vas être sauvé dimanche.
Depuis quelques jours, il y avait, en effet, quelques fantômes qui peuplaient le nid d'amour et qui, comme par hasard se retrouvait sur la sellette cette semaine. Greta avec son énergie et sa personnalité de dingue était donc quasiment assurée de passer cette semaine supplémentaire. Mais il ne fallait pas mettre la charrue avant les bœufs et puis, j'avais surtout abordée Greta pour parler d'autre chose. Heureusement, celle-ci avait pris les devants et c'est avec grand plaisir que je lui répondais :
[color=#A9054Je suis belle et bien française. Je dois bien admettre que j'ai un des pires accents anglais qu'on ait pu entendre dans cette émission, je fais de mon mieux pour m'en sortir et je dois t'avouer que c'est pas facile.[/color]
Je souffrais en effet à chaque phrase de peur d'accrocher un mot ou de faire une faute de prononciation. Même si au fond, je commençais à me détacher du regard des autres, avoir des critiques sur des choses aussi importantes pour moi, c'était dur. J'étais peut-être cash, un peu violente dans mes propos, mais c'était une carapace. J'étais un humain, qui avait juste voulue changer d'une manière un peu brutale et qui tentais d'assimiler tous ces changements qu'il s'était imposé de force, en gardant le silence et en rendant la pareil dans une émission de télévision.