ft. céleste

Je crois que mon estomac m'a été arraché durant la nuit. Mal à coeur d'avoir passé la nuit entouré de trente-cinq inconnus ou les tripes simplement en vrac, j'ai juste la dalle de ma vie. D'un naturel matinale, je suis bien entendu levé alors qu'il n'y a pas âme qui vive dans le château. La démarque vacillante et n'ayant même pas pris la peine d'enfiler un haut, j'enjambe un mec qui dort là, à même la moquette du salon. Ridicule, parfaitement humiliant. Je m'arrête, me retiens de lui foutre un coup de pied dans les côtes pour lui faire comprendre qu'il se tape l'affiche devant des millions de téléspectateurs, me rétracte: j'ai tout sauf la la force de monter sur mes grands chevaux à cette heure-là. Et puis, plus fun est-il de le laisser baver sur le sol. Je ricane, le contourne finalement et m'aventure dans l'immense cuisine dénué de toute trace de bouffe. J'ouvre le frigo, fouille les placards, scrute les tiroirs: la prod a manifestement restreint le bugjet bouffe cette année. "Lol?" J'hallucine. Pas un gramme de nourriture, c'est juste tellement pas logique... Une pancarte attire mon attention. Cellier. J'n'ai absolument aucune idée de ce que peut être un cellier, mais peu importe, je pousse lentement la porte susnommée: et là, Ali Baba de bouffe. Bordel, j'ai jamais vu ça. Irrémédiablement, mes yeux se calent sur mon péché le plus terrible, mon camarade cacao. Avide de sucre, je chope l'unique tablette chocolat caramel et en arrache l'alu que je jette par-dessus mon épaule. Je n'ai pas le temps de porter un carré à mes lèvres qu'une meuf au minois plutôt plaisant pointe le bout de son nez: dans un geste protecteur, je ramène ma tablette contre mon torse. Et j'ai l'air terriblement con. "C'est mort, le chocolat-caramel est à moi, t'avais qu'à t'pointer avant."

Me lever tôt alors que j'ai le droit de dormir, ça ne me ressemble pas. Non. Je dormirai milles ans si jamais on me l'autorisait. Pourtant, ce matin, le faim avait creusé un trou dans mon estomac. C'était elle qui me poussait à me lever. Exaspéré d'une telle situation, j'avais juste envie de me débarrasser de cette faim, envie de lui dire de repasser plus tard. Elle serait avec un peu de chance mieux venue qu'en ce moment même ...La sale bête n'en faisait qu'à sa tête. Il était tôt, trop tôt et je râlais déjà. Quittant mon lit, je rejoignis directement le cellier. Celui-là, je l'avais cerné. C'était une des seules pièce que j'avais complètement localisée. Ma survie en dépendait après tout. Avec la grâce d'un chat, je descendis en bas en veillant à ne pas réveiller les autres que je jalousais. Eux, au moins, ils dormaient. Poussant la porte du fameux cellier, je fût étonnée de voir qu'un candidat s'y trouvait déjà. Aucune idée de son prénom. Je ne sais rien de lui et me rappelle à peine avoir vu sa tête hier soir. ça, je le dis pas, j'veux pas qu'il se vexe. D'ailleurs mon regard dériva rapidement vers la tablette de chocolat qu'il tenait serrée contre son torse. Miam. Alors là, il allait être obligé de partager. Sinon ... Je le mords. Je suis capable de tout pour un bout de chocolat. "C'est mort, le chocolat-caramel est à moi, t'avais qu'à t'pointer avant." Je grimaçai, ma main appuyé sur mon ventre tentait de combler le vide de celui-ci. « Tu en donnerais même pas un bout à une fille qui adore ce chocolat. Aller, ça va être drôle. Tu me donnes un carré de chocolat et on discute en même temps. On deviendra ami, on s'adorera, on aura le droit de coucher ensemble quand on se fait chier. Tu vois, ça serait vachement chouette comme amitié.» J'étais pas certaine de ma petite théorie. Un sourire ancré sur mon visage tentait de faire flancher mon colocataire. « tout ça grâce à un bout de chocolat. » concluais-je finalement.

Je me fige une minute, les membres crispés et les yeux grands ouverts. Mes doigts lâchent même le carreau de chocolat initiallement destiné à être calé entre mes lèvres; cette illustre inconnue dont je ne me souviens même pas vient-elle bel et bien de me parler ouvertement de sexe? On deviendra ami, on s'adorera, on aura le droit de coucher ensemble quand on se fait chier. Tu vois, ça serait vachement chouette comme amitié. Putain, non, impossible, je dois rêver. Chez moi, le cul, c'est tout ce qu'il y a de plus tabou: non pas que je sois encore puceau jusqu'à la moëlle, seulement, j'évite de parler de ce que j'ai au-dessous de la ceinture et de ce que je sais en faire, question de principe. Bouche ouverte, l'air benêt, j'ai du mal à me reconnecter avec la réalité. "...Tu t'fous d'ma gueule là, c'est ça, hein?" J'inspire un grand coup, me ressaisis: il n'y a pas mort d'homme, certes, mais il n'empêche que... merde, c'est tellement peu classieux. "Non, sérieux, j'espère vraiment qu'tu t'fous d'moi en m'disant ça... PARCE QUE J'TE JURE QU'CA VA PAS L'FAIRE DU TOUT SINON!" Je gueule, mais c'est clairement involontaire, elle m'a juste mis hors de moi. Je me calme, me pince l'arête du nez. "T'sais quoi? Plutôt crever que t'donner ne s'raut-ce qu'un quart de carreau." Et histoire de la narguer un peu plus, je m'enfourne une barre entière dans la bouche, la fixant d'un air satisfait. Elle a un visage connement angélique quand même, cette jolie meuf sans nom.

Vu la tête qu'il tire, il a pas l'air d'apprécier mon humour. Il n'était pas comme tous les garçons que je rencontrais en temps normal, eux, ils se seraient jeté sur l'occasion mais tant pis. "...Tu t'fous d'ma gueule là, c'est ça, hein?" Un sourire innocent décida de se faire sa place sur mon visage, cherchant à apaiser les choses. Je ne pensais pas une seconde qu'il réagirait de la sorte. « C'était de l'humour ... Rien que de l'humour. Je sais, j'suis pas bonne pour faire de l'humour mais ça, je pensais que ça marcherait. » Là, j'étais sincère. Je voulais juste tenter de me faire un ami, la prochaine fois je devrai revoir ma méthode. Je replaçais mes mèches de cheveux qui avaient tendance à tomber trop souvent sur mon visage. J'suis pas une traînée . J'ai jamais couché avec quelqu'un que je n'aimais pas. Mon problème, je tombe amoureuse plus vite que l'éclair et ça s'en va aussi vite que c'est venu. "Non, sérieux, j'espère vraiment qu'tu t'fous d'moi en m'disant ça... PARCE QUE J'TE JURE QU'CA VA PAS L'FAIRE DU TOUT SINON!" Je me permettais alors d'avancer d'avantage et de poser ma main sur son épaule, prête à me faire repoussée fût l'humeur massacrante de celui-ci. « Calme toi hein. J'suis pas là pour coucher avec toi. J'ai une faim de loup et c'est tout. » et alors que je tentais de calmer la situation, je l'entendis me dire qu'il ne partagerait pas et je le vis aussi s'empiffrer de la barre de chocolat qu'il avait en main avant. L'enfoiré. « Si c'est comme ça que tu veux la jouer ... Tant pis pour toi. J'voulais être sympa, qu'on apprenne à se connaître. Je t'aurais dit : Au fait, moi c'est Céleste, tu sais comme la voûte. Toi tu m'aurais dit : Salut, moi c'est Antoine, Anatole, Grégoire ou Paul j'en sais rien et tout aurait été au mieux. » J'allais attraper un paquet de m&ns sur une étagère, l'ouvrit et mit une petite boule bleue dans ma bouche. Une fois que je l'eu mangé mon regard se porta une nouvel fois sur ce candidat qui ne manquait pas d'intérêt. Je ne l'admettais pas, mais j'étais curieuse de sa personne. Peu habituée à ce genre de bonhomme. « J'vais juste me contenter de manger ça en silence. »

Le chocolat a toujours eu un côté aphrodisiaque-gentillesse sur moi: je m'adoucie à la seconde où il effleure mes lèvres. Compréhensible était donc le fait que ma mère me drogue au cacao quand j'étais gosse et que j'y sois désormais accro. Pire qu'un fin gourmet, je ne bouffe rien si ce ne sont des masses de viandes et de chocolats en tout genre. Même les dégueulasses à la liqueur et au thé vert, ceux que vous croquez et que vous recrachez l'instant d'après. Et là, en l'occurence, le cacao commence à rapidement faire son effet; conséquence attenuante est la mine dépité que me tire Céleste. Et c'est là que je me rends compte que, parfois, je suis capable d'être un véritable enculé. Tant pis pour toi. J'voulais être sympa, qu'on apprenne à se connaître. Je t'aurais dit : Au fait, moi c'est Céleste, tu sais comme la voûte. J'en aurais presque versé une larme, sincèrement. Je défronce mes sourcils et m'éloigne d'elle, m'appuyant contre un meuble, le visage pensif. Et je la regarde, elle et son sachet de M&M's qu'elle déguste sans grande conviction. Cæsar, t'es qu'une pute. "Non mais, désolé t'sais, j'suis juste pas d'humeur." Et comme pour ponctuer ma phrase, je décroche une barre dans la longueur de ma tablette, comme je faisais pour prendre ma mère à ses propres mots lorsqu'elle m'interdisait de prendre plus d'une seule ligne. Je la lui tends, manifestement moi-même gêné de mon élan de générosité subite. "Tiens." Nouveau soupir. Immensément mal à l'aise, je me frotte les cils, grogne comme un vulgaire gamin lorsque j'en viens à toucher mon oeil au beurre noir encore douloureux. "Moi c'est Cæsar, mais tu peux m'app'ler Ceesi- non, cherche pas, tu m'appelles Cæsar en fait." ...Et j'ai l'air tellement con.

Je piochais dans mes m&ns un peu vexée de l’accueil qu'il m'avait fait. Je n'avais pas encore cerné sa personne, je ne le connaissais pas mais visiblement, il n'aimait pas le sexe. Était-il puceau ? peut-être. Soudainement, sa bouche s'ouvrit à nouveau pour articuler des mots qui me plurent bien plus que ce que j'avais pu entendre quelques instants plus tôt. "Non mais, désolé t'sais, j'suis juste pas d'humeur." Je relevais alors mon visage en sa direction et me contentais d'un simple « pourquoi ? » de ma voix douce. Il y avait une raison à être de mauvaise humeur, on ne l'ai jamais sans bonne raison. Je le vis alors décroché une ligne de chocolat "Tiens." m'avait-il alors dit. J'étais ravie que la situation s'améliore. J'étais ravie que celui-ci m'offre le bout de chocolat que je lui avais demandé un peu plus tôt. « Merci. » avais-je prononcé tout en saisissant la barre de chocolat qu'il me tendait. J'avais presque envie de lui faire un câlin pour le remercier mais je n'étais pas sûre que cela soit son rayon alors je préférais m'abstenir et ne rien faire mis à part lui sourire. C'est d'ailleurs seulement maintenant que je remarquai son oeil au beurre noir qu'il venait de toucher. J'étais plutôt intriguée, me demandant ce qu'il avait bien pu faire pour se retrouver avec cela sur le visage. C'était pas vraiment glamour, quoi que ... ça lui donnait un petit côté bagarreur en fait."Moi c'est Cæsar, mais tu peux m'app'ler Ceesi- non, cherche pas, tu m'appelles Cæsar en fait." « Dans ce cas, ce sera Cæsar. » Avais-je dit tout en lui souriant. Sans pour autant pouvoir décroché mes iris de son hématome. « Qu'est-ce que tu as fait pour avoir ton oeil dans cet état. T'es un bagarreur ? »

Plus un Ceasar, tu parviens enfin à te sortir de l'image de mec asocial et chiant au possible que tu t'es donné dès ton entrée dans ce château: je n'ai certes pas changé, je tâche simplement d'être plus supportable. Et ce qui vient de se passer en est une preuve tangible. A vrai dire, l'effort, bien que compensé par un apport certain en cacao, me paraît collossal, et j'aurai presque besoin qu'on m'en remercie mille fois, genoux à terre et prier mon prénom. Nota bene: arrêter de croîre tout puissant et noyau même des pensées et reflexions de tous. Un mininum vexé de ne pas avoir été congratulé, je me recule après avoir fait semblant de ne pas entendre un "pourquoi?" de sa part, tendant le bras plus que néccessaire afin de lui faire passer la barre de chocolat à bonne distance. Elle me remercie, acquièse, bombe le torse, fier de moi: ta b.a. de la journée ceessie, t'as de quoi te sentir puissant. Dans ce cas, ce sera Cæsar. Elle me sourit, j'esquisse un sourire en retour: enfin quelqu'un qui prononce correctement mon prénom. Qu'est-ce que tu as fait pour avoir ton oeil dans cet état. T'es un bagarreur ? LA question qu'il fallait pour me décoincer. Bravo Céleste, j'applaudis, très perspicace. "Ah non, c'pas à cause de ça. S'tu veux, j'ai titillé d'un peu trop près un adversaire sur l'ring, et il s'est pas gêné pour m'en remercier comme il s'doit. Mais ça va passer, d'ici deux-trois jours, j'l'aurais plus." A vrai dire, j'ai pas tant envie que ça que cette marque s'en aille: quand on en connait les circonstances, on s'y attache rapidement. C'est con à dire, mais je trouve ce truc foutrement esthétique. Soit. Pour détendre l'atmosphère toujours un peu tendue, je m'avance, l'air hésitant et les yeux rivés sur ceux de Céleste, puis tend ma main au-dessus de son paquet de M&M's. "J'peux?"

Je m'étais toujours demandé à quel force un point devait être frappé pour former un hématome comme celui que Cæsar arborait aujourd'hui. Pas bagarreuse pour un sous, il m'était impossible de mesurer la chose. La seule personne avec qui je me suis déjà battue c'est ma soeur et cela s'arrêtait à un tirage de cheveux. La plupart du temps, ma mère arrivait alors sans rien dire. Elle se contentait de nous regarder avec un regard noir. Quand enfin on avait capter sa présence, elle articulait calmement " est-ce ainsi que des jeunes filles doivent se comporter ? Céleste lâche les cheveux de ta soeur et quand tu auras compris que ce que tu fais est mal, que rien ne se règle par la violence, tu iras t'excuser. Ca ne sert à rien de demander à être excuser avant ça jeune fille ... Il faut comprendre pourquoi tu demander pardon. " Oui, parce que la plupart du temps, c'était moi qui tirait les cheveux de ma pauvre soeur. Je voulais juste lui montrer que je pouvais être aussi forte qu'elle et ce malgré notre presque six ans d'écart. "Ah non, c'pas à cause de ça. S'tu veux, j'ai titillé d'un peu trop près un adversaire sur l'ring, et il s'est pas gêné pour m'en remercier comme il s'doit. Mais ça va passer, d'ici deux-trois jours, j'l'aurais plus." Celui-ci me ramenait soudainement à la réalité, me tirant de mes souvenirs qui ne valaient certainement pas grand chose. Mon regard se porta encore une fois sur son oeil bien amoché, pour se concentrer ensuite sur son regard en général. « Oh, tu pratiques la boxe depuis longtemps ? En tout cas, ça a pas dû être drôle à recevoir. ça fait mal ? » J'avais envie de l'effleurer, juste pour voir. Mais je savais en ce moment précis que c'était mal venu. Je me mordillais la lèvre songeuse un instant. « Tu me montreras un jour ?... Comment tu boxes... » Enfin, je sais pas. Je voulais avoir un visuel de cette affaire, voir comment il s'y prenait. Je le vis alors positionner sa main au dessus de mon paquet de sucrerie, celui-ci me demandant si il pouvait en prendre. J'hochai doucement la tête, souriant légèrement. « Oui vas-y, sers-toi. » Je ne saurais expliquer pourquoi, mais j'essayais de me montrer rassurante avec le candidat. « Tu n'aimes pas trop les contacts physique pas vrai !? En dehors du ring je veux dire. Te sens pas obligé de répondre, on se connait à peine. » On se connait pas en fait. Je connais son prénom et je sais qu'il fait de la boxe et c'est tout.

Oh, tu pratiques la boxe depuis longtemps? "Ca fait quatorze piges." En tout cas, ça a pas dû être drôle à recevoir. ça fait mal? Je mens ou je tente la carte du mec warrior qui craint rien à la Rocky? "Ben touche, et si j'me mets à gueuler comme une meuf, t'auras p't'être ta réponse." Je préfère assumer plutôt que de mentir et de trahir ultérieurement. De toute manière, j'apprécie assez ce genre de douleur: pas par masochisme, mais tout simplement parce qu'elles me rappellent constamment leurs origines que je qualifie de nobles. Tu me montreras un jour?.. Comment tu boxes... J'acquièse doucement d'un signe de la tête: à vrai dire, je n'aime pas vraiment être regarder, mais inutile de lui dire du tac au tac qu'elle ne me verra jamais à l'oeuvre. Ouais, je suis définitivement dans un bon jour. Avec son autorisation, j'attrape une petite poignée d'M&M's, en portant déjà plusieurs à mes lèvres: je suis fan de ses saloperies et, à la maison,ma mère refuse constamment de m'en acheter; cause de mon empressement. La bouche encore pleine, j'essaye de prendre un air sérieux, toujours négligemment appuyé sur un meuble. "T'fais quoi dans la vie toi? Parce que tu m'parais vraiment jeune. " Un comble pour l'asocial que je suis: sa situation m'intéresse réellement. "Ca t'branche un M&M's jaune? J'aime pas ça perso." Et je regarde l'accusé, le tenant du bout des doigts. C'est con à dire, mais j'aime tellement pas le jaune que mon dégoût arrive à se faire ressentir jusqu'au goût de ce truc. Tellement ridicule.