Cette semaine, j’ai décidé d’en profiter comme si c’était la dernière. Il se pourrait bien que ce soit mes derniers jours dans le jeu étant donné que j’suis nominé d’office. J’suis pessimiste quant à mes chances de poursuivre l’aventure et je préfère donc me préparer à mon départ pour ne pas trop être déçu même si je le serai forcément car j’ai envie de rester et que je me plais ici. Par exemple, cette piscine intérieure où j’adore me prélasser de temps à autre. Etant habitué à nager, c’est un peu le paradis ici pour moi. Pour l’instant, je ne suis qu’en short de bain, j’ai pas encore mis les pieds à l’eau. Chignon bien attaché, je m’apprête d’ores et déjà à sauter. Néanmoins, un candidat m’interpelle aussitôt. Barbe noir alias Grey. Il se prélasse telle une star internationale sur un matelas gonflable avec ses lunettes de soleil. Certes, il y a énormément de lumière dans la salle grâce aux vitraux mais pas de là à être aveuglé par le soleil. Monsieur se croit clairement en vacances aux Bahamas. C’est drôle. Ce qui l’est moins, en revanche, c’est qu’il me questionne sur le métier que j’ai donné lors de mon casting. Je suis pris de court et le seul réflexe que je trouve pour ne pas y répondre c’est de me jeter juste à côté de lui en bombe pour le faire chavirer. « A l’abordage ! » Que je crie avant de me lancer à l’eau. Evidemment, le matelas est retourné et Grey se retrouve complétement trempé. J’espère qu’il m’en voudra pas trop. En même temps, il était en maillot. Y’a que ses lunettes au final qui auront pris injustement l’eau. Faut bien qu’il y ait des dégâts. « Désolé pour tes lunettes, c’était trop tentant. » Je déclare alors quand on a tous deux ressorti nos têtes de l’eau sans m’excuser pour autant pour ma bombe. « Tu dirais que je l’ai appelé comment ? » Je réponds pas directement à sa question comme ça, c’est tout bonnement parfait. « S’il est gris, je pourrai lui avoir donné ton nom. » Cette précision n’a pas vraiment d’importance. J’insinue que j’ai un bateau mais je l’ai pas non plus avoué clairement.

Grey commence à m’interroger sur mon métier, comme ça, alors que je débarque à peine dans la salle où se trouve la piscine. Je panique aussitôt et sans trop me poser de questions, je me jette à l’eau dans le but de le renverser et de faire distraction. On peut dire que j’ai réussi un peu mon coup. J’amène la conversation à peu près là où bon me semble. « Une salade composée, ça se mange froid. » Je rétorque alors l’air de rien. C’est pas pour provoquer mon camarade que j’dis ça mais plus car je suis soudainement interdit par le ridicule de cette expression. Ça existe bien des plats qui se mangent froid. Faudra qu’on m’explique. En attendant, je sais d’ores et déjà que je peux me préparer à une réplique de la part du barbu. Pour l’instant, j’crains pas grand-chose vu que j’suis déjà à l’eau. A moins qu’il ne tente de me couler mais j’suis quand même un peu plus balaise que lui alors… ça serait à ses risques et périls. « Pourquoi des crocodiles ? Tout de suite ! » Je m’indigne en repensant à ce bon vieux dessin animé classique et l’crocodile dedans. Je revois parfaitement la scène où Peter Pan et ses acolytes crient « poisson pourri » tandis que l’animal tapote dans l’eau d’un air affamé. J’me dis d’ailleurs que je ressemble un peu plus au Capitaine Crochet qu’autre chose et c’est pas Grey qui dira le contraire visiblement. « C’est un humour de pirate. » Il ne peut donc tout naturellement pas comprendre. « T’as de l’imagination. » Je suis quasiment admiratif des noms qu’il a pu trouver. Franchement, ça en impose comme il dit. Hélas, c’était rien de tout ça et le bateau n’était même pas en mer à vrai dire. « Le Black Pearl. Je sais, c’est classique. C’est pas moi qui l’aie choisi. » Je n’étais qu’un pirate parmi tant d’autres après tout. En tous les cas, ça me rappelle des souvenirs de mon ancien boulot. Un travail qui n’a sans doute jamais été encore imaginé par quiconque. Faut dire que je cache plutôt bien mon jeu par rapport à ma vie d'avant.