Le rapport de l'indien avec le couloir déformant n'avait eu de cesse d'évoluer au fil des semaines. Au départ, il avait trouvé cet endroit étrange, mais néanmoins amusant, et s'était plus d'une fois éternisé devant ces drôles de miroirs, fasciné de s'y découvrir sous toutes sortes de formes plus improbables les unes que les autres. Mais la semaine passée, c'est un Naveen perturbé qui s'y était rendu, lui qui avait pris à cœur l'un des défis soumis aux candidats et avait improvisé une petite crise existentielle face à un Lloyd-Snö d'une patience vertueuse, et qui par ailleurs s'était montré de très bon conseil. Ainsi, si aujourd'hui il traversait ce couloir dans l'optique de se rendre jusqu'à sa chambre, l'indien était bien plus détendu qu'il y a quelques jours, et regardait à peine son reflet dans les glaces devant lesquelles il avançait. Ses yeux se posèrent néanmoins sur la silhouette de Cody, qu'il distingua après quelques secondes et de qui il ne tarda pas à s'approcher. « Namasté. » Il souffla, dans un sourire, lorsque son partenaire prit l'initiative de le saluer dans sa langue, ce qui le surprit dans la mesure où il s'était toujours adapté au langage de ses camarades mais n'avait jamais pensé qu'on lui parlerait un jour en hindi. « Tu maîtrisais un peu l'hindi avant d'arriver ici, ou tu m'as entendu le dire ? » Il le questionna alors, pensant qu'il était plus que probable qu'il l'ait entendu formuler ce mot auprès de quelqu'un, parce qu'il n'était pas rare que l'indien partage sa culture avec ses camarades, c'était une chose qu'il faisait avec le plus grand des plaisirs lorsqu'on manifestait de l'intérêt pour ce genre de choses. Se souvenant toutefois du défi dont avait écopé Cody – Rowan n'épargnait décidément personne – il plissa bientôt les yeux quand il entendit son partenaire rajouter quelques mots dans une langue qu'il crut identifier. « Et la suite, c'est … du français, c'est ça ? » Il n'était pas sûr de lui, néanmoins il croyait identifier cette langue au même titre qu'il lui avait semblé identifier la langue espagnole, la semaine passée, lorsqu'Enola lui avait chanté une chanson. « Excuse-moi, je ... je n'ai pas compris ta question. Ça ne fait malheureusement pas partie des langues avec lesquelles je me suis familiarisé, même si j'ai l'espoir de l'apprendre un jour. » Le français avait un coté glamour qui l'avait toujours fasciné, au même titre que beaucoup de langues européennes. Il était peu probable qu'il ait le temps d'apprendre une nouvelle langue – et que ça lui soit dans le fond d'une très grande utilité – mais c'était l'un de ses rêves, c'est certain. « Du coup, je ne sais pas comment on va pouvoir communiquer, toi et moi. » Il ajouta, d'un ton encore un peu plus pensif, avant qu'une idée ne lui traverse finalement l'esprit. « Tu veux que j'aille nous chercher de quoi écrire ? Je ne sais pas si tu as le droit de communiquer de cette façon, mais je sais qu'Enola le pouvait, elle, la semaine passée. » Et il avait pu constater que ça lui avait nettement facilité la tâche, notamment lorsqu'elle avait pris le temps de lui expliquer les coutumes maritales de l'Occident, choses qu'elle aurait sûrement eu du mal à caler sur le rythme d'une chanson.