Nous avions nos mains jointe dans un signe de contrat scellé dans un lieu divin, et même si je ne suis pas croyante pour un sous, ça a quand même son poids vous ne trouvez pas. Il prolonge cette étreinte un peu plus longtemps, peu être trop longtemps ? Moi ça ne me dérange pas. Il finit par me rendre ma main, un petit sourire se dessine sur mon visage. Je profite de ce moment pour lui poser ma question, ma première question en tout cas je n'avais pas fait une liste dans ma tête je verrais sur le moment je me servirais de ces réponses pour lui poser d'autres questions. Je crois que j'avais posé la bonne question à vrai dire beaucoup m'était passé par la tête durant notre conversation, mais celle là était celle qui revient le plus souvent à mon esprit. Je le voix réfléchir à la façon dont il pourrait répondre à ma question, je ne perd pas une miette de sa réflexion je l'observe sans non plus avoir l'air d'une psychopathe qui l'épie à l'aide de jumelle. Non je le regarde tranquillement, posant mes yeux azure sur lui. Il finit par soupirer, je veux pas que ce soit pénible pour lui... Bref il commence à répondre à ma question. «... Je protège les autres... » Je bloque sur sa première réponse j'imagine qu'il comprend aisément que je vais avoir besoin d'en savoir plus je vais pas me contenter de ça c'est une réponse obscure. Veut-il protéger les autres de lui même ? « J’ai choisi de m’isoler non pas parce que l’enfer c’est les autres, comme dirait Sartre, mais parce que l’enfer, c’est moi. » D'accord, je ne dis rien. Je réfléchis, j'ai du ma à le voir comme ça maintenant qu'on est si... oui proche on est proche. Peut être que si j'étais resté aux apparences je le croirais sans aucun problème mais j'ai eu devant moi quelqu'un d'attentionné, de protecteur, de gentil. Je lui offre donc un doux sourire et le laisse continuer sur sa lancer je veux pas le couper. « Quand le choix s’est imposé à moi, j’ai choisi de ne pas être bouffé, mais de ne pas bouffer non plus. J’aurais pu choisir la voie de la simplicité, tu n’imagines pas à quel point c’est facile pour moi de détruire quelqu’un, j’aurais pu. Mais j’ai préféré lutter contre ça, justement, et la seule possibilité qui s’offrait à moi, c’était l’isolement. » Je trouve ça triste dans un sens. Mais courageux, je n'aurais pas pu, parce que justement je voulais sortir de l'isolement. « J’ai décidé de ne pas subir… Ni les autres, ni moi-même. Je suis contraint de me subir, évidement, mais loin des autres, c’est gérable. Fondamentalement, je ne suis pas quelqu’un de méchant, ou du moins, je ne crois pas l’être. Et pourtant… Regarde ce que les autres pensent de moi, regarde ce que tu pensais de moi… Est-ce que finalement mes yeux me trahissent ? » Je me sens légèrement coupable de l'avoir juger trop vite de l'avoir insulter de psychopathe, de violeur et j'en passe. Je suis vraiment une garce n'empêche.« Je ne t’aide pas vraiment, n’est-ce pas ? » Je souris, on résous pas les plus grandes énigme en quelques minutes hein. Je ne m'attendais pas à tout comprendre sur lui en une seule question posé, je ne suis même pas certaine qu'une aventure FAKE LOVER, imaginons qu'on aille jusqu'au bout serait suffisante pour percer le mystère Syssoï. «  Tu me mets sur la voie. » dis-je en souriant. Puis venant poser ma main sur la sienne j'ajoute. « Si tu penses que tu es capable de me supporter de temps en temps, je pense que j'arriverais à faire de même pour toi. » Je souris tranquillement, c'était une invitation, à me laisser entrer dans son monde. Et à peu être combler un petit peu cet isolement qui semble le bouffer. Puis qu'au final, il se fait bouffer, mais je pense qu'il en a conscience. Qu'il a poser le pour et le contre avant de prendre une telle décision. Je retire ma main et la pose sur mon genoux. J'ai droit à d'autre question n'est-ce pas ? Je veux choisir les bonnes questions. Mais d'abord j'aimerais en savoir plus sur lui, sur sa vie. « Tu fais quoi dans la vie ? Tu ferais un très bon psy mais j'imagine que c'est pas ton métier. » dis-je dans un petit rire. Puis j'ajoute ma véritable question juste après. « Qu'est ce qui t'es arrivé ? Je sais... que tu peux pas me répondre comme ça franchement. Mais... je me dis moi même c'est quelque chose de précis qui m'a.. amené à tout ça. Je me demande c'est un événement précis?. » Je me ravise, c'est trop précis comme question je peux pas lui poser ça. « Non, non répond pas à ça c'est trop précis. C'est comme si je te demandais c'est quoi ton secret. » Puis je reporte mon attention sur les murs de la chapelle. Je finis par lui poser une autre question qui me semble plus convenable que la précédente. « T'es croyant depuis toujours ? Où bien c'est un moyen pour toi de surmonter... tout ça ? » dis-je gardant les yeux sur le crucifix, cillant légèrement. J'ai du mal à comprendre qu'on puisse être croyant mais peu être a-t-il une raison bien précise. Je finis par le regarder de nouveau, un air calme sur le visage.

« Si tu penses que tu es capable de me supporter de temps en temps, je pense que j'arriverais à faire de même pour toi. » Je pense qu’elle n’a pas compris qu’elle fait déjà partie de mon monde. Mon monde se limitant à un périmètre de 2m autour de moi, elle est de plein pied dans ma zone de survie, comme les très rares personnes à qui j’accorde un tant soit peu d’importance dans ce jeu. Ils se comptent sur les doigts d’une main, et c’est tant mieux, sinon on se retrouverait à l’étroit dans mon monde. Elle est entré dans cette zone de confort à la seconde où elle a finalement obtenu ce qu’elle désirait : mon attention. Qu’elle eut été d’accord ou non, qu’elle se soit calmé ou eut restée agressive à mon égard, ça n’aurait rien changé, à partir du moment où j’ai cerné cette faille en elle, elle a franchit la barrière invisible la séparant du troupeau random que je ne calcule pas, voir rejette totalement. Cela dit, faut pas qu’elle s’approche plus, faut qu’elle reste dans la zone de confort, mais qu’elle ne cherche pas à entrer dans la zone de chaleur, celle au plus près de mon corps, sinon elle accède à la zone à haut risque, celle qui m’isole encore de mon propre monde. Il y existe sept cercles à l’enfer. Il existe sept murailles autour de moi. La septième, au plus près de moi, n’a pas de porte. Faut escalader. Moore a franchis deux portes. Elle en a encore quatre zone de confort à découvrir, quatre portes susceptibles d’être franchies avant de toucher le mur du fond. Elle ne pourra jamais me tirer de mon isolement, mais je la laisse croire, parce que, quelque part, ça fait du bien de la laisser tenter de faire du bien à quelqu’un d’autre. Pendant ce temps elle ne pense pas à la destruction d’elle-même par celle des autres. Elle a posé sa main sur la mienne, et pendant un instant je repense a notre discussion autour de la pitié. Je vais bien. J’ai presque envie de lui dire. Mais tout comme pour elle, ce serait un mensonge. Je ne vais pas bien, et c’est comme ça depuis ma naissance. Elle retire sa main et replonge dans ses réflexions. Elle cherche les meilleures questions à poser, et j’imagine les rouages de son cerveau entrer en action. Je dois lui apparaître comme une énigme insoluble, alors qu’à chacune de ses réactions à mes réponses, elle m’apparait un peu plus clairement. Et à chacune de ses questions aussi. Sa première question est relativement banale, et ne m’apporte rien, mais la deuxième m’annonce clairement que son secret possède une date précise. J’ouvre la bouche, mais elle me coupe dans ma lancée, revenant sur sa question en la trouvant trop directe... Du coup, elle la contourne, m’interrogeant sur ma religion, afin de déterminer si oui ou non, mon isolement date d’une période précise, d’un évènement précis qui m’aurait poussé vers un Dieu omnipotent... Je garde le silence un instant, m’attendant presque à la voir repartir pour m’offrir une nouvelle salve de questions. Mais le silence s’étire, et je comprends que c’est à mon tour de prendre la parole. «Je suis danseur.» Je brise le silence de cette manière, brusquement, ma voix résonnant dans l'acoustique particulière de ce lieu. «J’appartiens au ballet de l’Opéra de Paris.» J’ai un rire ironique, jaune. «T’as un métier masculin, j’ai un métier féminin...» Ca a quelque chose de risible, finalement. La jolie petite fille si féminine qu’on imagine mal en talon aiguille sur les chantiers, et le géant baraqué, surnommé Robocop, qu’on imagine mal virevolter sur une scène prestigieuse. Y a comme une erreur d’attribution à la base même du truc, comme si on était destiné à déborder du cadre au point de ne pas pouvoir rentrer dans les cases. J’aime ça. Je suis le meilleur dans ma catégorie, et quelque chose me dit qu’elle doit être très douée dans la sienne. «Et pour répondre à ta deuxième question...» J’hésite. C’est assez difficile de parler de ça. Pas difficile sur le plan émotionnel, mais difficile sur un plan bassement basique. Je ne suis même pas sûr d’avoir une réponse a fournir, étant donné que je me pose moi-même la question depuis longtemps. «Je ne suis pas sûr d’être croyant... Je... Dieu et moi entretenons une relation très compliquée, qui me pousse à remettre, sans cesse, son existence en question.» Je ne quitte pas le crucifix des yeux, comme si je le mettais au défi de me contredire. Vas-y, lève-toi et marche, Jesus ! «Depuis la naissance j’ai été défini comme chrétien, dans une famille pour qui la religion fait figure de ligne de conduite. La religion est très importante dans les familles de l’Est, mais également dans celles du Sud. J’ai appris à me signer en entrant dans une église, en voyant ma mère le faire, j’ai appris les différentes prières en entendant mon grand-père les réciter à voix basse. Je n’ai jamais eu vraiment le choix, et on ne me l’a pas laissé. Dieu existe et existait pour eux, alors pourquoi m’offrir la possibilité de ne pas y croire ? Une part de moi continue d’y croire, comme on se rattache à une vieille tradition familiale, mais j’ai du mal a comprendre certaines choses, et je refuse de céder à la facilité de dire «les voies du seigneur sont impénétrables.» et suivre comme un mouton.» Encore une fois, j’ai conscience que ma réponse ne va lui être d’aucun secours, alors j’ajoute : «On dit que c’est un fait marquant qui vous fait entrer, ou sortir de religion. Je ne suis ni dedans, ni dehors. Ça devrait répondre à ta question. Je suis en pleine négociation avec Dieu.» Blasphème, je le sais. J’y peux rien... J’espère qu’elle a conscience de l’effort que je fournis pour lui parler. D’habitude, je culmine à deux phrases par jour. Aujourd’hui je viens d’exploser mon quota... Pour elle.