L'anniversaire d'Ambrosia approchait, elle allait bientôt passer le cap des vingt-quatre ans, et cela faisait déjà un mois qu'elle avait survécue dans cette baraque, cela pouvait se fêter. Mais la jeune femme n'était pas tellement d'humeur joyeuse, ni joviale ces temps-ci, c'était pour elle plutôt le temps des réflexions, et des questionnements. La jolie brune s'était isolée pour midi, car les candidats bruyants, ça commençait sérieusement à l'énerver. Elle repassa dans la cuisine, engagea en rapide conversation avec quelques candidats. Puis lorsque qu'elle passa devant les toilettes -elle trainait dans la maison- la porte s'ouvrit sur Cassidy. Par une impulsion soudaine, la jeune femme le coinça, elle s'était mise devant la porte, et l'empêchait de sortir. « Tu m'évites ? C'est ça ta solution ? » lui demanda t-elle sérieusement, car elle n'avait presque pas vu et ni parlé à Cassidy depuis leur petite scène étrange dans la chambre de Juliette.

La semaine était passée plus vite qu'il ne l'aurait pensé. Eviter des gens, ça prenait plus de temps qu'il en semblait et c'était assez épuisant. D'autant plus stupide, c'est bien vrai, mais que voulez-vous, c'était trop compliqué entre Ambrosia et lui, il n'arrivait plus à suivre ce qui se passait entre eux. Cependant, il se demandait comment il avait fait pour se tenir loin d'elle, durant autant de jours. C'était un véritable exploit, vraiment.
La belle espagnole, elle, ne semblait pas du même avis que lui. Vu la façon dont elle l'avait coincé dans les toilettes alors qu'il s'apprêtait à en sortir et la façon dont elle comprit qu'il l'avait évité toute la semaine, elle n'était vraiment pas contente de ce qui se passait. « J'avais même dans l'idée de continuer à t'éviter, à vrai dire. » soupira l'anglais. « Cela dit, si tu as une meilleure solution, je suis preneur. J'ai essayé de remonter dans le temps, ça n'a pas fonctionné.» lâcha-t-il d'une voix froide. Il devenait un peu sarcastique sur les bords, oui. Comment cela avait-il pu tourner de cette façon-là? Depuis quand c'était lui qui fuyait les gens? C'était un battant, il affrontait les problèmes, il ne les esquivait pas. « Il faut qu'on règle cette histoire, Ambrosia. » souffla-t-il alors en s'adossant au mur. S'ils devaient parler sérieusement, qu'ils le fassent. De toute façon, ils ne pouvaient plus continuer ainsi.

Elle n'aimait pas cette situation, et d'ailleurs, elle se sentait plutôt mal depuis la dernière fois. Il fallait qu'ils en finissent tous les deux. Une bonne fois pour toute. Et la technique de Cassidy qui consistait à éviter Ambrosia n'était pas la plus efficasse, au contraire cela avait blessé la jeune femme. « Eh bien, désolée d'avoir ruiné tes plans. » répondit-elle, bien qu'elle ne l'était pas du tout. Pour la première fois depuis fois longtemps, Ambrosia était ironique. La jeune femme n'aimait pas le sarcasme qu'employait Cassidy, en tout cas, elle n'aimait pas qu'il le fasse avec elle. « Le sarcasme te va mal.» déclara t-elle aussi froide que lui, les lèvres pincées, et son regard planté de le sien. L'ambiance était limite électrique, voir glaciale. Puis Cassidy revint sur 'cette histoire', en s'assuyant contre le mur, la jeune femme resta devant la porte, au cas où il essayerait de filer en douce. « Je crois qu'il est temps, on peut pas rester comme ça. » ajouta t-elle doucement.

Pour le coup, il aurait préféré l'éviter encore quelques jours, juste histoire de savoir ce qu'il pourrait lui dire. Et devoir parler d'une chose qui était tout de même importante (leur relation, ce n'était pas rien non plus) aux toilettes, c'était assez spécial, il devait l'avouer. Et c'est bien vrai que le sarcasme, ça ne lui allait pas au teint. Il ressemblait plus à un doux petit agneau qu'autre chose, il fallait qu'il arrête de soudainement se transformer en loup. Il se contenta de lever les yeux au ciel, puisque dans la situation présente, il trouvait qu'être sarcastique lui allait très bien.
Ils devaient parler. Ouais. Il pensait sincèrement trouver quelque chose à dire, mais maintenant qu'il était devant le fait accompli, il n'avait aucune idée de ce qu'il voulait mettre au clair, comment dire les choses ou tout simplement quoi dire. Néant total. Si bien qu'il laissa le silence s'occuper de cette partie de la conversation, l'entrecoupant par des bafouilles ridicules qui prouvaient bien qu'il ne savait pas comment régler toute cette histoire. « Je ne sais pas quoi te dire. Et j'en ai marre d'essayer de chercher ce que je ressens pour toi. » commença-t-il finalement. Et il n'allait plus tenter de comprendre, il ne se prendrait plus la tête là-dessus. Il agirait comme il le désirerait, comme à sa grande habitude. « J'arrive pas à te voir comme ça, comme l'une de ces filles avec lesquelles je sors. J'ai aimé t'embrasser, mais je sais pas pourquoi, je peux pas te voir comme une "petite-amie". »

Le mouvement de Cassidy: les yeux vers le ciel, n'avait pas échappé à la jeune femme, qui se contenta de serrer sa machoire, et de ne rien dire. Cela vallait mieux pour eux deux. Un silence s'installa entre eux, et c'était plutôt génant cette fois, contrairement à d'autres situations. Ambrosia s'appuya sur l'encadrement de la porte, un tantinet pensive. Elle ne savait même pas par quoi commencer, ni quoi clarifier, ni quoi expliquer. Déjà que tout était confus dans sa tête, alors l'exprimer à Cassidy, cela relevait quand même de l'impossible. « C'est peut-être parce que tu ne ressens rien pour moi, non ? » lança t-elle extremement lucide. Ambrosia n'était pas du genre à faire dans les détails, et surtout pas aujourd'hui. La brunette croisa ses bras sur sa poitrine, écoutant ce que lui disait Cassidy. « Je crois que je peux pas te voir comme un 'petit ami' non plus. mais ce que je t'ai dis l'autre jour à propos du baiser est vrai, mais je n'arrive toujours pas à interpréter cela.. » déclara la belle demoiselle.

Il devait arrêter avec ses phrases à double sens, genre, sérieusement, parce que sinon, c'était sûr que personne n'allait le comprendre. « Je voulais pas dire ressentir ressentir, je ne sais juste pas... si j'ai envie de t'embrasser ou non, si je veux plus ou non...» fit-il. C'était trop étrange pour lui, de dire ce genre de choses à Ambrosia, il n'aurait jamais cru lui dire ça un jour. La belle reprit alors la parole. Le bon point était qu'elle non plus ne le voyait pas comme un petit ami potentiel, cependant, le coup du baiser restait une énigme pour l'un comme pour l'autre et cela n'avait rien d'agréable. Il soupira. « Je comprends pas comment on a fait pour en arriver là. Tout a changé tellement rapidement. Qu'est-ce que ce baiser signifie? Je n'en ai aucune idée. J'essaye sans cesse d'essayer de mettre des mots sur ce qui se passe entre toi et moi, mais aucun ne correspond pleinement. J'ai l'impression d'avoir tellement changé depuis que je suis dans ce jeu. Avant, je n'aurais pas passé plus de deux secondes à réfléchir, j'aurais continué ma vie. Et maintenant, je suis là et je passe des heures à tenter de comprendre. Mais qu'est-ce qu'il y a vraiment à comprendre? Qu'est-ce que je fous, là, sérieusement? Un gars qui n'a jamais donné une seule chance à l'amour se retrouve dans le nid d'amour dirigé par Cupidon? C'est quoi ce délire? » s'exclama l'anglais. Il ne se comprenait plus lui-même, alors, forcément, il n'allait pas comprendre quoi que ce soit d'autre pour le moment. « Je suis perdu depuis au moins deux semaines, peut-être même trois. Alors, je sais pas quoi te dire Ambrosia. Je ne sais pas ce qui se passe entre nous, je ne sais pas.»

La jeune femme était fatiguée de ces éternels conflits avec Cassidy, elle en avait marre de lutter, elle ne le ferait plus. A partir de maintenant, elle n'y ferait plus attention, et agirait au gré de ses envies, et de ses sentiments. Tiendrait-elle cette résolution? Pas sûr. « Donc si j'ai bien compris tu ne sais pas si tu as envie de m'embrasser ou non ? C'est bien cela que tu es entrain de me dire.. » demanda la jeune femme en fronçant légèrement les sourcils. Il était bien plus perdu qu'elle en fin de compte, car elle, elle le savait. La belle espagnole écouta le long discours de Cassidy, en le fixant, sans le lâcher du regard. Elle pinça ses lèvres un instant, laissant un blanc entre eux avant de lui répondre. « Tout le monde change. On n'échappe pas à la règle Cassidy. Moi aussi je change, et ma façon de te voir à changé, mais je ne peux pas t'expliquer, car j'arrive même pas à me situer. Ni à savoir comment je te vois, je sais juste que tu représentes beaucoup pour moi. C'est déjà ça. J'en suis au même point que toi. Parcontre en ce qui concerne ta vison de l'amour, là je peux rien te dire, je trouve ça triste que tu ne puisses pas y croire, ça peut être génial quelquefois tu sais. » lâcha la jeune demoiselle. Puis il lui répondit. Elle non plus ne le savait pas. « Pour résumer on ne sait rien..Peut-être qu'on essaye trop d'analyser la situation, et que cela nous nuit. On est trop spontané pour faire ça, cela ne nous ressemble pas. » répondit-elle brutalement, ouai, ils étaient paumés.

C'était le cas de le dire, Cassidy était aussi perdu qu'un petit poucet qui n'a pas jeté de petits cailloux pour retrouver son chemin, c'est vous dire. « Je pense savoir que oui, j'ai envie de t'embrasser, mais par rapport à ce qu'on a ou avait tous les deux, je ne sais pas si c'est correct de ma part de le vouloir. » répondit-il sans même y réfléchir. Si bien qu'il se demandait s'il en avait vraiment envie. Ouais, ouais, il était tordu comme gars.
Ambrosia donna son point de vue face aux réflexions de l'anglais. Ils semblaient se comprendre, puisque l'un comme l'autre, ils ne savaient plus ce qui se passait. Et oui, c'était triste qu'il n'accorde pas de chances à l'amour, mais c'était comme ça, c'était un fait avec lequel il avait vécu toute sa vie, comme une mauvaise habitude, c'était ancré en lui. La belle continua et souleva un bon point: ils étaient bien trop spontanés pour réfléchir aussi longtemps à une seule et même chose, au lieu d'agir à leur guise. « C'est vrai, je réfléchis trop. » lui accorda-t-il. « Dans ma vie, ça a toujours été facile, il me suffisait de mettre une petite étiquette sur chaque chose qui m'arrivait, sur chacune de mes relations. Je savais qui était quoi. Et maintenant, je ne sais plus ce que tu es, quelle étiquette tu arbores. Ça me perturbe de plus savoir. » lui avoua-t-il alors, la détaillant du regard, ne quittant plus ses yeux. Peut-être pourrait-il se contenter d'une étiquette qui a pour annotation « amie que j'ai envie d'embrasser »? Au fond, le bordel qu'on pouvait observer dans ses affaires était un bon reflet de ce qui se passait dans sa tête, bien qu'il essayait désespérément de faire le tri.

Cassidy lui répondit qu'il ne savait pas si cela était correct, par rapport à la relation qu'ils entrenaient, la brune fit une petite moue, avant de décroiser ses bras. Ils se prenaient trop la tête, Ambrosia avait raison. « On s'en fiche de savoir si c'est correct ou non. » répondit la jeune femme en bougeant ses mains tandis qu'elle s'exprimait. Après tout la jeune femme ne se posait pas la question de savoir si c'était correct d'avoir envie d'embrasser Cassidy, non elle ne le faisait pas car elle en avait envie un point c'est tout.
Cassidy avoua qu'elle avait raison, la brunette hocha la tête sans rien rajouter, car la discussion était suffisement compliqué, il ne fallait pas en rajouter. Puis le candidat lui parla de son histoire d'étiquette sur les relations, qui fit sourire la jeune femme pour la première fois depuis la conversation, ses lèvres s'étirent de quelques centimètres. Puis la candidate sentit le regard de Cassidy posé sur elle, il ne la quittait pas, Ambrosia leva les yeux, et le fixa à nouveau, et mordilla sa lèvre inférieur, nerveuse. Elle se demandait ce qu'il pensait à ce moment. « Ah mon étiquette a changé. Comme notre relation..C'est le fait de pas savoir où l'on en est qui te perburbes à ce point? » lança la jeune femme.

Pouvait-il vraiment se permettre de ne pas prendre en compte, que ça soit correct ou pas? Il n'en savait rien. Pour lui, une amie devait être une amie et essayait d'éviter l'ambiguïté, c'était bien, même très bien. Et maintenant qu'il y avait plus avec elle, était-ce réellement bien de sa part? La plupart dirait que ce n'était pas grand chose et pourtant, ça semblait important pour lui. La belle pensait visiblement le contraire.
La discussion avait passé le pire, la pression avait tombé d'un cran, ça allait mieux, d'après le fin sourire qui éclairait le visage de son... disons amie. « Je suppose, oui. » répondit-il en un léger haussement d'épaules. C'était sûrement en partie pour cela, oui. Il croisa les bras à son tour, continuant de la regarder, une malice non dissimulée dans le regard. « Alors, qu'est-ce qu'on fait maintenant? On enfouit au plus profond de nous cette envie? On fait comme si de rien était? Ou bien...?» Ou bien, il continuait à l'éviter? Qu'allaient-ils faire maintenant, c'était ça la vraie question. Il n'y avait pas dix milles solutions de toute façon, il restait plus qu'à en choisir une.