Un rayon de soleil traverse la vitre. Je me dis que je vais aller en profiter et prendre mon café à l’extérieur avec une clope en accompagnement. Je m’installe donc sur une table dans le jardin puis je le bois tranquillement en pensant à toutes sortes de choses. Une fois fini, je me grille une clope et me ballade dans une allée verte en laissant la tasse traîner. Je la rentrerai plus tard. De là, je m’approche de la balancelle où il y a déjà quelqu’un. Le cancre. Ou le puceau, j’sais pas trop. Celui qui a un prénom de poisson quoi. Je m’apprête à faire demi-tour mais il m’interpelle. J’écoute ce qu’il a à dire. Lorsqu’il me propose qu’on parle, je me dis que ma magic ball m’aurait bien été utile si je l’avais pas déjà cassée. Elle aurait surement répondu un truc du genre « n’y compte pas » ou « faut pas rêver ». « Brr. » Je grogne alors quand il me rappelle le truc de l’action ou vérité. C’est mon rôle de faire l’ours après tout. Je vais pas non plus verser une larme. S’il était plus agréable et immature, j’aurai pas dit son nom, voilà tout. « Susceptible. » Je déclare simplement. Un long silence s’installe tandis que je m’assois sur l’autre place de la balancelle. « T’as quoi à me raconter d’intéressant ? C’est quoi ta vision de la vie ? » Il veut parler. Ainsi soit-il. Qu’il me dise ce qu’il peut m’apporter et qu’il me prouve que je me plante et qu’il n’est pas qu’un petit merdeux qui aime faire chier son monde.

Le gamin a quelque chose contre moi. C’est pas vraiment passé le fait que j’le cite comme candidat à qui je ne souhaite pas vraiment parler. J’avoue que c’était pas forcément sympa. Mais c’était pas non plus une attaque ou une déclaration de guerre. Je m’attendais pas à ce qu’il revienne dessus surtout qu’il doit bien en avoir des ennemis ou du moins des gens pas fan de lui. Moi je fais partis de ce deuxième groupe. J’le connais pas tellement mais le peu qu’il m’a montré m’a laissé une mauvaise impression. C’est un petit merdeux à mes yeux et j’ai pas forcément envie de perdre du temps avec lui alors qu’il y a pleins de gens intéressants autour de moi. J’pense qu’il devrait en faire autant avec les gens avec qui il s’entend bien. Du moins, les gens qui le supporte. Ça n’empêche que je lève tout de même les yeux au ciel quand il me reparle de la falaise. Comme si j’allais me foutre en l’air pour si peu. J’ai l’impression qu’il veut me prouver le contraire et que je me trompe alors je tente de ranger mes préjugés mais en vain. « Tu la gaspille déjà ta salive. » Je peux pas m’empêcher de souligner ce fait. C’est plus fort que moi. Néanmoins, j’écoute quand même ce qu’il a à me dire et là, j’avoue que je suis assez touché. Ses mots me heurtent. Son ironie me fait culpabiliser. Il a raison le gamin. C’est surement moi qui ait tord sur toute la ligne. Je m’y prends totalement de travers. « Désolé. C’est moi qui suis con. » Je brise ce silence pesant puis j’ose planter mes iris dans son regard fermé. Il sera surement surpris d’un tel changement d’attitude mais j’sais aussi me remettre en question et là, c’est ce que je fais. Pleins de choses me traversent l’esprit. « J’vaux pas mieux que toi même si c’est l’impression que je te donne. J’suis pas non plus un ours qui ne connaît rien à la vie. » Oui, moi aussi, j’arrive très bien à savoir ce qu’il pense de moi. Il me considère comme tel et il l’a jamais caché d’ailleurs. J’apprécie pas cette vision car j’sais qu’il se trompe même s’il est persuadé d’avoir raison à mon sujet. Et je crois que la réciproque est vraie. « Et t’es pas un pauvre type. Pas plus que moi. » Même s’il se comporte comme un con et qu’il est irresponsable, qui suis-je pour le juger ? Je ne suis pas mieux. Je ne vaux pas mieux. « J’crois juste pas qu’on puisse s’apporter quelque chose de bon. » Si j’ai répondu ça, c’est uniquement car j’ai tendance dorénavant à aller vers des gens capable de me pousser vers le haut et d’éviter le reste. Mais j’ai surement tords. Je ne suis qu’un imbécile de toute façon.

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C’est vrai, parfois, j’suis un peu contradictoire. Là, clairement, c’est le cas. Je pose une question à Colin mais j’écoute pas la réponse. Enfin pas totalement. C’est pas quelque chose de respectueux. Le candidat ne me donne pas vraiment envie d’être respectueux car jusqu’à présent il l’a pas vraiment été avec les autres à mon sens. C’est ce qui coince. Je le déteste pas, j’ai aucune haine envers lui mais il me donne pas envie de le connaître. Pourtant, là, je lui demande de m’en dire plus à son sujet. Davantage pour la forme qu’autre chose car comme il le dit, j’en ai pas grand-chose à faire de sa réponse. Pourtant, je finis par me remettre en questions quelques secondes plus tard. Je me dis que j’ai surement jugé injustement le garçon et été un peu dur. Ses mots m’ont touché et je me livre alors. J’hésite à continuer lorsque j’entends l’insulte du garnement. Je sers les dents en lâchant un quasi-inaudible rugissement mais je le fais quand même. Puis j’écoute sa réponse, ce qu’il a à me dire. Il a pas tords sur tous les points. Néanmoins, j’suis pas forcément d’accord avec tout. « Je me nomme pas comme ça auprès de tout le monde. » Que ce soit clair, si je l’ai fait, c’était ironique. J’ai beau ne pas avoir beaucoup d’estime pour moi, je me considère un peu plus que comme une bête sauvage. « Je suis là pour jouer alors je joue, peu importe si le défi est débile. » Deuxième rectification. Je suis le premier à râler de ce défi mais je l’accepte quand même car c’est le jeu. Je me suis engagé et j’ai envie de tenir mes engagements. Peu importe si je suis ridicule. Franchement, j’suis plus à ça près et le ridicule ne tue pas de toute façon. « J’vais pas chialer. » Son don de tout dramatiser et son exagération m’exaspère. Je me livre un peu, tente une approche sympa et fais mon méa culpa et lui n’en a que faire. Ça me fou franchement les boules. Je suis en train de me demander si je perds pas mon temps. Clairement, à la base, c’est pour ça que je l’ai évité, je pense pas qu’il soit en mesure de m’apporter quelque chose de positif et je pense pas non plus avoir la patience ou une maturité suffisante pour lui apporter quelque chose de bon. C’est ce que je lui dis. Il a l’air septique. « Je pense oui. » Je réponds avec toute sincérité en jouant avec la ficelle de la balancelle tandis que mon regard affronte une nouvelle fois le sien. « Et toi tu crois que tout le monde ici est mauvais ? Que personne ici n’est en mesure de t’apporter une leçon de vie ? » J’attends une réponse sérieuse et pas un truc à la con spontanée. J’sais pas si il est immature ou tout simplement qu’il joue un jeu mais j’ose espérer qu’il sait être sérieux et prendre les choses à cœur quand il le faut. « Et en plus ça paie. » Que je réponds, indifférent face à sa remarque pour le psy. Je crois que j’ai même pas envie de répondre à sa question. Bien sûr que non, c’est pas ma thérapie. J’ai d’autres attentes du jeu même si j’estime que j’ai beaucoup à apprendre ici sur l’aspect humain. « J’ai des choses à dire. » Je finis finalement par avouer après un léger moment de silence.

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