Jusqu'ici, j'ai rencontré deux personnes qui comme moi jouaient d'un instrument. Malheureusement, une sur les deux s'en est allée. Quant à l'autre, j'attends toujours qu'elle me montre l'étendu de son talent. Tandis que je fais le tour de l'une de ces vieilles maisons abandonnées, un son parvient à mes oreilles. Je reconnais tout de suite l'instrument. Un piano. Il ne m'en faut pas plus pour me faire quitter ces lieux sordides et rechercher la provenance du son. Je la trouve enfin. Cette personne qui s'essaie sur un air d'Einaudi. Elle se trouve derrière cette porte, à quelques centimètres de moi. Aussitôt, je décide de pousser la porte. Le plus délicatement possible, bien entendu. Je ne veux pas la perturber, voire même pire l'interrompre. Ainsi, je découvre donc une silhouette féminine, vraisemblablement tombée dans un autre univers. J'ai l'impression de me voir, moi, quand je fais de la musique et que j'en arrive à, inconsciemment, quitter le monde terrestre pour intégrer un monde différent. Un monde qui m'appartient. A moi, et à moi seulement. Je me surprends à sourire face à cette douce mélodie, puis vais finalement m'installer dans un coin où elle ne me remarquera sans doute pas. Mais ma discrétion n'aura servi à rien puisque la jeune femme semble avoir repéré ma présence. Elle délaisse finalement l'instrument. « Qui est là ? » On se croirait dans une partie de cache-cache. Et j'ai sans aucun doute choisi la meilleure cachette: la plus évidente, celle à laquelle personne n'aurait pensé. « Magnifique. », dis-je finalement en guise de réponse.