Voilà plusieurs nuits que Mado peinait énormément à s'endormir. Elle était globalement une petite dormeuse, quelqu'un qui trouvait difficilement le sommeil, mais ces derniers jours, c'était d'autant plus compliqué. A cela, il y avait assurément une explication toute simple, toute bête. Avoir du se remémorer certains faits de son passé, et pas des plus plaisants, l'avait nettement préoccupée. Il y avait des choses auxquelles elle aurait préféré ne jamais repenser, mais qu'elle avait du se remémorer quelques peu afin de révéler son secret et d'en expliquer la source. A ce jour, elle tâchait à nouveau de laisser tout ça de coté, mais réveiller le passé était plus évident que de le rendormir, ça elle n'en était maintenant que trop sûre. D'autant plus que depuis dimanche, elle avait une raison supplémentaire de difficilement trouver le sommeil. Bob, son admirable partenaire, avait été éliminé, et avait décidé de ne pas rester au sein du nid dans l'immédiat. Il était parti, l'avait laissée ici, et oui, peut être Mado se sentait-elle maintenant un peu abandonnée. Pour autant, elle savait qu'elle n'était pas seule. Il lui restait Ezra, mais également Fitz, qui lui avait d'ailleurs proposé de dormir avec elle cette nuit, une chose qu'elle n'avait pas mis longtemps à accepter, évidemment. Elle repensait inévitablement à la nuit qu'ils avaient passé dans la chambre secrète, plus d'une semaine auparavant, et même si le cadre était ici différent, au même titre que la situation, il était certain que dormir à ses cotés lui ferait le plus grand bien, que cela l'apaiserait. Et puis, ils avaient sans nul doute besoin de parler, de certaines choses, et ce serait peut être le moment opportun pour oser les évoquer. Alors elle s'était glissée dans le même lit que lui, et s'était sans mal accommodée d'une étreinte réconfortante. Il lui demanda alors si ça allait mieux, et elle comprit aisément que cette question en cachait plusieurs, qu'il la lui posait en pensant à différentes choses, à différents faits. Pour autant, il lui fallait dans un premier temps opter pour une réponse assez globale. « Je crois, oui » souffla-t-elle alors, assez sincèrement, alors qu'elle sentait la main du jeune homme lui caresser les cheveux, ce qui la fit doucement sourire. « J'ai simplement besoin de retrouver une certaine sérénité, de ne plus penser à certaines choses. » Il comprendrait à quoi elle faisait référence, vu tout ce qu'elle avait révélé vendredi dernier, lors de l'ultime révélation. « Et puis, je me sens soutenue » reprit-elle, dans un souffle, avant d'orienter sa main vers la joue de son camarade, qu'elle caressa doucement, après avoir eu un peu de mal à la localiser à cause de la pénombre. Elle sentait qu'il était là pour elle, et ça lui était important. Elle n'avait jamais pu compter que sur elle ou sur Ezra, pourtant, Fitz représentait à ce jour un soutien évident. « Mais j'ai si peur de te perdre » reprit-elle, en soupirant doucement. Mais ça, il avait du le comprendre lorsque sa conversation avec Bob avait été diffusée. Le mieux était encore qu'elle le lui dise directement. Parce que c'était vrai, que c'était une chose qu'elle redoutait véritablement. Parce que sans lui, ce ne serait plus pareil, et qu'elle ne voulait pas avoir à faire comme s'il n'y avait rien eu. Non, elle en serait incapable, elle se connaissait.

Après la révélation de son secret, Mado aurait pu décréter qu'elle avait besoin de s'éloigner un peu de Fitz, non pas parce qu'il avait découvert son secret et qu'elle était susceptible de lui en vouloir pour ça - ça n'était clairement pas le cas, bien au contraire - mais parce qu'elle aurait pu estimer préférable de faire le point sur certaines choses la concernant, avant de se montrer aussi proche de lui que ces derniers temps. Mais elle n'avait pas pu instaurer la moindre distance entre eux, tout simplement parce qu'elle était arrivée à la conclusion qu'elle aurait justement besoin de lui pour dépasser tout ça, pour rendormir les fantômes de son passé et se concentrer sur le présent, sur son présent. A ce jour, il n'y avait plus de Madeleine, plus de jeune fille sous l'emprise de son père, plus d'adolescente livrée à elle-même. Parce qu'à ce jour, il y avait Mado, une jeune femme plus forte, et n'ayant plus du tout l'intention de vivre dans le passé, comme elle avait pu le faire pendant un certain temps. Alors oui, ça n'était pas simple, dans la mesure où elle vivait au quotidien avec le fruit de ce qu'elle avait vécu pendant des années, mais il fallait qu'elle se serve de cette aventure pour marquer un tournant dans sa vie, pour créer une cassure entre ce qu'elle s'infligeait avant de venir ici et ce qu'elle pourrait faire pour être plus heureuse en sortant de cette aventure. Être plus heureuse, ça passerait notamment par le fait d'assumer ce qu'elle voulait, chose dont elle était déjà certaine depuis quelques temps, mais qu'elle peinait peut être encore à exprimer, sans doute par peur d'être rejetée. Pour le moment, en tout cas, elle était dans ce lit, avec Fitz, et elle se sentait en sécurité. Comme lundi dernier. Comme chaque fois qu'elle était avec Fitz, finalement. Il était si attentif, si prévenant avec elle. Il s'inquiétait par exemple de son état, lui demandant comment elle allait, ce à quoi la jeune femme tâcha de répondre de façon plutôt positive, estimant que ça pouvait être pire, que ça l'avait d'ailleurs été vendredi. A ce jour, ça allait déjà un peu mieux, bien qu'elle doive effectivement prendre le temps de laisser quelques petites choses de coté, histoire de ne plus y penser, de ne plus penser qu'au meilleur, et plus au pire. Fitz laissa alors entendre qu'il serait là si elle ressentait le besoin d'en discuter, et cette idée ne put naturellement que lui faire plaisir. « Merci d'être là. Je pense que je pourrais avoir besoin de me confier à quelqu'un d'autre qu'à mon frère, que ça pourrait me faire du bien. Donc j'y penserai. » Elle lui était en tout cas clairement reconnaissante de se montrer disponible pour elle, car la jeune femme n'avait jamais pu compter sur grand monde par le passé. Fitz était alors devenu un soutien évident, un socle à part entière, et il est vrai qu'elle craignait de le perdre. Ça, il avait du s'en rendre compte en assistant à sa conversation avec Bob. Pour autant, il semblait vouloir qu'elle lui dise directement ce qu'elle avait pu sous-entendre avec son ancien partenaire, et c'était compréhensible. Il venait en plus de dire qu'il ne la laisserait pas tomber, alors elle pouvoir bien prendre son courage à deux mains et lui faire quelques confidences. « Beaucoup de choses » souffla-t-elle alors. « Tu sais, je suis réellement attachée à toi. J'ai bien conscience que tout ça, que toute cette histoire qui s'est étendue sur une bonne partie de notre aventure, a pu un temps laisser penser que j'étais une petite groupie simplement charmée par un physique, mais ... mais ça n'est pas le cas. Je me suis laissée séduire par tout ce qui te compose. J'ai d'abord eu du mal à me l'avouer, par fierté et par peur du rejet, mais je crois que certaines choses m'ont bien vite trahie ... » Elle se mit à rire légèrement, en repensant à ses crises de jalousie, à ces fois où elle en avait fait trois tonnes pour bien peu de choses et où elle était éventuellement passée pour une tarée. Soit. « Tu sais combien ça a été difficile pour moi de me laisser apprivoiser, mais je ne l'ai pas regretté. Parce que chaque instant que j'ai passé avec toi m'a épanouie. Tu as changé énormément de choses pour moi, Fitz. Tu m'as aidée à bien des niveaux. Tu m'as aidée à laisser tomber une carapace particulièrement tenace, à faire de nouveau confiance aux hommes, ou en tout cas à changer d'opinion concernant les meilleurs d'entre eux, dont tu fais partie à mes yeux. Tu m'as aussi aidée à assumer ce que je voulais, à assumer mes envies, mes désirs. » Et à repenser à la nuit de lundi dernier, elle était naturellement troublée. « Tu sais, je n'ai pas apprécié que Sydney évoque notre nuit dans la chambre secrète. Pas nécessairement par pudeur. Surtout parce qu'en l'évoquant de cette manière, elle a fait l'impasse sur tout ce qui importait vraiment. Sur tout ce qu'on a partagé, à travers nos regards, nos baisers, nos étreintes ... Dans tes bras, je me suis sentie désirée, mais surtout respectée. Tu te doutes qu'on m'a rarement donné l'impression d'en mériter, du respect. Alors c'est peut être pitoyable à dire, mais ça a été la plus belle nuit qui m'est été donnée de passer. » Alors, oui, elle risquait de passer pour une idéaliste, mais compte tenu de son passé, elle estimait ne pas s'avancer en disant ce genre de choses. Pour Fitz, c'était probablement différent, car peut être n'avait-ce été pour lui qu'une nuit comme une autre, et elle pouvait le comprendre. Mais pour Mado, c'avait eu un sens symbolique extrêmement fort. « Je ne veux pas que ça te fasse peur, mais ... mais cette nuit-là, j'ai ressenti quelque chose. Quelque chose que je ne connais pas, que je n'identifie pas, mais quelque chose d'extrêmement fort, et je ne parle pas de ... » Du plaisir qu'il lui avait donné. Non, elle ne parlait pas de ça. Elle parlait de ce qu'elle avait ressenti, après l'amour, lorsqu'il avait plongé son regard dans le sien. De ce qui lui avait donné envie de rire, mais aussi de pleurer. De ce qui à ce jour la laissait perplexe, aussi. « La question qui m'a été posée au prime m'a mise assez mal à l'aise, mais elle m'a aussi fait réfléchir. J'ai maintenant peur d'en attendre un peu plus que toi nous concernant. » Parce qu'elle, et bien, elle était maintenant sûre de ce qu'elle voulait. Mais peut être n'était-ce pas réciproque. Peut être Fitz ne voudrait-il décidément pas être associé à elle. Elle comprendrait.

Spoiler:

A quoi bon faire court lorsqu'on avait matière à faire long ? Parce que clairement, Mado avait beaucoup de choses à dire à Fitz. Des choses qu'elle avait sur le cœur depuis un certain temps déjà, d'autres qui étaient un peu plus récentes et dataient par exemple de la semaine passée, et dans tous les cas, elle ne se voyait pas lui adresser le strict minimum. Si elle se confiait, ça n'était certainement pas pour le faire à moitié. Quand elle faisait les choses, c'était pour les faire bien, et entièrement. Alors oui, il est possible qu'elle se soit lancée dans un discours assez conséquent, et dans lequel elle tâcha de faire comprendre au jeune homme qu'il lui avait apporté énormément de choses en l'espace de quelques semaines et que cela lui avait permis de s'épanouir pleinement. Elle avait véritablement besoin qu'il sache quel rôle majeur il avait joué dans son aventure, combien il avait été un soutien, un socle, un pilier. Combien Mado l'estimait et le respectait pour tout ce qu'il lui avait apporté. Elle le sentit alors renforcer leur étreinte, ce qui lui fit beaucoup de bien, mais ne l'empêcha pas de poursuivre, en évoquant leur nuit dans la chambre secrète, le fait que Sydney en ait maladroitement parlé au prime surtout. Parce que oui, c'était une chose qu'elle en ait parlé, mais c'en était une autre qu'elle en ait parlé de cette façon, en laissant simplement entendre qu'ils s'étaient éclatés. On perdait tout le symbolisme de la situation en évoquant la chose de cette manière. Alors certes, elle n'attendait pas non plus d'une chroniqueuse qu'elle comprenne combien ce moment fut important et riche de sens pour elle, combien elle s'était sentie honorée et respectée et combien elle avait chéri chaque seconde qu'elle avait passé dans les bras de Fitz, mais tout de même, ça n'était pas qu'une nuit comme une autre pour elle, tout simplement parce que ce fut la première fois qu'on lui avait laissé le choix, finalement. C'était peut être pathétique, mais c'était vrai. Mado n'avait donc pas tellement l'impression d'idéaliser la chose, quoi qu'on en pense. Toujours est-il que Fitz rebondit dans un premier temps sur ces quelques faits, et qu'elle l'écouta, très attentivement, parce qu'elle était naturellement curieuse de savoir ce qu'il pouvait penser de tout ça, de ce qu'elle venait d'évoquer. La première partie de son discours lui fit peut être un peu mal au cœur, parce qu'il est vrai qu'au départ, elle avait renvoyé des signaux pour le moins brouillés, et s'était montrée distante et peu intéressée sans doute. Par fierté, évidemment, mais aussi et surtout par crainte, et par désir de se protéger. Elle avait toujours fonctionné comme ça avec les hommes, alors inévitablement, elle avait fonctionné comme ça avec Fitz. « C'est souvent ce qu'on imagine de moi, tu sais. Que le père de mon fils m'a brisé le cœur et abandonnée et que c'est pour cette raison que je me suis si catégoriquement fermée aux hommes pendant des années. C'est même un schéma que j'exploite moi-même, subtilement, lorsque les gens sont trop curieux. Ça a beau être un peu limite, c'est quand même plus reluisant que la réalité, hm. » Parce que oui, avant de venir ici, et lorsqu'elle n'assumait décidément pas ce qu'elle avait vécu et dans quelles conditions avait été conçu son fils, Mado s'était plu à laisser entendre que le père du gamin s'était simplement barré. Elle n'aurait jamais pu dire qu'ils avaient le même père, par exemple. Ça l'aurait moyennement fait, sans doute. Ouais, hein. Mado voulait en tout cas rebondir sur les autres propos du jeune homme, qui disait s'être un peu inquiété du fait qu'elle puisse lui en vouloir pour la nuit qu'ils avaient passé dans la chambre secrète. Pourquoi ça ? A cause de son secret ? Ah non, elle ne pouvait absolument pas le laisser penser une pareille chose. « Fitz, si j'ai voulu qu'on aille jusqu'au bout cette nuit-là, c'est parce que je le désirais vraiment. Je ne me suis forcée à rien, j'ai simplement assumé ce que je voulais. Et en l'occurrence, je voulais que tu me fasses l'amour » souffla-t-elle alors, en caressant son bras. C'était aussi simple que ça et elle ne comprenait pas qu'il ait pu en douter. Okay, la révélation de son secret avait pu bousculer quelques esprits, mais elle était un peu gênée de savoir qu'il avait pu penser qu'elle aurait finalement regretté de s'être offerte à lui. Elle l'avait fait en son âme et conscience, en accord avec ce qu'elle voulait vraiment, et elle ne regretterait jamais une telle chose. Mado se confia ensuite davantage, sous-entendant qu'elle avait pu développer un ressenti inédit cette fameuse nuit, un ressenti qu'elle était incapable d'identifier ou de nommer mais qui l'avait fait se sentir très lunatique, sur le moment. Elle n'attendait pas de lui qu'il lui explique ce qui avait pu lui arriver, simplement qu'il ne soit pas effrayé par cette confession. Elle attendrait d'être fixée mais ne voulait surtout pas qu'il prenne peur, ce qui ne semblait donc pas être le cas. Il disait tenir beaucoup à elle, et naturellement, ça lui faisait grandement plaisir. Il y eut également la question qu'on lui avait posé au prime. S'estimait-elle en couple avec Fitz ? C'était une question compliquée et à laquelle elle avait eu du mal à répondre. Elle ne sut pas ce qu'elle risquait à répondre clairement par l'affirmative, alors elle préféra ne pas s'y risquer. Mais aujourd'hui, elle était fixée sur ce qu'elle voulait, c'était certain. Elle avait cependant peur qu'il n'ait pas les mêmes attentes qu'elle. Après tout, il devait connaitre ce genre de situations, et peut être qu'en l'état, ça ne le tentait pas plus que ça. Fitz l'interrogea alors, et elle n'osa pas livrer le fond de sa pensée. Il la trouverait peut être bête, et décidément trop peu confiante, mais bon, autant s'y risquer. « Je ne sais pas, je ne suis pas dans ta tête, mais ... mais je me dis que puisque tu peux avoir toutes les filles que tu veux, et dans la mesure où la perspective de vivre quelque chose d'officiel avec moi ne doit pas avoir grand chose d'attrayant ... » Elle ne termina pas sa phrase et se contenta de le fixer, malgré la pénombre, tout en soupirant. « Tu as le droit de penser que tu vaux mieux que ça ... que moi, parce que c'est sans doute vrai. » Parce que bon, c'était Mado hein, rien qu'elle. Alors disons qu'elle ne lui tiendrait pas rigueur du fait qu'il puisse préférer ne rien officialiser. Non pas qu'elle le prenne pour un goujat, hein, mais il avait quand même bien le droit de ne pas vouloir de n'importe qui, hm.

Non, il n'y avait jamais eu d'amour déchu, de briseur de cœur, tout simplement parce que Mado n'avait jamais eu le moindre petit-ami, et que le père d'Aaron n'était autre chose que son père à elle. Mais était-ce une chose qu'elle pouvait répondre aux gens qui s'inquiétaient de voir son fils exclusivement entouré de sa mère et de celui qu'ils savaient être le frère de cette dernière ? Non, pas vraiment. Tout simplement parce que ce serait s'exposer à des jugements - on aurait vite fait de l'accuser, elle, d'avoir été une adolescente dévergondée, par exemple - et qu'elle n'avait pas la moindre envie de se laisser atteindre par ce que pourraient penser de sombres inconnus. Aussi, elle ne voulait pas qu'on embête son fils avec ça. Il ne savait rien et c'était très bien comme ça. Il n'avait que quatre ans et n'avait assurément pas besoin d'en savoir plus sur son père dans l'immédiat. Cela pouvait encore attendre un certain nombre d'années, c'était certain. Toujours est-il que Mado s'était rendue dans ce programme télévisé, pour parler de son histoire, à travers un secret difficile à assumer. Parce que c'était préférable de le révéler de cette manière, en déballant tout, ce qui éviterait peut être à ceux qui auraient voulu la juger de parler trop vite, sans tout savoir. Maintenant c'était dit, et peut être qu'elle essuierait malgré tout quelques critiques une fois dehors, elle y était de toute façon préparée, mais ça ne changeait absolument rien au fait qu'elle ait jusqu'à présent préféré prétendre que le père de son fils était tout simplement parti, qu'ils les avaient laissé et qu'elle avait été amenée à l'élever seule, avec Ezra. Dans un sens, c'était un peu vrai, vu qu'il n'avait jamais été prévu que son père assume la gravité de ses actes et dans la mesure où la loi interdisait normalement à un incestueux de reconnaitre son enfant. De toute façon, souvent prise au dépourvue par des petits curieux, elle avait rarement autre chose en tête que ce genre d'issues faciles, qui suffisaient généralement à en semer plus d'un. En tout cas, Fitz semblait comprendre. Il n'imaginait sans doute pas combien le voisinage de la française était moins dupe que les autres et se satisfaisait par exemple beaucoup moins de ses réponses évasives et de moins en moins crédibles au fil des années, et c'était sans doute mieux comme ça. La jeune femme lui sourit alors partiellement, peut être un peu pensive, car appréhendant sans doute quelques peu le moment où elle serait confrontée aux regards des gens à l'extérieur, de ceux qui auraient suivi l'émission et sauraient ainsi pour son secret. Sans compter qu'il restait quelqu'un qui avait pu la voir également, ou en tout cas entendre parler de son passage dans l'émission, quelqu'un avec qui il était formellement exclu qu'elle reprenne contact un jour, quoi qu'il arrive. Elle n'avait assurément pas besoin qu'un être comme lui revienne dans sa vie. Il n'y avait tout simplement plus sa place. Quant au reste, Fitz semblait penser que la jeune femme aurait pu regretter de s'être offerte à lui dans la chambre secrète, ce qui n'était assurément pas le cas, parce qu'elle avait agi selon ses envies et qu'elle n'avait aucun regret à avoir, étant donné que tout s'était passé exactement comme elle l'avait voulu, et plus encore. Non, vraiment, elle ne voulait pas qu'il pense que la révélation de son secret avait pu lui faire regretter quoi que ce soit. Bien au contraire, finalement. Car à se remémorer tant de choses, elle avait d'autant plus pris conscience de la chance qu'elle avait eu de partager cette nuit avec Fitz, un homme honnête et respectueux, qui lui avait laissé le choix jusqu'au dernier stade. Fitz sembla alors quelques peu rassuré, probablement un peu gêné aussi, tandis qu'il formula une question qui ne tarda pas à embarrasser Mado également. Sans doute avait-il déjà une petite idée de la réponse qu'elle lui donnerait, car le comportement de Mado n'avait assurément trompé personne. De toute façon, elle n'avait jamais voulu laisser penser qu'elle avait connu d'autres hommes avant lui, parce qu'évidemment, ça n'était pas le cas. « Non, jamais » souffla-t-elle en retour. Peut être qu'il trouverait ça bizarre, finalement. Peut être que c'était une chose de le deviner mais une autre de l'entendre dire de sa bouche. « Parce qu'avant que je te rencontre, avant que je me sente en toute sécurité avec toi, il était formellement exclu qu'un homme me touche. » Elle ne voulait pas le gêner ou le flatter, elle voulait simplement qu'il comprenne qu'il avait décidément changé quelque chose en elle, qu'il lui avait envie de reconsidérer un certain nombre de choses. Par contre, il ne fallait pas qu'il pense qu'elle avait voulu éviter de devenir vieille fille en s'arrangeant pour mettre le premier gentil garçon dans son lit. Si ça avait été lui alors qu'avant ça n'aurait été personne, ça n'était assurément pas pour rien. Par la suite, ils en vinrent à évoquer la question qui fut posée à la française lors du prime. Si sur le moment elle n'avait pas tellement su quoi répondre, elle était maintenant plus sûre de ce qu'elle voulait. Mais peut être que Fitz, lui, ne voulait pas davantage. Peut être ne voudrait-il rien officialiser avec la fille qu'elle était, cette paumée de la vie qui n'avait pas toujours été facile à suivre, mais aussi à vivre. Elle ne savait pas, parce qu'elle n'était pas lui, qu'elle n'était pas dans sa tête. Une chose qu'il lui confirma alors, tandis que le ton du jeune homme laissait entendre qu'il pouvait avoir du mal à comprendre, et à apprécier, ses dires. Elle l'écouta alors, attentivement, quand il reprit la parole. Elle se sentit alors un peu bête de l'amener à parler de tout ça, de ce qui avait pu le faire souffrir à une époque. Surtout qu'elle donnait probablement l'impression de douter de lui et de ses motivations. Ainsi, la question qu'il lui posa fut prévisible. « Non, je ne pense pas que tu sois comme ça. J'en suis même sûre. Mais c'est une chose d'être proches à l'échelle de l'aventure, et une autre de revenir à la réalité une fois tout ça terminé. Tu pourrais être tenté de te dire qu'il y a mieux pour toi dehors qu'une nana que tu as rencontré au sein d'une émission télévisuelle, et je pourrais le comprendre, car je me doute qu'il y a des filles beaucoup plus intéressantes que moi à l'extérieur et ... » Elle se tut un instant, prenant conscience du fait qu'elle puisse décidément lui laisser penser qu'elle le prenait pour un coureur, ce qui n'était pas le cas. Mais exprimer ce qu'elle pensait, à savoir qu'il aurait peut être tort de "laisser une chance" à une fille aussi rasoire qu'elle l'était, ça n'avait rien de simple. « Je ne veux pas que tu t'empêches de faire quoi que ce soit une fois dehors, c'est tout » reprit-elle alors, espérant ne pas l'avoir vexé, car ça n'était pas le but. Si Mado savait que Fitz était un homme comme on en voit trop peu, peut être que lui penserait, après tout ça, que Mado n'était qu'une fille parmi tant d'autres, loin d'être la plus intéressante en tout cas. D'où la suite et le fait que Mado estime qu'officialiser avec quelqu'un comme elle pourrait ne pas intéresser grand monde. Parce qu'elle estimait que Fitz valait un peu mieux que ça, sans doute. Mais là encore, ça n'était peut être pas la chose à dire. « Non Fitz, je ... je ne parlais pas tant de ta famille ou de la mienne que de ce qu'on est, nous. De ce que je suis, moi. A savoir une emmerdeuse caractérielle et possessive. Une impulsive qui dramatise tout et en fait des tonnes à la moindre occasion. Je ne pense que ça fasse très envie, d'être avec une chieuse comme moi. » Elle se mit pour autant à rire légèrement, consciente du fait que tout ça était assez absurde et qu'ils faisaient compliqué quand ils pouvaient faire simple. Ainsi, Mado se redressa légèrement pour venir effleurer les lèvres de son camarade. « Mais une chieuse gentille, quand même, et qui a très envie, elle, d'être avec toi » finit-elle par souffler, avant de déposer un baiser sur ses lèvres. Elle aurait peut être du commencer par là, en fait. Oui, peut être.

Cette nuit dans la chambre secrète, Mado n'avait pas préalablement imaginé qu'elle les mènerait aussi loin, qu'elle les pousserait à devenir intimes, à partager tant de choses, autant sur le plan physique que sur le plan psychique. Car au départ, elle avait quelques peu appréhendé l'endroit et le symbolisme qui lui était propre, s'étant demandée ce qu'on attendait précisément d'elle, ce qu'elle devrait faire, si elle y était obligée, comme toutes les fois où elle l'avait été ... Elle s'était posée énormément de questions, avait bien vite angoissé mais était finalement arrivée à la conclusion que rien ne servait de se prendre la tête avec tout ça, que c'était bien inutile et que la seule chose à faire était de suivre ses envies sur le moment. Puis, très vite, elle s'était faite une raison, avait compris qu'elle avait peut être donné le nom de Fitz parce qu'une part d'elle-même le désirait depuis la fois où ils s'étaient embrassés, dans la chambre, un désir qui avait pu s'accroître dans le jacuzzi et qui s'était ainsi concrétisé dans la chambre secrète. Alors elle lui avait demandé s'il la trouvait désirable, ce à quoi elle reçut une réponse affirmative, puis l'avait incité à l'embrasser, histoire d'être sûre que ce qu'elle tenterait ne lui vaudrait pas d'essuyer un rejet. Et lorsqu'elle fut sûre d'elle, sûre de vouloir aller au bout avec Fitz, mais surtout sûre qu'il pourrait le vouloir également, elle s'était lancée, l'avait embrassé, avait pris des risques, et tout s'était ensuite fait naturellement. Une chose conduisant à une autre, ils avaient passé un moment intime. Une chose peut être assez "habituelle" pour un jeune homme de l'âge de Fitz, qui avait du avoir un certain nombre d'aventures tout de même, mais beaucoup plus inédite pour Mado. Car oui, autant le dire, il fut sa première expérience sexuelle consentie, la première qu'elle avait connu en l'espace de plus de quatre ans - puisque son père l'avait gardé sous son emprise bien après qu'elle ait atteint sa majorité, rappelons-le - ainsi, elle avait tendance à le considérer comme sa première fois, n'ayant pas franchement envie que ce qu'elle avait vécu par le passé compte. Maintenant, il était compréhensible que Fitz ait cherché à savoir s'il était effectivement le premier, bien qu'il ait du s'en douter, à plus d'une reprise, ne serait-ce que sur le moment. Elle le confirma alors, et ne mit pas longtemps à craindre qu'il ressente une certaine pression. Ce n'était clairement pas le but, et elle pourrait s'en vouloir, dans un sens, de l'avoir placé dans cette situation. Parce que oui, Mado s'était toujours refusée à s'offrir aux hommes qui avaient pu tenter certaines choses. Ne serait-ce que ses collègues de travail, pas toujours très farouches et délicats, et ignorant naturellement tout de son passé. Mais avec Fitz, tout lui avait semblé si évident. Peut être parce qu'elle avait eu le temps de l'apprécier et de se laisser séduire par ce jeune homme qui l'avait toujours beaucoup respectée. Mais il ne fallait pas qu'il croit lui devoir quoi que ce soit parce qu'il avait été sa première véritable expérience sexuelle. Fitz disait en tout cas espérer avoir été comme il fallait, et cette phrase fit doucement sourire la jeune femme. « Tu l'as été, oui, à chaque instant. Et c'est aussi pour ça que je ne regrette rien » lui assura-t-elle alors, tout bas également. Il l'avait mise en confiance, ne l'avait pas brusquée, lui avait maintes fois laissé le choix et donné l'occasion de tout arrêter si elle le préférait. Il avait été un partenaire idéal, un complice évident, en plus d'un amant fantastique, mais ça elle allait peut être éviter de le préciser, sait-on jamais que ce soit gênant et malvenu. « Et puis, ce serait plutôt à moi de m'inquiéter de ce genre de choses » souffla-t-elle ensuite, en se pinçant la lèvre. Parce que si elle n'avait pas eu envie d'y penser sur le moment, elle s'était demandée si ... son inexpérience n'avait pas joué contre elle. S'il avait vraiment pris autant de plaisir qu'elle, finalement. Parce qu'elle avait suivi ses envies mais n'avait peut être pas été particulièrement efficace. Bon, peut être aurait-elle du s'abstenir de dire ce genre de choses, parce qu'elle risquait de psychoter légèrement désormais, hm. Quant au reste, à la question posée au prime, elle les mena à une discussion où il n'était pas nécessairement aisé de pleinement se comprendre, en partie à cause de Mado qui passait par des propos parfois futiles quand elle pourrait aller droit au but. Du coup, elle craignait qu'il se méprenne et pense qu'elle le voyait comme un goujat disposé à multiplier les conquêtes. Tout ce qu'elle voulait dire, c'est qu'elle ne voulait pas qu'il se croit obligé de s'en tenir à elle si ça n'était pas ce qu'il voulait véritablement, si d'autres femmes étaient susceptibles de lui plaire à l'extérieur. Ce serait naturel, humain sans doute. Et elle tâcherait de comprendre et de se faire une raison. Elle fut en tout cas rassurée par son discours, comprenant qu'il avait décidément des valeurs, des principes, l'une des choses qui lui avait tout de suite plu chez lui. « Je dois t'avouer que ça m'arrange » souffla-t-elle alors, en lâchant un petit rire. Sans blague. Oui, ça avait tendance à l'arranger qu'il dise ne pas être disposé à s'intéresser aux minettes qui pourraient être tombées sous son charme. Déjà parce qu'elle préférait penser que ce genre de filles ne l'intéressaient effectivement pas - vu que Mado avait une assez mauvaise opinion d'elles, sans surprise - mais aussi parce que cela signifiait sans doute qu'elle comptait véritablement pour Fitz, ce qui ne la laissait pas indifférente. Quant au fait d'être chiante, et bien oui elle l'était, mais visiblement pas assez pour qu'il se soit lassé d'elle. Comme quoi. « Oh, à une ou deux reprises, ça a failli quand même » souffla-t-elle, parce qu'elle préférait s'en amuser aujourd'hui. Elle faisait référence à la fois où Cupidon les avait poussé à s'embrasser et où elle avait cassé l'ambiance, mais aussi à la soirée de la Saint-Valentin où elle avait, et bien, également cassé l'ambiance. Pour le coup, elle avait été très chiante, et pour le coup, ils avaient bien failli rester brouillés. Tout ça pour dire que Mado en vint enfin aux faits et qu'elle lui avoua avoir envie d'être avec lui, tout simplement. D'ailleurs, elle l'embrassa, comme pour illustrer symboliquement ses propos, sentant alors leur étreinte se resserrer. « Parce que je suis une nana compliquée et que c'aurait été trop simple, je suppose » reprit-elle, toujours amusée. Non, il n'était pas passé pour un enfoiré, pas du tout. Et puis, c'était de la faute de Mado, qui compliquait toujours tout. Fitz reprit alors la parole et la jeune femme se pinça la lèvre. Elle comprenait ce qu'il voulait dire par là, ainsi, elle était touchée. Touchée qu'ils se comprennent enfin et qu'ils parviennent ainsi à répondre à la question du prime. Visiblement, ils désiraient la même chose. « Donc, si on me reposait la question, je pourrais répondre "oui" sans craindre de me faire des idées ? » souffla-t-elle, peut être un peu longue à la détente, mais voulant être sûre de ne pas se méprendre. Il voulait être avec elle ? Vraiment ? Parce qu'elle, elle voulait décidément être avec lui. Oui, plus que tout. « J'ai eu un peu peur, sur le moment, que ma requête soit déplacée, ou précipitée, que je ne sois pas en position de te demander de me faire une telle promesse. Mais j'espérais que tu comprendrais combien c'était important pour moi de me sentir particulière, privilégiée. Combien j'aurais envie de pouvoir me dire que tu ne partagerais pas avec d'autres ce que tu pourrais partager avec moi à un certain niveau, du moins ici, au sein de cette aventure » fit-elle, en caressant la joue du jeune homme à l'aide de son pouce. Parce que dehors, et bien, elle ne savait pas ce qu'il pourrait leur arriver. La promesse concernait surtout le jeu, la chambre secrète. Elle n'avait pas osé se projeter, voir plus loin et trop lui en demander. A ce jour, peut être qu'elle oserait. Elle était en tout cas rassurée par ce qu'il lui avait dit tout à l'heure. Au fond, s'il avait le besoin d'aller voir ailleurs, elle préférerait qu'il se sépare d'elle au préalable. L'humiliation serait alors moindre. Même si la peine, elle, serait équivalente.