Si j’ai peur des esprits, ce n’est pas pour rien. Quand j’étais enfant j’étais persuadé qu’un esprit habitait dans l’immeuble où nous vivions, mes parents et moi. J’entendais le plancher craquer en pleine nuit alors que rien ne bougeais, j’étais alors persuadé qu’un esprit tentait de m’attraper et je me planquais sous mes couvertures de la tête aux pieds. Ca me glaçait le sang, je ne savais plus bouger, plus réfléchir correctement et cette peur est restée profondément ancrée en moi. C’est pourquoi l’apparition d’Elliot m’a foutu les jetons mais, manifestement, je ne suis pas le seul à avoir eu peur. « Et toi alors ?! J'ai vraiment cru que c'était la fin. » Fit-elle en souriant à son tour. « Quel est ton film d'horreur préféré ? » fait-elle en pointant la lampe de poche sous son visage. Si c’est une scène de film : je ne connais pas. Je suis pas cinéphile, alors bon. Mais très récemment j’ai vu un film qui m’a glacé le sang, la peur des esprits, encore… « The Woman in black. Avec le type qui joue dans Harry Potter. » Pas de sang, pas de tronçonneuse, ce film n’est en réalité absolument pas gore du tout, tout joue sur le mental et c’est précisément ça qui est dur dans ce genre de film. « Et toi ? » Demandais-je à mon tour avant de faire un petit tour de la pièce. Ca va, il n’y a ni traces ensanglantées ni de cordes pendue au plafond, j’en conclus que personne n’est mort d’une mort violente ici, donc à priori il ne devrait pas y avoir de mauvais esprit, n’est-ce pas ?

Je dois bien avouer que je me sens un peu inculte quand je cite le film où à joué l’acteur de Harry Potter comme film d’horreur favori mais le nombre de films que j’ai vu est très limités. Moins de cinquante je dirais en comptant les films pour enfants que j’ai vu dans ma jeunesse. Je dois surement représenter une espèce étrange pour la communauté cinéphile de ce monde mais pourtant… Ce n’est pas cette forme d’art qui me fait vibrer, allez savoir pourquoi. Ca ne s’explique pas. « Suspiria, de Argento. Si tu ne connais pas, tu dois absolument le voir. C'est angoissant, terrifiant. J'aime. » répond-elle. Je hoche la tête et note dans un coin de ma tête de regarder ce film dès que je le pourrai. « Je ne connais pas, en effet. Je ne suis pas du tout cinéphile en fait. » Avouais-je. Je n’en avais pas honte d’ailleurs, tout comme je n’étais pas particulièrement fière d’être mélomane. « Dis, t'as une histoire de fantôme à me raconter ? » Demande-t-elle. Je souris, ah ça ! J’adore les histoires de fantômes, ce qui est étrange puisque les esprits me foutent les pétoches mais, justement, j’ai toujours cherché à en savoir plus. Je me pose sur un vieux canapé pas trop poussiéreux avant de lui répondre. « Hm, oui, j’en connais plusieurs, j’adore ce genre d’histoires. » Chacun son truc et puis si elle me demande, c’est qu’elle aime aussi non ? Elle a l’air en tout cas. J’hésitai un instant à lui raconter l’histoire de la Maison du Diable aux USA avant de me souvenir qu’étant américaine, elle en avait surement déjà entendu parler. Alors j’optai pour une très courte histoire mais troublante tout de même. « C’est une histoire vraie… Il y a quelques années, un homme dans un village où j’ai été en Angleterre m’a raconté cette histoire. Une nuit, alors qu’il s’apprêtait à aller se coucher, quelqu’un frappa à sa porte. Le brave homme ouvre donc la porte sur la une jeune femme blessée. Elle lui demande l’hospitalité car son conjoint l’a battue, l’homme accepte. Il lui donne une couverture et lui dit de dormir sur le canapé… » Je lève les yeux vers Elliot, à ce stade de l’histoire évidemment il ne se passe encore rien. « Le lendemain il retrouve la couverture pliée sur le canapé et il n’y a plus traces de la jeune femme dans la maison. La journée passée normalement et le soir, rebelote, elle vient sonner chez lui et lui demande l’hospitalité car son conjoint l’a battue. Constatant qu’elle était blessée, à nouveau, il lui offrit de dormir sur le canapé avec la couverture. Quand le lendemain il se lève : la jeune femme n’est plus là et la couverture est pliée sur le canapé. Ce petit manège se répète plusieurs fois jusqu'à ce que, exaspéré, l’homme alerte la police. » Je sors mon paquet de cigarette de ma poche et en maintient une entre mes doigts, éteinte, avant de poursuivre. « La police a affirmé que la jeune femme était décédée suite aux coups de son conjoint. » Je coince finalement la cigarette entre mes lèvres, je l’allume et pendant que je parle la fumée s’échappe de mes lèvres. « Elle était morte. Depuis un an. » C’est la fin de l’histoire, alors certes ce n’est pas très folichon mais moi ça me suffit à me poser des questions. Et il y en a plein des comme ça, des petites histoires troublantes. « Si tu as une histoire, j’adorerais l’entendre. » Fis-je finalement en tirant à nouveau sur ma cigarette.

A la fin de mon histoire je crois apercevoir la candidat frissonner. C’est le but après tout alors dans un sens, je suis content de mon histoire. Quand cet homme me l’a racontée je l’ai ressassée pendant des jours et des jours, je me disais que c’était impossible que l’homme avait du voir une autre femme, se tromper dans la description, je ne sais pas, n’importe quoi mais il me fallait toujours une explication rationnelle car tant que je n’en avais pas, j’y croyais. Finalement je lui demande de me raconter une histoire à son tour et, sans broncher, elle s’exécute. Je l’écoute attentivement en tirant de temps à autre sur ma clope. Son histoire est à glacé le sang, dans le même genre que celle que j’ai raconté mais les histoires de fantômes sont bien souvent les même : on voit une personne morte depuis plus ou moins longtemps. Je ne dis rien, je me laisse le temps d’imaginer la scène alors qu’elle se sort une cigarette et l’allume. Finalement elle me pose une question. « Tu crois aux fantômes ? » Je lève les yeux et rencontre son regard. Doucement, je hoche la tête. « Tant que je n’ai pas une contre preuve, une explication rationnelle à tous ces évènements, j’y crois oui. » Bon, vous allez me dire qu’on a pas non plus de preuve que Dieu n’existe pas mais très honnêtement on en a aucune pour prouver qu’il existe alors oui, je suis athée. « Et toi ? » demandais-je en retour. Peut être qu’elle allait me prendre pour un fou à cause de ma réponse, ou peut être qu’elle y croyait aussi… allez savoir.