Loup & Billie
MERCREDI 21 SEPTEMBRE FIN DE MATINÉE

Vous savez quoi? Je n'avais jamais mis les pieds dans une salle de sport de ma vie. C'est quoi une salle de sport? Hein? Bon, je courrais, ça oui, je savais courir. J'aimais courir, mais ça s'arrêtait là. La salle de sport, c'était un mystère pour moi. Un véritable mystère... Presque une chimère. Mais puisque j'étais dans le nid d'amour pour une semaine au moins, il fallait bien que je passe par la salle de sport, juste pour pouvoir dire qu'au moins une fois dans ma vie, j'avais fait du sport, dans une salle de sport. Beaucoup trop de sport. Je n'aimais pas le sport. Mais bon. J'étais en pleine observation de ses appareils étranges, me demandant quels utilités ils pouvaient bien avoir. Une moue perplexe, j'analysais ses robots qui permettait de... Faire du sport. Pfiou. j'avais bien essayé de tester l'un ou l'autre outil de travail, mais j'étais vite redescendue, ne trouvant pas le fonctionnement de ses curieux objets. J'étais en pleine exploration quand un jeune homme entra, l'air de rien et pris possession d'un de ses monstres. J'ouvrais la bouche et la refermais, le regardant, quelques part entre l'admiration et la crainte, parce que franchement, il fallait être taré pour avoir envie de faire ce genre de... Truc. Je devais avoir l'air d'une cruche. Ahh. Stresse. Je prenais place sur le même appareil en l’imitant. Bam. Mauvais mouvement retour à l'envoyeur, direction? Ma tête. Merci le sport. Je me relevais aussitôt, massant mon front, lançant des regards accusateurs à ce bonhomme. C'était de sa faute, il n'avait pas besoin d'étaler son savoir et de faire croire que ces machines du diable était accessible à tous.

Mis en condition, j'avais décidé de me rendre à la salle de sport afin d'y faire un peu d'exercices. Non pas que j'aimais beaucoup ça, faire de la gonflette, mais j'avais un affreux besoin de distraction et la mer était peut-être un peu trop agitée pour que j'aille y nager. Il fallait que je me dépense. Je commençais à ressentir l'engourdissement dans mes membres à force de ne rien foutre de mes journées ni de mes soirées. Ainsi, après avoir enfilé un short de sport et un marcel, je poussai la porte de la pièce, ne me doutant pas une seule seconde que quelqu'un pourrait déjà s'y trouver. La plupart des candidats ne semblaient pas réellement sportifs mais soit, c'était là tous les enjeux de la cohabitation que de partager les machines avec les autres. Je ne prie pas la peine de saluer Billie, préférant bailler longuement sans réel gêne ni signe de politesse, et m'installai directement sur l'une des machines les plus sophistiquées des lieux. Je n'y comprenais pas grand chose, avec tous ces guidons qui se battaient en duel, mais réussis finalement à en saisir le principe pour m'installer contre le dossier de l'appareil, allongé sur le dos. Un, deux, trois mouvements, je tâchais de respirer au mieux et sentais déjà mes muscles qui commençaient à travailler. C'était sans compter sur la cruche à mes côtés et ses maladresses. J'étais un peu excédé qu'elle ne puisse comprendre seule comment utiliser une telle machine, c'était pourtant un jeu d'enfant. Relevant la tête, sourcils froncés, mon regard croisa le sien pour finalement le soutenir. « Plutôt que de me regarder comme une gamine effarouchée, remonte dessus et réessaye encore une fois, c'est pourtant pas compliqué! » Je lui fis un signe quelque peu autoritaire du menton. Si elle voulait que je l'aide, c'était maintenant ou jamais.

Comment il me parlait lui. Je fronçais les sourcils. J'étais franchement frustrée de ne pas y être parvenue et ce genre de réflexion était loin de me venir en aide. Un soupire. Je passais nerveusement une main dans ma chevelure brune. Battre à la main des blanc d’œufs en neige, ça c'est compliqué. Mais... Ce truc, c'est pas difficile, c'est pas compliqué, c'est juste... Ridicule. Oui, c'était ridicule. Je n'aurais jamais du essayer de me mettre à une connerie pareil. J'étais franchement déçue, de moi même, pas de lui, parce qu'au fond, je n'attendais rien de lui, je ne le connaissais pas. Enfin, non, ce serait mentir, j'aurais voulu qu'il m'apprécie, parce que j'étais comme cela, j'aimais être appréciée, même si moi, je ne les aimais pas particulièrement ou que je ne les connaissais tout simplement pas. Mais lui, il ne m'aimait pas. Je le sentais. Il avait cet agacement dans la voix. J'hésitais encore. Parce qu'il avait été autoritaire. j'avançais d'un pas, puis je reculais, mes doigts se nouant nerveusement. Ce n'était pourtant pas très compliqué. Je fermais les paupières pris une inspiration profonde. tout allait bien se passer. Tout allait parfaitement bien se passer. Il le fallait. Je m'installais derrière l'appareil et recommençais en grimaçant. Miracle, ça fonctionne. Aha. C'est pas compliqué. C'est ridicule, mais ce n'est pas compliqué. Un sourire satisfait, je me tournais vers le jeune homme, particulièrement fière de la prouesse que j'étais en train d'accomplir. Concentrée sur ce que je faisais, je ne parlais pas. Hm. C'était drôle, mais une fois, une fois seulement, je préférais courir, en plus, sur la plage, cela rend l'effort plus important, à cause du sable. Tu t’appelles comment Monsieur Bodybuilding? Oui, j'avais déjà oublié.

« Cette chose peut t'aider à brûler les calories des blancs d’œufs en question, ne la crédites pas de ridicule parce que tu ne te sens pas capable de l'utiliser. C'est stupide, remonte dessus. » Je ne cachais pas l'impatience dont je faisais preuve à l'instant. Lui ordonner de remonter sur cette machine était une façon de l'aider et de peut-être apprendre quelque chose d'intéressant dans sa journée, je ne cherchais en aucun cas à me montrer sympathique dans ma démarche, ce n'était pas mon but que de m'attirer les affinités de la jeune femme. Non pas que je ne l'appréciais pas, mais les comportements défaitistes avaient le don de me faire tiquer, désagréablement. Je sentais néanmoins la certaine nervosité de la candidate, notamment dans ses doigts qu'elle ne cessait de nouer les uns sur les autres. Arquant un sourcil face à son étrange réaction, je pris la peine de me lever pour me poster à côté de l'engin. « Tu vas me dire que tu as peur de cette machine? » Elle ne perdit ainsi pas son temps pour s'exécuter, s'installant sur cette dernière pour finalement en comprendre le mécanisme en un éclair. Comme quoi, il suffisait d'un peu de persévérance pour y parvenir. Je levai les yeux au plafond avant de m’asseoir calmement sur un banc de musculation, nullement touché par l'excitation de la demoiselle. Oui, elle était objectivement adorable, mais je n'étais pas très sensible à cet aspect, surtout ce matin. « Non, ce n'est pas compliqué... » Renchéris-je simplement avant de sourire ironiquement, sans que je ne puisse le contrôler. Elle me demanda alors de me présenter une nouvelle fois, par un petit surnom qui me fit une fois de plus lever les yeux au plafond. Ce n'était même pas drôle. « Attends, tu vas me dire que même au bout de cinq jours dans cette maison, tu n'as toujours pas été fichu de retenir mon prénom? Et pourtant tu te permets de faire des remarques sur mes muscles. Tu vas finir pas réellement me contrarier, pour la peine je ne te dirais rien, Billie. » Répondis-je d'une voix calme tout en fixant l'insolente sans ciller.

Tu sais que je brulerais plus de calorie en allant me défouler sur la plage? Non, mais de toute façon, j'allais bien vite quitter cette machine du diable pour retrouver mes petites séances habituelles et cent pour cent naturelles. C'était juste une expérience. Avant que je puisse descendre de la machine, Super-Mâle s'emballait et décidait de ne plus m'adresser la parole parce que, après seulement quelques jours, je ne me souvenais plus de son prénom. J'ouvrais la bouche et la refermais aussitôt, stoppant net toute activité pour le toiser, dans l'incompréhension totale. Hm. Ce n'était pas comme si nous nous étions réellement parler auparavant... Il était réellement vexé de ce surnom débile. Pfiou. Mon sourire s'était évanouie dans la nature, rongé par mon stresse. J'étais mal à l'aise, je n'osais même plus le regarder, triturant nerveusement mes doigts. Je... Hm. Désolée. VRAIMENT désolée. En plus, lui, il connaissait mon prénom, lui, il se souvenait de mon prénom, lui, il se souvenait de moi. Bouhou. La honte. Je me relevais d'ailleurs, après quelques instants de silence, un silence lourd et oppressant. Je relevais légèrement la frimousse vers lui, les joues rosies par la gêne que la situation provoquait. Je n'osais même pas sourire, je me contentais de le regarder, tentant de voir les dégats. On ne sait jamais qu'il ne m'en veille pas du tout et qu'il se paye juste ma tête. Hm. Ce n'était absolument pas drôle, mais bon, on ne savait jamais...