Lloyd a un peu de mal à respirer, ce n'est pas inhabituel en de telles circonstances et malgré cette difficulté il n'a pas envie de bouger. Il fait près de cinquante degrés dans le hammam et l'humidité couvre sa peau d'une moiteur pas franchement désagréable. S'il n'a pas fréquenté le hammam ou le sauna plus tôt c'est uniquement parce qu'il n'aime pas l'idée d'être en si petite tenue sous sa serviette, Lloyd a depuis longtemps accepté le côté exhibitionniste des émissions de télé-réalité, il l'avait accepté bien avant de participer à Fake Lover. Il n'en demeure pas moins que l'idée qu'une caméra le filme dans le plus simple appareil pour satisfaire les envies perverses d'un technicien ou d'un opérateur en studio le dérange profondément. Aussi, en dehors de sa douche il évite au maximum de s'exposer. Mais dans un hammam les règles sont assez claires en dehors d'une serviette -qui est optionnelle à l'extérieur d'un jeu tout public- les vêtements sont plus ou moins proscrits c'est pour ça que bon gré mal gré, il a retiré sous-vêtement et compagnie sous le drap blanc. La vapeur d'eau suffit à créer un brouillard qui dissimulerait les détails d'un corps, mais ça n'en reste pas moins gênant de se dire que des millions de téléspectateurs pourraient lui reluquer les fesses s'il venait à perdre sa serviette. La porte s'ouvre et un courant d'air frais lui fait ouvrir les yeux. Une silhouette féminine entre et s'installe non loin de lui, faut dire que le hammam n'est pas non plus gigantesque. « Décline ton identité inconnue ! » fait-il dans une très moyenne imitation d'un méchant de film de série Z.

Je commence à prendre très à cœur mon rôle de sportive. C’est déjà la deuxième fois cette semaine que je me rends au SPA. Je vais peut-être songer à une reconversion vers une carrière de footballeuse si ça continue. Je n’apprécie toujours pas les effets de la sueur dégoulinant sur ma peau brûlante mais la dernière fois j’ai vraiment pu observer des effets conséquents sur mon corps. C’est un peu moins chargée que la dernière fois que je me rends dans la salle surchauffée, je me suis rendue compte qu’apporter mes tongs n’avait aucun intérêt et c’est bien plus pratique comme ça. Une fois de plus je me fais accueillir par un homme. Je reconnais sa voix mais lui visiblement ne m’a pas encore reconnue. Bénef. « Salvador. » Un petit mensonge ne fait pas de mal. J’approche de façon à ce que malgré la fumée présente dans la pièce Lloyd-Snö puisse clairement m’identifier. Aller mes talents d’actrice, c’est à vous. Je feinte la panique lorsque je vois le regard du candidat sur moi. « Non. Mince. Tu connais mon secret. Comment je vais faire ? Comment on va faire ? Non oublie. Oublie ce que je viens de dire. » On a les cheveux tous les deux un peu ondulés, un prénom en S, bref on ne fait qu’une seule et même personne mais là du coup c’est compliqué de le lui cacher. Tant pis. Je m’assois non loin de lui, croisant mes jambes tant qu’elles ne sont pas toutes glissantes. « Comme il n’est pas là je peux en profiter pour te dire à quel point tu es bien bâti. » Je pousse le vice jusqu’au regard de fille qui n’en peut plus. Il faut bien s’occuper, hein, j'en ai pour une heure.

La fille répond Salvador, au ton de sa voix il identifie Salomée mais celle-ci préfère se montrer pour lui confirmer les soupçons de Lloyd. Elle semble, fait semblant de, paniquer parce que Lloyd aurait été témoin d'un moment d'inattention où elle aurait dévoilé le pot-aux-roses. Son secret et là, posé sous les yeux de Snö, que faire ? Sortir la buzzer en courant ou attendre cinq minutes ? Personne d'autre n'a entendu alors il ne voit pas de raison de se précipiter, de glisser dans sa course et de tomber dans le coma. « L'imitation était bonne cela dit. Je pense qu'il te manque un peu de poil au jambes pour être vraiment dans le rôle mais ça demande un engagement de plusieurs années pour développer une telle pilosité. » répond-il enfin avec un petit sourire amusé. Ce n'est qu'une fois qu'elle s'est assise et qu'elle a commencé à lui faire des compliments sur son physique que Lloyd décide d'entrer dans son jeu. Faut dire, elle en fait des tonnes. « Et encore t'as pas vu ce qu'il y a sous la serviette... » lâche-t-il sans l'ombre d'un sourire. C'est pas Arthur qui se plaindrait de ce que Lloyd cache de son corps aux caméras. Puis, il se met à réfléchir à quoi lui fait penser la situation Salomédor. (Qui donne au choix Salomée d'or, Salomée dort ou Salaud Médor). Cette histoire lui rappelle quelque chose, un truc de son enfance. Il met quelques secondes à mettre le doigt sur ce que c'est exactement. Mais bientôt l'image du dessin animé japonais lui revient en tête. Claire comme de l'eau de roche pas encore vaporisée pour lui tenir chaud dans le hammam. « Salvador et toi vous êtes un peu comme Ranma ½ c'est ça ? Si on t'arrose d'eau froide tu deviens une fille et après avoir été exposée à la chaleur tu redeviens un mec ? » Ça n'explique pas comment ils font pour être ensemble sur le prime mais ça c'est un mystère pour un autre jour. « Ça fait pas trop mal quand ça repousse entre les jambes ? » demande-t-il en ayant beaucoup de mal pour garder son sérieux.

Je dois sérieusement m’ennuyer pour en arriver à un mensonge de cette envergure. J’ai l’impression d’être une enfant qui n’a rien d’autre à faire... ce qui est vrai pour la deuxième partie. Cependant Lloyd-Snö n’est pas crédule et je dois redoubler d’argument pour que ça ait l’air crédible pour le peu que ça puisse être. Je ne vais pas me démonter. « J’ai craqué avant de rentrer dans le jeu j’ai tout rasé. » Je m’assois dans un soupir témoignant de la dure épreuve que ça a pu être. Ma vie a été très compliquée à cause de cet homme, c’est indéniable. Dur dur la vie de créature de la nature. J’en profite pour lancer un compliment hyper lourd à l’avocat du nid, produit de mon ennui encore une fois. « Charmant. Ça met en appétit. » C’est ironique et ça doit s’entendre à mon intonation de blasée.  « Ranma ½ ? » Je répète pour me questionner moi-même à voix haute sur un intitulé qui me parle mais pour lequel je n’arrive pas à remettre dans son contexte. Le lien finit par se faire, c’était le genre de bouquins que lisait mon frère. « Ah ! Oui voilà c’est exactement ça. Du coup le hammam c’est un peu la feinte tu vois. Normalement c’était notre endroit secret de transformation mais là… bah c’est gênant du coup. » Ce mytho se profile bien, ça pourrait presque devenir crédible. Plus c’est gros plus ça passe. En parlant de ça… « Un mal de chien. Mais elle n’est pas très imposante donc c’est surmontable. » J’esquisse un sourire narquois au passage car, oui, ça me fait rire.

Salomée et Lloyd s'entendent bien, ils ne sont pas en permanence fourrés ensemble mais il n'y a pas eu entre eux d'épisode tendu comme ça peut-être le cas avec certaines autres personnes habitant dans le nid. Elle est plutôt agréable à côtoyer et son sens de l'humour est plutôt facile à suivre. Une occasion sur laquelle Lloyd saute sans aucune hésitation. « Shaaame. Personne n'aurait soupçonné ton secret, ils auraient pensé que tu étais la femme à barbe ou quelque chose. » explique-t-il le plus sérieusement du monde. Entrer dans l'aventure avec un faux secret à défendre est une bonne façon de mettre les gens sur des pistes assez éloignées de son secret. À moins qu'elle ne soit vraiment la femme à barbe et qu'elle soit en train de le mener sur une fausse piste. Le serpent se mord la queue et en parlant de queue la réaction sensiblement ironique de Salomée l'incite à insister. « C'est ce que mon mari dit toujours. » lâche-t-il avec un sourire malicieux, Arthur n'ayant probablement jamais dit ça. La réflexion de Salomée en réponse à son explication sur le manga de son enfance lui arrache un petit rire. « Parce que je suis là... hum... je peux fermer les yeux ou tourner le dos si tu veux. » dit-il en s'exécutant une seconde, une main sur les yeux et tournant le dos à Salomée avant de reprendre sa position initiale, témoin du non changement d'apparence. Pour ce qui est de la taille de l'attirail de Salvador... « Je m'en doutais un peu à vrai dire, la présence d'une forte pilosité n'aide pas à donner l'impression de longueur, ça la noie un peu dans la hauteur de poils tu vois ? » fait-il d'un air expert. Bah quoi ? Tout le monde sait que c'est son domaine non ?