Valeri aurait très bien pu tourner les talons à la proposition de Sully, marquant sa prise de position. Ne souhaitant pas améliorer les choses entre eux. Après tout, il n’était jamais venu, ici, pour se faire des amis. Ca se saurait autrement. Qui voudrait sympathiser avec un petit gars comme lui, de toute façon ? Qui ? Oui, il est vrai qu’il aurait pu. Mais il ne l’avait pas fait. Certainement, était-il désireux au fond d’arranger quelque peu les choses entre eux. Il n’avait jamais été du genre à trop réfléchir, il laissait bien plus souvent son inconscient dicter ses gestes. Alors oui, c’était peut-être une façon comme une autre d’améliorer les choses entre eux, d’arranger les choses. Il y avait cette locution qui disait qui ne tente rien n’a rien, peut-être était-elle vraie. Il fallait toujours tenter et saisir les opportunités qui s’offraient à nous. Ca, Valeri était bien placé pour l’admettre… même si parfois, les opportunités de sa vie n’étaient pas si belles qu’il ne l’avait espéré. Oh ça non. Les quelques dires de l’américain l’amusa doucement, et un sourire amusé se fraya alors un chemin sur ses lèvres. Parait-il qu’aucun des deux n’avaient de pulsion meurtrière. Encore heureux, songea-t-il. Il ne manquerait plus qu’ils s’adonnent à une lutte sans merci à l’aide de couteaux bien aiguisés. Valeri hocha alors vaguement la tête. En effet, c’était la façon la plus raisonnable de de gérer les choses. Mais il y avait peut-être un problème. Un problème que le jeune biélorusse ne manqua pas à souligner. En effet, les deux garçons ne semblaient pas avoir les mêmes centres d’intérêts, et n’avaient pas le même tempérament. Le jour et la nuit. Une sorte de Ying et de Yang occidentale. Sully l’avait très certainement remarqué. A vrai dire, qui ne l’avait pas remarqué ? Ca se voyait comme le nez au milieu du visage, à moins de vouloir s’aveugler pour des raisons inconnues. D’ailleurs la remarque articulée par l’américain confirma ses pensées. Il est vrai qu’ils ne partageaient pas le même humour. Un léger rictus étira doucement les lèvres de Valeri. Il ne pouvait pas nier ce propos. Ils étaient dotés d’un humour différent. Mais selon Sully, cela ne représentera pas un obstacle. Oh ça, Valeri n’en était moins sûr… Vous savez : chassez le naturel et il revient au (grand) galop… Il agita doucement la tête, chassant cette pensée de son esprit. Pour y parvenir, il devait laisser de côté ses commentaires. C’était tout du moins le conseil dicté par Sully. Laisser de côté ses commentaires sarcastiques et… il avait ajouté un autre mot que Valeri eu du mal à comprendre et à interpréter. Etait-ce que c’était dans ses cordes ? « Oui… énonça-t-il doucement. Je pourrais même rester muet, si tu préfères. Je sais très bien le faire ça, tu pourras demander à Sun-Hi » reprit-il. En effet, si Sully avait trop peur que le jeune biélorusse ne puisse s’empêcher de garder ses commentaires pour lui-même, ce dernier pourra toujours jouer au muet. Il savait très bien le faire, puisque la règle d’or du bon mime était de ne pas parler pendant sa prestation. Et Sun-Hi était bien placée pour souligner le fait que le jeune biélorusse pouvait se taire pendant de nombreuses minutes. Oui, oui.

Être ami avec Sully était l’une des promesses qu’il avait faite à Lena. Tout du moins, tenter d’apaiser les tensions qui teintées leur relation. Il avait tenté de mettre en application sa promesse. Notamment lorsqu’il s’était retrouvé à manger avec la jeune femme, mais aussi l’américain qui s’était convié à la table. Mais il y avait aussi ce moment passé au palais du rire. Il ne pouvait pas nier que ce moment était bien. Ce fut d’ailleurs ce qu’il avoua. Il avoua que ce moment était sympa. Ils avaient bien ri, ensemble. Ils avaient passé un bon moment ensemble. Sully semblait être désireux de réitérer l’expérience. Evidemment, ils pourraient recommencer… même le jeune biélorusse avait souligné le fait que leur personnalité était différente. Bien assez différente pour partager les mêmes délires. Il est évident que la franchise et les commentaires de Valeri pourraient être un obstacle à cette volonté. Cette volonté de faire en sorte que leur relation s’améliore. Oui, parce qu’au fond, c’était ça le but : d’améliorer leur rapport. Le jeune biélorusse ne deviendra jamais meilleur ami avec lui. Il n’avait jamais eu de meilleur ami, d’ailleurs. Même lorsqu’il était enfant, il n’en avait pas un. Ou peut-être que si… mais il ne s’en rappelait plus alors. Enfin, au pire des cas, Valeri pourrait se taire perpétuellement. Jouer le muet. Il savait très bien le faire, après tout il était mime. D’ailleurs, Sun-Hi pouvait lui confirmer qu’il savait très bien ne pas parler pendant un long moment. Cette information ne manqua pas de faire sourire l’américain. Il le croyait sur parole, lui fit-il remarquer. D’accord. Il hocha alors vaguement la tête. Parait-il que ce serait trop simple et moins intéressant. Il sourcilla quelque peu de cette réflexion, alors que Sully ne manqua pas de continuer. Il parait qu’il n’y avait pas qu’un seul but dans cette histoire. Non seulement, c’était pour améliorer leurs rapports, mais aussi pour le pousser à faire preuve de bonne volonté. De la bonne volonté ? C’était bien un mot dont il avait oublié la signification depuis un moment. Il évitera ses commentaires en faisant des efforts. Il hocha alors vaguement la tête, approuvant son choix. Sully laissa alors entendre qu’ils pourraient établir une liste de sujets à éviter. C’était une bonne idée, ça. Une nouvelle fois, il hocha la tête afin de marquer son approbation. Fallait-il encore quels sujets. Alors que Valeri entrouvrit la bouche afin de répondre. Allant certainement donner un sujet qu’il préférerait qu’ils évitent de parler, ensemble, Sully reprit la parole. Dans l’immédiat, il n’en voyait qu’un seul. C’était tout du moins ce que ce dernier lui confia. Il arqua légèrement un sourcil. Un seul sujet ? Peut-être était-ce le même que Valeri avait en tête, à ce moment précis. Il ne savait pas vraiment. Alors qu’il prenait appui contre le rebord de l’évier, il porta son regard en direction de Sully. « Hum… Lena ? » souffla-t-il, alors qu’un frêle soupir s’échappa de sa bouche. Peut-être faisait-il fausse route et se trompait-il en évoquant le prénom de la jeune femme. Mais dans tous les cas, le jeune biélorusse ne voulait pas qu’ils abordent ce sujet. Par le passé, ils avaient prouvé qu’évoquer la danoise était source de conflit. Notamment lorsqu’il était question d’évoquer ce qu’il pouvait ressentir à son égard. Ce n’était que de l’amitié.

Valeri n’aura pas à jouer la carte du mutisme. Peut-être devait-il s’estimer heureux de ne pas avoir à le faire. Mais, afin d’éviter un conflit et toute discorde entre les deux jeunes hommes, l’américain proposa d’établir une liste de sujets qu’ils devaient éviter. Dans l’absolu, il ne disait n’en avoir qu’un seul en tête. Le jeune biélorusse pourrait en dire autant. Il s’apprêtait d’ailleurs à se laisser tenter par le jeu, en citant un seul qu’il souhaiterait éviter. Lena, demanda alors Valeri. Peut-être pouvait-il se tromper. Mais lui aimerait bien qu’ils évitent ce sujet. Oui. Par le passé, ils avaient fait assez preuve de discorde et de mal entendu à ce sujet. Sully acquiesça. Donc c’était bien ce à quoi il pensait. Lena. Valeri hocha alors la tête, marquant son approbation suite aux paroles de son interlocuteur. Leur avis diffèrera toujours. Toujours. Il ne pouvait pas le nier. Ce serait se voiler la face que de vouloir dire le contraire. Ainsi, ils étaient d’accord à ce sujet : qu’ils devaient éviter d’évoquer – ou tout simplement parler de Lena – la danoise. Pour une fois qu’ils semblaient d’accord sur un point… à croire qu’il y avait un soupçon d’effort de dessiné. Vous savez, il y avait cette expression qui disait un petit pas pour l’homme, un grand pas pour l’humanité. Il l’avait lu quelque part, lorsqu’il était gamin, sûrement dans un manuel scolaire. Il avait toujours trouvé cette citation idiote et sans intérêt, la jugeant d’erroné. Finalement, peut-être s’était-il trompé. En esquissant un semblant de pas, il venait de faire un grand pas en avant. Sully reprit la parole. Il ajouta quelques mots. Le regard du jeune biélorusse se reposa alors sur lui. C’était aussi ça qui avait contribué à les placer dans une telle situation. La création de nombreux malentendus ne pouvait pas être niée, c’est un fait. Redémarrer sur une base nouvelle ? Peut-être. Sûrement, oui. Il ne savait pas vraiment. Il hocha alors vaguement la tête. « Pour une fois que nous serons d’accord… » souffla-t-il, lui adressant alors un sourire. Oui. Pour une fois. Il ne pouvait pas nier ce nouveau fait. Pour une fois qu’ils étaient d’accord sur un point, sur ce point et que leurs opinions ne divergeront pas. Un petit pas pour l’homme, un grand pas pour l’humanité, comme disait l’autre sur sa Lune. Ce ne serait pas de l’humanité dont il serait question, là, mais de la sympathie ou d’un soupçon d’amitié. Oui. C’était ça. Un grand pas pour un soupçon d’amitié.