pour Emrys.

Castiell se laissa choir dans la cuisine américaine qu’il n’avait pas encore eu l’occasion d’essayer. Non, n’y croyez pas, l’anglais n’était pas un de ces hommes débrouillards capables de préparer de bons petits plats. Au contraire même. C’était une vraie calamité en cuisine. En tout cas, avec le temps, il a su s’habituer à sa propre nourriture, et tant qu’il ne l’a fait pas gouté à quelqu’un d’autre, tout se passera bien. Depuis le début de l’aventure, Castiell mangeait ce que préparait des candidats, et se contentait d’aider au rangement et au lavage de la salle. C’était pour le bien des autres. Il monta sur un comptoir de la cuisine, prêt à en découdre avec les aliments qu’il avait sorti, et il avait saisit une boite pour lire son étiquette, histoire d’être guidée dans ce qu’il allait faire. Un visage familier passa par là, et Castiell rigola en coinçant le corps mince d’Emrys entre ses jambes pour la ramener contre lui.

Bonjour, femme, dit-il en souriant malicieusement. Tu as bien dormi?

Hier soir, les deux jeunes gens avaient discutés tard alors qu’Emrys occupait son lit. Elle s’était endormie et Castiell, prit d’une éternelle insomnie, l’avait abandonné dans ses draps pour la laisser tranquille.

J'ouvrais doucement les yeux après avoir passé les précédentes heures à dormir, laissant l'une de mes mains glisser sur l'autre côté du lit.. apparemment, le candidat avec qui j'avais partagé ma nuit était déjà debout, j'étais loin d'en être étonnée. J'immergeais tranquillement, m'étirant, baillant également, avant de me lever. En gentille candidate, je fis le lit, remettant tout en ordre avant de voler jusqu'à la salle de bain. Je pris rapidement une douche, à l'eau froide, autant pour le fait que ça m'aidait à me réveiller, vraiment, et aussi pour les autres, oui, je leur laisse l'eau chaude, je suis trop généreuse. Enfin. Une fois lavée, je partais enfiler mon short en jean, qui donnait l'impression d'être vieux comme le monde vu combien il était usé, un débardeur noir, et j'attrapais un gilet au vol, encore glacée par la température de l'eau avec laquelle je m'étais douchée. Suite à ça, j'allais dans la cuisine, retrouvant alors Castiell, qui m'attrapa avec ses jambes. « Bonjour, homme. » Je le saluais de la même façon qu'il l'avait fait, lui renvoyant son sourire également. « Ouaip, mais je suis triste, tu t'étais déjà envolé quand je me suis réveillée.. » répondais-je alors, mimant une moue triste.

Castiell sourit un peu plus en voyant le sourire radieux qu’affichait Emrys. Si elle lui avait dit qu’elle n’avait pas bien dormi, l’anglais ne l’aurait pas cru. Ses traits étaient détendus et ses yeux pétillants, alors que lui, avait le visage marqué par la fatigue. Des cernes lui tombaient presque sous les yeux.

Désolé, mais j’ai préféré te laisser ronfler en paix.

Un rire bref lui échappa alors qu’il déposait un baiser sur la joue de sa camarade. Bien sur, il plaisantait. Bien qu’elle ait tendance à faire des bonds dans le lit, elle restait au moins silencieuse. Au moins.

Mais si tu as mieux dormi que moi, c'est ce qui compte.

Castiell qui avait lâché la boite de farine de tout-à-l'heure pour enlacer son amie, ressaisit le pot en le flanquant dans les mains de la belle blonde.

Sais-tu faire des pancakes, jolie fille? demanda-t-il, un sourire narquois au coin des lèvres.

« Han, c'est trop gentil ! » Je pris alors un air faussement flattée. « Sérieusement. Je ronfle ? » demandais-je, à moitié inquiète. On ne m'avait encore dit ça, et je ne savais pas si je devais le prendre au sérieux ou si pas du tout. Enfin, si c'était le cas, il est certain que j'aurais plutôt honte.. « Des pancakes ? ouais, je dois pouvoir savoir faire ça.. » Je me reculais, posant le paquet de farine qu'il venait de me donner sur le plan de travail. Je n'étais pas une excellente cuisinière, voir pas du tout, mais je pensais m'en sortir, tant qu'il ne s'agissait que de pancakes. Suite à ça, je sortais les ingrédients qui me semblait bon d'utiliser pour suivre une recette comme celle-ci. Levure, sucre, beurre, huile. Et les déposais près de la farine. « Tu sors les oeufs mon bel anglais ? » Je me tournais vers lui en souriant, allant attraper un récipient.

Castiell était d'humeur légère aujourd'hui. De plus, il avait l'impression que plus les jours passaient, plus sa relation à lui et à Emrys ne faisait que se renforcer. Il n'y avait pas eu un seul point d'ombre depuis l'incident du second prime, et l'anglais avait fait de nombreux efforts pour rester agréable tout le temps. Il voyait bien qu'Emrys surveillait ses propos et ses gestes depuis qu'il s'était montré étrange dans son comportement, avec elle. Alors il essayait de se montrer confiant et à l'aise avec elle.

Je te taquine, rigola l'anglais en tapotant sur le bout du nez de sa camarade. Merci, la dernière fois que j'en ai mangé remonte à...

Castiell fit une pause, la tête dans le frigo, avant de se redresser avec la boîte d'oeufs entre les mains. Il se retourna et ferma la porte du frigidaire avec le pied.

...très longtemps, finit-il en posant ce qu'avait demandé Emrys. C'est ma mère qui m'en faisait, si je me souviens bien. Alors ça date.

Il avait essayé d'adopter un ton neutre mais il semblait plus sec qu'il ne l'aurait voulu.

« Alors je vais essayer de te faire un truc un peu près potable, histoire que tes retrouvailles avec les pancakes se passent.. tu vois.. pas trop mal. » répliquais-je, souriant de nouveau. Si il n'en avait pas mangé depuis longtemps, moi, je ne me souvenais même pas en avoir fait un jour. Ma coloc' elle, avait l'habitude d'en cuisiner assez régulièrement, et j'espérais réussir à me souvenir de la façon dont elle les faisait. J'ouvrais alors la boîte à oeufs, en attrapait trois, puis les cassais, un à un, pour verser leur contenu, jaune plus blanc, dans une sorte de saladier. Je farfouillais dans les tiroirs, espérant trouver un fouet quelque part. Je soupirais en allant vers le dernier recoin que je n'avais pas encore parcouru, ayant la sordide impression qu'il n'y en aurait pas non plus ici, et, miracle ! je m'étais donc trompée. Enfin, j'attrapais l'instrument, et commençais à battre gentiment les oeufs. Puis, plat en mains, j'allais jusqu'à ce cher Castiell et lui léguai. « A ton tour ! » Je me retournais alors, attrapant la bouteille de lait ainsi qu'un verre mesureur dans lequel je versais un peu du contenu de la bouteille, dans les 20cl environ. « Tu me feras un gâteau d'anniversaire jeudi ? » demandais-je alors, comme une petite fille, les yeux pétillants.

Jusqu'à maintenant, Castiell n'avait pas beaucoup parlé de lui, et de sa vie à l'extérieur du nid d'amour. Personne ne savait vraiment grand chose sur lui, et pas même Emrys, qui pourtant était sa plus fidèle alliée. Au delà du fait qu'il n'avait pas énormément de trucs à dire sur lui, c'était surtout qu'il ne pouvait pas. C'était une sorte de blocage chez lui, une barrière. Alors, quand il mentionna sa mère et cette minuscule info sur lui, il avait semblé être irrité, ou presque. Du moins, si Emrys s'en était rendue compte, elle le cachait bien. Un petit sourire contrit déforma ses lèvres quand il saisit le plat pour battre les oeufs et mettre la main à la pâte. Cependant, il se stoppa et releva la tête, comme s'il avait mal entendu :

C'est ton anniversaire, jeudi?

La question avait fusée toute seule et paraissait un peu bête sur le coup. Non seulement elle ne lui avait rien dit, mais cependant, il ne lui avait pas non plus demandé quand cet événement se passait. L'anglais se reprit et hocha la tête.

Sincèrement, je vais soudoyer une fille du nid pour le faire, car ca m'embêterait de t'empoisonner le jour de tes... 26 ans, c'est ça?

« Ouaip ! » lâchais-je, toute fière. Si il y avait bien un truc que je fêtais chaque années sans fautes, c'était bien mon anniversaire. Bon évidemment, quand je parlais de le fêter, ça n'était pas pour faire un genre de goûter anniversaire ou une pyjama party, j'ai clairement passé l'âge. Mais rare étaient les fois, mieux, je n'avais jamais passé le six octobre à ne rien faire. Enfin, je me tournais vers Castiell lorsqu'il déclara qu'il ne comptait pas m'empoisonner, et qu'à choisir il demanderait plutôt à une autre candidate de préparer ça pour lui, d'ailleurs, il hésita sur mon âge, je souriais. « C'est ça, 26. Je te rattrape, fais attention ! » Aucunes chances que j'arrive un jour à le dépasser, étant donné qu'il était plus âgé et que devenir plus âgé que quelqu'un alors qu'il est déjà plus âgé.. ok.. trop de raisonnements tue le raisonnement.. Je continuais de préparer la pâte pour faire ces fameux pancakes avant de reprendre. « Si le gâteau paraît trop compliqué, je serai certainement pas contre un câlin tu sais. » Je ne m'étais pas tournée vers lui en lâchant ça, à la place, j'avais préféré plonger le bout de mon doigt dans le plat, goûtant, en quelques sortes, ce qui prenait peu à peu forme dans le saladier. Je grimaçais, ça m'apprendra à vouloir faire la maligne.. « Bon ok, sous cette forme-là c'est vraiment.. comment dirais-je.. immonde ! »