Evey

Lendemain de prime. La soirée de la veille avait été longue, et j'avais tardé à me coucher. J'avais aussi eu du mal à m'endormir, suite au petit stress que j'avais eu lors du prime à savoir le fait que j'avais bien failli me barrer à cause de mes hypocrites de camarades. Hypocrites, ils ne l'étaient heureusement pas tous. Bon, une bonne partie d'entre eux n'étaient que des faux-cul sans nom, mais certains sortaient tout de même du lot. C'était le cas d'Evey, qui m'avait soutenu suite à l'annonce de ma nomination hier soir, et avec qui je m'entendais plutôt bien depuis le début de l'aventure. La jeune femme n'était autre que la partenaire du blond, à qui j'étais resté menotté une semaine. Comme moi, Evey ne supportait pas Jackson, ce qui nous faisait un ennemi commun. Si j'avais la chance de m'entendre à merveille avec ma partenaire, ce n'était pas le cas d'Evey. Mais quand on voyait l'abruti qu'elle se coltinait, on pouvait très bien la comprendre.
Evey m'avait donné rendez-vous à la piscine, suite à la soirée d'hier soir qui avait été riche en émotions. Elle m'avait confié à l'oreille, à la fin du prime, juste avant d'aller se coucher, avoir une folle envie de faire trempette. J'avais accepté avec plaisir son invitation. J'avais donc obtenu un rendez-vous avec la grande blonde à quinze heures et demi, le lendemain, à l'heure où personne n'avait l'idée de nager. Allez savoir pourquoi, d'ailleurs... J'avais donc enfilé mon plus beau maillot de bain, vraiment très sexy, et rejoignis la jeune femme qui, lorsque j'arrivai dans l'enceinte de la piscine, était assise sur le bord. J'avançai alors vers Evey, et m'assis à côté d'elle. « Hello poupée. Aargh, j'ai deux minutes d'avance... » lui dis-je, en jetant un coup d'oeil à ma montre, qui affichait quinze heures et vingt-huit minutes. « Bon bah j'ai plus qu'à me barrer, et revenir à trente » fis-je, en plaisantant bien sur. Pour deux minutes, nous n'allions quand même pas faire de chichis. Et puis pour une fois que j'arrivais en avance, et non deux heures en retard, ça valait presque le coup de le noter.

Ruben, contrairement à d’autres candidats, ne figurait pas dans ma liste de cible à abattre, ou ma liste noire, en d’autres termes. Non. J’appréciais le candidat. Je le connaissais certes peu mais il ne méritait pas toute cette haine. Il n’avait fait que suivre le jeu, et c’était tout à fait son droit d’agir de la sorte. Que Syssoï écope d’une nomination par sa faute et voilà que la troisième guerre mondiale éclatait. Tant pour si peu, pathétique. Comme je me plaisais parfois à être anticonformiste, je m’amusais bien à défier le regard des autres à qui pourrait bien prendre l’idée de me juger pour mes fréquentations, à savoir le candidat ci-présent. Mais bon, vous devez commencer à me connaître : qu’est-ce que je m’en fiche de ce que les autres pensent de moi ! À la fin du dernier prime, alors qu’il passait à ma hauteur, j’accostais donc le candidat afin de lui proposer de passer du temps en ma compagnie. La piscine me semblait être un lieu digne d’une telle rencontre. Il acquiesça sans hésitation. Après tout, qu’avait-il à perdre? C’était donc aujourd’hui que nous devions nous voir, en milieu d’après-midi, et après avoir enfiler une tenue approprié pour l’occasion, je descendis rejoindre la piscine, une bonne quinzaine de minutes à l’avance, n’ayant rien de mieux à faire de ma peau. Ma serviette déposée sur l’un des transats, je m’installais sur le bord de la piscine, m’y trempant les jambes, alors que le reste de mon corps restait bien au sec. Mes deux bras tirés vers l’arrière, mains prenant appuie sur le sol, je me laissais aller à la contemplation de la pièce quand Ruben fit intrusion dans mon champs de vision. « Aargh, j’ai deux minutes d’avance… » Oui, et alors ? Quel était le mal d’être en avance, sinon que l’on arrivait justement avant l’heure au rendez-vous prévu. À moins qu’il n’est prit l’habitude de se faire attendre, le Ruben. Remarquez, ça ne me surprenait pas du tout si c’était le cas. « Bon bah j’ai plus qu’à me barrer, et revenir à trente. » Je tourne la tête vers lui – car malgré ce qu’il a beau raconter, il a quand même prit la peine de venir s’asseoir à mes côtés – et lui jette un de ces regards qui veut tout dire, à savoir que je trouve cette idée stupide. Ça serait triste qu’il se dérange pour si peu. « C’est pas nécessaire. Le temps que tu te lèves, que tu repartes et que tu reviennes, fort possible que tu arrives en retard au final. Et j’aime pas les retardataires. » Que ce soit clair.

De tous les candidats de ce nid, j'étais sans doute celui qui arrivait le plus constamment en retard aux primes. A chaque fois que j'arrivais, mes camarades me lançaient un regard noir du style "bah putain, c'est maintenant que tu arrives toi". Ou comment me faire comprendre que si je n'étais pas venu, ça aurait été tout aussi bien si même mieux. C'était désormais habituel pour eux tous : Ruben arrive en retard à tous les primes, et il va falloir s'y faire car ce n'est pas prêt de changer. Voilà pourquoi je m'étais étonné moi-même, en arrivant deux minutes en avance au rendez-vous fixé par Evey à la piscine. Je crois bien ne m'avoir jamais vu en avance à quelque rendez-vous que ce soit, ce qui peut expliquer ma surprise et ma réaction. J'avais eu dans l'idée de faire demi-tour et de revenir à l'heure précise du rendez-vous, mais me connaissant il y avait de fortes chances pour qu'au final je dépasse l'heure fixée. Quant à Evey, assise sur le bord de la piscine à mes côtés, c'était une idée tout bonnement idiote. « C’est pas nécessaire. Le temps que tu te lèves, que tu repartes et que tu reviennes, fort possible que tu arrives en retard au final. Et j’aime pas les retardataires. » Elle n'avait pas tord, là. Mine de rien, y'en avait là dedans. Tenez, j'avais perdu plus de trente secondes à exposer cette idée, donc en effet j'avais toutes les chances de me retrouver une fois encore en retard, si je prenais le temps de repartir et de revenir. Je décidai donc d'abandonner cette idée, c'était mieux. « Oh et puis t'as raison. Pour une fois que je suis en avance... faut pas tout gâcher. » Le fait qu'Evey n'aimait pas les retardataires avait fait tilt dans ma tête. Je préférais encore rester à côté d'elle, à discuter, car après tout nous avions rendez-vous. J'entamai alors la conversation. « En tout cas laisse-moi te dire qu'à mon sens, tu es l'une des personnes les plus matures de ce château. T'es l'une des seules à ne pas avoir crié 'à l'assassin !' lorsque j'ai nominé l'autre grand con, là, Syssoi. » C'était bel et bien vrai. Beaucoup de candidats m'étaient tombés dessus à bras raccourcis, mais ça n'avait pas été le cas d'Evey. Sans doute n'en avait-elle pas grand chose à faire. Je préférais encore ça au fait de m'en prendre plein la gueule. J'en avais déjà trop pris dans la tronche par ceux que je considérais comme des alliés dans ce jeu.

« Oh et puis t’as raison. Pour une fois que je suis en avance… faut pas tout gâcher. » Au moins il avait compris le sous-entendu. Cette relation avait commencé du bon pied, il ne fallait la ternir pour si peu. « En tout cas laisse-moi te dire qu’à mon sens, tu es l’une des personnes les plus matures de ce château. T’es l’une des seules à ne pas avoir crié ‘à l’assassin !’ lorsque j’ai nominé l’autre grand con là Syssoï. » J’esquissais un léger au compliment qu’il avait eu à mon égard, même si en fait, j’étais loin d’être mature. J’agissais parfois avec maturité, oui, mais je n’avais que vingt-trois, et dans ma tête, parfois, bien moins. Mais là, tout de suite et sur ce sujet précis, il avait raison. Même si ce n'était pas la seule raison expliquant mon manque d'entrain face à la situation. « Je ne vois pas pourquoi je l’aurais fait. Je ne le vénère pas, l’apprécie encore moins. Il m’est en fait complètement indifférent. Et l’engouement qu’il y a autour de lui, je me l’explique pas. » C’était un véritable mystère, en fait. Depuis qu’il avait découvert le secret de Moore – ou du moins, une partie, elle semblait s’y accrocher comme à une bouée de sauvetage. Sans compter Gabrielle qu’il semblait avoir envoutée par je ne sais quel magie. Pour ma part, je ne voyais en lui qu’un manipulateur qui choisissait bien ses victimes. Je ne sais même pas s’il accordait réellement un tant soit peut d’intérêt aux gens qui le côtoyait, qui le considérait comme un allié, ou un ami (tant qu’à être naïf, aussi bien y mettre le paquet). Je tournais la tête vers lui. « Je me fiche bien de savoir pourquoi tu l’as nominé. T’en avais le droit et tu l’as pris. Le jeu est comme ça, on va tous finir par partir d’ici de toute façon, que ce soit dimanche prochain ou à la fin d’l’aventure. L’amitié n’a pas sa place dans une émission comme celle-là et mêler ses histoires personnelles au jeu est la pire erreur à faire. Ça nous rend vulnérable. Rien qu’à voir la réaction de Moore. » Cette claque, qui resterait gravée dans nos esprits, qu’on le veuille ou non. En comme c’était en plein prime, c’est le pays entier qui y avait eu droit. J’imagine sans mal qu’on en ait parlé, dehors. Tout à faire le genre d’action qui suscite discussions. Fatiguée d’être assise sur le rebord, je me laissais finalement glisser à l’intérieur de bassin d’eau, qui m’arrivait à la taille. « Tu viens ? »

Désolé, j'ai l'impression que c'est mauvais .

Le fait que j'ai affirmé à Evey qu'elle était plus mature que bien des candidats la fit sourire. J'ignorais si elle se voyait véritablement aussi mature que moi je la voyais, mais pour moi cela ne faisait aucun doute : il était bien plus aisé de discuter avec elle qu'avec certains autres candidats dont je tairai les noms. Parler du jeu, par exemple, semblait d'une facilité infantile avec Evey alors qu'avec d'autres candidats, cela pouvait vite tourner au règlement de compte pour une parole malheureuse. Des paroles malheureuses, j'en avais eu pas mal ses derniers jours et j'avais même l'impression de les collectionner. A vrai dire, je n'osais parfois même plus ouvrir la bouche en présence de certains candidats, tellement je craignais de m'en prendre plein la gueule. Ce n'était même pas de la peur, mais juste l'envie d'être autre chose que le bouc émissaire de tout le nid. Evey, elle au moins, ne s'était aucunement retournée contre moi après ma décision de nominer Syssoi. « Je ne vois pas pourquoi je l’aurais fait. Je ne le vénère pas, l’apprécie encore moins. Il m’est en fait complètement indifférent. Et l’engouement qu’il y a autour de lui, je me l’explique pas. » Nous étions deux dans ce cas là : qu'est ce que les autres pouvaient bien trouver au grand con ? Il parlait clairement pour ne rien dire, ne sortait que des conneries et, surtout, n'avait à mon sens aucune utilité dans ce jeu. Monsieur avait été le premier candidat sélectionné, alors forcément il ne se sentait plus. Mais ni Evey ni moi ne le craignions. « Je me demande tout comme toi ce qui peut bien tous les fasciner chez ce mec. Il a rien de plus qu'un autre, et on pourrait très bien s'en passer. » Syssoi n'était rien de plus qu'un candidat à part entière. S'il venait à sauter un de ces jours, cela ferait du bien à pas mal de monde. Malheureusement, ce nid n'était rempli que de gros faux cul qui crachaient derrière son dos et qui, une fois en face de lui, se comportaient comme de véritables toutous. C'était juste pitoyable. « Je me fiche bien de savoir pourquoi tu l’as nominé. T’en avais le droit et tu l’as pris. Le jeu est comme ça, on va tous finir par partir d’ici de toute façon, que ce soit dimanche prochain ou à la fin d’l’aventure. L’amitié n’a pas sa place dans une émission comme celle-là et mêler ses histoires personnelles au jeu est la pire erreur à faire. Ça nous rend vulnérable. Rien qu’à voir la réaction de Moore. » La réaction de Moore, parlons-en. Cette bonne grosse claque que j'avais reçu de la part de celle dont j'étais le plus proche, et qui aujourd'hui ne daignait même plus m'adresser la parole autrement que pour m'insulter et me traiter de crétin. « J'avais le choix entre un indice, du fric et nominer quelqu'un. Je n'ai fais que faire un choix. Je vois même pas pourquoi tout le monde s'est excité pour ça. Et puis bon, se prendre une claque parce qu'on faire preuve d'audace, c'est abusé quoi. » Bah oui, je m'étais montré particulièrement audacieux ce soir là. Il n'y en aurait pas eu deux comme moi qui se seraient laissés tenter à nominer Syssoi, ou n'importe qui d'autre. De toute manière ils n'avaient que deux choses en tête : le pognon, et les secrets. Moi, je voulais cogner du poing et montrer que Fake Lover pouvait être autre chose qu'une chasse aux secrets et à l'argent. Mais apparemment, oser n'avait rien de bon ici. Evey se laissa finalement glisser dans l'eau. « Tu viens ? » Je n'allais pas rester assis tout seul comme un con sur le rebord de la piscine pendant que mademoiselle allait profiter de l'eau. Je décidai donc de me laisser glisser, à mon tour. « Ouep. Ouh bordel elle est pas très chaude. » J'étais sans doute resté trop longtemps en dehors de l'eau. Résultat, le choc fut assez violent. Je ne m'attendais pas à ce que l'eau de la piscine soit si fraiche. Mais il parait que l'eau froide est bonne pour le corps. Allons bon.

et désolée j'ai l'impression que c'est long