Et voilà que j'ai envie de pisser, mais c'pire qu'un labyrinthe ici, je tourne en rond et ça commence à me prendre le chou. Si je ne trouve pas les chiottes, je vais faire dans ma culotte, ce n'est pas possible. Une folle dans une marrée de gens à s'écrier où sont les toilettes, voilà ce que je suis. Finalement je finis par trouver la salle d'eau. Je serre les fesses le temps que l'unique WC se libère, puis je me jette sur la porte lorsque celle-ci s'ouvre. Trop pressée pour pouvoir patienter. D'ailleurs j'ai le droit à quelques injures des candidats qui attendaient eux aussi pour aller se soulager. Fuck, fallait être plus adroit et rapide. Je fais donc ma petite affaire, mais pas de chance pour moi, quand je veux ressortir, le verrou ne semble pas être en accord avec ma volonté. C'est coincé. Putain de malchance. Je réclame alors de l'aide, mais en retour, j'ai le droit au maître du silence. Comment ça, il n'y a plus personne ? C'est bien ma veine. Je cogne sur la porte, tente à l'aide de ma minuscule force de la défoncer, mais il n'y a rien à faire. Je suis définitivement bloquée. Je soupire, je suis agacée, mais je garde mon calme et ma cool attitude. Je tente alors une autre tactique : le je monte sur la cuvette pour passer par-dessus la porte. Bien sûr je suis bien trop naine pour ça et j'ai eu la maladresse, ou la débilité, de ne pas avoir rabaissé le truc qui cache la cuvette et qui m'aurait empêché de glisser. Le pied dans le fond du trou, celui-ci ne veut pas s'extirper et semble coincé. Je n'ai plus qu'une solution qui s'offre à moi, hurler à la mort en espérant que superman m'entende. « YOUUUHYOUH ! SOS ! JE SUIS COINCEE ! ». Et normalement c'est à ce moment qu'il entre, défonce la porte et vient à mon secours. Mais bon, je peux toujours rêver.

« Eh mec, t’sais pas où j’pourrais pisser un coup ? » demandai-je au premier venu. Il m’observe, de son mètre quatre-vingt dix, du front jusqu’aux orteils, un air hautain et un sourire presque sadique sur le bout des lèvres. Putain, je demande juste où sont les chiottes quoi. Mon regard se fait insistant, et après quelques instants à se regarder comme deux idiots, il m’indique du bout de l’index le fond du couloir. Je lui adresse un sourire plus hypocrite qu’amical, et aussitôt, je m’en vais dans la direction indiquée. Après quelques pas à peine, je m’arrête, me retourne, lève mon majeur dans la direction du cher inconnu. Prends ça bâtard ! C’était lâche, mais nécessaire pour ma fierté personnelle. Puis je reprends la direction des toilettes. Bonne nouvelle, les WC semblaient. Semblaient. Faux espoirs. Rapidement, des cris et des appels se firent entendre. « YOUUUHYOUH ! SOS ! JE SUIS COINCEE ! » Putain, c’est bien ma veine. Je me casse tant que j’en ai encore la possibilité où j’endosse ma cape et mes collants pour aller à la rescousse de l’inconnue enfermée ? Pffff… Choix Cornéliens. Aller je reste. Je m’approche, tape à la porte afin de prévenir la personne de ma présence. « Il y a un problème ? » demandai-je de vive voix afin d’être certain que la personne m’entende et viril, juste pour le plaisir de me croire dans un film à scénario américain. Questionne conne, évidement qu’il y a un problème ; mais ce n’est pas ce que demandent tous les supers héros dans les films hollywoodiens ? Et puis, elle dit qu’elle est coincée, peut-être qu’elle a simplement des problèmes digestifs…

Moi j'appelle ça de la poisse, ou de la bêtise, à voir. Car un être normalement constitué ne se retrouverait pas ainsi doublement bloqué dans des chiottes. Il faut sacrément le faire ou s'appeler Rhéa. Je tambourine sur la porte, je hurle, bref je fais l'hystérique. Il paraît que ça fonctionne et qu'au bout d'un moment, quelqu'un t'entend et vient te secourir à force d'être lassé d'entendre une furie faire la truie en se pétant les cordes vocales. La preuve. « Il y a un problème ? » Mon héros, mon sauveur, mon preux chevalier, le messie (...), enfin pas encore, je suis toujours bloquée. « Non, non, la vie est belle, les oiseaux chantent, les abeilles butinent .. ». Que je suis drôle. Mais ce fut sur un ton plaisantin, pas sarcastique. Je tente quand même de reprendre un peu de sérieux, bien que ça soit délicat dans une telle posture, puis j'expose ma situation. «Je suis coincée l'pied dans le trou. Je crois que ça résume bien mon problème ... ». Pied que j'essaie d'extirper et qui, soudain, ou par magie, se décoince et se libère. Super, bien que je pue le canard WC, voilà un problème de régler. « Finalement je n'aurais qu'un problème de verrou. Si éventuellement et de par ta force surhumaine, tu pouvais défoncer la porte, tu me serais d'une grande aide ! ». Dis-je d'une voix suppliante. Pitié, qu'il ne me laisse pas moisir ici. Je suis jeune, pleine de vie, assez mignonne, j'ai l'avenir devant moi, je ne peux pas crever tel un rat d'égout au fond de ces chiottes.

« Non, non, la vie est belle, les oiseaux chantent, les abeilles butinent .. » répond-t-elle. Elle ose se foutre de ma tronche ? Et bien, quel culot. Superman était sur le point de se faire la mal quand elle poursuit son discours, afin d’exposer objectivement les faits. «Je suis coincée l'pied dans le trou. Je crois que ça résume bien mon problème ... ». Explique-t-elle. Aussitôt, j’éclate de rire. Non, vraiment ? Le pied dans le trou ? Comment a-t-elle pu se coincer le pied dans le trou ? Alors déjà, c’est juste dégueulasse, et ensuite, il faut tout de même être particulièrement doué pour en arriver à une telle situation. Soit. Je me calme un instant. « Non, vraiment ?! » demandai-je, particulièrement ahuri. Je parviens à reprendre mon calme et mon sérieux de preux chevalier tandis qu’elle continue : « Finalement je n'aurais qu'un problème de verrou. Si éventuellement et de par ta force surhumaine, tu pouvais défoncer la porte, tu me serais d'une grande aide ! ». Problème de pied réglé ? Tant mieux. Même si Miranda Kerr se trouvait derrière cette porte, je n’aurais pas plongé mes doigts dans ce mélange de liquides biologiques, d’excréments, urines et autres afin d’en extirpé un pied. Elle me demandait de défoncer la porte. Facile ! Enfin, mouais, la porte à l’air plutôt solide… Mon épaule va y passer. Ca va faire mal. J’hésite un instant : je ne suis pas une fiotte, mais bon, j’ai pas la carrure de Rocky non plus hein… Le mec de deux mètres que j’ai croisé tout à l’heure dans les couloirs serait sans doute plus habile à réaliser cette tâche que moi… « Simple question… physiquement, tu ressembles à quoi ? » demandai-je, doucement, mais particulièrement sérieusement. En effet, j’aurais plutôt les boules de défoncer la porte, et mon corps par la même occasion pour me retrouver face à un laideron.