L'hiver Irlandais avait la réputation d'être vigoureux et aujourd'hui, ça se vérifiait, puisqu'il ne devait pas trois degrés. Pourtant, je ne pouvais résister à l'idée de visiter les fameuses falaises. Depuis ce matin, je ne cessais d'entendre parler de ce lieu apparemment magnifique. Si bien que poussé par un ennuis dévorant, je pris la décision d'y aller après le déjeuner. Etant donné le nombre de candidat qui en avait fait l'éloge, il ne devait plus n'y avoir personne à cette heure-ci. De toute façon il était trop tard puisque j'avais déjà enfilé ma veste en cuir par dessus le t-shirt noir que je portais. Le vent ne faisait pas trop de ravages par chance, puisque de toute évidence, il soufflerait d'avantage au bord de la mer. Malheureusement, mes calculs étaient erronés puisque je distinguais une silhouette non loin de la rambarde. Il s'agissait d'un homme que j'avais brièvement croisé dans le manoir. Je le saluais d'un signe de tête avant de me planter à ses côtés, sans un mot. Au lieu de cela, je me contentais d'observer le paysage, contemplatif. La vue était imprenable, et étrangement, observer les vagues s'échouer sur les rochers avait quelques chose de mystique.

Une envie soudaine d'aventure. Ou du moins, d'aventure dans les limites de ce qui était permis. Partir en trek au Népal avec juste un énorme sac de randonnée et des casseroles accrochées à la ceinture, ce n'était sans doute pas autorisé dans le contrat de Milan. Ce n'était pourtant pas l'envie qui lui manquait. Bref, juste après avoir englouti son déjeuner, constitué d'à peu près les trois repas habituels qu'il avait durant la journée, le jeune irlandais avait enfilé son sweat stupidement préféré - "brooklyn parle français" - de coton - et ouais - et s'était glissé hors du château, dont il ne se lassait pas d'admirer l'architecture. Impressionnant, quoi que pas vraiment son type. Mains dans les poches de son jean, il rentra légèrement la tête dans les épaules, lorsqu'un coup de vent plus violent que les autres le fit frissonner. La fraicheur du temps n'était pas intenable, mais il n'avait pas pris de veste. Bah. C'est donc seul qu'il s'éloigna du domaine, avec en tête la vision des falaises qui s'élevaient non loin du château. Il n'avait encore jamais mis les pieds de ce côté de la propriété, et sa curiosité l'avait poussé à changer ça. C'est pour ça qu'une fois arrivé, ses pieds s'arrêtèrent d'eux-mêmes, et il resta là, assommé par la beauté des lieux, assommé par un sentiment d'insignifiance. S'appuyant sur les barres qui avaient sans doute été installés là pour eux, il resta là un certain temps, jusqu'à ce que des bruits de pas résonnèrent dans son dos. Il ne se retourna pas pour autant, se contentant de tourner légèrement le visage pour adresser un signe de menton au gars qui venait de s'arrêter à côté de lui. L'homme ne prononça pas un mot. Milan non plus. Si le silence était quelque chose que l'irlandais savait respecter, et dans lequel il se plongeait régulièrement et avec joie, il le sentait pesant, là, tout de suite. Il ignorait si c'était la présence du gars qui l'empêchait de profiter du moment et de l'apaisement que le spectacle procurait, mais il finit par ouvrir la bouche. « Et donc, on va tous les deux rester là à observer le vide » ironisa-t-il, se moquant autant de lui-même que du gars. Après tout, il était mal placé pour parler, ce qu'il faisait clairement comprendre dans sa remarque.