Il fait déjà nuit. Le fait qu’on ait reculé d’une heure la semaine dernière n’a rien arrangé. Au contraire. Il fait sombre encore plus tôt. Ils sont bêtes. C’est plutôt avancer d’une heure qu’on aurait besoin ! Je ne comprends pas du tout. Ils ne sont pas logiques. A quoi ça sert ? C’est n’importe quoi, on devrait protester, manifester dans la rue, faire une révolution j’sais pas ! Parce que ça craint quoi, à 18h bam, c’est déjà limite la nuit. Pourquoi personne ne se révolte à ce propos ? Je trouve qu’il y aurait matière ! On nous vole de la journée ! C’est inadmissible. Bref, ce soir, j’ai mangé tôt, genre 19h. Comme les papi et mamies. Mais j’avais super faim. Alors à quoi bon attendre quand je peux contenter mon estomac de suite ? Après ça, je décide de sortir dehors, digérer tranquillement. Je m’assois sur le rebord de la fontaine. Je n’ai pas de blouson, malgré le froid, mais j’ai une veste assez épaisse qui me tient chaud. De toute façon, je suis pas frileux. Je suis tranquille, jouant d’une main avec l’eau, lorsqu’Eibhlin s’approche de ma personne. « Tu dois être content… » Ah ? Et pourquoi donc ? Je suis pas mécontent ceci dit, non, mais bon, elle doit avoir une idée particulière en tête, de pourquoi je suis content. Je la regarde s’assoir à mes côtés. Je comptais lui poser la question, savoir de quoi il retourne, mais elle le fait toute seule. « Tu dois être content… Parce que j’suis nominée. Si je m’en vais, tu seras bien tranquille non ? » J’hausse un sourcil. Mais elle continue, obligée de sortir une connerie dans cette situation. Je connais ça l’humour comme échapatoire. « Ou tu vas pleurer. Tu te rendras compte de ma valeur. Et je te manquerais aussi, au plus au point… » Au moins. Même qu’elle est ma seule amie apparement. « Gosh, celle qui se fou constamment de ma gueule est ma seule amie…Merde, c’est triste. » Bah oui quoi, la seule amie que j’ai, c’est la fille qui passe son temps à dire combien je suis moche, et parfois débile. Ça craint du boudin. « C’est sur que je vais chialer toute les larmes de mon corps du coup si tu pars. Je vais mettre des jours à m’en remettre, et encore. Ça sera un peu comme si une part de moi s’en va. » J’en fais trop là hm ? C’est pas crédible ? « Non mais plus sérieusement, pourquoi tu penses ça ? » Pas que je vais chialer, mais que je serais content. Bah oui, pourquoi donc ? J’ai donné l’impression de m’en réjouir lors du prime ? « T’es pas facile à vivre c’est clair, t’es même chiante, m’enfin je n’ai pas envie que tu partes. Et puis qui serait là après pour m’emmerder ? » Oui, qui ? Pour tout avouer, j’ai été déçu qu’Akela choisisse la demoiselle. Malgré tout je l’aime bien, et c’est sur qu’elle laissera un vide derrière elle si elle vient à partir. Mais bon, je suis assez confiant. Elle devrait rester quand même ? Tout dépendra de qui elle aura en face d’elle. « Et non merci, j’ai déjà mangé. » Puis je vais manger comment de son plat, avec les mains ? D’autant qu’elle serait foutu de me dire, et bah t’en aura pas.

 « On sait tous que t’es maso, c’pour ça… » Oui ça doit être ça, mais pas que. Si je n’ai qu’elle en amie, c’est que je dois avoir une personnalité pourrie et les autres en ont rien à faire de moi. De toute façon, en vrai, est ce que je peux la considérer comme mon amie ? J’en doute. Un ami, il s’intéresse à toi. Il est à l’écoute. Il veut ton bien. Il ne passe pas son temps à te rabacher à la gueule combien t’es moche. Même s’il le pense, il ne le dirait pas. « Tu dois avoir raison. » Que je dis. Avant de lui faire tout une tyrade comme quoi ça me fendrait le cœur, que je serais perdu sans elle, ce genre de choses.  « Non !... Te voir pleurer, ça me fendrait le cœur… Je ne veux pas que tu gâches tout le reste de ton aventure simplement parce que je vais m’en aller… On se reverra, tu verras ! » Oh comme c’est beau. Limite là j’aurais envie de pleurer. « Tu le promets hein ? » Allez promets le moi, je serais plus rassuré. Finalement on parle plus sérieusement deux minutes. « Juste pour ça, parce que je suis chiante. Et parce que je t’emmerde toujours avec ton physique difficile…Et que finalement depuis le début de l’aventure, je ne fais que ça avec toi… » Au moins le reconnait elle. « Nooon, tu ne fais pas que ça. » Voyons quand même. « Parfois tu m’emmerdes aussi sur mon intelligence. » Haha. Ou mon absence d’intelligence plutôt pour elle. Dans le fond c’est vrai qu’elle a de bonnes raisons sur le pourquoi je souhaiterais son départ. Quant on y réfléchi bien. « T’as raison dans le fond je dois vraiment être maso. Et peut être naïf. Parce que je me plais à croire que tu m’aimes bien quand même un peu. Et que tu finiras pas arrêter d’être aussi mauvaise avec ma personne. » Ce n’est peut être pas près d’arriver. « Mais je brieferais quelqu’un pour le faire à ma place… » Pour être chiante et moqueuse ? Question critique tu physique, c’est bon, y a déjà Pavel et Henley pour ça. Mais le reste… « Oui mais on ne remplace pas l’originale. » Cela ne sera pas pareil. Je décline son offre de manger son repas. Étrangement elle me dit que c’était super bon, que c’est dommage, et elle veut savoir ce que j’ai bouffé. Euh pourquoi ? Je doute que ça l’intéresse. « Hamburger frites. » Et ouais, bien meilleur que son riz là. « J’suis vraiment si chiante que ça… ? » Elle se le demande vraiment ? « Bah t’es quand même la reine dans le domaine…Mais bon, ça t’arrive de l’être moins. Comme maintenant là. Ton cas n’est pas désespéré à mon avis. » Y a de l’espoir. « T’sais ce que je crois ? Que t’agis comme ça, pour en quelque sorte repousser les gens. Ça évite de s’attacher et de potentiellement souffrir. » Psychanalise à deux balles du soir, bonsoir. Oh bien sur, je pense qu’elle est chiante naturellement. Mais le fait par exemple de tout le temps se foutre de ma gueule, me critiquer…Ne serait ce pas un mécanisme de protection ? C’est une tentative hasardeuse, je suis peut être carrément à côté de la plaque.

« M’en voilà rassuré ! » Je vais pouvoir mieux dormir la nuit maintenant que je sais que je reverrais Eibhlin à la sortie. Un poids en moins. Je vais pouvoir vivre mon aventure à fond à présent, parce que là ça me retenait, piffou, je vous dis pas. Et oui, même alors qu’elle passe son temps à se foutre de ma gueule, de mon physique, et de mon intelligence aussi. « Oh, tu dois être intelligent, sûrement, c'est juste qu'on n'aurait un peu de mal à la dire vue d'ici... » Personnellement je préfère qu’on me critique là-dessus plutôt que mon physique. Parce que bon je suis tout à fait d’accord qu’il n’y a pas forcément la lumière à tous les étages. « Mais t’as pas compris…Je joue les débiles exprès, pour pas vous faire complexer. Et puis que vous ayez l’impression d’être intelligent comme ça, à côté de moi. » Et oui parce que je suis un mec sympa moi. Je pense à eux. En attendant moi je suis un petit peu maso pour apprécier la jeune femme malgré son comportement envers ma personne. Limite si j’en redemanderais pas en plus hein. « Et j’attends ce jour avec impatience. » Celui où elle déclarera m’aimer bien et vouloir être mon amie. Moi je dis que cela arrivera bien plus tôt qu’on ne le croit, oui oui, même avant que j’ai des cheveux blancs. Je parle du fait que si elle part, qui sera là pour m’emmerder ? Alors elle évoque un ou une remplaçante qu’elle formerait. Mais bon ils n’égaleront jamais l’originale. Je sais quoi dire pour lui faire plaisir, z’avez vu. Puis je me mets ensuite à la psychanalyser, trouvant des raisons à son comportement. Je ne dois pas être loin de la vérité quand même. « T'es psychologue toi, maintenant ? Mais t'as raison... J'ai déjà trop souffert comme ça dans ma vie, du coup j'ai pas encore envie que ça recommence... » Ah vous voyez. Bon elle va surement me sortir un je blague après, m’enfin ça doit être vrai quand même. Je suis trop fort. « Ouais, je suis psychologue à mes heures perdues, ça me permet d’arrondir mes fins de mois ! Pour toi y aurait du boulot. » Je connais un peu les psy, j’en ai déjà fréquenté. On m’a forcé alors que je ne voulais pas. Au final ce n’était pas si terrible que ça, même si je ne suis pas sur que cela m’a aidé à quoi que ce soit. Peut être un peu. Mais ma psy était canon, alors, forcément c’était une motiv pour m’y rendre. Comme prévu elle me sort un bon je blague, avant d’expliquer qu’elle kiff jouer la chieuse, que ça lui procure du bien être tout ça. « Ah parce que tu sers à quelque chose ? Première nouvelle. » que je dis dans un sourire. Obligé que je la fasse, elle me tend une perche si énorme, il serait bête de ne pas l’attraper. « Le problème c’est que t’es une chieuse sensible tu vois. Tu peux tout faire aux autres, mais la réciproque n’est pas vraie. »