Ah, ce lac. Voilà un endroit qu'il n'oublierait pas. Voilà un endroit qui avait une grande dimension symbolique aux yeux du suisse. Pour sûr qu'il avait vécu maintes émotions en ce lieu, et que cela avait de nombreuses fois marqué son aventure. Pour autant, il ne pouvait s'empêcher d'y repenser avec embarras. La plupart des choses qui s'étaient produites ici lui rappelaient l'être perturbé et beaucoup trop sensible qu'il avait été durant les premières semaines de jeu. C'est bien simple, le grand brun ne comptait plus le nombre de larmes qu'il avait pu laisser couler du coté de ce lac, mais également un peu plus loin, davantage près de la plage, vers laquelle il était justement en train de se diriger. Il faut savoir que Raphaël avait toujours eu une grande peur de l'eau. C'était autant valable pour l'eau de mer, que pour l'eau d'un lac, celle d'une piscine ou même celle qui lui servait à se laver. C'était comme ça depuis son enfance, depuis qu'on l'en avait dégouté, disons. Et justement, il estimait avoir fait quelques progrès de ce coté là, lui qui avait été jusqu'à réclamer - et par deux fois - des cours de natation. Il ne savait nager que partiellement désormais, mais pour quelqu'un qui avait toujours eu grandement peur de glisser ne serait-ce qu'un pied dans le bassin d'une piscine, c'était assurément une évolution des plus remarquables. Raphaël avait en tout cas - et bien modestement - tendance à être fier de lui, de son parcours, des améliorations notables au niveau de son quotidien, de sa personnalité ... Il lui restait un peu de chemin à parcours, quelques efforts encore à faire, mais il avait tendance à penser - à raison, espérons - que le plus gros était maintenant fait. C'est d'ailleurs sur cette réflexion qu'il finit par atterrir face à la plage, où il ne tarda pas à reconnaitre une silhouette familière. Un corps fin et accroupi, des cheveux roux, une peau pâle. A n'en point douter, il s'agissait ici de Dagga. Et visiblement, celle-ci l'avait tout autant remarqué. Au signe de la jeune femme, il approcha, arrivant bien vite à son niveau, et décidant alors de s'accroupir à ses cotés. Il lui sourit, puis posa son regard sur ce qu'elle venait visiblement de déposer sur la surface de l'eau. « Es-tu celle qu'il me faut féliciter pour la réalisation d'une si jolie chose ? » demanda-t-il alors, plus souriant encore. Il ignorait si ce bateau était d'elle, mais il le supposait légitimement. « En tout cas, cet adorable bateau semble flotter. Mais je suis certain qu'il cherche juste à m'impressionner. » Il adressa un clin d’œil à sa camarade. Oui bon, l'humour et Raphaël, ça n'était toujours pas une grande histoire d'amour, c'est clair. Mais il ne lâchait rien ! Il persévérait, même. Même si ça restait très limite, effectivement.

C'était un fascinant petit bateau en bois. Quelque chose de joli, de modeste, peut être d'un peu enfantin, mais de tout à fait plaisant à admirer. Raphaël, en tout cas, était charmé par ce petit objet qui, d'après lui, avait du être fabriqué des mains de Dagga. Lui, il n'aurait jamais pu construire quoi que ce soit de ce genre. Si les jouets des kinder surprise ne lui avaient jamais réussi, autant dire que demain n'était pas la veille du jour où il s'essaierait à la construction d'objets en bois. Ah non, clairement pas. Ou si tel était le cas, il va de soi qu'il n'obtiendrait jamais un aussi joli résultat. Parce qu'encore une fois, il appréciait beaucoup la vue de ce charmant bateau. Sa camarade ne tarda en tout cas pas à lui confirmer qu'elle en était bien la créatrice, ce qui le fit sourire davantage. Non pas que Dagga ait particulièrement une tête à construire des bateaux en bois, mais disons qu'il lisait en elle comme une certaine sensibilité artistique. Ouais, c'est surtout qu'elle s'était trouvé près du bateau, et que donc ça paraissait logique, mais soit, ça n'enlevait rien à la beauté de l'objet. Il ne rebondit alors pas, se disant que le simple fait d'évoquer des félicitations revenait naturellement à la féliciter. C'est alors qu'il constata que le bateau flottait. En tout cas, pour le moment, c'était bien le cas. De quoi amuser Raphaël et le pousser à s'essayer une fois de plus à l'humour, allant même jusqu'à adresser un clin d’œil à la jolie rousse. A croire qu'il commençait quelques peu à se lâcher. Sa camarade ne manqua alors pas de réagir, ce qui le fit ricaner comme un enfant. En fait, c'était là tout le charme de l'objet qu'avait fabriqué Dagga : il lui faisait penser au genre de jouets qu'il aurait aimé posséder durant son enfance et qui aurait assurément fait de lui quelqu'un de plus heureux au fil des années. Parfois, ça se jouait à rien. Parfois, ça se jouait à un simple bateau en bois. Cruelle vie. « Je suis ... et bien, je suis ... je suis Malik. » Ah oui ? Curieux, il n'en avait pas l'air. Alors, attendez la suite ... « Raphaël et moi avons échangé nos corps. Je l'ai toujours trouvé plus grand, plus ... beau ? ... Hm ... » Oula, pas sûr que Malik se serait laissé aller à ce genre de propos, d'autant plus que c'était petit, oh oui vraiment petit, d'en profiter pour se vanter. Mais bon, merci d'admettre que c'était trop rare pour être relevable, hm. Finalement, il lâcha un rictus embarrassé, en mode "ne fais pas attention aux conneries que je peux dire, et rassure-toi, je suis bel et bien sobre". Parce que voilà, là tout de suite, ça n'était peut être pas très flagrant, donc bon. Sa camarade lui rendit alors son clin d’œil, après avoir gentiment appuyé ses propos. Il adopta même une posture cambrée, un peu trop pédante, et dénotant complètement avec son allure habituelle. Cette après-midi, il avait décidé de ne pas se prendre au sérieux, et bon sang ce que ça faisait du bien. « Je vais bien, oui. Pour l'une des premières fois de ma vie, j'essaye de faire le ... le con. Ça me plait, j'en ai marre d'avoir toujours l'air guindé, coincé. Je commence à me libérer, et j'aime ça. J'aime beaucoup de choses en ce moment. » Il aimait rire, il aimait de nouveau manger à sa faim, tout comme il aimait danser, et qu'il aimait chaque personne qui lui faisait aimer tant de choses. Hm, vous suivez ? « Et toi, Dagga, comment vas-tu ? » demanda-t-il à son tour, dans un sourire. Cet échange était incroyablement différent de celui dans la cuisine, ou dans les souterrains. Il était en fait mille fois plus plaisant. Raphaël, en tout cas, appréciait ce genre de changements. Il n'avait jamais rien eu contre Dagga. D'ailleurs, elle faisait partie de ceux qui l'avaient aidé à évoluer. Il lui en était alors grandement reconnaissant.