+ Rowan

Je ne me lasse pas d'être dehors. Il fait beau, pas comme en Irlande, donc autant en profiter. J'adore Hawaï. Je n'y viens pas assez souvent, c'est bête, mais bon, je passe tellement de temps à étudier aussi...Enfin, non, je passe surtout beaucoup de temps partout ailleurs sur le globe, ou à faire autre chose que d'étudier. Du coup, je ne sais pas du tout pourquoi je ne viens pas plus souvent sur cette île paradisiaque. J'avais dû oublier qu'elle existait. J'ai une mémoire sélective donc j'oublie vite ce qui ne me parait pas important, ou en tout inutile pour le moment. Je suis déjà venu quelques fois à Hawaï en vacances, mais ce n'était jamais bien long et puis je ne voyais pas grand chose à part la plage et des filles en maillot de bain parce que mon père état toujours trop occupé ailleurs pour faire visiter des endroits intéressants à son fiston. Bah oui, comprenez que c'est bien plus sympathique d'aller draguer ou chercher de la prostituée que d'emmener son fils au zoo ou au jardin botanique, surtout quand on est un espagnol riche, séduisant et célibataire. Enfin, je lui en veux pas trop, sans lui je ne serais pas ce que je suis. Je ne pense à tout ça que parce que je promène dans le jardin, parce que je vois toutes ces plantes et ces fleurs dont je ne connais pas forcément le nom. S'il m'avait enseignais plus de chose je ne me sentirais pas aussi ignorant. Mais bon, j'aurais dû me prendre en main et apprendre ce genre de choses moi-même si j'avais envie de me cultiver un peu, j'imagine. Je sens soudain quelque chose d'une drôle de consistance sous mon pied. Je regarde ce que c'est et m'aperçois que j'écrase le pied de quelqu'un d'autre, une femme, une blonde, plutôt jolie. « Hm, oh, pardon. J'étais absorbé par...» Je ne peux tout de même pas lui dire que j'étais absorbé par le jardin, et puis pas non par sa beauté, ça fait direct le gros dragueur. Donc je ne finis pas ma phrase, ce n'est pas important de toute façon. «  Tiens pour m'excuser. » Je cueille une fleur. Je ne sais même pas si j'ai le droit, mais je m'en fiche, je prends le gauche et offre un sourire plein de bonne volonté à la demoiselle tout en lui tendant la fleur que je viens de cueillir, surement en tout illégalité pour elle.

J’arrive pas trop à m’habituer à Hawaii pour l’instant. Du coup j’essaie de passer un maximum de temps à l’extérieur du nid, histoire de me familiariser avec la plage, le sable, la chaleur, tout ça. Je crois que la vue depuis le centre-ville d’Anchorage, avec les montagnes qui dominent les lieux, ça me manque un petit peu quand même. M’enfin, Hawaii c’est joli aussi, c’est l’occasion de découvrir ce coin et c’est pas plus mal. J’ai découvert le jardin en début de semaine, et j’ai bien aimé pour tout dire. On dirait presque un petit village avec sa petite fontaine, son labyrinthe et son kiosque, entre autres. Alors quitte à devoir m’habituer au climat d’Hawaii, autant le faire dans le jardin. Et puis il y a limite un jardin botanique. UN JARDIN AVEC DES FLEURS. C’est trop bien, j’en reviens pas. Bon je vais pas passer mes journées ici non plus, mais je garde cet endroit dans un coin de ma tête. J’observe les fleurs tout en avançant, mais je suis coupée dans mon élan par un pied qui vient dire bonjour au mien. Je lève la tête des fleurs et j’observe le mal autrui. Enfin bon, il dit pardon tout de suite, alors il est pas si malpoli que ça, au final. Il était  absorbé par quelque chose. Bon, ça arrive. « Par quelque chose, dirons-nous. » Il est pas obligé de me dire ce qui l’intéressait autant, après tout ça me regarde pas, je comprends pas cette manie de toujours vouloir se justifier. Je jette un coup d’œil à mon pied, ma chaussure est même pas salie, si c’est pas génial. « Il y a pas mort d’homme. » Se faire marcher dessus c’est jamais agréable, mais bon, il a pas fait exprès, alors je vais lui crier dessus. Et puis il s’est excusé alors, oublions cette maladresse. D’ailleurs il s’excuse de façon plutôt sympathique. « C’est gentil. Merci. » Je vais pas lui sauter au cou pour si peu, je suis pas du genre à sauter sur tout le monde pour un rien, faut pas croire, mais ça me fait vachement plaisir, c’est hyper gentil. Et puis ça fait bien longtemps que je n’ai pas reçu de fleurs, alors même si elle est coupée dans l’illégalité la plus totale, ça me dérange pas. Je lui fais même un sourire en prenant la fleur. « Monsieur le gentleman a-t-il un prénom ? » Je suis désolée pour lui, mais je l’ai pas retenu.

A trop pense j'en viens à écraser un pied. Ce sont deux choses qui m'arrivent rarement, de penser et d'écraser des pieds. Je suis plutôt con dans mon genre donc penser c'est pas trop mon truc. Par contre je suis très attentif aux gens, aux femmes qui m'entoure surtout, et je suis un bon danseur, forcément puisque je suis espagnol, donc les pieds que j'ai écrasés sont peu nombreux, il me semble. Je m'excuse immédiatement, je suis bien élevé, vous voyez. J'étais absorbé par...quelque chose, comme elle dit. Après tout, je ne suis pas obligé de le justifier non plus. J'esquisse un léger sourire avant de regarder vers le sol, vérifiant bien que sa chaussure n'est pas sali, ça serait bête et du coup je me sentirais un peu obligé de la lui nettoyer. Je ne ferais pas ça pour un homme, jamais de la vie je ne m'abaisserais à faire de genre de choses, mais là c'est une jolie femme, pas susceptible en plus de cela donc je veux bien me montrer serviable. Elle me fait remarquer qu'il n'y a pas mort d'homme. « Non, heureusement. » Il ne manquerait plus que ça, tiens ! Qu'en écrasant le pied de quelqu'un celui-ci meurt sur le coup. Franchement, ça serait con. Surtout pour elle. Je cueille une fleur et la lui tends, pour me faire pardonner d'avoir été un peu tête en l'air. Elle trouve que c'est gentil et me remercie. Je souris un peu plus fièrement qu'avant. Oui, moi je suis un gentil garçon, je le sais, mais ce n'est peut-être pas la peine que je m'en vante, sinon elle va ma cataloguer comme le maladroit prétentieux, ce qui me caractérise plutôt bien, en fait. Et puis la blonde me demande si j'ai un prénom. Ce serait inquiétant si je n'en avais pas, il me semble. « Esteban, encantado. » Parler espagnol ça fait souvent bonne impression, donc si ça peut gommer ma petite maladresse, autant me servir de ma langue à mon avantage. Je m'incline, en grand gentleman que je suis. J'aurais pu lui faire un baise-main, mais ça aurait été un peu too much, je pense, surtout que l'on venait à peine de se rencontrer. « Toi tu es Rowan, c'est ça ? » Je lui pose la question mais je sais que c'est ça, je m'en souviens. Oui, j'ai retenu son prénom quand elle a été appelée par Cupidon le soir du prime, déjà parce qu'on ne l'entend pas souvent et puis parce que c'est une femme, naturellement. Je retiens mieux les prénoms de la gente féminine, c'est toujours plus pratique pour draguer, ça rapproche immédiatement et ça fait perdre moins de temps en présentations.

En général je ne laisse pas trop passer ce genre de comportement, si on m’écrase le pied je me gène pas trop pour faire remarquer son comportement au mal autrui, c’est jamais agréable, mais lui a de la chance, il est passé entre les mailles du filet. Il s’est excusé aussi, ça aide. Il a de la chance d’être tombé sur moi mine de rien, plus d’une candidate lui aurait mis sa main dans la figure pour sa maladresse, m’enfin bon, il y a pas mort d’homme. Heureusement qu’il dit, bah oui heureusement sinon ce serait lui l’homme mort, s’il ne s’était pas excusé. Je lui demande son prénom, parce que bon, j’aimerais bien savoir le prénom de mon preux chevalier. Esteban, donc. Ça sonne étrange à mes oreilles, sûrement parce que c’est pas américain. C’est peut-être espagnol, tiens, ça l’est sûrement. Il rajoute un truc incompréhensible à mes oreilles. « À tes souhaits surtout. »  Il est gentil, mais j’ai pas google translate sous la main. « Tu es de quelle nationalité ? »  Que je lui demande quand même, histoire de pas trop m’avancer et de me planter, j’aurais pas l’air maligne si je vise à côté. Il s’incline même. J’ai pas l’habitude de ça je dois dire. J’esquisse un petit sourire, faut reconnaître que même si c’est gentil, ça reste drôle. Dans tous les cas, il a retenu mon prénom, c’est suffisamment rare pour être souligné. « C’est ça. » Je sais pas trop comment il l’a reconnu, si c’est juste qu’il est doué ou s’il utilise des aides mémo-techniques comme je le fais, mais c’est cool de pas avoir à se présenter pour une fois. « Dis-moi, en général, les femmes elles te tombent dans les bras quand tu leur offres la fleur ou quand tu parles je sais pas trop quelle langue ? » Que je lui dis, parce que je suis pas dupe, il doit certainement savoir comment faire tomber les filles, c’est un lover, et je me demande si j’ai pas loupé une étape, parce que je suis pas encore dans ses bras.

J'ai de la chance, il me semble. Beaucoup d'autres femmes m'auraient surement collées une bonne baffe dans la tête pour leur avoir marché sur le pied et sali leur jolie chaussure. Heureusement, je crois que je suis tombé sur une demoiselle relativement pacifique. Ou alors elle me trouve mignon avec mon teint blanc et elle n'a pas envie de gâcher ma parfaite symétrie facial en me dessinant la forme de sa main sur la joue. C'est gentil de sa part, si c'est ça. Après m'être excusé et lui avoir une fleur, elle désire connaître mon prénom. Je le lui donne donc, en profitant pour parler espagnol, mais visiblement elle ne s'y connait pas trop. « Ça voulait dire "enchanté". » Que j'explique sur un ton amusé. Elle me demande alors que quelle nationalité je suis. « Espagnole. Et toi ? » Je ne saurais pas deviner rien qu'en la regardant ou d'après son prénom, que je n'avais encore jamais entendu. Elle n'a pas tellement d'accent en plus de ça, ou en tout cas pas un que je connais, alors je ne peux même pas me fier à cela pour déterminer d'où elle vient. Au moins je connais son prénom, elle me confirme que c'est bien ça. Au moins je me sens moins ignorant à son sujet. Enfin, de toute façon on aurait bien fini par faire connaissance. Puis elle me demande à quel moment les femmes me tombent dans les bras, ce qui me fait sourire jusqu'au oreilles. « Oh, ça dépend, parfois je vais même jusqu'à leur jouer un air de guitare ou les faire danser. » Et quand j'en ai l'occasion je vais même encore plus loin en fonction de l'endroit où l'on se trouve, du genre de femme sur qui je tombe. Je m'adapte vite, donc ça ne me pose aucun problème de faire avec ce que j'ai sous la main. « La langue en fait tout de même beaucoup. » Que j'avoue finalement. Je ne sais pas si elle aura compris que j'use ici du double sens du mot « langue », mais au pire ce n'est pas bien grave, je me suis compris, c'est le principal.