Pour la première fois depuis que je suis entré dans le nid je me pose la question de savoir ce qu'il se passe à l'extérieur pendant que je ne suis pas pressé de sortir, sachant que rien ne m'y attend si ce n'est des embrouilles de toutes les couleurs et de tout les styles, que ce soit le violet des billets de 500, le blanc de la merde quand le client questionne le grammage de la poudre ou le bronzage d'une métisse qui me dégage: "d'où tu oses m'aborder dans la rue ?". Oh bébé oops pardon, mademoiselle, je veux pas vous draguer, promis juré...eh reviens, 5 minutes quoi, je t'ai pas insulté je suis poli et courtois...mais pour les mecs comme moi, vous avez autre chose à faire...

Je pense aux films qui sortent au cinéma et que j'attendais avec hate, à l'heure ou j'entre dans la salle de détente mes potos de banlieue doivent attendre le RER C sur un quai pluvieux pour aller taper un McDo avant une séance de Fast and Furious 6 dans une salle obscure sur les champs Elysées, ce grand boulevard qu'on nous autorise que lorsqu'on le descend en caisse de luxe sous le regard accusateur des passants qui se doutent qu'on a pas touché l'héritage d'un ancêtre illustre. 400 ans d'esclavage aucun payback c'est pas logique, donc nique ta grand mère, nique ton arbre généalogique...

Ca c'est des paroles que je connais. Je pense à celles que je ne connais pas encore un sourire aux lèvres. Les heures passées à se foutre de la gueule de Rohff et de son album qu'il ne sortirais jamais, il sera peut être sorti avant que moi je sorte d'ici, et tout ces autres morceaux qui feront la playlist que j'écouterais demain alors que privé de mon compte premium Spotify sur un iPad bridé aujourd'hui, je ne peux que réciter des mots que je connais par coeur, sur une musique qui s'efface de ma mémoire au fur et à mesure que les jours passent.

Odessa hein ? La rouquine de l'emission. Même pas sur de lui avoir adressé la parole. Déja 3 semaines ou seulement 3 semaines ? Je me rend compte que la notion du temps s'évanouie en même temps que la batterie d'un beat de Therapy 2093. Il n'y a que mon passé et mon casier judiciaire hein, qui ne s'effacera pas. La dernière fois que j'ai perdu la notion du temps j'étais enfermé aussi, mais dans d'autre conditions, comparé à la taule ici c'est le teloh. Elle n'a pas remarqué ma présence, ni entendu arriver. Le son qui s'échappe du casque de son walkman est tellement fort que je reconnais un son des Supremes. Elle fait dans la musique classique, c'est bien, c'est mieux, c'est...

«Formidable.»

Elle ne m'a pas entendu murmurer non plus. Je ne suis qu'une ombre qui s'assoit dans son coin et dans son dos. Bien que privée de son ici au moins mon ombre n'est pas dangereuse. La production à oublié de me fournir en encore de chine pour dessiner sur mes calpins. J'ai trouvé un BIC dans le nid comme on trouve une paire de Jordans taille 40 à châtelet: après deux longues heures de recherche et de persévérance. Il est rouge, je tchipe, tant pis ca apportera une touche de couleur. Formidable, ça sera le mot calligraphié du jour sur un rythme étouffé qui me parvient de la présence d'Odessa, assez fort pour que je l'entende, suffisamment doucement pour que j'en imagine un nouveau. Les secondes chances, à l'extérieur ça n'existe pas. Je ne veux pas y retourner.