J'ai besoin de prendre un peu l'air, parce que j'ai passé trop de temps à lire à l'intérieur et ça ne peut que me faire du bien d'être dehors. La nuit commence à tomber mais ça n'a pas d'importance. Quoi que si parce que ces histoires d'heures moi ça m'enquiquine. Je préfère marcher sous un soleil de plomb que sous un ciel étoilé. Oh bien sûr les étoiles ne doivent pas être plus réelles que le soleil mais bon. En tout cas heureusement que des lampes ont été mises pour éclairer un peu les différents endroits du jardin parce que je ne suis pas certaine d'apprécier me retrouver dans la forêt quand la nuit tombe. Je ne suis pas forcément très intrépide. Et puis je ne sais pas si c'est de savoir que Halloween est demain mais j'ai tendance à m'imaginer des choses pas forcément géniales. D'ailleurs je suis presque persuadée de voir des yeux un peu plus loin ce qui est pour le moins absurde, il n'y a aucun animal ici, peut être un ou deux petits écureuils mais rien de plus. Et puis j'entends le bruissement des feuilles, les branches qui craquent et... « Tiens India tu tombes bien. » Mon dieu, j'ai eu peur. Je sursaute et peut être même que je laisse échapper un léger cris. Mon dieu. « Tu m'as fait peur.   » J'imagine qu'il l'a remarqué tout seul ça mais bon. « En fait ... C'est juste que ça me donnera bonne conscience quand je repenserai au fait que j'étais venu pour courir, et que je l'ai pas fait. » Et ça me fait sourire parce que je pourrai tellement sortir ce genre d'excuses. Pas pour le sport parce que j'adore ça mais tout court. « D'accord, donc si on m demande je m'assurerai de corroborer ta version des faits.    » Que je dis dans un sourire alors que ce n'est pas très grave, je n'aime pas mentir mais là ce n'est pas un mensonge puisqu'on était ensemble. « C'est bizarre, en te regardant j'aurai plutôt imaginé que tu faisais souvent du sport.   » Il a l'air en forme, plutôt en bonne condition physique mais après tout il a peut être simplement un bon métabolisme. C'est tout à fait probable. « En tout cas on peut dire que tu tombes bien toi aussi parce que j'étais à deux doigts de croire à l'absurdité de la présence de lutins maléfiques juste là bas. Ce qui est totalement faux, parce qu'on sait tous les deux que ça n'existe que dans les contes pour enfants... Pas vrai ?   » Non mais je sais que ça n'existe pas, mais j'ai une imagination débordante et quand je suis seule je pense à tout un tas de choses, aujourd'hui ce sont les lutins, tout à l'heure c'était un sujet beaucoup plus sérieux et sur lequel je ne veux pas revenir maintenant.

Amery me surprend lorsqu'il s'approche de moi, il me fait peur mais me connaissant ce n'est pas non plus exceptionnel, je sursaute tout le temps. C'est à croire que je ne me suis pas encore faite à l'idée que j'étais entourés de nombreux candidats. Pourtant si. On est quand même pas mal. Même si ça diminue on est beaucoup. Et ça ne devrait pas me surprendre. Surtout que si je suis sortie c'est pour être seule. C'est que c'était logique que ça ne dure pas longtemps... ma solitude. Mais ça n'a pas d'importance, j'aime bien Amery. « Désolé. » Je secoue la tête, non mais non. « Non mais c'est moi j'étais dans la lune.  » Je pensais aux créatures maléfiques et tout ça mais ce n'est pas vraiment une chose que je peux lui dire et tout. Enfin pas immédiatement, en plus il me parle d'excuses et tout ça. Et je lui parle d'alibi. « Oui si jamais tu croises ma conscience. » Et ça me fait rire, alors je me contente de rire. Et voilà. Je l'interroge parce qu'il est en tenue de sport et tout ça. Et puis même il a l'air sportif. « J'essaie d'en faire une fois par semaine, mais j'ai perdu mes bonnes résolutions depuis que je suis ici. » Je comprends, c'est vrai qu'on peut facilement se laisser aller ici puisqu'on a pas d'obligations. « C'est par manque d'envie ? Non parce que si c'est parce que tu es seul je cours tous les jours, donc je serais ravie de te tenir compagnie et sinon je me tais et je m'occupe de mes affaires.   » Que je lance dans un sourire, en tout cas je suis sincère et si je lui propose c'est que ça ne me pose pas le moindre problème. C'est vrai qu'une présence ça encourage. Et je lui parle de mes pensées, les lutins même si je sais que ça n'existe pas je lui demande de confirmer, au cas où. Je souris légèrement face à sa remarque. « Je le savais... Mais tu sais à ta place je ne sous-estimerais pas le sadisme de Cupidon   » Il en serait bien capable. Même si ça n'existe pas et que je le sens. Et assez logiquement il m'interroge sur la raison de ma présence. « Oh rien, enfin j'avais envie de prendre un peu l'air, on étouffe à l'intérieur alors me voilà et j'ai cru voir des choses là bas mais je crois juste que j'ai une imagination débordante. Rien de bien grave. C'est sans doute l'effet Halloween.   » Oui voilà, je pense trop et je m'imagine trop de choses bizarres et stupide. C'est pas très grave, il y a plus grave en plus.

Je fais ça tout naturellement, de proposer à Amery de venir courir avec moi parce que si ça peut le motiver c'est pas plus mal et en plus ça ne me posera pas le moindre problème. Il est gentil Amery, loin d'être désagréable alors forcément j'imagine que ça ne doit pas être quelqu'un d'ennuyant avec qui faire du sport et si j'aime bien la tranquillité, je ne rechigne pas contre un peu de compagnie si elle est agréable. Mais il n'est pas obligée et ce n'est pas dit qu'il acceptera. « Ce serait avec plaisir, et puis comme ça je ne pourrai pas me défiler. » Je souris légèrement je suis contente qu'il accepte. « Super on fait comme ça alors, en plus compte sur moi pour venir te chercher si je ne te vois pas.   » Non mais c'est bien voilà, il pourra courir, ça me fera de la compagnie et tout le monde sera content du coup. En ce qui concerne les lutins maléfiques je sais que c'est complètement absurde mais bon c'est plus fort que moi, je continue sur ma lancée surtout quand il dit que la production ne les aurait pas laissé sous le dôme, et je suis sûre que si. Cupidon n'est pas réputé pour sa gentillesse. « Alors on peut s'estimer heureux qu'ils n'existent pas. » Tout à fait, je me contente de hocher la tête et de sourire. Non mais ce n'est pas de ma faute, j'ai toujours eu beaucoup d'imagination même si elle était plutôt en veille ces derniers temps. « Je comprends, on étouffe un peu à l'intérieur. Mais je pense pas que t'aies de raison d'avoir peur dans cette forêt. » Je grimace légèrement, non mais il a raison je sais c'est que dès que j'ai une idée en tête après c'est difficile de me l'enlever. « Je sais, surtout depuis que tu es là... Il faudrait être fou pour s'attaquer à deux personnes.  » Effrayer une femme c'est drôle mais pas un homme quand même. Enfin je trouve ça ridicule. « Et sinon tu fais quoi dans la vie ? » Je ne peux pas m'empêcher d'esquisser un léger sourire. C'est bizarre comme question maintenant mais c'est vrai qu'en réfléchissant je ne sais pas grand chose de lui à part qu'il est plutôt serviable, qu'il a un fils et qu'il aime les pâtes au ketchup. « Je suis traductrice littéraire et toi qu'est-ce que tu fais ?  » Oui comme je ne sais pas autant profite de l'occasion pour en savoir plus sur lui. « Tu... ce n'est pas trop dur sans ton fils ?  » J'espère ne pas faire de gaffe, ou lui faire trop de mal si justement la séparation est insupportable. Mais j'imagine qu'il doit être entre de bonnes mains.

Non mais je ne suis pas trop embêtante en vrai, si un jour il me dit qu'il n'a pas envie d'aller courir je ne vois pas pourquoi je devrais le forcer, mais j'irai quand même le chercher parce que c'est bête de ne pas faire quoi que ce soit parce qu'on a pas le courage. Après on s'enfonce dans une sale routine et c'est nul. Mais ça ne me regarde pas trop ce qu'il choisit de faire ou non. « Je compte sur toi. » Je souris, il ne m'envoie pas sur les roses donc j'imagine que c'est bon signe. « Tu peux, en plus tu me remercieras plus tard.   » J'exagère un peu j'imagine, mais c'est ce qu'on dit, c'est dur au début et après ça ne peut faire que du bien. Alors voilà, enfin c'est décidé, on pourra courir ensemble à l'avenir. Il est ensuite question de mon imagination débordante. La foret maléfique, qui n'a rien de maléfique en plus de ça. Non mais c'est moi, c'est stupide, peut être que c'était juste une décoration d'Halloween ou peut être que ce n'était rien du tout. « T'as raison, même si je pense sérieusement que personne ne comptait t'attaquer. » Oui je sais, non mais je sais en plus, je n'ai pas vraiment peur, il y qu'à voir où je vis. Je vis dans une ville où le taux de criminalité crève tous les plafonds, j'ai vu pire que des yeux fictifs dans une forêt.  « Je le sais, mais c'était pour vérifier si tu me défendrais ou si tu partirais en courant au premier danger...   » Qu'est-ce que je raconte n'importe quoi. Je peux vraiment en dire des âneries alors du coup je me mets à rire parce que ce n'est pas très sérieux quand même. Il vient à m'interroger sur mon métier parce que c'est vrai qu'on ne se connait pas particulièrement alors qu'on vit dans la même maison depuis six semaines.  « Français, je traduis en français.    » La plupart du temps ils demandent ça aux francophones de traduire vers leur langue mais il faut croire que j'ai de la chance ou que je sois douée. J'ai déjà traduit du français vers l'anglais mais c'est vraiment exceptionnel. Vraiment. Quant à lui son métier na pas l'air de le passionner plus que ça, enfin je me fais peut être des idées aussi.  « Qu'est-ce que tu aurais aimer faire ?  » Parce que me semble être quelque chose qui s'est imposé à lui plus que l'inverse. Mais j'imagine que c'est sa paternité qui a joué, ce n'est pas facile à gérer un bébé aussi jeune, j'en sais quelque chose, mon mari avait arrêté ses études pour que je puisse me consacrer aux miennes. Je crois que j'aurais mieux fait d'éviter de lui parler de son fils, je baisse les yeux un peu honteuse.  « Je suis désolée je n'aurais pas du... Enfin je... Excuse-moi.    » Je me sens ridicule, je sais en plus que ça fait mal. Je le sais, mais je suis idiote, vraiment trop idiote. Je n'ose plus relever la tête, je suis trop trop trop stupide.

Evidemment je peux comprendre totalement Amery lorsqu'il manque de motivation pour courir, c'est pour cette raison que je lui propose de le faire avec moi. C'est tellement facile de se laisser aller, se reposer sur ses lauriers et tout. Je l'ai fait, j'ai manqué de motivation lorsque j'étais au plus mal, je ne mangeais plus, je ne dormais plus vraiment non plus, je traînais ici et là pourtant je me suis remise, pas toute seule, avec l'aide d'Ivan mais je ne sais pas ce que je ferais sans lui de toute façon. Donc si je peux un peu aider Amery a ma façon je ne peux pas ne pas le faire. On a chacun nos faiblesses. La mienne c'est aujourd'hui dans la forêt. En plus je ne comprends pas parce que d'habitude j'suis pas trop mal dans cette forêt. Elle ne m'a jamais fait peur et heureusement parce que c'est quand même ici que je cours d'habitude. Il y a des choses qui ne s'expliquent pas, peut être que c'est Halloween, et je vois bien qu'il essaye de me rassurer Amery, il est adorable d'ailleurs et moi je dis un peu n'importe quoi du coup je lui dis que c'était pour tester son courage, n'importe quoi. « Si jamais on se fait attaquer par des lutins, je te laisserai pas tomber. » Oh, je lui offre un regard tellement mielleux et tellement compatissant, c'est comme s'il venait de me faire la déclaration du siècle. « Oh c'est tellement gentil !   » Je sers mes mains les unes contre les autres. C'est niais et gnangnan mais je le suis un peu... au fond. Et puis il me pose des questions parce que c'est vrai qu'on a pas vraiment parlé de nos vies tout ça et je ne sais pas grand chose de lui. C'est une très bonne idée, je lui parle de mon métier. « Oh tu le parles couramment ? Je suis impressionné. Et ça te plaît ? » Je rougis un peu parce que je suis toujours gênée quand on réagit de cette façon. Surtout que ce n'est pas si terrible, je n'ai jamais eu l'impression d'avoir beaucoup de mérite finalement, je n'ai pas eu à apprendre la langue, j'ai simplement dû apprendre les techniques de traductions, plus simple que pour tout le monde. « Oui oui j'adore ça. Je ... en fait oui, je parle couramment depuis que je suis petite, c'est mon père qui m'a appris il est bilingue lui aussi. Ma grand mère est française.   » Donc j'imagine que c'est plus simple. Elle vit aux Etats-Unis depuis plusieurs années maintenant mais elle y allait souvent quand elle était plus jeune. Et j'imagine que lui n'a pas vraiment choisi son métier vu la façon dont il l'a dit, donc je lui demande ce qu'il aurait aimé faire et je suis assez surprise de la réponse à vrai dire. Ce n'est pas commun. « Rien ne t'empêche de l'être encore, ton fils est un peu plus grand, et tu es jeune encore.    » Il a encore toute la vie devant lui. Et je comprends qu'il a dû arrêter pour son fils, mais maintenant il doit aller à l'école et tout et même s'il travail il y a toujours les cours du soir et même si ça ne sera pas simple ce n'est pas impossible s'il le veut vraiment. Et du coup je parle de son fils mais je regrette aussitôt. Il me rassure en me racontant tout ça du coup. Mais il y a quelque chose qui me fait tiquer, il parle de ses grand-parents mais pas de sa mère et c'est bizarre mais si elle n'est plus là ça doit être douloureux et je préfère ne rien dire. C'est mieux. « Vous serez encore plus content de vous retrouver du coup. Dis... Tu as une photo ?  » De son fils. J'imagine que oui, mais pas là sur lui mais j'aimerai bien le voir, j'aime beaucoup les enfants et comme j'imagine que je n'en aurai plus pour ma part.