Merveilleux jour qu'est le Samedi.
De bonne humeur, je saute hors du lit en n'ayant dormi qu'à peine quatre heures. Pile ce qu'il me faut pour être à peu près en forme. C'est que je manque cruellement d'énergie ces temps-ci. Je ne suis pas habituée à dormir dans le lit plusieurs nuits d'affilée. Non pas que je déteste la compagnie de Dagga, au contraire sa présence à le don de m'apaiser. En contemplant son dos des heures durant, je m'endors en me collant à elle pour la tenir contre moi. Les effluves de sa chevelure m’apaisent. Je traîne trop au lit. Il faut que je m'occupe. Une idée me vient à l'esprit. Un sourire rayonnant s'affiche sur mon visage. Je jette un oeil à l'horloge posé sur ma table de chevet. J'espère qu'elle ne dort pas. Je m'habille en vitesse pour ne pas perdre de temps. J'enfile mes godasses en manquant plusieurs fois de tomber. Je m'affaire à marcher en direction de la Cantine. J'entre, je regarde à droite et à gauche. Personne. Je m'empresse de tout préparer. Je sors tout ce qui est nécessaire pour un cours de pâtisseries improvisé. Au programme : des brownies aux chamallow. Son partenaire et elle sont en train de parler que soudain je l'embarque avec moi en la prenant par la main. Je suis sur le point de m'affranchir la porte que je me retourne et souris au jeune homme. - Promis Otello, je te la rendrai en seul un morceau. Je lui lance un clin d'oeil malicieux avant de disparaître. Je l'emmène en cuisine où l'attend son premier cour de pâtisserie. Comme promis. - On va faire des brownies aujourd'hui., dis-je d'un ton enjoué. Je lui souris les yeux pétillants.

Cela faisait quasiment trois heures qu'elle était levée. Un miracle, autrement dit. Pour Ismay, qui aimait profiter de son lit et de ses draps bien chauds au petit matin, ouvrir l'oeil à tout juste huit heures relevait de l'extraordinaire, de la chimère. Et pourtant, ce jour-là, samedi, elle s'était réveillée tôt et en pleine forme. Dingue. Un jour à marquer d'une pierre blanche. Bref, lavée, habillée et rassasiée à peine à neuf heures, elle se retrouva bien vite sans occupation. Elle avait même proposé aux quelques Connor déjà réveillés de faire leur vaisselle. Non, décidément, impossible de s'occuper, si bien qu'elle se posa, livre à la main, dans le salon de la mairie. C'est là qu'avec soulagement, elle finit par croiser Otello - enfin réveillé - avec qui elle commença à échanger quelques mots. Alors qu'elle écoutait une histoire qu'il racontait, elle sentit plus qu'elle ne vit un feu-follet lui attraper la patte et l'entraîner au loin. « Au sec... !! » et elle s'interrompit dès qu'elle reconnu la tignasse d'Elliot. Haussant les épaules à l'adresse de son partenaire, elle se rattrapa et se remis dans une position décente, sans plus avoir l'air d'un sac à patate qu'on traînait dans tout le nid. Laissant sa camarade la guider, elles atterrirent rapidement dans la cantine et alors qu'elle s'apprêtait à exiger des explications grâce à son regard de chien battu, Elliot mit fin au suspense. Des... des... brownies ? Les yeux d'Ismay s'ouvrirent en grand et comme au ralenti, un sourire lumineux illumina son visage. « TROP BIEN » s'exclama-t-elle, se retenant tout juste de ne pas lancer les bras en l'air de joie. Elle n'avait évidemment pas oublier la promesse de la jeune femme de lui apprendre deux-trois trucs, mais elle s'était dit que elle avait du zappé, et c'était heureuse qu'elle constatait qu'elle s'était trompée. Trottinant jusqu'à tout le bordel d'ustensiles et d'ingrédients préalablement préparés, elle jeta un coup d'oeil à tout avant de redresser le menton. « Par quoi on commence, chef ? » demanda-t-elle l'air farouche. Le pire, c'était qu'elle était certaine que ce n'était pas si sorcier. Des brownies, ça ne pouvait pas être insurmontable.

J'espère que Otello ne m'en voudra pas trop pour lui avoir piqué sa partenaire le temps d'une leçon de pâtisserie. Je n'ai pas oublié la promesse que je lui ai faite pour lui enseigner quelques rudiments de la pâtisserie. Ça m'a trotté dans la tête toute en semaine, tout cherchant une recette simple pour apprenti pâtissier. J'ai tout de suite pensé aux brownies. La recette est simple qu'on peut refaire soi-même n'importe quand, il suffit juste de suivre à la ligne près la recette. Évidemment, il peut y avoir des ratés surtout quand on débute ou qu'on n'en a jamais fais auparavant. Ou pire, on a aucun don pour la cuisine. En vérité, ce dernier argument se révèle totalement erroné. Ce n'est pas un talent qu'on reçoit du Saint-Esprit, mais un talent qu'on cultive avec du travail, de la rigueur et de la précision. En cuisine, rien n'est laissé au hasard. La moindre fausse manipulation peut conduire à des problèmes digestifs de toute sorte. Une fois arrivées à la cuisine, je lui annonce fièrement ce que nous allons préparé aujourd'hui. Quand j'ai vu son visage s'illuminait, mon palpitant s'est arrêté de battre. Débordante d'enthousiasme, elle s'écrie : - TROP BIEN. En la voyant de si bonne humeur dès le matin me réchauffe le cœur. Ça me motive également. Je me sens pousser des ailes tout d'un coup. C'est par fierté que j'expose les ustensiles qu'on va utiliser pour la préparation de brownies pour 5 à 6 personnes. - Par quoi on commence, chef ?, me demande-t-elle toujours avec cette même énergie. Je ne pouvais pas trouver de meilleur commis de cuisine. Faire des gâteaux, c'est plus drôle quand on est deux. J'aimais les préparer avec mes sœurs. On organisait des après-midi pâtisseries. Elles m'ont aidé à gagner des sous grâce au vente de gâteaux pour m'acheter la voiture de mes rêves. - Alors, commençons par faire fondre le chocolat. C'est toi qui va le faire. Je vais juste te préparer le bain-marie, puis tu fais le reste. Ce n'est pas la tâche la plus compliquée en soi. - T'inquiète, je serai là, près de toi pour surveiller ce que tu fais. Mon sourire se veut rassurant. Je lui prépare une casserole remplie d'eau que je pose sur la gazinière. Je l'allume et laisse bouillir l'eau tranquillement. Une fois que l'eau est bien chaud, je décide de poser le récipient en verre - rempli de morceaux de chocolat et un peu de beurre - qui recouvre entièrement la casserole. - C'est simple. Je vais te donner une spatule. Tu attends que le chocolat fond et tu vas commencer à remuer au fur et à mesure jusqu'à que le contenu chocolaté devient liquide., lui expliquai-je en douceur. Je vérifie si le chocolat a commencé à fondre. - Vas-y. Tu peux remuer maintenant. Je lui tends une spatule pour qu'elle la prenne et me mets à côté d'elle pour la rassurer de ma présence.

Elle semble presque aussi excitée qu'Ismay. Peut-être quelqu'un devrait-il prendre la peine de leur préciser qu'il ne s'agit que de faire des brownies ? Une activité de femme que les femmes, justement, détestaient de plus en plus et répugnaient à entendre que la cuisine, c'était pour elles, et pas pour les maris. Apparemment, leur triste condition de sexe faible ne les embarrassait pas tant que ça. Mais il y avait bien entendu une différence entre cuisiner pour le plaisir et cuisiner tous les jours, devant trouver une nouvelle idée à chaque repas, pour quelqu'un qui n'en branlait pas une en attendant. Oui, c'était certain qu'il y avait un fossé entre ces deux choses. Et là, il ne faisait aucun doute que même si préparer la bouffe n'était franchement pas son passe-temps favori, Ismay était ravie d'être derrière les fourneaux. Elle était là par envie - et aussi parce qu'elle venait de se faire kidnapper, un peu - et pour préparer un truc ultra succulent. Alors forcément. Oui, les brownies, elle adorait ça. Elle se souvenait encore de la fois où, avec l'un de ses amis de l'université, elle avait essayé d'en faire sans connaître la recette. Dans une tasse. Oui oui. On prenait une tasse, on y mélangeait telles et telles quantités de farine à pâtisserie, lait, sucre, cacao, oeuf, on mélangeait le tout, mettait le résultat au micro-onde et on attendait de voir du brownie dépasser du rebord de la tasse ! Et voilà ! des brownies en trois minutes ! Elle se souvenait aussi du goût relativement exécrable des-dit brownies. Bref, elle était certaine qu'avec Elliot, ça se terminerait bien mieux, ce pourquoi elle écouta très attentivement ses instructions jusque là rudimentaires. D'accord, ça, elle savait faire. Déterminée, elle empoigna la spatule, hocha la tête et lorsque son chef cuisto lui indiqua qu'elle pouvait commencer à remuer le chocolat, elle s'exécuta. Remuer, c'était facile. C'était un passage obligé dans la préparation des crêpes : dessert qu'elle aimait tellement qu'elle avait finalement appris à faire. « Dis, il faut un goûteur pour ce genre d'étapes, pas vrai ? Pour vérifier que c'est bien prêt » avança-t-elle, pas intéressée le moins du monde. Ben non. C'était juste une question comme ça, de culture G, histoire d'être sûre de ne pas rater cette limpide recette lorsqu'elle serait de retour chez elle, ou en tout cas, séparée d'Elliot. Rien de plus. Bon, faux, d'accord. Pas la peine de lui montrer qu'elle ne lui laissait pas le choix. « Ok, je crois que j'ai le coup de main. » Et elle lui jeta un coup d'oeil curieux. Ben oui, c'était quoi, la suite du programme ? À moins qu'Elliot n'attende qu'elle ait terminé, pour être sûre qu'elle ne rate rien de cette suite ? Oh. Adorable.

Passer une matinée pâtisserie avec Ismay n'a pas de prix. Ce qui lui fait plaisir c'est d'être avec la jeune femme. Il faut dire que sa compagnie est plaisante. Sa jovialité transparaît dans ses traits. Ça me rend encore plus heureuse de l'avoir à mes côtés. Ce n'est pas tant de faire des gâteaux qui me plaît le plus, c'est de me retrouver avec une personne que j'apprécie beaucoup. Faire des brownies n'est pas sorcier, en plus. Il suffit d'y mettre un peu du sien. L'anglaise a l'air enthousiaste que moi à l'idée d'en préparer. Des brownies, c'était la première recette que m'a apprise ma grand-mère. Je les aimais tellement quand j'étais petite que j'ai voulu apprendre à en faire. Après ça, j'ai voulu tout apprendre de la pâtisserie. Grand-mère était ravie de m'apprendre. Elle avait surtout la patience de le faire. Je me souviens des gâteaux que j'ai raté. Même les animaux n'en voulaient pas. Je me suis durement entraînée. Depuis, j'en fais tout le temps parce que c'est simple et rapide. Il y a des demandeurs. Étape premier de la recette : Faire fondre du chocolat. On commence par le bain marie. Le chocolat aura une meilleure texture que fondu dans une casserole. Ensuite, il faut remuer avec la spatule. Je laisse la brune le faire. Je reste tout de même à côté pour surveiller. Elle commence par remuer tout doucement. Elle se débrouille très bien en plus. J'examine le chocolat en train de fondre. Il est presque liquide. - Dis, il faut un goûteur pour ce genre d'étapes, pas vrai ? Pour vérifier que c'est bien prêt. Je hoche la tête. Je me dévoue. Je m'en vais chercher une petite cuillère. Je plonge la cuillère dans le chocolat. Je souffle dessus avant de goûter. C'est presque bon. Encore quelques secondes et ça sera prêt. - Ok, je crois que j'ai le coup de main. Je lui souris. Je l'observe en silence, en train de continuer à tourner le spatule. C'est le moment pour moi de passer la suite. Je m'empresse de prendre un récipient et casser trois oeufs. Je les casse un par un. Je verse un peu de sucre dedans. Je mélange avec un fouet rapidement jusqu'à ce que le mélange blanchisse. - Je crois que tu peux arrêter de remuer maintenant. Ensuite, je mets de la farine dans le mélange puis je rajoute le sucre vanillé. Je me tourne vers Ismay avec le récipient dans les mains. J'éteins la gazinière. - Maintenant, tu verses le chocolat dans le mélange. Je lui lance un regard complice. Je fais un signe de tête pour l'inciter à le faire sans crainte.

On remue, on remue, on remue et on se remue, par la même occasion. Pas question de tirer au flan devant les fourneaux. Ismay voulait prouver qu'elle était aussi capable de réaliser une recette simple et au résultat satisfaisant - voire délicieux, si possible - non pas parce qu'elle avait réellement quelque chose à prouver à qui que ce soit, mais parce que ça l'amusait, et parce que, maintenant qu'elle était entièrement immergée dans la passion d'Elliot, ou l'une d'elle, en tout cas, elle voulait s'y plonger à fond. Elle appréciait suffisamment la jeune femme pour ça. Oui, vraiment. Elliot était sans doute l'une des personnes qu'elle appréciait le plus, pour l'instant. Et juste pour ça, elle était ravie de se jeter corps et âme dans la pâte à brownies. Alors elle remuait, remuait, remuait, comme la brune le lui avait dit de le faire. C'était sûrement la partie facile. Forcément, il devait y avoir un passage plus ardu, expliquant le fait qu'elle n'ait jamais été foutue de faire de la pâtisserie par elle-même, seule. Calmant l'activité de son poignet pour ne pas dégommer celui de sa compagne, Ismay l'observa tandis qu'elle goûtait. Parfait. Génial. Et elle recommença, jetant de temps à autre un regard intrigué à ce que faisait la brune à côté d'elle. Finalement, elle pu s'arrêter et pouffa de rire. « Je crois que mon bras va se décrocher » plaisanta-t-elle. C'était faux bien sûr, elle n'était pas débutante à ce point-là. S'exécutant, elle récupéra le récipient plein de chocolat fondu, et en versa précautionneusement le contenu dans le deuxième récipient. « Ça donne combien de brownies, ce genre de recette, à ton avis ? » questionna-t-elle, avisant le mélange, déposant le pot en verre sur le plan de travail. « Pas assez pour tout le nid, je suppose ? » continua-t-elle sans attendre de réponse. Évidemment que non, ils étaient une trentaine, impossible qu'il y en ai un nombre suffisant.« Parce que dans ce cas, j'assomme le premier qui laisse traîner ses doigts ! » et elle parodia un rire diabolique en brandissant la spatule qu'elle avait toujours en main, aspergeant le buffet de gouttelettes de chocolat fondu. « ... oups » et elle rit de son vrai rire, cette fois.