Comme tous les dimanches, nous avions eu le droit au prime ce matin. Nous avions tous suivis nos rituels qui consistaient souvent à 'se faire beau' et 'attendre que la suite se passe'. En tout cas, c'était ma façon de procéder ça. Même si ce prime-ci, la seule chose qui m'avait réellement importée avait été de savoir si Odessa me rejoindrait ce soir dans mon lit, ou pas. Je n'en avais pas vraiment douté mais nous ne sommes jamais à l'abris d'une mauvaise surprise dans ce jeu. D'ailleurs, le prime avait connu un rebondissement avec une nomination supplémentaire, celle de Nova et Kimo et donc le départ de Kimo. Mais au final, j'avais eu raison d'y croire, elle était restée et je pouvais me coucher serein ce soir. Ou presque. Parce que les images de son interwiew défilaient encore dans mon esprit. Elle avait dit m'apprécier, mais pas de la même façon que ce que je peux l'apprécier. Elle avait dit avoir peur de me blesser ... Cela me faisait bizarre d'entendre ces mots dans une interwiew et non pas directement. Cela me vexait plus qu'autre chose en fait. Parce que je nous pensais suffisamment proche. Je pensais que ça ferait partie des choses qu'elle n'oublierait pas de me mentionner. Je ne l'avais donc pas attendu pour aller me coucher, ce soir, c'était à moi de jouer le nain grincheux. Vêtu de mon caleçon noir, je m'étais plongé seul au sein de ce lit. J'avais essayé de m'endormir, sans que cela ne fonctionne et puis j'avais entendu quelqu'un entré. Un corps se rapproché de mon lit, ce même corps s'allongé et m’étreindre. Odessa. Son parfum venait de la dénoncer et il s'agissait bien là, du câlin qu'elle m'avait promit lors du prime. « Fais gaffe à ne pas me blesser » Marmonnais-je alors sans aucune autre réaction. Bien entendu, je faisais référence à l'interwiew qu'elle avait donné à cette Sia. Bien entendu que c'était cela.

Je me doutais bien que tôt ou tard, elle finirait par me rejoindre dans ce lit. Que je ne pourrais pas jouer au mort durant bien longtemps. Pourtant j'avais essayé de l'éviter, le reste de la journée et la soirée également. Il me fallait avaler ce que j'avais entendu lors de ce prime. Avaler le fait qu'elle avait peur de me blesser parce qu'elle ne partageait pas, les peut-êtres mêmes sentiments que moi. Mais de quels sentiments parle-t-on ? On en sait même rien. Odessa a jugé bon de me protéger mais elle s'y est très mal prit. Je ne suis pas quelqu'un qui a besoin qu'on le protège. Elle connait tout de moi, également mon secret, elle doit savoir comment je suis. Elle ne devrait surtout pas avoir peur de me blesser. Puis c'est pas comme si j'étais idiot non plus. Je vois bien ce qu'il se passe avec Cosmas, je vois bien que ce n'est pas la même chose avec moi. Je lui demandais même pas que mon peut-être béguin pour elle -parce que je n'en sais actuellement plus rien du tout- soit réciproque. Je lui demandais de l'honnêteté, de la franchise. Et j'ai l'impression de ne rien avoir eu de toute cela. Et c'est ça qui me blesse plus que tout autre chose. Alors dès que je sens ses bras se serrés autour de mon corps dans ce lit, je ne peux m'empêcher de lui lancer une pique. Pique qui ne lui fera pas du bien, je le sais. Pourtant je ne veux pas non plus lui faire du mal. C'est complexe mais j'essaie de lui faire ressentir ce qu'elle m'a fait ressentir lors de ce prime. Sauf que moi, c'était devant tout le monde que je suis passé pour le roi des cons.« Je suis désolée... » Je décide finalement de me retourner, parce que je veux lui faire face pour parler. Même si je ne vois pas son visage à cause de l'obscurité, je veux lui faire face. « Désolée de quoi Odessa ? D'avoir été plus honnête avec Sia qu'avec moi ? D'avoir été plus honnête avec tous les autres ? » Je n'aime pas avoir à lui parler comme ça. Je me déteste. Je me déteste de lui dire cela et de la faire culpabiliser mais il faut que ça sorte.  « Je ne te demandais pas de tomber amoureuse de moi. Je ne te l'ai jamais demandé. »

Je ne devrais sans doute pas donner tant d'importance au propos tenus par Odessa lors de cette interwiew. D'ailleurs, pourquoi est-ce que cela me touche comme ça ? Pourquoi est-ce que je ne suis pas suffisamment mature pour jouer le mec qui s'en fou. Sans doute parce que ce n'est pas ça la maturité pour moi. La maturité, c'est aussi savoir se montrer sincère et c'est exactement ce que je suis en train de faire actuellement. Je me montre sincère avec elle en lui faisant comprendre que cela ne m'a pas plus. J'aimerais m'en foutre mais ça n'est pas le cas. Peut-être qu'elle a raison après tout, peut-être que je l'apprécie d'une autre façon qu'elle. Peut-être simplement que je ressens des choses pour elle mais je sais, au fond, que cela doit cesser. Parce que cela me fera plus de mal que de bien. Parce que je ne suis pas prêt à subir ça. Pas maintenant. Pas après une rupture. Pas après Minnie. C'est de ma faute, je le sais. Elle n'est pas responsable de ce que je ressens, pas vraiment. Elle a pas déclenché cela intentionnellement. Pourtant, je lui en veux. Je lui en veux d'être plus sincère, plus honnête, avec d'autres personnes que moi. Sia, plus précisément.« C'est faux Charles, je ne suis pas plus honnête avec quiconque, autre que toi. J'ai toujours été honnête avec toi et ce que j'ai dit dans cette interview n'était pas sensé te faire de la peine, je pensais que... j'ai juste cru que tu avais compris ce que je voulais dire et... » J'suis pas certain d'avoir envie de discuter de cela en fait. Peut-être n'ais-je pas eu envie de saisir le message parce que cela m'arrangeait bien mieux « Hum » Actuellement, c'est tout ce qui me vient à l'esprit. Lamentable. « Je... J'sais pas quoi te dire. J'ai sans doute préféré ne rien comprendre du tout. » Et désormais, je le regrettais. Je le regrettais beaucoup même. « Je n'ai jamais dit ça ! Où vois-tu que j'ai pu dire ça ! Non, jamais, mais voilà, j'ai l'impression que tu m'en veux parfois, que tu m'en veux d'être avec lui et j'ai l'impression que ça te fait du mal et à mon tour, je m'en veux. » Elle venait de mettre le doigt sur le noeud du problème. Je suis jaloux. Plus que de raison alors que je n'ai aucunement le droit de l'être. Après tout, elle n'est que ma partenaire.  « Je peux pas contrôler ça, je te jure. J'aimerais beaucoup prétendre que ça ne me fait rien du tout de te voir avec lui mais ça serait mentir. Mais bon, je peux faire semblant. Oui, je peux. Je voulais être comédien alors je peux faire semblant. Si tu veux que je te souhaite tout le bonheur du monde ... Je le ferai. » Mais cela ne serait pas vraiment sincère. « Qu'est ce que tu attends moi Charles ? Dis moi ce que je suis vraiment pour toi... » Dois-je vraiment répondre à cela ?  « Il ne faut pas que j'en attende plus de toi que ce que tu es vraiment. Tu es ma partenaire. Voilà ce que tu es. Voilà ce que je dois te demander d'être. » Et je ferai des effort pour que cela fonctionne. « Et une amie également, si tu le désires. Mais je ne peux te demander plus. J'en ai pas le droit.  »

Mon premier projet était de me terrer comme un loup solitaire dans ma tanière jusqu'à ce que j'oublie un peu Odessa. Ce projet n'étant pas vraiment réalisable, surtout lorsque celle-ci m'entoura de ses bras en venant se coucher, je dois donc sortir mon plan de secours. Et celui-ci semble être efficace. Faut dire que c'est le plus raisonnable des plans et il est tout simple. Il consiste à parler. Parler pour pouvoir mettre les choses au clair avec elle. Pour pouvoir en savoir plus sur la situations et la confronter à ce qu'elle a dit lors de l'interwiew. J'ai bien conscience que je n'ai aucune chance avec Odessa mais je tiens trop à elle que pour laisser tout tomber et également perdre une amie. J'sais bien qu'elle tient à Cosmas, en tout cas, elle éprouve quelque chose pour lui. Je ne sais pas vraiment dire si c'est de l'ordre physique ou psychique mais il y a quelque chose et je n'y changerais rien. Je n'ai pas à devoir changer ça. Ca me ferait passer pour un salop et e ne suis pas ce genre d'homme. Je ne l'ai jamais été et je ne vais pas commencer à l'être. Casser des couples, très peu pour moi. Même si rien n'est encore officiel dans leur couple. Enfin. Cette discussion nous permet notamment de savoir que nous sommes tous deux coupable de ce malaise. Nous avons tous les deux fermer les yeux d'une certaine façon, sur des détails, afin de ne voir que ce qui nous plaisait et ce n'est définitivement pas le bon plan. Regardez-nous et vous comprendrez que cette méthode ne vaut rien et n'amène que des ennuies. Ennuies que j'espère bien entendu régler afin de passer une meilleure nuit. « Oui… J’imagine… » Odessa approuve d'ailleurs mes paroles. Elle pense donc également que nous sommes autant coupable l'un que l'autre. Nous sommes au moins du même avis sur cela, c'est un petit pas en avant déjà. Je profite d'ailleurs de ce moment de confession pour lui dire tout ce que je peux ressentir. Je ne sais pas vraiment ce que je recherche en faisant tout cela ... je cherche peut-être simplement à me soulager un peu. Tout le monde sait que ça fait du bien de parler et qu'il est bon de dire ce que l'on peut avoir sur le coeur. « C’est de ma faute… Tout ça, enfin… Si j’étais moins… Je ne sais pas, si j’étais moins… moi. » J'attrape instinctivement sa main, parce que j'en ai besoin. J'ai besoin d'avoir un certain contact. «Ne change surtout pas ... Reste toi-même. C'est l'une de tes plus grandes forces. Ne change pas. Il est clair que la situation ne serait pas la même si tu n'étais pas toi ... Mais on s'en fout, reste toi-même» C'est un peu débile ce que je lui dis, mais j'y tiens. Faut pas qu'elle change. Pas à cause d'un mec comme moi. Pas pour ce genre de détails. «Tu sais, ce sont des choses qui arrivent ... Tout le monde ou presque a déjà vécu une histoire à sens unique et les gens n'en sont pas mort pour autant. Alors ça ne va pas me tuer non plus. Je peux supporter le fait que tu ne m'aimes pas de la même façon et que cela restera comme ça ... Je crois que je le peux. » C'est ce que je lui affirmais, tentant par la même occasion de me rentrer cela dans la tête. Pour de bon. Me rentrer dans la tête que tout va bien se passer malgré tout. « Je suis désolée aussi… Je ne veux pas te faire du mal alors… qu’est ce que je dois faire ? »«Je te l'ai dis ... ne change rien surtout. Reste celle que tu es et continu d'agir comme tu le fais. J'suis grand, j'ai trente-deux ans ... C'est à moi de me rentrer dans la tête qu'il ne se passera jamais rien et que tu n'es que ma partenaire. Mais je ne veux pas que tu changes. Et surtout, continues de profiter de ton aventure ... J'veux pas que tu te prives pour moi. Ce serait débile ... On se connaissait même pas avant d'arriver ici. »