featuring elliot

Donc. Trois pièces de cinq francs chaque semaine. En sachant qu'une machine coûte cinq francs... Et bien, c'est simple - ils allaient devoir se cotiser ou faire attention à ne pas se montrer trop dépensier, et ne pas utiliser cinq francs pour, simplement, laver son tee-shirt préféré, par exemple. Bon. Pour Ismay, ça ne devrait pas être si compliqué. À vrai dire, elle n'avait pas encore de machine à laver dans l'appartement qu'elle avait à Salisbury si bien que la laverie, elle connaissait. Attendre une heure dans la boutique sale, tout ça. Du coup, elle serait sans doute moins agacée par le fait de devoir patienter tranquillement que ses vêtements soient propres et secs. Du moins, c'était ce qu'elle se disait avant que l'évidence ne survienne dans son esprit. Mais oui. Ils étaient dans le nid. Seuls au monde. Pourquoi s'embêter à attendre là, alors qu'il suffisait d'aller faire son petit tour et même, de vivre sa vie normalement, et de revenir une fois la machine terminée ? Alors forcément, c'est ce qu'elle fit. Laisser là ses affaires. Revenir plus tard. Une fois ses cinq francs dépensés bien comme il fallait, elle s'en retourna vaquer à ses occupations, jusqu'à ce que, plus tard dans la journée, elle se souvint qu'il était peut-être bon qu'elle n'encombre pas plus longtemps l'une des machines. Impossible, cependant, de retrouver laquelle elle avait utiliser. Elles n'étaient pourtant guère nombreuses - elle devait avoir laissé une partie de sa tête dans son lit. S'accroupissant finalement devant l'un des engins, elle en ouvrit le hublot, et attrapa le premier bout de tissu qui lui tomba sous la main pour rapidement constater que... ce n'était pas à elle. Ah. Bon. Néanmoins, son oeil d'éternelle fille aimant les fringues lui indiqua que ce haut... sans se préoccuper du fait que le vêtement ne lui appartenait nullement, elle se déplia et le laissa pendre devant elle, l'analysant avec un sourire appréciateur. Un très beau haut. Là-dessus, des bruits de pas la tirèrent de sa rêverie et, se retournant, elle aperçut une autre brune, avec rien dans les mains. Le lien se fit rapidement. Un regard au vêtement, un regard à la fille. « C'est à toi, c'est ça ? » lâcha-t-elle finalement avec un sourire. Baissant les bras, elle reposa le haut sur la machine. « Désolée, j'ai pas pu m'en empêcher. Il est très beau. » Comme une confession. Oui, elle aimait le fringues, ah. Et elle aimait aussi le style que semblait avoir la nouvelle venue. Bon. Détournant le regard, elle recula vers la deuxième machine.

Je porte trop de fringues. Je ne devrais pas en porter autant.
On est Mercredi. J'ai envie de faire une petite lessive. Je dois faire attention à ne pas dépenser les cinq francs d'un coup. Sinon, je suis dans la merde. Au pire, je les laverai à la main. C'est avec un sourire aux lèvres et les écouteurs aux oreilles que je me dirige vers la laverie automatique. A cette heure-ci, les candidats sont en train de se prélasser ou de faire une sieste. Je fourre toutes mes affaires sales dans un sac, puis me mets en route en fumant un cigarillo sur le chemin vers le quartier d'Aragon. Je fredonne gaiement en entrant dans la lavomatique. Ambiance rétro, digne des 60's. Aujourd'hui, j'ai le smile. J'ai envie de me poser, me fumer un joint sous un arbre en jouant du ukulélé. Rien de plus agréable. Je sors de mon sac tout mon linge que je fourgue dans une des machines à ma disposition. Je la mets en marche. Je continue à chanter du Cults à tue-tête. Les caméras sont en train de filmer. Je m'en fous. J'ai la bougeotte. Je m'occupe comme je peux en attendant que ma lessive se finisse. Je sors, je m'en grille une. C'est la fin de la chanson. Transition. Nouvelle chanson, nouveau rythme. Je m'éloigne de la vitrine de la laverie. Je vais plus loin. J'ai le ventre qui gargouille. J'arrive près de la cantine. Je salue mes camarades et prends le bocal à cookies. Mon bocal à cookies. Des cookies faits main, en plus. Je reviens à la laverie avec le bocal dans les mains. J'enlève mon casque et j'éteins mon Ipod. Je vois une silhouette filiforme se tenir debout près de la machine. Elle est en train de regarder mon haut. Elle me voit s'avancer vers elle. Elle fait tout de suite le lien. - C'est à toi, c'est ça ?, demande-t-elle en me souriant. J'acquiesce, en grignotant mon cookie. Elle le dépose délicatement sur la surface lisse de la machine. - Désolée, j'ai pas pu m'en empêcher. Il est très beau. Je hausse les épaules, j'avale le reste de mon cookie puis lui réponds, un sourire au coin. - Merci. Je peux te le prêter, si tu veux. Je ne tiens pas spécialement à ce haut. J'en ai d'autres qui ont plus de valeur sentimentale à mes yeux. Elle a raison. C'est un très beau haut. Ce polo a appartenu à une de mes amies. - C'est Ismay, je crois. Moi, c'est Elliot. Je sors un cookie de mon bocal. - Tu veux un cookie ? Je les ai fait moi-même. C'est prouvé les Américains font les meilleurs cookies du monde. J'ai oublié le lait. Dommage.

Bon. Est-ce qu'on pouvait être jeté de l'émission pour vol de vêtements ? Hm ? Non, parce que la situation de Ismay était un peu délicate, même si, clairement, ce n'était absolument pas voler le haut qui était son but premier, lorsqu'elle l'avait sorti de la machine. Mais combien d'innocents avaient déjà été condamnés pour des crimes qu'ils n'avaient pas commis ? Un truc grand nombre, sans aucun doute. Un nombre qui révoltait la brune. Mais il ne s'agissait nullement du propos. Non, le propos, c'était la deuxième brune, celle qui venait d'entrer, dont Ismay était quasiment certaine qu'elle s'appelait Elliot. Ou Elliott. Ou Eliott. Enfin, elle n'aurait sans doute jamais à écrire ce prénom, donc au fond, la manière dont il s'écrivait importait peu. Redéposant le vêtement là où elle l'avait trouvé, elle nota l'air indifférent et le cookie de la jeune femme. Le son de sa voix la ramena sur terre et elle vrilla son regard vers elle, la regardant sans la moindre retenue. Retenue n'était pas vraiment un mot régulier dans le vocabulaire d'Ismay. Acquiesçant un sourire, elle hocha la tête en signe de remerciement, même si elle savait pertinemment que jamais, malgré l'assurance qu'elle avait de ne pas essuyer de refus, elle ne se rendrait après d'elle pour lui demander un prêt de haut. Oh non. Plutôt que de se torturer l'esprit sur ce détail, Ismay entendit donc qu'elle ne s'était pas trompée sur le prénom de sa camarade. Elliot - quelle qu'en soit l'orthographe. Tiens. Elle avait également retenu son propre nom, ce qui l'étonna plus. « C'est ça. Ça me rassure de ne pas être la seule folle à avoir retenu la majorité des prénoms en à peine quelques heures. » C'était vrai. Ça semblait tellement improbable aux yeux de certains qu'elle avait l'air, ça en plus du reste, de débarquer tout droit d'une autre planète. Ce n'était que quelques prénoms, bon sang. Et là, inattendu, la fille lui secoua un bocal rempli de cookies - ? - sous le nez, lui proposant de se servir. Elle était décidément trop généreuse. De bon coeur, Ismay plongea la main dans le bocal et en extirpa un bonbon. « Merci » sourit-elle en amenant le cookie à ses lèvres. Grignotant tranquillement, elle observa à nouveau la demoiselle. Elle avait beau se creuser la tête, elle ne parvenait pas à l'imaginer, vêtue d'un tablier et de gants de cuisine. « C'est marrant, t'as pas la tête à aimer faire les cookies » hasarda-t-elle, comme ça, sans réfléchir, comme fascinée.



(c'est totalement craignos, désolée )

Je me balade avec un bocal à cookies et c'est tout à fait normal. Il faut dire que je suis gourmande. Je ne me prive jamais. Surtout quand ça concerne les sucreries. J'aime tellement ça que j'en fais moi-même. C'est mon petit dada. Un passe-temps comme un autre, en somme. Je grignote mon cookie aux pépites de chocolat en silence, tout en observant la jeune fille en face de moi. Elle a une jolie forme des yeux. Je savais que j'aurai du prendre mon appareil à polaroid. Une prochaine fois peut-être. Je n'ai plus l'habitude de me trimballer avec moi. Son prénom m'est revenu tout de suite. Un prénom qui a une sonorité qui me plaît énormément. Ismay, c'est joli. C'est atypique. Je retiendrai plus facilement comme ça. - C'est ça. Ça me rassure de ne pas être la seule folle à avoir retenu la majorité des prénoms en à peine quelques heures. J'ai retenu certains prénoms, mais les autres prénoms je les ai oublié entre temps. Le sien m'a particulièrement marqué. Le nom de son partenaire également. Otello, je crois. Je suis plus douée pour retenir les noms d'artistes. Par contre, je suis physionomiste. Je me rappelle de tous les visages que j'ai croisés dans ma vie. Je n'oublie jamais un visage. C'est fou, non ? J'ai presque fini de manger mon cookie. Par convenance, je lui tends le bocal pour qu'elle se serve. - - Merci. Elle en prends un volontiers qu'elle grignote en silence. - C'est marrant, t'as pas la tête à aimer faire les cookies. Je ris pendant que je me ressers. - Je sais cuisiner toute sorte de pâtisseries. Je ne suis pas douée pour les plats salés. J'ai les bases et c'est tout. Par contre, je suis la reine des gâteaux. J'en fais souvent pour remonter le moral des autres. Je suis capable d'en faire à n'importe quelle heure de la journée. Je suis une vraie pile électrique. Ça me détends, tu vois. Les cookies, c'est ma spécialité. C'est vrai que je ne renvoie pas cette image de la mère poule qui s'active aux fourneaux. Pour moi, c'est un peu ça l'idée. J'aime prendre soin des autres. - Et toi, t'as des spécialités en cuisine ou ailleurs ?, lui demandai-je.

(qu'est-ce que tu racontes ? c'est très bien )

Il était drôlement bon, son cookie. Les traits déformés par un air comblé, elle le dégusta en un rien de temps, un peu étonnée par ses capacités évidentes pour la cuisine. Ou en tout cas, pour la pâtisserie. Elle ne pu s'empêcher de se promettre de goûter à une autre de ses préparations le plus tôt possible, dès qu'elle en aurait l'occasion. Terminant le gâteau, elle écouta avec attention Elliot qui lui avouait son penchant pour les gâteaux. Dieu qu'elle l'enviait. Elle se débrouillait derrière les fourneaux bien sûr, et parvenait à vivre de ses plats modestement préparés, mais jamais elle n'avait eu ce truc, ce don qui lui aurait donné envie de cuisiner pour le simple plaisir de cuisiner, et pas seulement des choses sucrées. Ainsi, lorsque la brune la questionna sur ses propres talents de chef, elle se contenta de plaisanter un petit « les plats salés. » En gros, la base de la base. Quelle tristesse. Elle regrettait de ne pas avoir prit la peine d'en apprendre davantage, d'autant plus que son cousin était un véritable artiste de la nourriture, donnant à ses recettes des goûts, couleurs et formes qui bluffaient chaque fois Ismay. « Ma mère est comme toi, une vraie fée des pâtisseries, ça faisait un peu d'elle mon idole, quand j'étais petite. Elle a essayé de m'apprendre, mais je ne dois pas avoir la fibre cuisinière, je me contente de préparer de quoi me maintenir en vie » et elle afficha un sourire. Maman, si tu me regarde. Ce dont elle doutait un peu, mais soit. Malgré elle, elle songea que ça faisait longtemps qu'elle n'avait plus eu de nouvelles de sa mère, ni même de son père. Depuis qu'elle avait emménagé à Salisbury, en fait. Repensant à la question initiale de la jeune femme, Ismay consentit finalement à réfléchir à une réponse décente. « En vrai, je ne suis pas super douée en cuisine. Par contre, j'ai le plus haut diplôme possible en ce qui concerne être casse-pieds et savoir s'y prendre avec les psychotiques. » Un faux air de fierté illumina ses traits. Sans aucun doute, c'était les deux choses pour lesquelles elle était la plus douée. Par vocation ou non, d'ailleurs.

Je sens que je ne vais que m'empiffrer dans cette émission. C'est hallucinant le nombre de sucreries que la Production nous fournit. Quand je suis allé dans le cinéma du village, il n'y avait que ça dans les vitrines. Comment faire craquer tout accro aux sucreries. C'est pire qu'à Honeydukes ! Des bonbons à la volonté. Je reste plutôt une adoratrice de pâtisserie. Je pourrais en faire pour un régiment. Muffins, pancakes, cookies, s'mores et toutes les autres pâtisseries typiquement américaines. Après, mes compétences culinaires s'arrêtent là. Le seul plat salé que je ne rate jamais, c'est le hamburger maison. Un classique dans la "gastronomie" américaine. Apparemment, mon interlocutrice ne sait faire que des plats salés. Fort dommage. Moi, je vois la pâtisserie plus comme un jeu qu'une contrainte. J''ai participé à de nombreuses compétitions de tartes quand je venais rendre visite à ma grand-mère, en Alabama. C'est elle qui m'a tout appris. Elle me manque. Je ne l'ai pas revue depuis trois ans. Depuis la mort de Papa. La brune poursuit : - Ma mère est comme toi, une vraie fée des pâtisseries, ça faisait un peu d'elle mon idole, quand j'étais petite. Elle a essayé de m'apprendre, mais je ne dois pas avoir la fibre cuisinière, je me contente de préparer de quoi me maintenir en vie. Je pourrai lui apprendre si elle souhaite. En plus, cuisiner à plusieurs c'est plus amusant, plus pédagogique surtout. Après, tout est une question de patience et d'entraînement. Il faut un peu de la volonté également. Je lui ai demandé si elle avait d'autres spécialités - à part en cuisine. - En vrai, je ne suis pas super douée en cuisine. Par contre, j'ai le plus haut diplôme possible en ce qui concerne être casse-pieds et savoir s'y prendre avec les psychotiques., me répond-t-elle. Je ris en manquant de m'étouffer avec un bout de cookies. Je tousse un peu. Avec du lait, ça serait mieux passer. Voilà ce que c'est d'être tête en l'air. Je réplique : - Et moi, j'ai un doctorat en ce qui concerne les blagues qui ne font rire que moi et les conneries que je peux débiter à la minute. Je pouffe de rire en posant le bocal à cookies sur le haut de la machine. Je me baisse, puis ouvre le hublot et en retire les vêtements à présent propres pour les mettre. - Tu es anglaise non ? Je reconnais l'accent britannique à des kilomètres, moi-même ayant fréquenté beaucoup de british dans mon job. Je plie soigneusement mes hauts un par un. - Sinon, tu fais quel métier sans indiscrétion ? Je range mes vêtements pliés dans mon sac que je pose parterre. J'ai envie d'une clope maintenant.

Le pire, c'est qu'elle était sérieuse. Non, vraiment. Certes, il y avait sans doute meilleur travailleur qu'elle dans le domaine psychiatrique, et elle n'était peut-être pas la pire chieuse du monde, mais elle était quand même pas mal classée. Vrai de vrai. Et apparemment, Elliot était un peu de la même veine. Une dingue. Une vraie dingue. Pouffant, elle étouffa son rire en un simple sourire de sa main sur ses lèvres. Imitant alors la demoiselle, elle se décala pour faire face à la dernière machine à laver, dont elle ouvrit le hublot, pour récupérer ses affaires. Redressant la tête en entendant à nouveau sa voix, elle hocha la tête. « Bien vu ! je suis de Londres, mais j'ai déménagé à Salisbury il y a peu. » Et à vrai dire, Londres lui manquait un peu, parfois. Si Salisbury était magnifique et qu'elle s'y pensait, il n'en était pas moins qu'elle avait grandit dans la capitale, capitale qu'elle connaissait par coeur et qu'elle ne se lassait jamais de parcourir en long, en large et en travers. « Je suis infirmière en secteur psychiatrique » répondit-elle à la seconde question qu'Elliot. Lui jetant un bref coup d'oeil, elle s'assura que sa compagne n'avait pas fait un bond de deux mètres en arrière en faisant des signes de croix. « Et toi ? Attends ! laisse-moi deviner ! » Se relevant brusquement, elle brandit un index vers elle, leva les yeux vers un point invisible au plafond, et plissa les lèvres. Réfléchissant une demi-seconde, elle vrilla à nouveau le regard sur Elliot, réfléchit à nouveau une seconde, et un sourire illumina son visage. « Tu es musicienne ! » s'exclama-t-elle, avec l'air de celle qui ne doute pas une seule seconde de la véracité de ses propos, avant d'ajouter, pensive « mais comme tu dois te nourrir malgré tout, tu prêtes également ta voix aux films d'animations que réalisent tes amis artistes fans des studios Ghibli. » Oui. Oui, ça lui semblait tout à fait probable et réaliste, du peu qu'elle connaissait d'Elliot, à savoir son goût pour la pâtisserie et son style - style qu'Ismay appréciait, jusqu'à présent, énormément. « J'ai juste ? En tout cas, une chose est sûre, tu n'es pas britannique » et ça, elle en était certaine - les anglophones pas de Grande-Bretagne, elle les reconnaissait à des kilomètres à la ronde. À la rigueur, elle avait vécut la majorité de sa vie en Amérique et avait perdu l'accent mais ça lui semblait peu probable.

Depuis tout à l'heure, je n'arrête pas de fixer ses yeux. Je ne sais pas, ils ont une forme qui me plaît. Il n'y a qu'à moi que ce genre de truc fasse effet. Je range mes affaires tout en continuant à lui poser des questions. - Bien vu ! je suis de Londres, mais j'ai déménagé à Salisbury il y a peu. Je connais bien Londres. J'y vais souvent pour assister à des concerts, pour interviewer des groupes. D'ailleurs, j'écris pour le journal hebdomadaire, NME dont les critiques ne sont que des pointures de la musique. Je commence par l'interroger sur son métier. - Je suis infirmière en secteur psychiatrique., répondit-t-elle. Elle me regarde en attendant une quelconque réaction de ma part. Je hausse un sourcil. Comme dans Vol au-dessus d'un nid de coucou, avec Jack Nicholson ? Je ne l'imagine pas du tout en infirmière. Elle n'est pas n'importe quelle infirmière. Elle s'occupe des fous. J'ai les yeux qui brillent comme une enfant. J'ai toujours trouvé les métiers des autres plus fascinants que le mien. Pour le coup, je suis admirative. Ce sont des métiers qu'on ne mentionne presque pas à cause des idées surfaites qu'on n'en fait. C'est un métier comme un autre. Il n'y a pas de quoi être choqué. En même temps, plus rien ne me choque dans ce mode. J'en ai vu des atrocités, donc je peux vous dire que c'est rien du tout. Soudain, elle se relève spontanément. Je la vois me pointer du doigts. Je ris. Ses mimiques sont adorables. - Et toi ? Attends ! laisse-moi deviner ! Elle est en train d'essayer de deviner mon métier. Elle est peut-être télépathe en plus ? Allez, dis-le ! - Tu es musicienne ! Bien essayé ! J'avoue que j'avais pensé à faire carrière dans la musique. Mais je me suis tout simplement dégonflée. Mon travail actuel me plaît tel qu'il est. Je suis musicienne à mes heures perdues. Je n'ai pas eu le cran de le devenir. De peur de l'échec. Et ce n'est pas fini, elle rajoute : - Mais comme tu dois te nourrir malgré tout, tu prêtes également ta voix aux films d'animations que réalisent tes amis artistes fans des studios Ghibli. J'ai l'image d'un énorme Totoro dans la tête. Je ris de bon coeur. J'explose carrément de rire. Je suis pliée en deux. Je n'avais pas penser à ça. Je crois qu'elle vient de me trouver une reconversion possible. Je me tiens les côtés pendant que je lui réponds : - J'aurai pu être musicienne, mais je me contente d'être simplement critique de musique. Je hausse les épaules. Je m'en fous du métier en tant quel. Je n'ai jamais eu d'autres talents à part dans la musique. Je ne suis qu'une autodidacte, qu'une passionnée de musique. - Je n'avais jamais pensé à faire doubleuse de voix. Si j'avais su, je me serai reconvertie plus tôt. Même à mon âge, j'aime encore les dessins animés. - A cause de toi, je n'arrive pas à enlever Totoro de la tête., dis-je en boudant un peu. Je lui souris. C'est pour plaisanter que je lui ai dis ça. - Alors, ton partenaire ne te mets pas trop la misère ? Je reprends un autre cookie. Je lui tends le bocal pour qu'elle se resserve si elle le souhaite.

Critique de musique, elle était critique de musique. Bon, elle n'était pas si loin, finalement. Quel talent, mesdames et messieurs ! Accueillant cette information d'un large sourire, elle écouta avec attention toutes les paroles d'Elliot. Oh mais il était certain, clair et net même, qu'elle avait un grand avenir en tant que doubleuse de dessins animés. Forcément, il ne fallait pas une voix désagréable pour ça. Heureuse de l'avoir aidée à trouver une putain de vocation de secours, elle afficha une énième sourire satisfait, qui se décomposa bien vite lorsqu'elle l'accusa de lui avoir coller Totoro dans le cerveau. Attendez... Totoro ? Aussitôt, son sourire revint, plus rayonnant encore qu'auparavant. « Totoro, et Chihiro, et Mononoké, et Nausicaä, et Ponyo, et Kiki, et Hauru, et Pazu, et Arrietty » énuméra-t-elle, son sourire s'agrandissant au fur et à mesure que les compagnons qui l'avaient accompagnée tout au long de son adolescence apparaissaient dans son esprit. « Je suis dingue de Miyazaki » jugea-t-elle bon de préciser de façon tout à fait inutile. On ne s'en serait aucunement douté, vraiment. Mais Ismay était tellement ravie de croiser quelqu'un qui, non seulement connaissait l'oeuvre du vieil homme, mais aussi semblait apprécier, et comprendre ses goûts. Rares étaient les gens - du moins dans son entourage, qu'elle semblait bien mal choisir - qui avaient une autre vision des films d'animations de ce génie que celle de simples dessins animés pour gosses. Ne voyaient-ils pas la magie, l'ambition, le message qui se dégageaient de ces oeuvres ? À cet instant, Elliot, lui proposant de nouveau de piocher un cookie dans son précieux bocal, l'interrogea sur son partenaire. Acceptant de bon coeur le biscuit, elle s'empressa d'en prendre un. Son partenaire ? « Otello ? Oh non, au contraire ! il est prévenant, cultivé, très agréable, mais il ne dort pas assez à mon goût, il est toujours en vadrouille, je ne sais pas si c'est dans ses habitudes, mais si je le croisais en train de dormir appuyé contre un mur en pleine journée, ça ne m'étonnerait même pas. » L'image d'un Otello dormant debout contre un mur, la bouche légèrement entrouverte, l'air d'un jeune enfant serein et paisible, lui apparut avec une telle vivacité qu'elle en éclata de rire. Le pauvre, il avait l'air de si peu dormir la nuit... À se demander comment il faisait pour tenir la journée. Une seconde durant, elle songea à le forcer à se bourrer de tisane avant d'aller au lit. Ça l'aiderait sans doute. « Enfin, on verra bien comment ça se passera dans les prochains jours, ou, touchons du bois, les prochaines semaines, mais je ne m'en fais pas trop... Non, je ne m'en fais pas du tout, même... Et toi ? Ils t'ont mise avec une fille, c'est ça ? » Reprenant le fil de ses pensées, elle s'était souvenue qu'Elliot constituait l'un des quelques binômes homogènes du nid. Ignorant tout de l'orientation sexuelle de la jeune femme, il y avait de quoi se demander si elle n'était pas déçue de cette attribution. Cela dit, on ne devait pas forcément tomber en amour avec son partenaire, bien sûr.

Quand elle a parlé de studio Ghibli, mon cerveau a fait un quart de tour. J'ai revis les films d'animation qui ont bercés mon enfance. Pour certains, c'est Disney. Pour moi, ça toujours été Miyazaki. Le restera sans doute, à jamais. Papa m'a fait découvrir ces dessins animés à travers sa musique. Sur le piano, il en jouait souvent. Puis la magie opérait instantanément. A cette pensée, je souris. Ce sont des souvenirs que j'ai cru avoir oublié. Il m'a même offert un géant Totoro, provenant tout droit du Japon pour mon septième anniversaire. Apparemment, Ismay est aussi accro que moi puisqu'un sourire lumineux vient s'épanouir sur son visage de poupée. - Totoro, et Chihiro, et Mononoké, et Nausicaä, et Ponyo, et Kiki, et Hauru, et Pazu, et Arrietty. Des personnages auxquels je me suis attachée. J'aimais Mononoké en particulier. C'était mon personne préféré. L'intrépide et indomptable, Mononoké. Enfant, je voulais lui ressembler. Je garde un souvenir particulier pour Le tombeau des lucioles. A chaque fois que je le regarde, je pleure. Le pire que ça marche à chaque fois. - Je suis dingue de Miyazaki. Je lui rends son sourire avec la même intensité. Elle n'est pas la seule dans ce cas. Mon enfance n'a pas tellement été marquée par les dessins animés. Nous n'avions pas de télévision. Maman avait une collection énorme de films donc, elle nous mettait du Miyazaki car elle considérait que les émissions pour enfant à la télévision étaient néfastes pour ses filles. Mes soeurs et moi, nous avons grandi avec les films de Miyazaki. Les Disney, on les a connus plus tard. Elle prend de nouveau un cookie pendant que je savoure le mien. Je lui demande si ça se passe bien avec son partenaire. Elle répond : - Otello ? Oh non, au contraire ! il est prévenant, cultivé, très agréable, mais il ne dort pas assez à mon goût, il est toujours en vadrouille, je ne sais pas si c'est dans ses habitudes, mais si je le croisais en train de dormir appuyé contre un mur en pleine journée, ça ne m'étonnerait même pas. Otello. Je l'ai croisé sans vraiment lui parler. Il impressionne de par sa carrure, de par son charisme. Je n'ose aller vers lui de peur de passer pour une complète idiote en face de lui. Elle me le décrit comme avenant et distingué. Il ne dort pas beaucoup. Moi aussi, je dors très peu. Mais ça ne m'empêche pas de péter la forme. Il a peut-être une horloge interne qui fonctionne différemment. Dans mon cas, c'est ça. - Enfin, on verra bien comment ça se passera dans les prochains jours, ou, touchons du bois, les prochaines semaines, mais je ne m'en fais pas trop... Non, je ne m'en fais pas du tout, même... Et toi ? Ils t'ont mise avec une fille, c'est ça ? Je hoche la tête avec énergie. - Elle s'appelle Dagga. Je suis jalouse de ses cheveux bouclés. Je ne m'attendais pas à ce que la Production me mette avec une fille. Finalement, je trouve ça très bien. Elle est juste adorable et belle. Elle est ouverte et compréhensive. Tu verrais ses tâches de rousseurs. Elles sont magnifiques. Je ne suis pas déçue. Je lui souris. Mon partenaire, je ne l'échangerai pas contre une. Je suis trop habituée à sa présence. Elle est mon véritable pilier car elle est la seule à savoir ce qui me ronge de l'intérieur. - Ca te dit qu'on fasse des gâteaux ensemble ? Je pourrai t'apprendre, si tu veux. Qu'en dis-tu ? Mon regard se fait suppliant et mielleux comme le regard d'un enfant. S'il te plaît, s'il te plaît. Dis oui ...