Ça serait mentir de dire que je ne me suis pas perdu au moins une ou deux fois – sinon plus – depuis mon arrivée dans le décor de Fake Lover. Car c’est bel et bien un décor, un studio de cinéma qui nous sert de résidence. Original, comme idée, il n’y a pas à dire. Mais côté commodité, on repassera. Ces allées-venus entre l’intérieur et l’extérieur, la non-prolixité des essentiels, je sens que pour certains, ça deviendra chiant à la longue. Ceux qui auront du mal à s’adapter. Pas comme moi. Je suis le genre de mec qui est comme un poisson dans l’eau, et ce, partout où il nage. Alors ce ne doit pas être une surprise que je vous dise que j’ai pris la direction de la plage. Nager, eau… il me semble que ces deux éléments se marient très bien. Vêtu pour l’occasion d’un short de plage bleu et blanc, d’une camisole et de sandale, mon seul plan est de profiter du soleil de Los Angeles sans les tracas de la vie quotidienne. Il s’agit de mes premières vacances loin du boulot, même si ce n’en ait pas vraiment. Disons que c’est ce qui s’en rapproche le plus, au court des dernières années. Et je pense que Yann a été assez clair à ce sujet : « Mec, amuse-toi, une occasion comme celle-là, tu ne vivras pas ça deux fois! » Le pire, c’est qu’il a raison. Installée sur un transat, un verre à la main, une jeune femme me repère et m’invite à la rejoindre d’un signe de la main. « Hey salut... euh... Machin ! » Je suis convaincu que ce Machin ne m’était pas réellement destiné, et je passe outre. « Salut ! » que je lui lance, faute de mieux. « Un peu de compagnie, ça te va ? » Je suis poli, je préfère demander. D’ailleurs, en attendant sa réponse, j’en profite pour bifurquer vers le bar pour me servir un truc. Une bière, tiens, ça fera l’affaire.

Sa tête me dit vaguement quelque chose, je me demande si c’est parce que je l’ai croisé ça et là dans le Nid, ou parce que j’ai discuté avec elle lors du prime – pour le peu de temps où ma partenaire m’a laissé fait compagnon seul. Mais non, ce n’est pas ça. Je suis carrément à côté de la plaque. Et le pire c’est que son nom, je l’ai sur le bout de la langue. Bref. « Oh non, tu ne me déranges pas du tout, je t’en prie, on va pouvoir papoter! Enfin… si tu aimes papoter, certains n’aiment pas ça ici je crois. Tu es Oliver c’est ça ? Le cuisinier ? » Bingo, voilà que j’ai une illumination soudaine. Enfin, presque. Mais c’est un pas dans la bonne direction « Touché! Et toi, j’hésite, c’est Ismène ou Odessa? Va savoir, je vous mélange toute les deux, faut m’excuser, j’ai pas tant la mémoire des noms. » Et pourtant, je suis persuadé que ces deux demoiselles ne se ressemblent en rien. Seulement, mon premier contact avec elles fut sur mon blog il me semble, et leurs messages s’entremêlent dans ma tête. C’est flou. « Mais va pour le papotage. Je suis le genre de mec qui tolère les séances magasinage interminables de ces bonnes copines, alors tu sais, discuter un peu, ça ne m’effraie pas tellement. Je préfère même ça à être le porteur de sac attitré… » Un léger sourire se fraye un chemin au coin de mes lèvres. Il y a un transat libre à ces côtés, et je m’y installe, enlevant mes sandales pour être capable de m’installer en tailleur sans encombre. « Et tiens, si on trinquait à notre aventure. Ça se fête, je pense. » Il ne reste quand même plus que nous, trente petites brebis, parmi tout ce flot de moutons. C’est qu’on doit s’être démarqué, en quelque sorte.

« Odessa mais disons que je te pardonne car je trouve très flatteur de pouvoir être confondu avec Ismène, qui est très jolie, enfin… si je ne me trompe pas de candidate car j’ai encore un peu de mal, comme tout le monde j’imagine. » Plus d’une femme se serait irritée d’avoir été prise pour une autre, ça me fait sourire de voir qu’elle n’est pas de celles-là. Au contraire, elle trouve même le moyen d’y trouver un compliment. Ce n’était en rien le but, mais bon, si ça lui fait plaisir, soit. « Non, non, je ne pense pas que tu te trompes, par contre, laisse-moi te dire qu’elle n’est pas la seule à être jolie dans les environs. » Petit clin d’œil amusé envers la principale intéressée. Oh, n’allez pas croire que je suis en mode charmeur, en fait, je suis tout simplement comme ça avec tout le monde, le genre attentionné, gentil, adorable. « Tant mieux alors ! Et comme ça, tu es le porteur de sac attitré ? Je crois que tu mérites une médaille, mon meilleur ami grogne toujours quand je le lui demande et finalement, ne le fais jamais. » J’esquisse un sourire. Tiens, ça me dit vaguement quelque chose, ça. En fait, la plupart des petits amis de mes bonnes copines sont de cette race. Moi, j’ai préféré me la faire accommodante, parce qu’en dehors des apparences, je suis loin d’être un mec chiant. « Ah non, pas de médaille pour moi. Je sais juste être patient, c’est tout. Et puis, je les vois si peu souvent à cause de mon horaire de fou que j’ai appris à faire sacrifices pour leur faire plaisir. » Qu’est-ce que je ne ferais pas pour elles, d’ailleurs. Tout le bonheur de ces dames. Il faut croire que ma mère m’a très bien élevée, je suis un gentil garçon, moi. « Très bonne idée ! » m’annonce finalement ma camarade quand je lui propose de trinquer. Elle lève son verre et j’en fais de même avec ma bouteille. « À notre… aventure, qu’elle soit aussi longue que possible et pas trop mouvementée… Si tu veux ajouter quelque chose ! » « À ma future victoire bien sûr… non, je blague! À notre aventure, oui ! » Certes, on y pense tous, en notre for intérieur, mais je suis loin d’être de ceux qui s’en vantent. Je veux gagner, je suis venu pour ça, mais je n’ai pas toutes les cartes en main pour m’en assurer. Alors je ne fais que faire de mon mieux, et prier.

« Je vois que la production n’a pas lésiné sur les charmeurs cette saison et je ne vais pas m’en plaindre ! Sauf si tu parlais d’une autre et dans ce cas, je vais aller me noyer de honte… » Je laisse échapper un léger rire, et j’hoche négativement la tête, levant les yeux au ciel. « Je n’ai pas envie de me la jouer lifeguard aujourd’hui, alors si tu pouvais éviter de te noyer, ça m’arrangerait... » Qu’elle prenne ma remarque, et la précédente, comme elle le désirait. Certes, on aurait pu croire que je m’adressais uniquement à elle, mais en fait, c’était plutôt un commentaire fait à l’ensemble des candidates. Sans être pour autant intéressée à faire quelques achats, rien ne m’empêchait de regarder la marchandise, si vous comprenez le sous-entendu. Cupidon avait toujours su mettre le grappin sur des candidats de tous les horizons, de tous les âges, de toutes les cultures. Et ce beau monde passait généralement bien sur grand écran. Il faut savoir plaire à la majorité, aux téléspectateurs derrière son écran. Et le ‘moche’ n’est pas vraiment dans leur corde. Au final, nous devrions tous être flattés d’être là, de répondre à ce standard télévisuel. Quelle chance ! Et d’ailleurs, en parlant de ça, Odessa semble prétendre que mes amies doivent être comblées, en ma compagnie. Après tout, quel homme accepterait sans rouspéter de porter des sacs toute la journée? Moi-même, j’en connais peu. « En tant que cuisinier, c'est ça ? Tu travailles dans un restaurant alors ? Et comment se fait-il qu'en étant aussi serviable, l'une de tes connaissances n'ait pas réussi à te mettre le grappin dessus ? » Je me doutais bien que ce genre de question viendrait. La réponse attendra un peu. Elle a touché l’une de mes cordes sensibles en parlant de mon métier. « Oui, je suis cuisinier. Je travaille dans la restauration depuis… presque toujours, en fait. Et je possède mon propre bistrot, maintenant. C’est une occupation à temps plein, ce sont de longues journées interminables, mais j’adore ça. » Il le faut bien ! « Et c’est parce que je le veux bien que je suis célibataire. C’est loin d’être par manque de… choix? Ou d’option, si tu veux. » Les termes n’étaient pas juste, mais je ne trouvais pas meilleur synonyme. Oui, certaines de mes amies m’avaient clairement signifié avoir le béguin pour moi, mais toutes, sans exception, avait eu droit à un refus de ma part. Elles en connaissaient les raisons. Et je ne souhaitais pas les étaler aux vues de tous. Trinquer me semble être une bonne distraction. « Ambitieux donc… Enfin j’imagine qu’on l’est tous, non? » Il s’agit probablement là de l’un de mes plus grands traits de caractère. Car il faut de l’ambition pour mener la carrière que j’ai, pour diriger un restaurant qui compte une clientèle de plus en plus nombreuse, et de plus en plus critique. Ces deux étoiles Michelin nous ont certes offerts une belle visibilité, mais aussi, beaucoup de pression. Il faut satisfaire à la demande. « Sans l’ambition, je ne me serai jamais présenter à ces auditions. Oui, je souhaite gagner, me rendre jusqu’à la toute fin, mais je ne suis pas con, je sais que ça ne se passera peut-être pas comme je l’ai prévu. On est jamais à l’abri d’un imprévu ou d’un accident de parcours, d’une distraction. » Aussi bien être honnête. Je ne suis pas là pour faire joli à la télévision, ni même pour flirter avec de belles demoiselles. J’ai d’autres objectifs, plus ludiques, en tête. En espérant que mon aventure ne tienne qu’à ça. Et aux quelques rencontres que je ferais sur ma route.

( purée, je voulais pas faire aussi long )

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