Cette magic 8 ball commence à me rendre dingue. Je l’ai accidentellement faite tomber par terre et depuis elle déconne grave genre elle se met quasiment à parler en continue. Autant dire que c’est gavant. Surtout que j’ai pas de tournevis pour enlever les piles. Du coup, j’ai décidé de l’isoler dans un coin tranquille et j’ai choisi la salle d’interview. Elle est vraiment utile cette pièce ? Je doute qu’il y ait vraiment des gens qui s’en servent. C’est pas comme si il y avait beaucoup de journalistes parmi les candidats. « Toi tu restes ici et t’arrêtes de me gonfler. » Et c’est là que la balle de billard en apparence me répond que « le sort en est jeté ». Pour le coup, ça me fait bien rire. Non mais franchement, qu’est-ce qu’il leur ait passé par la tête de mettre ça dans la liste des cadeaux ? C’est marrant deux secondes mais il suffit de la faire tomber et hop, ça marche plus correctement. Je suis déçu, j’aurai limite préféré des câlins à la place. Là, mes oreilles saignent. Et puis, j’attire aussi les regards. D’ailleurs, y’a quelqu’un qui m’observe appuyé à la porte. Je remarque sa présence puis décide d’engager la conversation ou du moins d’apporter des précisions quant au fait que je parle tout seul au cas où il aurait entendu cette partie-là. « Je parlais à cette satanée balle qui veut pas se taire, brroo. » Non, ce son n’est clairement pas naturel. Y’a le défi de Rowan qui s’ajoute en plus dans mes phrases cette semaine. Je dois faire des bruits d’ours de temps à autre. Charmant, n’est-ce-pas ? « Et toi ? Tu t’en sors avec ton poupon où tu viens le condamner à jamais dans cette salle ? » Le candidat est encore plus malchanceux que moi. Il a hérité d’un poupon interactif qui m’a également cassé les oreilles la dernière fois. Comme quoi, niveau cadeaux de noël, ils ont vraiment foiré cette saison. « Je te jugerai pas si c’était le cas, c’est le triste sort que s’apprête à connaître ma magic ball. » Magique… magique… pas si magique, car si elle l’était réellement, elle se tairait là au lieu de dire pleins de phrases insensées à tout bout de champ.

La salle d’interview sera le tombeau de ma magic 8 ball. Ou du moins ce qu’il en reste. Une boule de billard cassée qui n’arrête pas de jacter. Parfois, y’a des phrases censées mais la plupart du temps c’est une combinaison assez illogique de mots qui arrivent sans même qu’on les ait désirés. En clair, mon cadeau ne fonctionne plus correctement et c’est devenu un cadeau empoisonné. Seule solution : le condamner dans une pièce peu utile et assez bien insonorisée. La salle d’interview se révèle être l’endroit idéal pour ça. Ce qui est plutôt drôle, c’est que Lino semble penser comme moi puisqu’il se pointe lui aussi avec son cadeau empoisonné et je comprends alors que son poupon s’apprête à subir le même sort que ma balle. Un fin sourire s’arque sur mon visage tandis qu’il apporte des précisions quant à un éventuel statut de père qu’il pourrait avoir. « Personne n’est fait pour en avoir. » Je déclare alors d’un ton monocorde et d’un air songeur. « Mais pourtant, ça arrive un jour et les responsabilités viennent. Qu’on s’en sorte bien avec des enfants ou mal, ça revient au même. On est tous sur un pied d’égalité. » J’ai un avis très tranché sur la question. Je parle d’un sujet qui me tient plutôt à cœur. Néanmoins, je comprends tout à fait là où veut en venir Lino. Et puis, ça serait mentir de dire qu’un bébé qui braille sans arrêt c’est agréable. Non, j’en ai pleinement conscience, c’est chiant. Et encore plus dans cette situation où il s’agit d’un faux nourrisson. « J’espère que ça n’était pas dans tes plans d’en avoir un vrai dans l’immédiat ? » J’imagine que non vu comment il remue le poupon dans tous les sens. Plus aucun respect. J’suis presque choqué par le fait qu’il le balance comme ça. Heureusement, j’ai conscience qu’il s’agit-là d’un faux bébé mais ça me rends clairement pas à l’aise. « Ouais. Elle était en forme. Brrr. » Je lève les yeux au ciel repoussant un léger rugissement d’ours. Avec Lino, cette semaine, on peut dire qu’on aura été dans la même galère autant avec notre cadeau qu’avec le gage attribué par Rowan. « Quel membre de la production a le plus gardé son âme d’enfant si bien qu’il a tout un stock de gages bidon à sa disposition ? » Je m’empare alors du micro de la salle en me mettant à la place de Rowan dans sa rubrique. Pas difficile de comprendre de qui je parle. « Attention à ne pas réutiliser de joker. » Oui, bon, on a tout à fait le droit à un moment de lui en vouloir à la blonde pour ce gage à la noix et de se moquer d’elle. C’est sans rancune.