you don't want to wake up a sleep-walker
ft. Rowan & Maxence

On l'a tous connu au moins une fois, cette appréhension au moment d'aller se coucher, par peur de refaire le même rêve que la nuit précédente. Et le pire c'était que je ne me souvenais même pas du rêve en question, pas même un tout petit peu, je me souvenais simplement de cette sensation horrible que j'avais eu au réveil. Douloureux, le réveil, parce que réveillé en sursaut j'avais basculé au pied du lit, écrasant au passage le chat qui en plus de miauler avec indignation m'avait planté ses griffes dans l'avant-bras pour me faire comprendre sa désapprobation ... Inutile de dire que j'avais réveillé toute ma chambre au passage, la totale quoi. Du coup, et même si je savais que c'était totalement irrationnel, je redoutais de monter me coucher et de me retrouver à nouveau, peut-être, avec cette sensation qui m'avait réveillée la nuit dernière, et que seuls cinq cafés d'affilée avaient réussi à chasser. Par chance le temps plus que clément dont nous bénéficions ici me donnait une excuse en or, et à minuit passé on pouvait encore traiter sur la terrasse sans avoir trop frais ; J'avais tout de même embarqué un gilet avec moi en plus de ma méthode de langue. Je me concentrais mieux le soir, de toute façon, pour étudier c'était donc plus facile, et il était rare à mon avis que d'autres gens viennent trainer sur le toit à une heure pareille. J'étais aussi repassé par la cuisine où j'avais pris une bouteille de jus d'orange que j'avais monté avec moi. Mon gilet, ma méthode, à boire, mes clopes et un cendrier : le combo parfait. Mais preuve que je m'améliorais grandement, cela faisait une demi-heure que j'étais là, attablé, et que j'avais fumé qu'une seule cigarette, pour l'instant. La bouteille de jus d'orange elle avait pratiquement diminué de moitié en revanche, et je n'avais pris qu'un seul verre. Ce qui, jusqu'à présent ne posait pas de souci puisque j'étais tout seul, mais qui risquait de devenir un problème maintenant que j'avais entendu l'escalier qui menait à la terrasse grincer. Relevant la tête de mon livre j'avais reconnu Rowan et lui avait adressé un sourire « Une autre couche-tard. » Cornant machinalement la page à laquelle j'étais arrêté pour ne pas la perdre, j'avais refermé mon livre tout en regardant la jeune femme se diriger vers moi. Elle pouvait s'asseoir sur le banc à côté de moi, je n'allais pas la chasser. « J'espère que tu ne craints pas les moustiques, parce qu'ils ont l'air de tous s'être donnés rendez-vous ici. » Faut dire que la lumière avait tendance à les attirer, mais que j'avais besoin de la lumière pour lire, donc. Et puis ça va, généralement je n'étais pas trop attaqué par les moustiques, et là avec les manches longues de mon gilet cela limitait en plus un peu les zones à attaquer.

Va falloir que j’attache Archie. C’est plus possible, là. Il est bien gentil de me tenir pour responsable des bleus sur ses genoux, mais il est plutôt pas mal non plus dans son genre. Il se transforme en vrai furie la nuit, j’en ai pas l’exclusivité, désolée mon gars. Non mais c’est pas possible de cogner autant, je suis sûre que personnellement je suis pas responsable de mes gestes, c’est mon inconscient qui réclame vengeance des coups qu’il m’inflige. Du coup quand je l’ai vu traîner autour de la chambre, j’ai pris mes jambes à mon cou. Je sais pas s’il comptait se coucher, mais j’ai suivi mon instinct de survie et j’ai fuis. Mes jambes me remercient encore. Je savais pas trop où aller à cette heure-ci, j’avais presque envie de monter un siège sur le canapé histoire d’avoir un refuge pour la nuit. M’enfin, je suis pas assez fatiguée pour ça. Je m’habitue plutôt bien au fait de se coucher au petit matin et de se lever parfois à midi passé. Du coup, j’ai passé tout droit après le salon, et sans trop savoir pourquoi, mes pas m’ont menée sur la terrasse. Je crois pas être déjà venue ici. Du coup je jette un coup d’œil à la fameuse terrasse, et je m’arrête un peu sur les auto-tamponneuses. Les auto-tamponneuses. LES AUTO-TAMPONNEUSES. Non mais j’ai dû rêver, c’est pas possible. Il fait nuit, c’est sûrement ça, j’ai confondu avec … un arbre, je sais pas mais j’ai confondu avec quelque chose. N’empêche que des auto-tamponneuses sur un toit, c’est assez exceptionnel. Si c’est ça. Non mais faut que je m’approche, j’ai besoin d’en être sûre. Ceci dit, je suis interrompue dans ma quête de vérité par une voix que je connais. Je tourne la tête et découvre Maxence. « Couche-tard ou nuit blanche, j’ai pas encore décidé. » Ça dépend si mes genoux acceptent de subir l’épreuve Archie encore cette nuit. Bon pour l’instant j’opte pour la première solution, en espérant pouvoir compter sur Maxence pour m’occuper, afin de repousser le moment fatidique du coucher. Quant à lui, il est couche-tard à en croire ses paroles. Je m’installe sur le banc à côté de lui, je vais pas rester debout tout de même. « Ça devrait aller, la plupart des parties de mon corps ont été soigneusement anesthésiées par les coups de mon partenaire. » Bon pour être honnête, j’aimerais tout autant éviter les moustiques, m’enfin ça fait partie du lot quand on décide de sortir en pleine nuit, hein. « Hm, dis-moi… » Je me pince la lèvre, il va me prendre pour une folle, mais faut que je lui pose la question, ça m’intrigue trop. « Je suis folle où il y a des auto-tamponneuses sur le toit ? » Que je dis en regardant au loin, non mais ça m’intrigue trop.

Je ne savais pas trop si je faisais partie des couche-tard ou non. Je pense que c'était subjectif en fin de compte, dans la vie de tous les jours j'avais l'impression de l'être au moins un peu, mais depuis que j'étais ici ... J'avais beau me coucher aux alentours de vingt-trois heures trente ou minuit, j'étais quand toujours parmi les premiers à retrouver mon lit. Mais j'étais toujours dans la première moitié des levés également, on voyait d'ailleurs bien la fracture entre les étudiants et ceux qui parce qu'habitués à se lever plus ou moins tôt pour aller bosser continuaient de conserver le même rythme, par volonté ou par habitude. C'était même pas vraiment mon cas pourtant, j'avais pas vraiment un boulot à heures fixes, ça dépendait de tout un tas d'autres facteurs. Du coup en tout cas, me voir traîner sur la terrasse à cette heure-ci n'était pas habituel, et puisque Rowan et moi ne partagions pas la même chambre je me renseignais simplement, est-ce que c'était une couche-tard ou bien est-ce qu'elle peinait simplement à trouver le sommeil aujourd'hui pour une raison ou une autre ? « Couche-tard ou nuit blanche, j’ai pas encore décidé. » Ah ouais, de toute évidence elle était plus calée que moi dans ce domaine-là. Parce que je ne voulais pas aller dormir pour diverses raisons, mais cela ne voulait pas dire que je n'étais pas fatigué. J'avais les yeux qui commençaient à piquer pour être honnête. Mais puisque Rowan venait de s'installer à côté de moi cela me faisait une raison de plus de veiller encore un peu, et au passage j'avais cru bon de la prévenir de l'invasion de moustiques des fois qu'elle change d'avis « Ça devrait aller, la plupart des parties de mon corps ont été soigneusement anesthésiées par les coups de mon partenaire. » J'avais arqué un sourcil ; Est-ce que j'étais le seul à être tombé sur un partenaire pas trop encombrant, et avec qui dormir ne relevait pas du marathon ou de la corvée ? Offrant à la jeune femme une moue compatissante j'avais fini par répondre « Quoi, il te frappe en plus ? Faut lui rendre, et bien viser si tu vois ce que je veux dire. » C'était un peu contraire au code de solidarité masculine ce que je venais de lui dire, non ? Bah, tant pis. Après tout pas de quartier, le sommeil c'était sacré. « Mais si ça ne suffit pas tu peux toujours venir squatter mon lit. Bon, on risque de devoir se serrer un peu entre toi, moi, Mickael et le chat, mais plus on est de fous plus on rit, parait-il. Et puis on se tiendra chaud. » Je ne garantissais pas des bienfaits sur le sommeil ensuite ceci-dit. Semblant scruter les alentours, Rowan semblait maintenant regarder de l'autre côté de la terrasse avec attention, et même avec incompréhension à en juger par son air dubitatif et ses sourcils froncés. Et d'ailleurs, me gratifiant d'un « Hm, dis-moi ... » destiné à attirer mon attention au cas où cela ne serait pas déjà le cas, elle m'avait posé une question, comme si cela la perturbait intensément « Je suis folle où il y a des auto-tamponneuses sur le toit ? » Instinctivement j'avais tourné la tête dans la même direction qu'elle, même s'il faisait noir, et même si je savais déjà très bien ce qui se trouvait là. Les autos-tamponneuses, effectivement, et c'est vrai que je m'étais demandé si je n'avais pas trop pris le soleil et chopé une insolation, la première fois que j'étais monté et que je les avait trouvées là. « Non je pense pas que tu sois folle, du moins pas que je sache pour l'instant ... Mais par contre tu aurais vraiment du mettre un chapeau avant de sortir griller au soleil aujourd'hui. » n'avais-je pu m'empêcher de répondre d'un ton railleur, tout en mordillant machinalement le capuchon de mon stylo. J'avais écrasé mon mégot quand j'avais vu la jeune femme, inconsciemment fallait bien que je remplace. Mais bon je lui accordais, des autos-tamponneuses déjà ce n'était franchement ordinaire, mais sur un toit encore moins. Imaginez un peu si on se tamponnaient un peu trop fort et que l'un des candidats valdinguait jusqu'en bas ? C'était toujours con de mourir, mais mourir comme ça c'était carrément plus con que la moyenne. « Un des nombreux délires du décorateur de la production sans doute. C'est à se demander ce qu'ils fument tous en réfléchissant à la saison suivante. » Parce que y'avait pas que les autos-tamponneuses qui faisaient tâche, la chambre qui ressemblait à un échiquier on en parle aussi ?

J’ai beau avoir fui le lit que je partage avec Archie, c’est pas pour autant que la nuit va être un cauchemar. C’est pas la première fois ni la dernière que je ferais une nuit blanche, donc bon, je peux le supporter. Et l’avantage de ne rien faire de ses journées et de n’avoir donc aucun horaire à tenir, c’est qu’au pire, je peux pioncer quand je veux. Il y a bien un moment où mon partenaire va sortir du lit, et je m’y jetterais dedans à peine aura-il levé les fesses. Donc bon, rester éveillée me posait pas spécialement de problèmes même si trouver le sommeil est toujours plus agréable. Mais au moins, ce soir, j’ai la chance de tomber sur de la compagnie en venant sur cette terrasse, et pas la pire qui soit. Maxence ne trouve donc pas le sommeil à priori, bah on va s’occuper à deux c’est pas un souci. Vu comme c’est parti je suis presque tentée de faire une critique d’Archie pour faire passer le temps, c’est que j’en aurais des choses à dires, et puis la proposition de Maxence pour mettre fin à la violence physique de mon partenaire est pas trop mal, je serais curieuse de savoir s’il a d’autres bons plans, dans quel cas je suis preneuse. « J’y ai déjà pensé, c'est mal ? » Oh que oui, mais pas parce que je suis sadique, jamais de la vie, simplement pour le taquiner. Mais j’ai vite éliminé cette idée de mon esprit, parce que mine de rien, ça doit faire sacrément mal, et il le mérite pas, mon pauvre partenaire. « Mais entre nous, je dois être bien moins délicate que lui la nuit. » Je le frappe bien plus d’après ce qu’il dit, et mine de rien ça se voit un peu. Mais je vais éviter de lui le dire, ça lui ferait trop plaisir et je suis persuadée qu’il me lâchera pas si je fais cette révélation. Faut espérer que la production ne lui montre pas ses images, je suis foutue sinon. Du coup, en avouant à Maxence que je me transforme en Mike Tyson une fois la nuit tombée, je suis pas sûre que sa proposition de venir squatter le lit qu’il partage avec son partenaire et le chat tienne toujours. Dommage. Ça m’aurait plu, uniquement pour profiter du chat, bien évidemment. D’ailleurs ce chat, ce serait bien que je le rencontre enfin, depuis le temps que j’en entends parler. « Être coincée entre deux garçons, je suis pas sûre que ça me plaise, je visais plus le tête-à-tête avec ton chat. » Vraiment, je suis déçue de devoir partager le chat avec les deux garçons, je le voulais que pour moi, c’est terrible. Plus sérieusement, mon sommeil se porte très bien même si Archie se venge des coups que je lui donne, et puis dans le pire des cas je le pousse à terre durant son sommeil et le problème est réglé. En ultime recours il reste le canapé, pour lui bien évidemment. Et puis s’il continue vraiment à râler pour les quelques bleus que je lui inflige, j’ai qu’à le pousser ni vu ni connu du toit, ahah. En parlant du toit d’ailleurs, je sais pas si je deviens folle ou pas, mais je crois avoir repéré un objet mystique. Je reste bloquée dessus pendant bien des minutes, depuis que je suis arrivée ici en fait. Il fait presque nuit, donc ce serait pas impossible que je me mette à avoir des hallucinations. Mais mine de rien, la terrasse est un minimum éclairée – c’est pas plus mal si on veut pas se casser la  figure et finir en mode poupée désarticulée quelques mètres plus – et du coup je distingue quand même deux/trois formes qui, j’en suis sûre, s’apparente à des auto-tamponneuses. Ça se reconnait quand même. Bref, quoi qu’il en soit, je demande confirmation ou non à Maxence, parce que je sens que je pourrais pas totalement lui parler tant que je ne serais pas fixée. Et si j’ai pas répondu, j’arriverais pas à dormir, et du coup j’embêterais Archie, qui me tapera, qui me poussera à déménager et je finirais dans le lit de Maxence et son partenaire, à étouffer entre eux, dont à transpirer, avec le chat sur moi, donc qui me laissera des poils dessus. Et je finirais en boule de poils géantes qui transpire, c’est ça qu’il veut ? Non, alors il doit me répondre, il a pas le choix. Mais d’après ce qu’il me dit, je dois quand même être myope ou je sais pas quel problème des yeux, parce que ‘’j’aurais du mettre un chapeau avant de sortir griller au soleil’’. Donc déjà je grille pas, je me liquéfie sur place, c’est différent. Et puis je vais même pas noter le ‘’du moins pas pour l’instant’’, dis donc c’est qu’il devient fourbe. « J’y penserais, la prochaine fois. » Ok pas de soleil sans chapeau sinon j’ai des hallucinations d’auto-tamponneuses. Si ça se trouve je suis tellement bien partie que je vais rêver d’elles cette nuit, qu’elles vont me capturer et me ficeler sur leur banquette en cuir imité. Enfin du coup, je sais pas si dit comme ça, ça relève du cauchemar ou d’autre chose, mais je vais éviter d’y réfléchir. Je deviens folle, voilà ça commence. Non mais en fait, je le suis pas totalement vu que visiblement, j’ai pas rêvé à en croire ses paroles suivantes. Ah bah me voilà clairement rassurée. Parce que quitte à avoir des hallucinations, je préfère encore voir Joaquin Phoenix qui me suit en mode naturiste que des auto-tamponneuses, voyez. « Ceci dit, les auto-tamponneuses me semblent presque être une idée normale en comparaison avec la décoration de certaines pièces. » Genre ma chambre, donc je suis pas encore sûre de quel coin des Etats-Unis la décoration est censée représenter. « Tu sais quoi ? Parle-moi de toi. » Que je dis finalement. « Quitte à ne pas dormir, autant que j’en apprennes plus sur toi.  » Je suis curieuse mine de rien, et puis je me dis qu’on se croise régulièrement depuis qu’on est ici, alors ce serait bête de rien savoir d’autres sur lui excepté le fait qu’il se soit ramené avec un chat dont faudra prochainement organiser les funérailles vu les commentaires de certains candidats.

Spoiler:

Pour ça je pouvais dire que Mickael n'était vraiment pas chiant, y'en avait plusieurs ici qui semblaient vivre avec plus ou moins de difficultés la cohabitation avec leur partenaire mais ce n'était pas vraiment mon cas. Mickael était facile à vivre jusqu'à présent, et parce qu'il ne m'avait jamais fait la moindre réflexion et que je doutais qu'il soit du genre à garder ça pour lui, je pouvais en conclure qu'il en était sans doute de même pour lui. Ce qui, on ne va pas se mentir, m'enlevait une sacré épine du pied parce que c'était un peu un des trucs que je redoutais en venant ici, hm. Et de toute évidence tout le monde n'avait pas eu ma chance puisque Rowan semblait hésiter sur la façon dont faire payer à son propre partenaire ses brusqueries de la nuit. J'avais bien une solution pour elle, mais assez radicale j'en conviens. « J’y ai déjà pensé, c'est mal ? » J'avais laissé échapper un léger rire, tout en affichant un rictus faussement hésitant « Mal probablement, mais ton secret est sain et sauf avec moi. » Et puis bon, comme je venais aussi plus ou moins de lui souffler l'idée cela faisait pratiquement de moi un complice, alors autant assurer mes arrières, des fois que. « Mais entre nous, je dois être bien moins délicate que lui la nuit. » D'un seul coup j'avais presque de la peine pour son partenaire, du coup. Et je me demandais même si c'était une si bonne idée de lui avoir proposé mon lit en guise de terre d'asile ... Bien qu'en se serrant à trois sa marge de manœuvre serait plus que réduite, sans compter le chat qui ne se gênerait pas pour lui filer un coup de griffe si elle ne se tenait pas tranquille, huhu. « Être coincée entre deux garçons, je suis pas sûre que ça me plaise, je visais plus le tête-à-tête avec ton chat. » Encore une preuve flagrante de solidarité féminine faite au détriment de nous, pauvres hommes. Prenant en tout cas un air des plus désolé j'avais répondu en soupirant « Je me doute bien mais qu'est-ce que tu veux, la vie est faite de tout un tas de sacrifices. » Et puis si elle était si violente que ça qui sait si ce ne serait pas Archie qui la virerait du lit, dans l'espoir de retrouver enfin un sommeil paisible et réparateur, au moins le temps d'une nuit ... Si Rowan n'avait pas envie de devoir se contenter du canapé elle allait devoir montrer un peu plus d'enthousiasme, et pas uniquement envers le chat, hein. Mais là je crois que je l'avais perdue, plus rien ne comptait plus que les autos-tamponneuses ... C'est sûr que c'était plus intriguant que moi en train d'étudier sur un vieux livre corné et usé. Elle n'y croyait pas trop ceci dit, elle était à deux doigts de penser voir une hallucination et j'aurais eu tort de nier en bloc sans la charrier un peu « J’y penserais, la prochaine fois. » Le pire c'est que j'avais dit ça en rigolant, mais pour avoir déjà été victime d'une hallucination à cause de la chaleur je pouvais confirmer que ce n'était pas franchement drôle ... Surtout après coup, quand on réalisait, en fait. Mais pas d'hallucination ici, donc, simplement un délire de la production comme ils semblaient avoir à chaque saison, et même plusieurs fois par saison à en juger la décoration de certaines pièces. Idée que Rowan semblait d'ailleurs partager avec moi « Ceci dit, les auto-tamponneuses me semblent presque être une idée normale en comparaison avec la décoration de certaines pièces. » Nous étions donc d'accord. Bon, le pire restait quand même la salle de réception à mon sens ... Tant de rose, de kitsch, de cœurs et de références à Cupidon dans une seule et même pièce, mes yeux en avaient pratiquement saigné. « Oui enfin, le bon goût n'a jamais tué personne, jusqu'à preuve du contraire ... Alors qu'un mauvais virage sur une de ces autos et une dégringolade de cinq étages, probablement. » Terre à terre un jour, terre à terre toujours. Machinalement j'avais écrasé le plat de ma main sur ma nuque, saloperie de moustique. J'aurais peut-être du la mettre en veilleuse avant de me dire que je ne craignais pas trop les moustiques avec mon jean et mes manches longues, ces bestioles trouvaient toujours le moyen de s'infiltrer sur le moindre petit bout de peau resté découvert. Quant à Rowan, elle décida de changer de sujet et de laisser les autos-tamponneuses là où elles étaient. Ce qui n'était pas un mal, parce que si elle avait cherché quelqu'un pour les tester avec elle ce n'était pas sur moi qu'elle aurait compté. « Tu sais quoi ? Parle-moi de toi. Quitte à ne pas dormir, autant que j’en apprennes plus sur toi. » C'était un peu facile comme question, même à une heure pareille. Et puis surtout c'était ultra-difficile, parce que quelle personne normalement constituée pouvait aimer répondre à cette question ? A moins de s'appeler Dior et Esteban, certes. « C'est une question piège ? » Sait-on jamais, hein. Non ? Bon. « Bon, laisse-moi réfléchir. » Fallait pas espérer trop non plus, ce n'était parce qu'elle me le demandait gentiment que j'allais lui déballer des choses intéressantes sur ma vie, il allait falloir être un peu plus persuasive que ça si elle voulait de l'intéressant. « Alors, hm ... Je suis allergique au poisson, je pourrais presque tuer pour des loukoums, je ... hm, j'ai été serveur dans un café et moniteur de ski quand j'étais étudiant ... je parle plusieurs langues, parce que c'est un truc qui me passionne, mais quand j'étais petit je voulais être pirate, ou brigand je savais pas trop trop ... ah, et je connais les douze premières décimales de Pi, mais uniquement pour frimer parce qu'en vrai j'ai toujours été une calamité en mathématiques. » Voilà voilà, elle devait assurément être hautement satisfaite de ces informations capitales à mon sujet. Mais la prochaine fois qu'elle voudrait vraiment savoir quelque chose elle poserait une question plus précise, disons que ça serait sa leçon du jour. Du soir. « Bon allez, à moi de poser les questions. T'as toujours vécu en Alaska ? T'as déjà vu une aurore boréale alors ? » Elle ne pouvait pas le savoir, elle, comme sa région pouvait me faire rêver. J'étais ce genre de personne qui avait carrément fait une liste des endroits que je voudrais visiter un jour ... Parce que je voyageais, plus que la plupart des gens c'est certain, mais y'avait des moments où je rêvais de voir autre chose que des villes sablonneuses, des étendues arides et poussiéreuses et des paysages de destruction ou de désolation. « Tu fais quoi dans la vie, d'ailleurs ? » Ça, c'était des questions que j'estimais précises, et destinées à alimenter un peu ma curiosité concernant la jeune femme. Non pas que de savoir quelle était sa friandise préférée ou sa carrière rêver quand elle avait cinq ans ne m'intéressent pas, mais disons que c'était un peu moins utile comme information, quoi.

Spoiler:

Ça me surprend qu’il me donne des conseils pour achever Archie, en visant un peu plus haut que les jambes. Il y a pas une solidarité masculine en principe, ou un truc dans le genre ? Entre filles ça m’étonnerait pas qu’il y en ait pas, mais entre garçons, quand même ! Ceci dit c’est un bon conseil, même s’il est pas vraiment nouveau vu que l’idée m’a déjà effleuré l’esprit. Oui je sais, pauvre Archie, blablabla, je suis sûre qu’il sera dévasté de plus pouvoir utiliser son engin pendant quelques jours si je venais à viser trop haut. Dans tous les cas, je lui avoue y avoir déjà pensé. Je lui demande si c’est mal, mais je me doute bien de la réponse. Alàlà, c’est tellement mal que je vais probablement finir en enfer, quel dommage. Heureusement, mon secret est bien gardé. Il a tout intérêt à le garder, surtout.  « Me voilà donc rassurée. » Pas de solidarité masculine, ça me plait. Puisqu’on est dans les confessions, je reconnais ne pas être des plus délicates au lit – et je parle bien des coups – même si ça me tue de le dire. Là aussi, j’espère que mon secret est bien gardé, sinon je suis foutue. Mais au pire, si Archie me casse trop les pieds, j’ai un nouveau foyer grâce à Maxence. Enfin, partager le lit avec deux garçons et un chat me tente pas plus que ça quand même. Je veux que le chat, en fait. Mais visiblement, accepter la présence des deux garçons est un sacrifice comme on voit souvent dans une vie, ahem. « Mais je suis pas sûre de pouvoir vivre avec un tel sacrifice sur la conscience, vois-tu. » C’est vrai, ça va bien trop me perturber, c’est pas cool. Je vais finir dépressive, à me taper la tête contre les murs jusqu’à ce que mort s’en suive, c’est ça qu’il veut ? En tout cas, je suis désormais bien trop occupée par les auto-tamponneuses pour continuer la conversation. Tant que ma curiosité ne sera pas satisfaite, je ne pourrais pas détacher mes yeux de l’attraction. M’enfin, Maxence me confirme assez rapidement – après s’être joué de moi, le vilain -  ce dont je me doutais : ce sont bel et bien des auto-tamponneuses. Du coup j’espère que c’est des tours gratuits, hein, parce que j’ai pas amené ma bourse avec moi. Quoi qu’il en soit, cet endroit est quand même plus sympathique que la décoration des chambres, et donc, semble un peu plus normal. Enfin j’en suis plus si sûre après l’argument imparable de mon camarade. En effet, une mauvaise décoration n’a jamais tué personne contrairement à des auto-tamponneuses sur un toit. Bon il y a pas encore eu de mort – à moins qu’on nous cache quelque chose – mais quand même, c’est pas très rassurant. La décoration, à la rigueur, elle rend aveugle, elle nous coûte pas la vie. Je suis tout à coup un peu moins motivée à faire un petit tour en auto, merci bien Maxence. « Un moyen de se débarrasser des candidats insupportables, sans doute. » Par exemple Chanel et Jasmin, à tout hasard. Cette pensée devrait certainement rendre fou de joie certains candidats. Pour ma part, je suis pas vraiment sûre de vouloir risquer ma liberté pour si peu, et puis les auto-tamponneuses c’est bien trop voyant, vaut mieux se servir de poison. Ma curiosité concernant les auto-tamponneuses désormais – presque – satisfaites, je m’intéresse un peu plus à mon camarade, dont je ne sais pas grand-chose. Outre le fait qu’il soit venu ici avec un chat, dont j’ignorais toujours le nom en fait. Le truc, c’est que je suis pas spécialement douée pour faire connaissance avec les autres, les relations sociales, et tout ça. On me dit souvent que je suis bizarre dès que j’ose faire connaissance avec quelqu’un, parce que je pose pas vraiment les bonnes questions, du coup je préfère éviter. Mais visiblement être trop évasive s’apparente à une question piège. Du coup ça m’aide pas hein, faudrait savoir, soit je pose les mauvaises questions, soit elles sont pièges. « Seulement si tu veux qu’elle le soit. » Que je lui dis. Ça n’a rien d’une question piège, c’est lui qui s’imagine que ça est une. À la rigueur, s’il ne sait pas par où commencer, je suis pas compliquée, il a qu’à me faire un topo rapide comme on remplirait un questionnaire sur un site de rencontre. Prénom, nationalité, lieu de résidence, profession, ce qu’il aime et ce qu’il déteste. Et ça m’aurait convenu, hein. Bon, il vise un peu loin ceci dit vu qu’il a besoin de réflexion. Du coup j’attends sagement. Je m’attendais à une vraie réponse, du coup je reste silencieuse quelques instants une fois qu’il m’a énuméré ses allergies et les métiers qu’il rêvait de faire quand il était jeune. Bon. Ça m’apprendra, faut vraiment que j’écrive un manuel ‘’faire connaissance pour les nuls’’, parce que visiblement, ma technique n’est toujours pas au point. « Très intéressant. Pas vraiment ce que j’attendais ceci dit, mais intéressant. »  Pour ce qui est des allergies, par exemple. « Du coup, maintenant je sais qu’il me suffira de te faire manger du poisson ni vu ni connu si tu m’agaces. Ou si tu te moques gentiment de moi à nouveau. » Roh ça va, je rigole, je vais pas le tuer pour si peu quand même. Du coup je laisse échapper un très léger rire – rire à gorge déployée n’est pas ma spécialité – pour lui faire comprendre que je rigole, qu’il a pas besoin de craindre pour sa vie tant que je serais dans ce nid. C’est à lui de poser les questions maintenant, et malheureusement je peux pas vraiment lui répondre une connerie, les questions ne s’y prêtent pas. Dommage. Du coup je me montre sérieuse, je suis trop gentille. « Non, j’y vis depuis un peu moins de dix ans. »  Très honnêtement, j’ai l’impression d’y avoir toujours vécu, probablement parce que cette région m’a accueillie alors que j’étais en pleine crise identitaire. Pour rien au monde j’y déménagerais. Ce qui est drôle, sachant que je suis arrivée là-bas parce qu’il s’agissait du coin le plus éloigné d’un quelconque représentant de ma famille, et non par réelle envie d’y vivre. « Oui, en effet. Enfin Anchorage est pas vraiment la ville où tu les vois le mieux, faut plutôt aller vers Fairbanks, du coup ça reste un spectacle qui me surprend toujours. »  Et heureusement. Je sais bien que je suis déjà chanceuse de pouvoir assister à un tel spectacle plus de la moitié de l’année, mais le jour où cela ne me fera plus rien parce que j’y suis trop habituée, je commencerais sérieusement à m’inquiéter. J’ai pas le temps de lui poser une question qu’il renchérit. « Je suis graphiste. » Encore une fois, il s’agissait pas d’un choix longuement réfléchi ou d’un quelconque rêve, mais bien d’une profession choisie par dépit. Arrivée à Anchorage, il avait bien fallu que je me trouve rapidement un job si je voulais pouvoir louer un appartement, et celui-ci s’était imposé à moi grâce à mes quelques compétences en dessin. « Tu parles plusieurs langues, alors ? Lesquelles ? Apprises par plaisir ou pour le travail ? » C’est bien là les deux raisons principales à l’apprentissage d’une langue, non ? Enfin bon moi je sais pas, je parle quelques mots d’allemand à la rigueur, mais rien d’autre.

Bon, à bien y réfléchir si Rowan se la jouait vraiment championne de kung-fu pendant la nuit on ne pouvait pas vraiment reprocher à son partenaire de lui rendre au moins un peu la monnaie de sa pièce, parce qu'après tout la galanterie avait elle aussi ses limites. Alors en définitive disons simplement que je pouvais m'estimer heureux de ne pas être dans sa situation, même si à première vue je restais aussi persuadé que si j'avais eu Rowan comme partenaire j'aurais pu tomber sur bien pire, qu'on se le dise ... Tiens, par exemple j'aurais pu tomber sur quelqu'un qui n'aimait pas les chats, et là ça aurait forcément coincé un peu. « Me voilà donc rassurée. » qu'elle me répondit en tout cas d'un ton amusé, m'arrachant un sourire. De toute façon garder son secret ne me coûtait pas grand-chose, si jamais Archie parlait de sa partenaire à quelqu'un où arborait des jambes couvertes de bleus tout cela ne serait plus qu'un secret de polichinelle. Quant à l'éventualité de plutôt partager un lit avec Mickael, Tixy et moi, il semblerait bien que le chat soit le seul des trois à ne pas lui poser souci ; Bah oui, après avoir passé une semaine et demie à dormir avec un type qui lui rendait ses coups je comprenais que dormir avec deux marmottes comme nous soit un horrible sacrifice. « Mais je suis pas sûre de pouvoir vivre avec un tel sacrifice sur la conscience, vois-tu. » Je secouais la tête affirmativement, comme le psy qui tentait de convaincre son patient qu'il l'écoutait avec attention et qu'il n'était pas du tout en train de faire sa liste de courses dans sa tête pendant que l'autre lui racontait ses malheurs. « Je te pensais pas du genre à renoncer au premier obstacle quand même, je dois avouer que je suis déçu. Je ne sais pas si je pourrais m'en remettre. » avais-je alors répondu d'un ton horriblement déçu, tout en soupirant de façon pas du tout exagérée, hm. Mais tant pis pour mes états d'âmes puisque Rowan était de toute façon bien trop obnubilée par les autos-tamponneuses que la production avait décidé de mettre sur le toit. Ils avaient une forêt, une plage, et un jardin immense mais non, ils avaient décidé de mettre ça sur le TOIT. Peut-être en espérant pouvoir se débarrasser ni vu ni connu de certains candidats encombrants, le tout en faisant passer cela pour des accidents tragiques « Un moyen de se débarrasser des candidats insupportables, sans doute. » Elle lisait pratiquement dans mes pensées en plus du reste, je ne savais pas si je devais trouver ça cool ou bien un brin flippant - sait-on jamais, si elle pouvait lire TOUTES mes pensées j'aurais peut-être le droit de m'inquiéter, hm - mais en tout cas elle me plaisait de plus en plus, cette fille. « Dans ce cas là je crois que j'ai quelques suggestions pour eux, hm ... » Sans rancune hein, mais comme on dit y'en avait certains s'ils prenaient feu et que j'avais un verre d'eau je le boirais, quoi. Enfin non peut-être pas, j'étais pas un bouffon comme ça, mais ça faisait toujours du bien de l'imaginer, ça défoulait un peu disons, huhu. Ses interrogations concernant les autos-tamponneuses en tout cas résolues, Rowan avait semble-t-il décidé d'en apprendre plus sur le petit camarade que j'étais, mais sans doute était-il temps de lui avouer que sa technique n'était pas au point, parce que ma question si vous vouliez mon avis ressemblait plus à une question piège qu'autre chose ... Ça ressemblait à ce genre de questions stressantes qu'on posait lors des entretiens d'embauches, et auxquelles on avait l'impression que peu importe la réponse que l'on donnait, ce n'était jamais la bonne « Seulement si tu veux qu’elle le soit. » m'assurait-elle pourtant ... Bon, dans ce cas là je pensais pouvoir ne pas trop me mouiller en lui listant quelques détails inutiles de ma personne, parce qu'après tout elle n'avait pas précisé le niveau d'utilité qu'elle espérait obtenir de ma réponse, et moi je trouvais ça bien trop facile de lui donner plein d'informations utiles comme ça d'un seul coup. Parce que cela faisait un peu partie du jeu aussi, à mon sens, d'apprendre à connaître ses petits camarades avant que ceux-ci ne vous mette gentiment dehors par le biais des nominations. Bref, entre mes jobs étudiants, mon goût pour les loukoums et autres joyeusetés, elle était gâtée. « Très intéressant. Pas vraiment ce que j’attendais ceci dit, mais intéressant. Du coup, maintenant je sais qu’il me suffira de te faire manger du poisson ni vu ni connu si tu m’agaces. Ou si tu te moques gentiment de moi à nouveau. » Ah bah bravo, de tout ce que je venais de dire c'était le meilleur moyen de me tuer qu'elle avait retenu, je comprenais à comprendre un peu la douleur d'Archie bizarrement. « Rappelle moi de ne plus jamais manger à côté de toi. » Et de ne plus rien accepter qui vienne d'elle niveau nourriture, donc. Ceci dit on se doute bien que je faisais particulièrement attention à ce que je mangeais, et encore plus ici, parce qu'Hawaii était quand même pas trop loin de l'Asie, et qu'ils étaient reconnus pour manger énormément de poisson ... Et ça serait quand même con de mourir à cause d'un sushi. Elle avait laissé passer son tour en tout cas, et maintenant que c'était à mon tour de poser les questions je m'étais arrangé pour quelque chose d'un peu plus précis, histoire de ne pas me retrouver avec des informations du type le nombre de poissons rouges qu'elle avait eu dans son enfance ou bien sa fleur préférée. Est-ce qu'elle avait toujours vécu en Alaska par exemple, et est-ce qu'elle avait déjà vu une aurore boréale parce que voilà, c'était le combo obligatoire « Non, j’y vis depuis un peu moins de dix ans. » Je ne savais pas trop quel âge elle avait mais je me disais qu'en gros cela devait faire depuis qu'elle avait terminé le lycée, plus ou moins ... à une ou deux années près, hm. « Oui, en effet. Enfin Anchorage est pas vraiment la ville où tu les vois le mieux, faut plutôt aller vers Fairbanks, du coup ça reste un spectacle qui me surprend toujours. » J'avais souri, je pense que s'il n'avait pas fait aussi sombre elle aurait presque pu voir les étoiles dans mes yeux, je devais avoir l'air d'un gosse à qui on racontait une histoire. « Tu vivais où, avant ? » Bah oui, forcément sa réponse m'avait rendu curieux, et à moins qu'elle ne soit originaire du pôle nord je me disais que ça avait du lui faire un gros changement en tous les cas ... C'était un peu comme si moi j'avais quitté Briançon pour aller m'installer à Marseille, hm. Et histoire de parfaire le truc je lui avais demandé ce qu'elle faisait dans la vie, parce qu'une partie de moi avait du mal à imaginer d'une part qu'on puisse faire autre chose qu'élever des rennes ou des chiens de traineau en Alaska, et d'autre part à imaginer Rowan dans l'une de ces deux professions, huhu. « Je suis graphiste. » Signe affirmatif de la tête, parce que même si c'était un peu vague je savais que je n'y comprendrais foutrement rien si je commençais à demander des détails. Ceci dit j'avais tout de même répondu sur le ton de la plaisanterie « Je sais où venir pour avoir une campagne de soutien efficace le jour où je suis nominé alors. » J'acceptais même de lui prêter Tixy en échange, si c'était pas un deal honnête ça, je ne sais pas ce que c'était. J'avais fini par me lever, étirant mes bras au dessus de ma tête tout en dégourdissant mes jambes ; J'avais l'impression d'être assis là depuis trois plombes, alors que cela devait faire une heure à peine. « Tu parles plusieurs langues, alors ? Lesquelles ? Apprises par plaisir ou pour le travail ? » Reculant et quittant des yeux le bas de l'immeuble que j'observais après m'être rapproché du bord, je m'étais retourné vers Rowan tout en réfléchissant à sa question ... Parce que c'était un peu dur de choisir entre plaisir et travail dans le cas présent, je crois que c'était un peu des deux en fait. « L'anglais oui, c'est pratiquement obligatoire pour bosser. » En journalisme tout du moins, je me doutais bien que dans certains corps de métier ça n'avait pas vraiment d'utilité propre. « J'ai le français et l'italien de par mes parents, donc celles-ci ne comptent pas vraiment. » Quoi que mes parents, c'était un raccourci un peu simple, mais passons. « J'ai étudié l'arabe et le persan quand j'étais à l'université, j'ai commencé le cingalais en option les deux dernières années ... » J'avais marqué une pause, réalisant que plus ma phrase avançait plus je marmonnais plus que je ne parlais. Tant et si bien que c'est presque à voix basse que j'avais terminé « Et puis je me suis mis au pashto avec un collègue, et j'ai commencé le malais y'a huit mois ... » tout en désignant vaguement le bouquin usé et corné que j'avais laissé sur la table. Le souci c'est qu'habituellement quand je disais ça j'avais le droit à deux types de réactions : ceux qui ne me croyaient carrément pas, et ceux qui se disaient que ma vie devait vraiment être moisie pour que je n'ai rien d'autre à foutre. Mais la vérité c'était que ça me plaisait, que j'étudiais une langue comme d'autres collectionneraient les timbres où auraient une passion pour les puzzles. Et comme j'avais toujours eu une excellente mémoire cela me permettait de continuer à la faire travailler.

Spoiler:

Non mais là il peut plus revenir sur ses paroles, c’est fini, il m’a proposé de venir squatter le lit qu’il partage avec son partenaire, et même si je veux partager qu’avec le chat, je vais le faire un jour ou l’autre, juste pour l’embêter, je suis comme ça moi, trop gentille. Ce sera un vrai sacrifice de dormir avec lui et son partenaire dont j’oublie toujours le nom, mais je peux bien souffrir ne serait-ce qu’une nuit, et puis le chat sera là pour m’aider dans cette dure épreuve, enfin si elle décide pas de se la jouer jalouse et de me défigurer pendant la nuit. C’est fourbe ces petites bêtes là, et je l’ai pas encore rencontrée, si ça se trouve on aura pas de feeling et tout mon plan tombera à l’eau, ce dont j’ai pas trop envie. En tout cas, Maxence est déçu du sacrifice que je ne pourrais subir sans l’avoir sur la conscience. Il aura du mal à s’en remettre, non mais je voulais pas lui faire du mal. « Je suis désolée de briser ton petit cœur, comment puis-je me faire pardonner ? » que je dis avant de reporter mon attention sur les auto-tamponneuses. Non mais bon, je suis gentille, si je lui brise le cœur je veux bien m’en occuper, même si c’est pas dans mes habitudes de me soucier pour les autres, voyez. Je suis égoïste, on peut le dire, mais je veux bien faire un effort pour Maxence. Clairement, il est pas le genre de garçons que je pousserais involontairement en bas du toit lors d’une petite partie d’auto-tamponneuses. Il y a bien des candidats qu’on pourrait pousser d’ailleurs, c’est peut-être l’idée de base de la production, même si je pense quand même qu’une solution un peu plus discrète serait mieux, quand même. En tout cas, Maxence a des suggestions pour la production concernant les candidats à éliminer. Oulà, est-ce qu’une âme de psychopathe se cache sous ce visage angélique ? « J’espère que je suis pas dans la liste des suggestions, je serais vraiment triste sinon. » Enfin bon, je me doute bien de la réponse, enfin je me trompe peut-être, mais il me ferait pas ça, à moins, adorable petite blonde à qui on ne peut pas résister. D’ailleurs, en parlant de ça, j’ai pas pu résister à l’envie d’en apprendre plus sur lui, même si c’est plutôt maladroit, et ça il me l’a bien fait comprendre, le vilain. À charge de revanche, tiens. Bon, même si ce n’est pas la réponse que j’espérais, j’en sais quand même un peu plus. Genre qu’il est allergique au poisson. C’était le truc à pas dire, surtout après s’être gentiment moqué de moi. Ne lui a-t-on jamais appris que les femmes peuvent se montrer particulièrement fourbes ? Et puis ne pas manger à mes côtés ne veut pas dire que je n’arriverais pas à glisser du poisson ni vu ni connu dans son assiette. « Oh, tu me connais pas mon cher, je trouve toujours un moyen de parvenir à mes fins. » Dommage pour lui. Bon au moins, il peut être rassuré sur un point, je compte pas l’empoisonner avec un petit plat soigneusement préparé par mes soins, vu que je suis une piètre cuisinière. Je suis mauvaise en tout, en fait. Quoi qu’il en soit, il peut être rassuré quand même, je compte pas me débarrasser de lui tout de suite, il fait partie des gens que j’apprécie, alors je vais pas lui infliger ça, il est pas sur la liste pour l’instant, il peut respirer. Bon maintenant qu’on a bien plaisanté, il passe aux questions, et j’ai rien de con à lui sortir, malheureusement. Du coup je joue franc-jeu, après tout j’ai rien à cacher, du moins pas que je sache. J’ai pas toujours vécu en Alaska, et j’ai mes raisons pour avoir déménagé, à la limite il y a que ça que je vais cacher, par parce que j’en ai honte, mais parce que ça ne le regarde pas. Bon, de toute manière il est pas intéressé par le fait que j’aie déménagé rapidement après la fin de mes études, mais plus par les aurores boréales que j’ai pu voir. Ça me va. Du coup je lui fais un rapide topo. Mais voilà qu’il me questionne sur l’endroit où je vivais avant. « Je vivais en Pennsylvanie. » Peut-être qu’il s’attendait à un peu plus de précision, mais c’était inutile. Ça remonte à loin quand même, ça fait dix ans que je ne vis plus là-bas, et ma vie en Pennsylvanie est quelque chose qui doit appartenir au passé désormais. Autant dire que même sans le vouloir, mes souvenirs s’estompent peu-à-peu. Comme les visages des membres de ma famille que j’ai laissée derrière moi. Voilà qu’on parle de mon métier. Là encore, rien de désiré dans mes choix, plus un choix par défaut, ce qui m’arrangeait le mieux à vrai dire. Dans tous les cas, mon métier peut lui servir en cas de nomination. « T’auras une campagne digne des plus grands hommes politiques, promis. » Enfin, j’en suis pas si sûre, on peut pas dire que Cupidon aille mit les bouchées doubles au niveau de l’informatique ici, on a juste notre Ipad et un appareil photo, autant dire que mes moyens pour lui assurer une campagne de soutien digne de ce nom soit considérablement réduit, ça craint. Je pourrais juste compter sur quelques stylos et mes dix doigts, donc je suis pas sûre que je sois sa meilleure alliée. Mais je vais éviter de lui le dire, je voudrais pas lui faire de peine quand même. « Mais je ne travaille jamais gratuitement. » Et bien oui, qu’est-ce qu’il croit. Faudra me payer, d’une façon ou d’une autre. Bon, maintenant c’est à mon tour de poser les questions, et j’ai retenu la leçon, des questions plus précises. Dans la présentation peu sérieuse qu’il m’a faite quelques minutes auparavant, j’ai retenu le fait qu’il aime apprendre à parler des langues étrangères. Du coup j’ai rebondi là-dessus, là il pourrait rien dire sur mes questions pièges. Je suis curieuse je dois dire, parce que les langues c’est pas trop mon truc, j’ai un esprit qui se déconcentre bien trop rapidement pour me permettre d’apprendre plus que quelques notions utiles à demander son chemin ou commander à manger. L’anglais et le français sont une évidence à vrai dire, surtout la deuxième option en vue de son accent. Mais je suis véritablement curieuse des autres langues, et à vrai dire ma curiosité n’est pas pleinement satisfaite une fois sa réponse donnée. Déjà, j’ai eu de la peine à l’entendre jusqu’au bout. Il s’est un peu éloigné de moi et malheureusement j’ai pas une écoute digne d’un super-héros. Ceci dit, je pense que même s’il avait été à côté de moi je n’aurais pas vraiment compris, parce que certaines des langues qu’il m’a énoncées me sont inconnues – sauf l’Italien, l’arabe et le persan, quand même. Mais pour les deux dernières, nada. Faut pas que je le lui dise, parce que sinon j’aurais l’air bien maligne face à un gars qui apprend des langues à la pelle et qui a été à l’université, alors que j’ai pas été plus loin que le diplôme du lycée pour ma part. Il désigne vaguement le livre qu’il lisait avant que je l’interrompe. Je me permets de le prendre et de le feuilleter quelques instants. À vrai dire, ça doit être fascinant d’apprendre des langues étrangères, surtout celles dont on a pas vraiment l’habitude. Il faut de la motivation bien-sûr, mais le désir de réussite et le sentiment une fois cela fait doit probablement booster comme rien d’autre. « Ça a l’air vraiment intéressant comme langue. » Que je dis, toujours avec le livre en main. Ça doit certainement être une belle langue, je trouve déjà que les langues orientales sonnent comme une sorte de chant à l’oreille, mais peut-être suis-je la seule. « Tu travailles dans quoi, d’ailleurs ? » Il m’avait posé la question, c’est donc logique que je lui la pose à mon tour.

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