J'étais une de celles qui se lèvent tôt. Non pas pour entretenir mon brushing ou pour repasser en révision mon maquillage, non, on ne pouvait pas dire que j'avais le physique de toutes ces femmes qui prennent un peu trop soin d'elles. Voyez, j'aimais prendre soin de moi, là n'était pas le soucis. L'hygiène avait d'ailleurs une place importante dans mes critères, cependant je crois que j'aimais simplement apparaître au naturel et n'avait jamais peur de me montrer sous mon vrai jour. Par exemple, prendre une photo de moi sans maquillage ne me dérangeait pas vraiment, contrairement à certaines femmes qui elles, se révulsaient et en venaient presque aux cris et aux mains lorsqu'elles n'étaient pas prises sur leur bon profil. J'étais une adepte des grimaces, et ce simple critère expliquait pas mal de choses. Je n'avais pas peur d'être la personne que je suis, je n'avais pas peur de ne pas être prise au sérieux, puisque c'est bien souvent en sachant rire de soi que l'on devient appréciée par les autres. Je m'étais construit une importante base de fans sur ces simples critères, être soi. Tout au long de ces années, mes supporters m'avaient porter sur une vague de délire ambiant qui m'avait comblée de bonheur. Tous ces petits messages sur les réseaux sociaux, ces forums qui parlaient de moi, qui décrivaient chaque tenue que je portais, c'était juste incroyable. Evidement, à l'époque je n'étais pas encore la femme que j'étais aujourd'hui, mon style était encore un peu sombre, mes cheveux plus courts, mes yeux plus noirs. J'avais évolué, et en étais heureuse. Passant une main dans ma chevelure, je laissais une de mes mèches blondes dévier sur mon épaule alors que je franchissais le pallier de la salle de bain. Là dessus, je m'arrêtais, observant comme hypnotisée, comme absente l'homme qui se tenait face à moi. Bien malgré moi, et alors que ce n'était totalement pas mon genre, je ne pu contenir cette réfléxion intérieure. Il était drôlement beau. Enfin je veux dire, de toute façon, je crois que tous les candidats de cette saison étaient des sortes de mannequins, non ? Du moins ils auraient pu, alors que ce n'était clairement pas mon cas. Par chance je n'étais ni trop grande, ni trop petite. J'avais juste un physique tout à fait banal, parfois même enfantin, lorsque je ne portais aucun maquillage. Il se figea un instant avant de tourner son regard vers moi. « J'ai quelque chose sur le visage ? » il s'approche légèrement, son ton déjà plus doux « Tu veux que je te laisse la place peut-être ? » cherchant mes mots comme une gamine de quatorze ans rencontrant les Tokio Hotel, je finis par grimacer de ma propre stupidité tout en prenant la parole. « Hm... Non, non, tu ne me déranges pas, je vais juste prendre la douche d'à... » je remarquais alors le savon coulant sur son corps, alors que le jeune homme avait presque quitté la douche pour venir me parler. Je m'interrompu sur un ton un peu plus affolé, mais amusée tout de même « Attention t'es entrain de mettre de la mousse partout ! » dis-je en pointant le chemin qu'il venait de tracer sur le carrelage, un léger rire cristallin s'échappant de mes lèvres.

Je l'observe un instant alors que son regard dévie dans la trajectoire du mien, retraçant un filet de mousse sur le sol de la loge. Je ne savais pas bien pourquoi il était avancé, peut-être était-ce juste pour me parler, ou peut-être s'était-il senti menacé ? Je ne le connaissais pour ainsi dire pas, du moins pas encore, et ne pouvais donc de toute évidence pas lire dans ses actes. « J'avoue ne pas y avoir fait assez attention. Je nettoierai tout ça après. » dit-il en remontant ses yeux azurés jusqu'aux miens. Je me sens bête le temps d'une poignée de secondes, transpercée. Mais finalement, tout se coupe, tranché par une musique qui m'était familière. Une musique qui en cet instant, allait me gêner tout particulièrement. Parce que je ne m'imaginais pas réellement embrasser un parfait inconnu, pas que je ne l'ai pas déjà fait, non, seulement le contexte était bien trop intime. Il était à moitié nu, face à moi, il y avait tout de même de quoi être gênée. Une musique qui n'était pas vraiment la bienvenue, non. Alors, je vis son visage s'approcher lentement du mien, mon palpitant se libérant les chaines de ma cage thoracique. Je me sentais comme une gamine, totalement perdue, assistant sans aucun contrôle à son premier baiser. Je me sentais stupide. Alors, ses lèvres se déposèrent un court instant sur les miennes. Simple contact. Les trais de mes bras défièrent la loi de la gravité, se redressant presque instantanément sans que je n'ai réellement de contrôle sur ceux ci. Ma poitrine effleure un instant son torse avec que celui ci ne se retire. Je n'avais pas bougé d'un millimètre. Peut-être ne me ferais-je jamais à l'entente de cette sonnerie. Passant une main dans sa nuque, il baissa un instant la tête en reprenant la parole. « Désolée pour ce baiser médiocre. » il se retourne et le jet d'eau frappe de nouveau sa peau. « J'ai pourtant rarement connu de baiser aussi doux. » repris-je alors en un sourire apaisé, tentant de le rassurer. Et c'était vrai. Me retournant à mon tour, je m'approchais du lavabot, observant mon reflet dans la glasse. Je n'étais même pas maquillée, et commençais presque à m'en vouloir. C'est toujours dans ce genre de moments là que je n'étais jamais prête. A force de prôner le fait que je n'avais pas peur de paraitre au naturel devant les gens, j'en oubliais parfois qu'eux, au contraire, pouvaient se sentir repoussés. Non pas que j'attendais quoi que ce soit dans cette situation, cependant il était je pense normal pour une femme que de se sentir désirable lorsqu'un homme venait déposer ses lèvres sur les siennes, aussi machinal ce geste soit-il. Je pousse un léger soupir, mes pupilles fixant ces longs yeux d'émeraude en amande avant que mon regard ne dévie sur le reflet de dos du jeune homme. Je ne savais même plus ce que je faisais ici, là, dans ce tee shirt blanc trop grand, flottant au dessus de mon frêle corps, recouvrant un mini short en jean ni trop court, ni trop long. Et clairement, je doutais qu'il veuille de ma présence à ses côtés pendant qu'il était entrain de se doucher. Prétextant de sortir une trousse de maquillage qui n'était même pas la mienne, et qui clairement, allait à l'encontre de ce que j'avais pu lui annoncer plus tôt, je reprenais la parole. « Je crois que j'ai envie d'en apprendre un peu plus sur toi... » je secoue la tête, stupide. « Enfin si tu acceptes de bien vouloir m'en dire plus, bien entendu... Je m'appelle Brune. »

Je n'avais jamas été quelqu'un de très porté maquillage. Peut-être parce que je trouvais ça long et fastidieux, ou peut-être parce que je n'aimais pas ce poids sur mon visage. Que je me préférais sans, ou encore que de toute façon, avec ou sans cela ne changeait pas grand chose. J'étais communicative, extravertie, cependant je n'avais clairement aucune expérience en matière de flirt. Bien sûr, j'avais déjà eu des relations par les passé, plusieurs même, mais rien de bien concret, rien de durable. Au fond je n'étais qu'une gamine de plus patientant dans son cercueil de verre, en attente d'un prince. C'était pathétique. Je me ressaisis un instant, parce que je dois vraiment avoir l'air stupide. Mes yeux s'échouent un instant sur cette trousse qui n'est de toute évidence pas la mienne. Elle est noire, surmontée d'une boucle et languette argentées. J'ai envie de me baffer. Mais pas le temps de m'infliger un quelconque châtiment que le jeune homme est déjà à mes côtés, sans même que je ne dise mot, une serviette autour de la taille, les sourcils froncés. « Tu sais, tu n'as pas besoin ça. Tu es plus jolie au naturel. » mes yeux grimpèrent rapidement aux siens avant de jongler entre ceux ci et la trousse. Il a certainement raison. J'observe alors mon reflet, pensive, comme si je n'étais de toute façon pas vraiment convaincu. Les gens qui m'avaient observé grandir pendant des années à travers des concerts et autres représentations avaient certainement toujours du penser que ce style punk que j'arborais par le passé était celle que j'étais. Que c'était celui ci que je porterais à vie. Mais ce n'était pas le cas. Je n'étais plus cette adolescente rebelle, j'avais grandi, ma musique avait évolué. « Tu as probablement raison. » lâchais-je sur un ton grave, avant qu'un fin sourire écorche mes lèvres « De toute façon ce n'est même pas la mienne. » il va me trouver stupide, et ce serait clairement normal. Je ne tarde d'ailleurs pas à connaitre son nom « Enoch. » qui annonce tout en plantant son regard dans le mien. « Qu'as-tu envie de savoir ? » à vrai dire, je n'avais pas d'idée précise. Je n'aimais pas franchement les présentations basiques, j'aimais les détails futiles, ceux qui vous permettaient de réellement pouvoir sortir une personne d'une situation pour arriver à l'apprécier à sa juste valeur. « Je ne sais pas... Ce que tu fais de tes soirées lorsque tu es seul. Ce qui te fait sourire. Si tu aimes passer des heures à observer l'océan, ou faire du vélo en pleine foret. Des petites choses qui font une vie, je suppose. » un sourire s'esquisse sur mon visage, alors que mes pupilles dévient vers la trousse de maquillage que je tiens encore entre mes mains. Je décide de la pousser avec détermination contre le mur, l'éloignant ainsi de moi.

Malgré le fait que le jeune homme ne parle pas vraiment, je n'avais pas non plus l'impression qu'il était d'une timidité un peu trop poussée. Non, il me semblait juste être... calme. Du moins c'est le sentiment que j'éprouvais là, avec lui. J'étais calme. Je repoussais ainsi la trousse de maquillage à l'appartenance inconnue et ce sous les conseils d'Enoch. Il trouve que je suis mieux sans. C'est une première. En général, les hommes préfèrent les femmes avec du maquillage, histoire de cacher les imperfections de leurs visages, comme par exemple ces taches de rousseurs s'éparpillant à coup de pinceau, léger, sur l'arrête de mon nez. Chose que les maquilleuses de la prod s'étaient empressée de masquer lors de mon entrée au sein du nid. Je ne savais pas bien si j'étais belle ou d'une simplicité un peu poussée, mais j'avais toujours opté pour la seconde option, me cachant longtemps derrière cette apparence de rockeuse, alors que je ne cherchais en vérité qu'à définir mon identité. Le jeune homme attrapa un tube de mousse à rasée, s'en déversant dans une de ses mains avant de l'étaler contre sa première joue, longeant son menton pour atteindre sa seconde. « Je n'ai pas une vie très ... palpitante. » il sourit légèrement, j'arrive à dénoter une certaine gêne dans son regard, alors qu'il n'a pas vraiment lieu d'être. « Je ne sors pas beaucoup, il faut dire. Je travaille dans mon atelier de menuiserie à confectionner des meubles en bois. J'aime promener mon chien le soir, en regardant les étoiles. Ce qui me fait sourire ... Je ne sais pas ... La bonne humeur des gens. J'aime l'ambiance chaleureuse des pubs, le son de la cornemuse. Je ... » il quoi ? Les yeux brillants, j'ai toujours aimé entendre les gens parler d'eux. Je trouve ça intéressant. Je trouve qu'il n'y a pas mieux que d'apprendre à connaitre de parfaits inconnus. Peut-être suis-je simplement un peu trop sociable. « Désolé. Je dois t'ennuyer avec mes histoires. » dit-il en baissant la tête, ne tardant de cet fait pas à se couper. Du sang dévale un instant du côté gauche de son menton, et une légère moue désolée s'esquisse sur mon visage. « Attends, ne bouge pas. » lui dis-je, préoccupée. Je n'ai jamais vraiment apprécié la vue du sang, et si j'en apercevais en trop grande quantité, je pouvais parfois faire un malaise. Mais la plaie n'était clairement pas assez grande pour m'effrayer. Ouvrant le tiroir du lavabot, je saisissais un bout de coton que je mouillais légèrement, juste un bout. Un de mes doigts se glissa sous le menton du jeune homme pour redresser son visage, le tournant ainsi vers moi. J'étais concentrée, telle une infirmière un peu trop préoccupée par l'état de son patient, alors que de toute évidence, ce n'était qu'une blessure, qui se refermerait au bout de simplement quelques heures . Son visage était encore à moitié endui de crème. Je déposais donc doucement le coton sur la plaie du jeune homme, chassant ainsi le sang qui s'en évadait. « Voilà. » que je murmure peut-être plus pour moi que pour lui. Me rendant compte que je suis peut-être un peu trop proche du jeune homme, je décide finalement de retirer mes mains de son visage, me replaçant à ma place initiale tout en observant son reflet. « Je suis sûre que tes meubles sont très beaux. Tu as de la chance, je n'ai jamais été très douée pour tout ce qui touche aux travaux manuels. » à vrai dire, je n'avais jamais vraiment eu le temps de m'y intéresser, ma vie étant déjà bien trop remplie par une autre passion qui était la musique. Décidant qu'il devait me trouver stupide de ne pas bouger, je retirais ainsi mes vêtements, me retrouvant en maillot de bain avant de me diriger sous la douche. L'eau chaude ne tardait d'ailleurs pas à glisser sur mon corps. Finalement je jetais un nouveau coup d'oeil par dessus mon épaule, repensant à ses paroles. « Je trouve qu'il n'y a rien de plus beau que les étoiles. Que l'on soit à New York, Londres ou Paris, elles sont toujours là pour illuminer nos nuits. » lâchais-je, rêveuse. Il m'était déjà arrivé de m'allonger dans l'herbe, quelques nuits, juste pour observer les étoiles briller au dessus de moi.