Il faut que je m’occupe des vêtements de Kat. Elle m’en a mis beaucoup, mais je commence à manquer de pantalons, parfois. Je sais bien qu’elle m’a mis des shorts, aussi, et des jupes, et des robes, mais je n’ai pas envie de mettre ça. Devant Jamie ou elle, ça ne me dérange plus beaucoup. Mais devant les autres, c’est différent, ils ne savent pas encore que je ne suis pas jolie, mon corps, enfin, je préfère cacher. Même si je suis un peu obligée, parfois, avec le pyjama. Mais ça va, c’est peu de temps, et pas devant tout le monde, juste un candidat, donc ça va, je crois. Du coup, je vais à laverie, avec toutes les affaires que j’ai déjà mises. Et je me retrouve devant les machines, toutes les machines, je me mordille la langue, c’est vrai que ce sont des machines, ici. Kat, c’est elle qui lave les vêtements. Moi, je vais le ménage, mais pas les vêtements. Je ne sais même plus ce qu’il faut y mettre là-dedans, j’ai pas l’habitude. Je mets du produit. Je crois que c’est le bon, je ne sais pas. Il a une bonne odeur. Ça doit être ça. Je regarde les étiquettes, Kat, elle dit que c’est ce qu’il faut faire. Mais ça devient très vite trop compliqué, et je mets tout dans la machine avant d’appuyer sur le bouton. J’espère que ça ne va pas les abîmer. Mais s’il faut tout trier, ça va vraiment être long je crois. Et je m’assois sur une autre machine à laver, jusqu’à ce qu’Opaline arrive. Elle me demande ce que je fais. « j’attends, moi. » j’attends toujours, je crois. « t’attends avec moi ? » ce serait mieux, c’est vrai, ça. « tu sais combien de temps il faut ? »

Elle accepte d’attendre avec moi. Je préfère, c’est mieux, à deux. Et puis, je pense au temps qu’il faut attendre. Si c’est vraiment long, je ne sais pas. Ce serait peut-être idiot d’attendre ici, si c’est long. Moi, je ne sais pas. Je balance mes jambes, mes pieds tapent un peu à chaque fois contre la machine sur laquelle je suis assise. Mais pas trop fort. Je ne veux pas tout casser. Pas ici. Elle s’assoit à côté de moi, et elle ne sait pas non pas non plus le temps qu’il va falloir, le temps qu’on va devoir passer toutes les deux à attendre. Ah. Et elle me demande pour quoi, le temps. « le linge. J’ai mis des vêtements dans la machine. » je lui montre des yeux la machine, avec les vêtements de Kat qui tournent dedans. « ça. je ne sais pas combien de temps il faut pour que ce soit fait.» vrai, que je ne sais pas. « c’est pour ça. si c’est très long, on va peut-être s’ennuyer. » C’est possible, je crois. C’est pour ça. Elle ne veut peut-être pas rester, Opaline, si c’est très long. J’arrête un peu de gigoter. Je crois que ça faisait un peu de bruit. Peut-être trop. Et je reporte mon regard sur Opaline. Je pince un peu les lèvres. J’hésite. « Dis, tu vas te fâcher si je te pose une question ? » je ne sais pas. Je demande, certains se fâchent, quand je pose des questions.

Opaline pense que ce n’est pas très long. C’est la première fois que je fais ça moi, ici, je ne sais pas, c’est pour ça, mais elle, elle pense que c’est rapide, j’hoche la tête, quand elle dit qu’on peut aller faire autre chose, et je suis contente qu’elle dise ça, qu’elle emploie le mot on, qu’elle m’inclue avec elle dans ses projets pour le moment, elle veut passer du temps avec moi, je crois, moi aussi. C’est vrai que je l’aime bien, Opaline, beaucoup, même, sans doute beaucoup trop, parce qu’on ne se connait pas depuis longtemps, mais c’est pas ma faute, ça, juré, si je m’attache trop aux gens. Elle ne me répond pas tout de suite lorsque je veux lui poser une question, une autre question, une vraie question. Peut-être qu’elle ne veut pas. Je veux pas qu’elle se fâche comme Sandro, ah, ça non. Elle répond, finalement, elle ne va pas se fâcher. Je la crois. Elle n’a pas l’air de se fâcher beaucoup. Pas avec moi, en tout cas. Je préfère ça, c’est vrai. « je veux pas te fâcher, c’est pour ça, je préfère te demander l’autorisation, avant, parfois, ça agace les gens, quand je pose des questions, je veux pas t’agacer, moi, juré, juré, et .. » j’allais continuer, mais j’entends la musique, cette musique, fichue musique. Je grimace, je lève les yeux au ciel, comme si Cupidon pouvait me voir, à l’instant précis. Je laisse montrer mon mécontentement, avec Opaline, parce que je crois qu’elle est du même avis que moi, pour le sujet. C’est pour ça, je laisse passer la musique, je ne compte pas embrasser Opaline pour une chanson moi, ah, ça non. « t’allais pas bien au prime ? » enfin, c’est pas une vraie question, finalement, elle allait pas bien, je le sais, mais, vrai que j’aimerai savoir pourquoi, et je suis un peu maladroite, pour tout ça, moi.