► Le 27 février, 16h38, en compagnie de Melissa.
Une bouteille d'alcool. Un balcon. Et le but du jeu était de ne pas tomber. Oui, c'était ce que Síomha était décidée à faire. Il faut dire qu'elle se faisait tellement chier et que les choses excitantes étaient tellement peu nombreuses... Si bien qu'elle avait pris une énième bouteille, s'enfonçant toujours un peu plus dans cette addiction dévastatrice. Elle penserait à arrêter l'alcool demain. Pareil avec la clope. Et avec la baise aussi. Quoique non, elle ne prévoyait pas d'arrêter. Ainsi donc, avec un taux encore raisonnable d'alcool dans le sang, elle s'était rendue sur le balcon. Elle esquissa quelques pas de danse au rythme de la chanson qu'elle fredonnait. Ce n'était pas glorieux. A croire qu'elle avait consommé plus d'alcool qu'elle ne l'aurait cru... Qu'importe. Poussant un soupir, elle alla s'accouder à la rambarde. Cette grande et épaisse rambarde. A croire que la production avait vraiment peur de perdre un de ses petits candidats adorés. Mais c'était aussi terriblement tentant de voir si elle pouvait tenir debout, en étant très légèrement éméchée. Quoi? Dans le pire des cas, elle descendrait d'un étage sans passer par les escaliers. Ce n'était pas très grave. Ainsi donc, elle commença par s'asseoir sur la dite rambarde avant de glisser ses pieds dessus, prudemment et de se lever. Elle avait un putain d'équilibre. Puisqu'elle réussit à se déplacer sans même vaciller... Tss. En fait, ça craignait. Soupir. Décidément... Si bien qu'elle se contenta de s'asseoir sur la rambarde, les pieds dans le vide, face à l'horizon, avalant une nouvelle gorgée d'alcool. Pff.

Vagabondant joyeusement entre les pièces du château, Melissa n'avait qu'une hâte : qu'un miracle se produise. Parce que, putain, c'était mort ici. Elle se faisait royalement chier et s'amuser ici relevait du miracle. Elle avait donc rejoint l'extérieur pour s'en griller une. Elle était donc en train de fumer une clope dans le grand parc qui surplombé la quasi-totalité du nid d'amour de Cupidon. Elle marchait, pour revenir à l'intérieur, une légère brise fraiche lui frappant de temps à autre le visage, lorsque son œil fut attiré par une tache noire et jaune, en hauteur. Elle leva alors les yeux, et découvrit une blondasse en train de se mettre debout sur la rambarde du balcon. D'un coup, elle s'arrêta, pour observer le manège de cette petite idiote qui visiblement ne tenait pas beaucoup à sa vie. "eh bien écoute, tombe et fracasse-toi le crâne" susurra la jeune rousse, toute seule. Cependant il fallait avouer que son petit numéro d'équilibriste était beaucoup plus divertissant que tout ce qui se passait ailleurs, dans le monde ou dans le nid. Bon dieu, faite qu'elle tombe. Et puis, d'un coup, la jeune femme vint à reposer ses fesses sur la rambarde, visiblement trop froussarde pour continuer les conneries qu'elle avait commencé. Melissa roula des yeux.

Et puis, merde, elle pénétra dans le château, grimpant les escaliers quatre à quatre, pour finalement arriver sur le balcon, trouvant la même personne que tout à l'heure, de dos cette fois. D'en bas, elle ne l'avait pas reconnu -il fallait dire que y'avait tellement de blondasses dans ce jeu que ça en donnait le tournis-, alors elle espérait très sincèrement savoir de qui il s'agissait. La silhouette ressemblait beaucoup à celle de Siomha. Quoi qu'il en soit, ce petit jeu était ridicule. « Je ne sais pas ce qui me retiens de te pousser. La culpabilité sans doutes. » Ou pas. Melissa vint à s'approcher de la belle blonde pour finalement s'accouder sur la rambarde, à côté de Siomha.

Elle se faisait juste chier. Comme elle le faisait si bien comprendre avec ses soupirs. Et cet ennui était terriblement pesant. Tout comme l'était cet enfermement et cette proximité avec autant d'individus et cela, durant la journée entière. C'était beaucoup à gérer, mine de rien. Et le fait qu'il y avait cet ennui, ce vide, ce sentiment de lassitude n'aidait en rien les choses. Son seul échappatoire consistait à faire des stupidités. Boire, pour commencer. Se bourrer la gueule faisait passer le temps plus vite. Mais n'enlevait pas grand chose à l'ennui. Alors, mettre partiellement sa vie en danger était une bonne solution. Histoire d'accélérer quelque peu les martèlements de son cœur. Malheureusement, se tenir debout sur la rambarde du balcon n'eut pas l'effet escompté. Elle se faisait toujours aussi chier. C'était pathétique. Alors, elle s'était assise. Fixant cet horizon, cet océan sans fin, regardant la liberté en face d'elle, comme si elle souhaitait s'en imprégner. Soupir. Qu'est-ce qu'elle se faisait chier. C'était infligeant. Oui, enfin, c'était chiant, ça, d'accord. Mais pas non plus au point de devoir se coltiner un autre candidat. Puisque Melissa débarqua. Soupir. Pourquoi ne la poussait-elle pas? Ouais, tiens, pourquoi pas? Elle se contenta de lever les yeux au ciel face à ce commentaire, avant de boire une nouvelle gorgée d'alcool. C'est pas tout ça, mais elle se faisait toujours chier. Et elle devait supporter l'autre. Elle était chanceuse comme fille, ça fait peur.

Si on lui avait dit, avant qu'elle ne rentre dans le jeu, que les candidats de télé-réalité étaient pour la plupart suicidaires, elle ne l'aurait très probablement pas cru. C'est vrai quoi, merde, tu as la chance d'entrer dans une télé-réalité super connue dans tous le pays et même ailleurs, tu as la chance d'avoir ta gueule à l'écran et de pouvoir dire "maman j'passe à la télé", de faire tout un tas de conneries mais, tu ne peux pas avoir envie de te suicider. Si on le lui disait maintenant, elle pourrait aisément le croire. Bordel, elle était sympa cette émission mais qu'est-ce qu'on se faisait chier. Depuis son arrivée dans le jeu, elle avait du s'amuser -ou du moins se plaire dans le jeu- trois ou quatre fois. Et encore, elle n'avait pas de souvenirs précis. Souvent elle avait eu l'idée de quitter le jeu, non pas qu'elle en avait tout particulièrement envie, mais voir la gueule des autres candidats l’insupportait de plus en plus. Mais, bien sur, toutes ces idées furent bientôt réfutées lorsqu'elle s'était rendue compte que son départ ferait trop plaisir à Peggy et toute sa clique. Enfin soit. C'était donc après avoir vu l'idiote suspendue sur la rambarde du balcon que Melissa voyait une occasion de passer du bon temps. Ou du moins de s'amuser. De toutes façons au point où elle en était même aller aux toilettes ou se rouler un petit joint étaient beaucoup plus intéressants que tout ce qui se passait dans ce château. Des incapables, sérieux. Y'avait qu'à voir Siomha, la pauvre avait décidé de mettre fin à sa vie. Et oui. C'était triste mais il ne fallait pas chercher plus loin: la télé-réalité était néfaste. Preuve en était. Ayant comme seule réponse un soupir de la blondasse, elle tourna les yeux un peu plus vers elle et vit une bouteille d'alcool. De mieux en mieux, tiens. Si elle vraiment quitter ce monde, il n'y avait qu'à le dire, la rousse se ferait une joie de la pousser et de regarder son corps d'en haut tout en se pétant une barre. Sadique ? Pas qu'un peu. Et putain les pensées morbides ça faisait du bien. « T'es au bout du rouleau, nan ? Je peux te jeter tu sais comme ça au moins ce sera réglé, autant pour toi que pour moi. » La nana était d'un ennui total. Non pas qu'elle était complétement chiante à mourir mais elle pouvait au moins parler, quoi. En plus, quand on est bourré, bizarrement la parole est plus facile. Pas avec elle visiblement, elle était bizarre. Finalement, la rousse vint à prendre place à côté de Siomha, sur la rambarde, regardant l'horizon. Un parc, un océan. C'était extraordinaire. Nan c'était une blague. Juste trois arbres et des litres d'eau.

Síomha? Se suicider? Sans déconner? Melissa était suffisamment stupide pour penser un truc pareil? Décidément, ils étaient tous plus cons les uns que les autres, ils allaient finir par battre un record dans la médiocrité à force. Non, vraiment. Là, ça devenait pathétique à force. Et dire qu'elle était dans ce groupe de bras cassés. Tss. Toujours est-il que non, son envie n'était pas de se jeter du haut de ce balcon afin d'en finir. Surtout qu'elle ne risquerait que de se casser quelques os et non de mourir. Bah, ouais, ce n'était pas si haut que cela. Passons. Donc, si son but était d'en finir avec la vie, en bonne désespérée qu'elle n'était pas, elle l'aurait sûrement fait avant. Elle avait vécu tellement de merde dans sa vie, que si elle avait voulu se suicider, ce n'était pas les occasions qui auraient manqué. « Tu crois vraiment que si j'avais voulu en finir, je me serais cassée le cul à entrer dans ce putain de jeu? » Ouais, tout de même, elle croyait vraiment ça? Elle se serait pas fait chier à venir ici. Elle n'aurait pas attendu d'être filmée pour se foutre en l'air. Puisque contrairement à certains, elle savait que sa vie insignifiante n'intéressait personne et son potentiel suicide ne risquerait pas de soulever des foules d'indignés. Au final, Melissa s'installa à côté de la blonde, sur la rambarde. Allez hop, deux folles pour le prix d'une. Si l'une tombait, l'autre tombait avec la première. Quelque chose lui disait que beaucoup de candidats seraient ravis de les pousser. Oh, les vilains. Eh ouais.