Wendy s'était retirée assez rapidement de la foule du prime, jugeant que toute cette petite réunion l'étouffait beaucoup trop. Il faut dire que tout ceci n'était plus trop de son âge. Les sourires, les bisous tout ça, non merci. Elle préférait rester seule que de bavarder avec quelques autres candidats. Ce n'était que le début, il fallait qu'elle s'habitue à vivre en communauté. Trente candidats. C'était énorme. Mais tellement excitant à la fois. Heureusement qu'il y avait son frère, sinon elle se serait sentie perdue. Surtout entourée de tout ces abrutis. Soit. Elle s'était donc délicatement éclipsée - non sans faire parler d'elle, surtout auprès de la jeune Faye - pour visiter le lieu qui, gentiment, l'accueillait. Même si le cadre était magnifique, Paris lui manquait, et lui manquerait toujours. Quoi qu'il en soit, elle se retrouvait là, devant cette porte, par je ne sais quel miracle, se demandant bien ce que cet objet pouvait bien faire ici. Elle écarquilla un moment les yeux, la fatigue sans doutes, avant d'entendre des bruits de pas non loin d'elle. Elle tourna la tête vers le son. Tiens, une blonde. Elle l'avait remarquée, mais sans y accorder plus d'importance. Une fois qu'elle fut à une assez bonne distance pour pouvoir entendre ce que la française avait à dire, elle lâcha : « J'ai la flemme de l'ouvrir. Ouvre-la pour moi. » Elle se rogna la lèvre supérieure avant de tourner à nouveau sa tête vers la blonde et de sourire. Bordel, cette porte l'intriguait. Pourtant ce n'était.. qu'une porte. Une simple porte, comme on en voit tous les jours. Mais cette porte là était.. magique. Il y avait peut-être des elfes, dedans. Ou bien Faye, mais si c'était le cas, alors elle ne l'ouvrirait pas, cette porte. Mais que y'avait il à l'intérieur ? Il se suffisait d'appuyer sa main sur la poignée, et basta. Mais comme elle venait de le dire à Joanee - dont elle ne le connaissait toujours pas le nom -, elle avait terriblement la flemme de le faire. Elle se contenta donc de soupirer, avant de s'asseoir par terre. Ces talons lui avaient littéralement tués les pieds. Que c'était dur d'être une fille, de se faire belle chaque jour. Ses pieds pouvaient en témoigner. « Je suis sûre qu'on voit ma culotte. » Elle parlait peut-être toute seule, à moins que sa colocataire l'écoutait. Qui sait, peut-être qu'elle daignerait répondre, histoire que Wendy ne se sente moins seule. Que le temps était long. Elle s'ennuyait déjà. Ridicule.

Deux filles s'étaient déjà engueulées, et lui avaient soudainement rappelé ses années de collège, où les pisseuses se tiraient les cheveux, et où les moins hystériques se contentaient de « faire tourner les rumeurs ». Elle comprenait toujours plus pourquoi ses amis avaient toujours été masculins: les filles, qu'elle plaie. Avec son physique ultra fin et son visage d'enfant, elle passait souvent pour une demoiselle en détresse, ce qui avait ses avantages lorsqu'on sortait de nuit avec des hommes imposants autour de soi, beaucoup moins lorsqu'on l'agaçait assez pour qu'elle décroche une droite bien placée. Heureusement pour elle, son métier lui avait appris à garder son sang froid et son calme, sa violence pour elle. Elle avait laissé de côté les présentations pour se servir un jus de fruit dans le frigo, qu'elle vida d'un trait sans refermer la porte, déposa son verre vide dans l'évier. Ah, la vaisselle allait encore être un grande question existentielle, et, étrangement, elle se trouverait toujours aux chiottes quand le débat s'ouvrirait, c'était certain. Elle se redirigea vers la terrasse, en quête d'Alix, histoire de faire plus ample connaissance, mais un petit tas posé face à la porte dite « interdite » l'interpella. Wendy, dont elle avait déjà entendu le nom, vous n'avez pas à savoir où ni quand. Sûrement la seule fille de cette émission qui lui avait parue moins niaise que les autres, malgré ses airs de princesse attardée un peu ridicules, elle lui avait trouvé la langue bien pendue, et puis, comment en vouloir à quelqu'un qui colle son chewing-gum dans les cheveux d'une fille? « J'ai la flemme de l'ouvrir. Ouvre-la pour moi. » Elle s'arrêta, penchant sa tête sur le côté, sourcils haussés. Chouette, une fille unique un peu trop gâtée, un peu trop aimée. Elle s'approcha d'elle et s'accroupit légèrement, du moins assez pour que son visage lui soit parfaitement visible. « Merde alors. Toi tu as la flemme, et moi j'ai aucune envie de t'obéir. » Elle se redressa. « On dirait bien qu'il va falloir appeler quelqu'un d'autre. » Si l'envie de voir Wendy piquer une crise et se rouler par terre en tapant des mains et des pieds était extrêmement tentante, l'idée de soudoyer une abrutie et l'inciter à ouvrir la porte à sa place, et à celle de Wendy l'était encore plus. Elle avait d'ailleurs aperçu une fille, devant le buffet, qui avait le profil parfait de la niaise influençable. Pendant qu'elle restée plantée là à tenter de se rappeler le visage de cette conne, la voix de Wendy retentit une seconde fois dans la pénombre. « Je suis sûre qu'on voit ma culotte. » Une brune là, avec un accent pas possible... une robe à chier et des talons trop fins pour ses mollets plutôt épais, une erreur de style qui riait au moindre bonjour, putain, c'était quoi son prénom? Elle les retenait pourtant tous, d'habitude. Elle se mordit la lèvre tout en fouillant sa mémoire. L'envie d'ouvrir la porte s'était emparée d'elle pour ne plus la lâcher. Elle glissa à Wendy sans vraiment y penser « bien vu, Sherlock », dirigeant son regard vers la foule toujours blablatante – la fille y était peut-être, et il suffirait alors de l'appeler, de lui expliquer que Cupidon vient de nous donner une mission: élire la seule candidate digne d'ouvrir la porte, et le tour était joué.

Johanna, Joan, ou Joanny peut-être. Quelque soit son prénom, elle venait de rejoindre la française qui était étendue comme une illuminée, par terre. C'était totalement sur-réaliste. Et surprenant pour une jeune fille de sa classe. Mais au diable les préjugés, être assise sur de l'herbe n'allait pas la tuer. Ni tuer qui que ce soit, d'ailleurs. C'est donc avec un sourire d'enfant qu'elle observait la blonde s'accroupir face à elle, lui sifflant à la tronche une phrase qui prouvait bien, qu'elle, on ne pouvait pas en faire ce que l'on en voulait. Tant mieux, après tout. Malheureusement -ou heureusement?- pour elle, Wendy avait dit ça pour entamer la conversation, rien de plus. Même si elle était plus que trouillarde, elle n'aurait pas demander à Joanee qui avait l'air adorable, d'ouvrir cette porte qui lui promettait quelques surprises. Et puis cela aurait fait trop 'loup qui s'attaque à la brebis'. Enfin Joanee ressemblait de moins en moins à une brebis, mais pourquoi pas. « Au pire.. ouais, t'as raison. » Mince, elle venait de perdre sa voix. Joanee allait donc devoir crier à l'autre bout de la plage pour qu'une personne ne ramène son cul et ouvre cette p*tain de porte qui l'intriguait tant. Pendant ce temps là la blondasse d'à côté continuait de se tortiller dans tout les sens. Ce n'était visiblement pas la porte qui l'intriguait, elle. Mais quoi d'autre? Ou qui. Trop- curieuse, la jeune femme s'empressa de lui demander. « Qu'est-ce qui t'attire autant là-bas, blondie? » se contenta t-elle de demander, sans y ajouter plus de questions. La suite se voulait beaucoup plus détendue. Enfin, vite fait. Wendy se demandait d'ailleurs comment sa camarade avait pu voir sa culotte dans le noir. Et, surtout, comment avait-elle pu voir sa culotte.. inexistante. « Ah ah, ça tombe bien, j'en ai pas. » Signe que la jeune femme ne l'écoutait pas. Soit. Elle referma ses jambes, qui sait, s'il n'y avait pas des caméras cachées dans les plantes, ha. Elle n'allait pas pleurer, non, très clairement, elle s'en fichait. Elle ne la connaissait ni d'Eve ni d'Adam et ce n'était pas quelque paroles en l'air qui allait la vexer, loin de là. Passons. « Tu t'appelles comment, en fait ? » Il fallait au moins qu'elle sache son prénom. Elle tapota, ensuite, et légèrement, la place à côté de la sienne avec sa main, l'invitant à s'asseoir. Histoire de papoter, quoi.

Spoiler:

Le regard de Joan se perdait parmi la foule, cherchant avidement la brebis, galeuse ou pas, on s'en fout, qui allait ouvrir la porte à leur place, tout en s'avançant vers Wendy. Ce qui l'attirait tant derrière cette porte? L'argent. Elle haussa un sourcil. « Désobéir, évidemment ». Elle entama un mouvement pour s'assoir – du côté opposé à celui que Wendy avait désigné, ça va de soi – avant de se stopper net en plein mouvement, le regard fixé sur la porte. C'était trop bête, trop facile, et la réponse lui était venue directement à l'esprit. Elle finit par se poser à ses côtés, et tourna son regard vers elle, lentement, oubliant totalement sa question. Cupidon ne pouvait pas être aussi débile... « Attends, maintenant que j'y pense... Tu trouves pas que ce serait stupide de faire une « porte interdite » et de punir le premier abruti qui l'ouvrira malgré la contre-indication? C'est pile le genre de truc qui peut être récompensé, non? Désobéir fait partie du jeu, sinon, c'est pas drôle. » Pensive, elle préféra mettre un terme définitif à cette réflexion presque stérile, et haussa les épaules. « De toute façon, je suis nominée », et d'un coup de pied, elle ouvrit la porte en grand. À l'intérieur: noir et rien. Pourtant, elle et Wendy s'étaient retirées légèrement en arrière – sait-on jamais, ce serait quand même con comme mort, assassinée par la porte interdite du nid d'amour. Elle s'attendait à ce que la voix de Cupidon résonne dans toute la baraque, mais que dalle. Peut-être une bombe à retardement? Un virus caché? Elle se tourna vers Wendy avec un sourire ironique. « Joanee, mais appelle moi Joan, c'est plus court et moins moche. » Tant qu'à attendre la sentence, autant le faire en papotant, non? Elle n'avait jamais aimé attendre passivement.

TERMINE.