Le ciel gris n’augure rien de bon, et ne m’indique clairement pas à quoi je dois m’attendre en sortant dehors. Mais j’en ai un peu marre de rester cloitré à l’intérieur, à rester inactive. Parce qu’à ce rythme, je risque de passer au travers du répertoire de la bibliothèque en un laps de temps record. Non, allons plutôt braver l’hypothétique froideur de l’hiver, ça me donnera une bonne raison pour bouger : celle de me garder au chaud. J’enfile un manteau par-dessus une tenue déjà chaude – me préparant au pire – et file à l’extérieur. Je regrette déjà le surplus de vêtements. Sans que ce soit doux, le fond de l’air est frisquet, mais pas désagréable. Quelques minutes sur la patinoire suffiront à me réchauffer, de toute évidence. Car c’est bien là que je me rends. Enfilant ces patins de bonnes qualités (mais jamais aussi bonne que les miens, qui sont confectionnés sur mesure par des professionnels), je file sans hésitation sur la glace et commence à faire quelques tours de piste pour m’échauffer, d’abord en douceur, puis en prenant un peu plus de vitesse à chaque coup de patin. J’y ajoute même un peu de challenge en parcourant le tout de reculons avec un glissée impeccable. J’ai l’habitude, il faut dire. Mon corps s’habituant à l’effort, je m’arrête un instant pour déposer mon manteau sur un siège non-loin de là, et je reprends mes glissements contrôlés sur cette surface glacée. J’enchaîne quelques sauts et pirouettes qui sont des plus simplistes pour moi, mais qui, visiblement, en impressionne d’autres. Comme ce candidat que je remarque du coin de l’œil, me scrutant avec cet air béat au visage. « Whaouh t’es super douée dis donc. » Et comment. C’est mon métier, si je ne l’étais pas, je n’aurai jamais atteint mon niveau actuel. Je freine à quelques pas de lui, l’éclaboussant au passage de quelques éclats de glace. « Merci. » me contentais-je de lui répondre. Les compliments, peut importe leur provenance, sont toujours à prendre. Ça permet d’éviter de se foutre à terre quand les critiques pèsent un peu lourds sur nos épaules. « Je suppose que tu ne t’en sort pas aussi bien… » Et ce n’est même pas une hypothèse, mais plutôt une affirmation. Seulement, énoncée ainsi, c’est moins agressant.