Nicole

LUNDI 24 SEPTEMBRE, 00H26
APRÈS PRIME, CHAMPS DE LAVANDE.

Voilà un premier prime dont j'allais très certainement me souvenir un moment. Je m'étais retrouvé projeté dans un univers inconnu, celui de la télévision et, accessoirement, de la télé-réalité. Je ne connaissais rien de tout ça, et de ce que j'avais pu en voir ce soir, ça ne me rassurait pas grandement. Dire que ma mère m'avait dissuadé d'y mettre un pied, où est-ce que je m'étais encore embarqué moi... Autre chose que je redoutais dans les semaines à venir : ma partenaire. La jeune femme s'était montrée particulièrement sèche avec moi, et dès lors que j'avais été amené à la rencontrer, elle s'était empressée de me faire comprendre qu'elle n'était pas franchement ravie de se coltiner un mec dans mon genre. Je crois surtout que ce qui lui posait le plus problème chez moi, c'était mon style vestimentaire. J'avais hérité du goût calamiteux de mon père en matière de fringues, je n'y pouvais donc rien et faisais avec. Mais je ne désirais pas que l'on parte sur de mauvaises bases, Nicole et moi. Je n'avais personnellement rien contre elle et ne demandais qu'à me faire apprécier par la jeune femme, si bien sûr elle m'en donnait l'occasion. Voilà pourquoi une fois le prime achevé et le village accessible dans son intégralité, je lui proposai de faire un tour à mes côtés, avant de rentrer dormir et découvrir notre chambre. Nous marchâmes alors l'un à côté de l'autre sans dire un mot, jusqu'à nous retrouver au beau milieu d'un champ de lavande. La nuit se voulait fraiche, et en bon partenaire que j'étais je veillai aussitôt à ce que Nicole n'attrape pas froid. Le premier soir, ce serait quand même dommage. « Mets ça, il vente beaucoup. » fis-je alors, après avoir retiré une veste que je n'avais enfilée que quelques instants avant la fin du prime, l'ayant laissée dans un coin tout au long de ce dernier. Puis je posai la dite veste sur les épaules de Nicole, plus attentionné que jamais. Si, avec ça, elle trouvait encore un moyen de m'envoyer paitre, c'est que je m'y prenais vraiment comme un manche et que, surtout, je ne comprenais définitivement rien aux femmes.

Ce parfum… il me rappelle celui des petits sachets qu’on met dans les placards pour éviter que les fringues puent l’humidité dégueulasse. D’ailleurs c’est à peine si elle m’irrite les narines tellement elle est forte, cette odeur. Faisant gigoter mes naseaux comme si un éternuement allait se pointer, je marchais aux côtés de mon pseudo-prince charmant, silencieuse, laissant l’excitation du prime redescendre. Mon partenaire m’avait l’air d’être quelqu’un de plutôt calme, et surtout peu bavard. N’étant plus en état de transe totale, je n’étais plus aussi hystérique qu’il y a quelques heures ; ce côté fifou je le laisse volontiers à Teresa. Je suis plutôt du genre majeur et responsable moi, you know. Mes bras croisés sous ma poitrine afin de me réchauffer de ce vent glaciale, je regrettais tristement que mon fake lover boy ne soit pas un canon de beauté. Soit, ce n’est pas comme si j’étais une hypocrite de base qui ne sait pas faire semblant. Néanmoins là même si l’air se faisait frisquet je n’avais pas envie de me coller à lui pour me réchauffer. Et puis depuis qu’il m’avait proposé cette petite ballade –que j’ai gentiment accepté car je suis une fille super gentille et trop sympa- nous n’avons pas eu de réelle discussion. C’était bien triste ; j’espère qu’on allait au moins trouver un sujet duquel parler d’ici la finale. « Mets ça, il vente beaucoup. » Surprise, je tournais mon visage vers lui, des mèches blondes portées par le vent venant se coller sur ma joue tandis qu’il me déposait un lourd tissu sur le dos. Wait. Il me prenait pour une ânesse qui allait lui transporter son surplus de fringues ou quoi ? Visionnant le bas du tissu, j’en déduisais qu’il s’agissait en fait de la veste qu’il portait il y a quelques secondes... Ah ok elle était là pour me réchauffer. Cool. Je n’avais même pas remarqué qu’il l’avait enlevée, c’est pour dire mon niveau d’attention. J’ai pas l’habitude de me préoccuper des autres en fait, à part Teresa et moi-même rien n’attire ma curiosité. Même si cet être qui est à mes côtés est étrange. C’est comme ça qu’on se comporte quand on est en couple et « amoureux » ? On est plein d'attention sans raison? Ca me parait bien louche, il doit avoir quelque chose derrière la tête. Peut-être que c'est un petit garçon abstinent qui est venu ici pour déballer sa Chupa Chups. En plein doute, je prenais tout de même le temps de le remercier avec un bref « Merci. » tandis que nous continuions notre chemin à travers champs. En Jimmy Choo, c'est pas l'éclate. Bon allez, histoire qu'on se fasse pas chier jusqu'au bout, je fis l'effort d'entreprendre la conversation. « Tu l'as achetée au Taj Mahal cette veste? Maah-Lik ça fait un peu Taj Mahal, c'est pour ça. Tu viens de là-bas d'ailleurs? »

Nicole avait beau ne pas avoir été très sympathique avec moi lors du prime, cela ne m'empêchait pas de vouloir à tout prix lui éviter de s'enrhumer. Il faisait particulièrement frais, il était tard - bref, tout gentleman digne de ce nom aurait retiré sa veste pour la poser sur les épaules de la jeune femme, et c'est ainsi ce que je fis. « Merci. » Bien, j'avais fait ma bonne action du soir. Nous poursuivîmes notre marche à travers le champs, sans dire un mot. Puis Nicole entreprit de "briser la glace", de quoi me soulager quelque peu car tout à fait franchement, je ne savais trop quoi lui dire sur l'instant. « Tu l'as achetée au Taj Mahal cette veste? Maah-Lik ça fait un peu Taj Mahal, c'est pour ça. Tu viens de là-bas d'ailleurs? » Je portai un instant le regard au sol, sur toute cette lavande autour de nous, avant de poser à nouveau les yeux sur ma partenaire. Que dire, que répondre... Elle venait de critiquer ma façon de me vêtir en fait, et me questionnait sur mes origines par la même occasion. Je retenais surtout qu'elle me prenait pour un indien. Les indiens n'ont pas les yeux verts ! Sauf Aishwarya Rai mais elle, c'est une exception. « Le Taj Mahal se situe en Inde, or je viens d’Égypte. » Première petite précision, entre partenaires on était aussi censés apprendre à se connaitre, alors j'ouvrai la marche. « Et cette veste, elle te plait pas ? Je veux dire, tu trouves que je m'habille comme un sac ? » C'était un truc qu'elle ne supportait pas chez moi ça, non, mon style vestimentaire ? Elle m'avait pris pour un larbin le premier soir, ça voulait dire pas mal de choses. Et forcément, je ne devais pas faire le poids face à cette grande asperge au cuir chevelu décoloré en talons de douze. On ne venait pas du même milieu, cela sonnait à mes yeux comme une évidence. « Et toi alors, d'où viens-tu ? » Bon, il ne fallait pas être devin pour saisir que cette jeune femme avait des origines bien spécifiques, car cela sautait aux yeux comme le fait que je n'étais pas prêtre. Mais où vivait-elle, ça, je l'ignorais encore. Voilà pourquoi j'attendais de Nicole qu'elle me parle un peu d'elle, à son tour. Pour le moment nous semblions ne pas trop oser nous parler ouvertement, mais cela viendrait probablement au fur et à mesure. C'était peut-être même une question de minutes en fait, avant que ce début de conversation ne prenne un tournant radical. Une chose demeurait néanmoins certaine : pour marquer le coup avec Nicole, je lui avais généreusement passé ma veste et, du coup, je grelotais rien que pour ses beaux yeux. Maintenant, je n'avais plus qu'à espérer qu'elle ne profite pas de moi à l'avenir, car hélas j'étais du genre à me faire avoir sans rechigner. Trop bon, trop con, et trop faible surtout. La gente féminine m'avait déjà fait de sales coups, et j’espérais ne pas réitérer l'expérience ici.

« Le Taj Mahal se situe en Inde, or je viens d’Égypte. » Son ton me paraissait sec. Je suis sûre qu’il l’était pour de vrai. J’acquiesçais en guise de réponse, sans y voir vraiment de différence. Pour moi les indiens et égyptiens c’est pareil, quoi que Cléopâtre est clairement plus canon que Boudha… Conclusion : j’ai fait une bonne pioche avec un égyptien, j’aurais pu tomber sur un indien. Malik, donc, m’avait l’air d’être un homme faible. Un homme qui a besoin qu’on le rassure, qu’on lui dise qu’il nous plait, et toutes ces choses. La preuve, son questionnement sur sa veste témoignait d’un grand manque de confiance en lui. Je suis habillée comme une bonnasse et pourtant je ne vais pas lui demander si ça lui plait ou non. De toute façon on voit à moitié mon cul, donc évidemment que ça lui plait ; y a pas photo. « Oh un sac n’exagérons rien. Tu pourrais être mille fois plus sexy habillé différemment c’est tout. Mais c’est pas plus mal car comme ça tu attires les femmes bien… Comme moi !» Je pouffais. Ca faisait trop en une seule phrase, là. Attirer les femmes vêtu de la sorte, non. Moi, être une femme bien, non plus. Et moi-même être attirée par ce genre d’homme, encore moins ! On dit qu’il y a la beauté extérieure et intérieure, personnellement je n’y crois pas ; pour moi tout est à l’extérieur. Malik n’est pas laid, mais ses fringues résultent son état d’esprit de papy ; qu’on se le dise. Par politesse il me demanda d’où je venais, par pure moquerie j’étais bien tentée de lui répondre que je venais d’Asie. Buuut je suis vraiment trop cool comme fille quand je veux, donc j’allais lui faire grâce de cette réponse inutile. « Je viens de New-York. » Lui souriant, j’espérais qu’il se contente de cette réponse. Il avait tout intérêt à s’en contenter, en fait. Pas question que je lui révèle que mes ancêtres sont des immigrés qui vivaient dans les rases campagnes coréennes fut un temps. Marquant une pause, le concept du jeu vint alors clignoter comme un warning au-dessus des champs. Un couple, nous étions un couple. Par conséquent il me fallait faire des efforts ; lui parler gentiment et ne pas me laisser envahir par l’envie de continuer la route sans lui adresser un mot. Il était gentil, là n’était pas le problème, mais lorsque je ne suis pas décidée je ne suis pas du genre à sautiller partout et à être super amicale. « Je suis d’origine coréenne… mais les immigrés remontent à loin, hein ! Même si cette foutue éducation de merde est restée.» Ma dernière phrase fut murmurée, je dirais même grincée entre mes dents. Des paroles de haine, voilà ce que c’était. Derrière les yeux bridés se cache une éducation bien différente des autres, et surtout difficile, mais ça peu de gens le savent. La plupart s’en foutent d’ailleurs, ce qui a le don de me rendre super haineuse. Hater. Nous avancions en bravant le froid. D’un regard en coin, je pu clairement constater le grelottement de mon fake lover boy. Je suis habituée avec mes petites histoires de cœur à avoir des petites attentions qui ne viennent pas forcément du cœur mais qui leur font plaisir, et qui les font rester plus longtemps. Je venais ainsi enrouler mes bras autour de sa taille, posant ma tête sur son torse pour essayer de rendre la position plus confortable, je bougeais un peu mes mains afin de créer une source de chaleur. « Ca te réchauffe un peu ? Dis… ça te complexe ce que je peux penser ? Elle est très chaude cette veste tu sais, c’est cool. » Un peu connasse de lui vanter les bienfaits de sa veste, certes, mais c’est l’intention qui compte nan ?

Raté. Je n'étais pas indien, mais égyptien. En même temps, elle n'avait fait là qu'une supposition qui avait pour but de camoufler une remarque faite sur mon look, plus précisément sur la veste que je venais de lui donner. Je lui demandai alors si, à ses yeux, j'étais habillé comme un sac - pour ne pas dire comme un plouc. Des critiques sur mon look, j'en avais déjà essuyées, et beaucoup, mais à voir Nicole, sa façon de se vêtir, de se tenir, tout ça, je commençais à penser que j'étais pas à la hauteur, de mon côté. « Oh un sac n’exagérons rien. Tu pourrais être mille fois plus sexy habillé différemment c’est tout. Mais c’est pas plus mal car comme ça tu attires les femmes bien… Comme moi !» Elle se mit à rire, tandis que je restai sans réaction pendant un moment. Alors déjà, le problème chez moi venait véritablement des fringues que je me mettais sur le dos. Tout n'était peut-être pas à jeter alors ! Y avait-il un espoir pour que je ressemble à quelque chose, tout compte fait ?... « Je n'en doute pas. Que tu es une femme bien. » Non vraiment, pour moi Nicole était une femme bien, même si sa précédente réplique avait été dite sur le ton de l'humour. Je tendais à croire qu'à la base, toutes les demoiselles étaient des femmes bien, et qu'elles perdaient ce statut au moment où elles vous faisaient la pire crasse. Nicole ne m'avait pas encore déçu, j’espérais que cela ne se ferait d'ailleurs jamais, alors à mes yeux elle restait quelqu'un de bien, quoi qu'elle en dise et quelque soit l'estime qu'elle avait de sa personne. Entre deux grelotements, je lui demandai de me parler d'elle - plus particulièrement d'où est ce qu'elle venait. Car cela importait à mes yeux de le savoir. « Je viens de New-York. » Han, les états unis. J'avais toujours rêvé d'y mettre un jour un pied. Le rêve Américain, on connait tous, surtout celles et ceux qui, à mon image, ont eu une vie parfois difficile et ont connu des jours sans, beaucoup de jours sans. Les petites galères du quotidien qui vont donnent, à la longue, envie de changer de vie du tout au tout. « Je suis d’origine coréenne… mais les immigrés remontent à loin, hein ! Même si cette foutue éducation de merde est restée. » reprit-elle dans un grincement de dents. Je la sentis d'un coup assez aigrie en parlant de son pays, et de l’éducation qu'elle y avait reçue. Coréenne, égyptien, vive le mélange des cultures et la diversité des origines ! « C'est bête mais quand je pense à la Corée, j'ai à l'esprit l'image de filles refaites de partout... J'espère que c'est pas ton cas ! » lâchais-je subitement. Quelle maladresse... Par là j'entendais surtout que les filles superficielles, ça n'était pas pour moi. Mais le fait que Nicole avait une silhouette zéro défaut et que ses vêtements, compte tenu du temps, étaient très peu appropriés, ne faisaient pas d'elle pour autant une fille superficielle. Je m'étais mal exprimé en fait, c'était surtout ça. Il ventait de plus en plus - en plein mois de septembre ça n'avait rien d'étonnant - et le fait que j'attrapais progressivement froid n'échappa pas à ma partenaire, qui s'empressa de rapprocher son svelte corps du mien, pour me réchauffer je crois bien. « Ca te réchauffe un peu ? Dis… ça te complexe ce que je peux penser ? Elle est très chaude cette veste tu sais, c’est cool. » Oui, c'était aussi la raison pour laquelle je le lui avais passée. Je savais cette veste bien assez chaude pour lui empêcher d'attraper froid. Sa tête posée contre mon torse, et ses mains s'agitant autour de ma taille, je n'osais tout simplement plus bouger d'un cil. « Heuu, oui oui, j'ai moins froid d'un coup. » Ces propos, s'ils étaient mal interprétés, pouvaient passer pour salaces, alors qu'ils ne l'étaient pas du tout. Là, j'aurais aimé qu'elle recule d'un pas ou deux, quitte à ce que cette source de chaleur soudaine s'en aille avec. Car ce genre de contacts me mettaient fortement mal à l'aise. Disons que je n'avais pas grande expérience avec les femmes, mais que depuis un certain évènement advenu il y a plusieurs années, leur présence autour de moi, ou trop près de moi, me gênait. Néanmoins je la laissais se blottir contre moi, ne trouvant pas le courage de lui avouer que ce qu'elle faisait sur l'instant m’embarrassait fortement.

« Je n'en doute pas. Que tu es une femme bien. » Vivement, mon visage se tourna vers lui. Mes sourcils froncés d’incompréhension, je trouvais sa tentative plutôt pathétique. Le jour où je serais ce genre de fille qui peut servir de modèle n’est pas arrivé et n’arrivera sans doute jamais. Ce n’est d’ailleurs pas ce qui va me mener à la dépression, j’aime ma vie comme elle est ; et vivre dans la luxure me rassasie bien plus que si je devais être nonne au foyer. « Jouer le jeu d’un couple c’est bien, mais évite de me mentir pour soi-disant me faire plaisir. » Mon ton s’était fait quelque peu rude et il n’était pas près de changer suite aux paroles de Malik. Comment pouvait-il « espérer » que ce ne soit pas mon cas ? Evidemment que j’étais naturelle, la question ne se posait même pas. A vrai dire je le prenais un peu pour une offense. Mon visage se refrogna. « Je ne suis pas refaite non. Je suis bien plus belle que Teresa. La preuve que le naturel est toujours mieux que le fake. » Là je mettais surtout ma phrase en parallèle avec le monde du luxe. Sinon, pas sûr que je pense vraiment ce que je dis. Je n’aimais pas ces préjugés sur mon pays d’origine, bien que je dois avouer qu’il n’avait pas tort. Mais soit, ce n’est pas une bonne façon de voir les choses, j’allais lui apprendre à penser à la Nicole moi. « Ils sont pourris tes aprioris, j’pense pas que toutes les égyptiennes sont des pétasses qui se donnent la mort avec un serpent moi » Oui bon… encore un mensonge. Etrangement je voyais toutes les égyptiennes avec un carré noir épais et maquillées à la Cléopâtre, bien sûr je pensais qu’elles étaient sublimes mais en observant Malik j’en déduisais que finalement si là-bas les mecs étaient pas top les femmes ne pouvaient pas donner naissance à des bébés super canons. Donc il devait y avoir des thons. Malgré ça j’étais accrochée à lui afin de le réchauffer, et j’étais bien triste de constater qu’il n’en avait pratiquement rien à foutre. Soit c’était un homme bien rangé et carré dans sa vie, soit c’était un fils à maman. Je doute, je doute, je ne sais pas lequel choisir ! « Tu fréquentes quel genre de fille habituellement? T'es plus du genre sages ou imprévisibles? » Mon souffle venait se glisser au creux de son oreille. J'avais bien remarqué qu'il n'était pas très chaleureux comme type, alors autant pousser le vice jusqu'au bout, et c'était un réel plaisir. Pour en rajouter un peu plus, l'une de mes main venait glisser sur lui afin de lui laisser la possibilité de s'imaginer toutes sortes de choses en suant à grosses gouttes.

Cette position était des plus inconfortables. C'était limite si on ne partageait pas une veste pour deux, en fait. Nous en vînmes à parler de mon look, puis du genre de femmes que j'étais susceptible d'attirer... et enfin j'eus comme une parole malheureuse, du moins au vu de sa réaction ce devait en être une... « Jouer le jeu d’un couple c’est bien, mais évite de me mentir pour soi-disant me faire plaisir. » Alors déjà, bien que je n'avais rien contre ma partenaire, je ne cherchais aucunement sur l'instant à lui faire plaisir. « Serais-tu en train de sous-entendre que je suis un menteur ? » lui demandais-je, un peu contrarié par sa remarque. Donc je n'avais pas le droit d'exposer le réel fond de ma pensée sans que cela ne passe inévitablement pour un mensonge, hm ? À mes yeux elle avait tout d'une fille bien, même si elle semblait ne pas en avoir conscience, et tentait de le faire oublier de par une attitude limite désinvolte. Suite à ça je commis une petite bourde - ouais encore une -, concernant son pays d'origine, à savoir la Corée. J'avais évoqué le fait que là-bas, les jeunes femmes avaient souvent recours à la chirurgie plastique tout en lui demandant, dans la foulée, si elle s'était elle aussi laissée tenter par ça. Ou comment prétendre qu'il y avait une chance pour qu'elle ne soit pas totalement naturelle. Pas très chic, hein. J'en avais même honte, et craignais qu'elle le prenne mal. Malheureusement, cela sembla être le cas. « Je ne suis pas refaite non. Je suis bien plus belle que Teresa. La preuve que le naturel est toujours mieux que le fake. » Teresa, Teresa... pourquoi est-ce que ce prénom ne me disait rien ? Ah, ce devait être une autre candidate. Néanmoins je n'avais pas encore retenu les noms de tous et de toutes, alors forcément je ne compris pas la référence. Mais là n'était pas le plus important. Je l'avais vexée, et il me fallait maintenant lui présenter des excuses. « Ils sont pourris tes aprioris, j’pense pas que toutes les égyptiennes sont des pétasses qui se donnent la mort avec un serpent moi » Je ne notais même pas sa remarque sur les égyptiennes, elle était libre de penser ce qu'elle voulait après tout. Je cherchais plutôt comment rattraper le coup, si c'était encore possible. « Je suis désolé si tu t'es sentie offensée, je... excuse-moi Nicole. » lui implorais-je presque, tout penaud. J'avais carrément manqué de classe sur le coup alors je tentais de faire oublier ça comme je le pouvais, toujours avec maladresse hélas. « Tu fréquentes quel genre de fille habituellement? T'es plus du genre sages ou imprévisibles? » D'un coup, je la sentis très, trop entreprenante. Elle devait chercher à me mettre mal à l'aise et je dois dire qu'elle y parvenais sans aucun mal. Je me retrouvais du coup gêné, comme jamais, à la recherche d'une réponse à lui donner. « Je ne... fréquente plus de filles depuis un moment. » reconnaissais-je tout en baissant la tête. Maintenant, elle pouvait penser ce qu'elle voulait de moi, me sortir que je n'étais qu'un gros looser ne sachant tout simplement pas s'y prendre avec la gente féminine, ou je ne sais quoi d'autre encore. Mais la vérité résidait dans mes propos : je n'avais, par exemple, pas passé mes doigts dans les cheveux d'une femme depuis de nombreuses années. Et maintenant j’espérais qu'elle allait retirer sa main d'un instant à l'autre car plus les secondes passaient, plus mon esprit se brouillait et les mauvais souvenirs refaisaient surface. Il avait bien sûr fallu que je tombe sur une partenaire sadique et vicieuse... J'avais beau faire tous les efforts du monde pour que ça colle entre nous, j'avais l'impression qu'elle voulait au final tout le contraire.

« Je suis désolé si tu t'es sentie offensée, je... excuse-moi Nicole. » Il était mignon, mais son excuse bidon n’effaçait pas le fait que je trouvais sa réflexion déplacée. Me contentant d’un silence, je lui renvoyais la monnaie de sa pièce en venant lui susurrer quelques mots à l’oreille ; de quoi le stresser et me venger avec plaisir. Sa réponse à ma question fut simple, claire, et précise. Pourquoi ça ne m’étonnait pas ? Pourquoi je me doutais que c’était un vieux type ? Question rhétorique ; ses vêtements le trahissaient clairement. Wait. Il avait dit « filles », non ? Bien que ce genre de mec ait plus l’air d’être maladroit et incapable avec les filles que gay, il y avait tout de même une forte possibilité –de part ses paroles- qu’il m’ait caché ce penchant pour les hommes. Après tout nous ne nous connaissions pas encore réellement. Mon menton vint se poser sur son épaule, mes yeux le regardant comme une gamine en admiration devant son père. « Tu t’es mis à préférer les hommes suite à une fille un peu connasse ? » Pauvre Malik, qu’est-ce que j’allais en faire ? Si on m’avait collé le désillusionné de l’émission dans l’espoir que je lui redonne goût aux femmes, merci bien mais je m’en serais passée volontiers ! Globalement je le trouvai tout de même sympathique mais je sens que ça allait être très long avant qu’il ne se lâche complètement. Je lui tenais maintenant simplement la hanche tandis que ma seconde main venait balayer le champ. La lavande me chatouillait l’intérieur des doigts, jusqu’à ce que je vienne en arracher un brin. Le portant face à mon regard, je le constatais avant de réduire la tige en arrachant le surplus. Délicatement, je venais lui poser la fleur sur l’oreille. « Ca te rend très mignon. » un sourire venait illuminer mon visage, mon corps venant rompre tout contact avec le sien par la même occasion. « Je veux bien respecter ta peur du contact féminin, mais dans ce cas dis moi comment je dois me comporter... genre comme une nonne de supermarché? » Le coup du supermarché, c'était simplement pour la rime. Soit. Son attitude venait de me convaincre en un point: être plus compatissante avec lui. Je ne dis pas que je tiendrais ma décision plus de deux heures mais on verra bien ce qui en découlera. En toute honnêteté je ne souhaite pas continuer à foncer pour toujours me cogner contre un mûr, c'est beaucoup trop frustrant et en plus on avancera pas comme ça. Pour aller loin dans l'aventure j'ai cru comprendre qu'il fallait une certaine cohésion au sein du couple.. je m'y attelais donc.

J'avais cette désagréable impression que Nicole était en train de sous-entendre que j'étais un menteur. Un compliment de débité et voilà, c'était pour elle un mensonge. Et bien non, c'était on ne peut plus sincère. Suite à ça elle me questionna sur le type de femmes que j'avais l'habitude de fréquenter. Je lui signifiai alors que je ne fréquentais plus tellement de femmes, à l'heure actuelle. « Tu t’es mis à préférer les hommes suite à une fille un peu connasse ? » Je n'avais pas sous-entendu non plus que je préférais les hommes. En fait, je ne savais juste plus du tout où j'en étais. J'étais perdu oui, totalement même. Mais à aucun moment je n'avais sous-entendu préférer les hommes car ça n'était pas le cas, du moins je n'en étais pas certain, je me cherchais voilà tout. « Je n'ai jamais dit ça. » rétorquais-je en détournant le regard, fortement incommodé par la situation. La seule chose véridique dans ses propos, c'était le fait qu'une fille m'avait brisé le cœur. Mais je n'oserais jamais insulter celle-ci car elle avait beaucoup compté à mes yeux. Seulement à l'époque j'étais trop jeune, et il avait fallu que tout se termine assez tragiquement. Nicole laissa l'une de ses mains se perdre dans le champ de lavande duquel elle sorti un brin qui fini finalement sur mon oreille. « Ca te rend très mignon. » fit-elle tout en arborant un large sourire. Puis elle se détacha de moi, complètement. Je pus en quelque sorte respirer, enfin. Car je m'étais trouvé jusque là légèrement oppressé. Enfin, surtout embarrassé. Donc ce brin de lavande posé sur mon oreille m'allait bien, me rendait... "mignon" ? Je supposais que c'était une bonne chose. « Je veux bien respecter ta peur du contact féminin, mais dans ce cas dis moi comment je dois me comporter... genre comme une nonne de supermarché? » Une nonne de supermarché ? J'avais beau essayer, impossible de me l'imaginer. Mais de toute façon je préférais le lui dire tout net, je ne risquais pas de lui demander de se comporter de telle ou telle façon avec moi car ça n'était vraiment pas dans mes habitudes d’exiger une telle chose de quelqu'un. « Je n'ai pas à te dire comment te comporter avec moi Nicole. Je ne ferai jamais ça. » Je n'imposais jamais rien à personne moi, encore moins à une demoiselle. Et puis tout à fait honnêtement je ne savais pas quel comportement j'attendais d'elle. Entre nous je la trouvais parfois un peu trop persistante, mais au fond je préférais croire qu'elle n'avait rien contre moi, qu'elle essayait juste de m'aider, d'une façon ou d'une autre. Je la voyais mal chercher à tout prix à me mener la vie dure, il n'y aurait de toute façon aucun intérêt à cela puisqu'en faisant une telle chose, elle avait toutes les chances de me voir me renfermer peu à peu sur moi-même. « Nicole s'il te plait est-ce que... est-ce qu'on peut rentrer ? Je voudrais aller dormir. » J'aurais pu partir par moi-même, la laisser là mais non, ça n'était pas concevable pour moi de laisser une jeune femme seule dans un champ de lavande à cette heure-ci. C'est bien simple si elle désirait rester là, je ne pouvais qu'en faire de même. Mais la fatigue se faisait ressentir et j’espérais qu'on pourrait rejoindre notre chambre, y passer notre toute première nuit en tant que partenaires et reparler de tout ça demain, ou plus tard, peu importe.

L’aventure ne s’annonçait pas facile. Mon partenaire n’avait rien d’amusant et paraissait même réticent à l’idée de m’être associé. Suite à ses paroles, me regard venait se perdre dans le champ de lavande, se faisant rêveurs au mouvement féerique de ces fleurs énigmatiques plongées dans le noir de la nuit. Allez savoir pourquoi je me faisais poète ce soir. Sans le savoir Malik m’avait mis le moral à zéro, j’étais maintenant beaucoup moins enjouée et énergique que les heures précédentes. « Nicole s'il te plait est-ce que... est-ce qu'on peut rentrer ? Je voudrais aller dormir. » Il avait ce don pour vous achever une conversation, une rencontre. Le courant ne passait pas entre nous, c’était bien clair. « Allons-y. » Mes pupilles vinrent se nicher dans les siennes et j’esquissais un sourire de faux-semblant. Tandis que nous faisions demi-tour, j’enlevais la veste de mes épaules, celle qui lui appartenait, et la lui tendit. « Tiens, elle m’a été très utile. Remets-là. » Sous l'éclairage de la lune, nous rejoignons alors notre chambre pour notre première nuit ensemble. A parier qu'elle ne serait pas très agitée.

Sujet terminé pour Nicole.