Le soleil brillait de mille feux en ce début d’après-midi, et je prenais l’air, installée sur l’une des tables de la terrasse qui donnait vu sur le jardin. Une tasse de thé et quelques biscuits trônaient sur celle-ci : je savourais mon dessert en toute tranquillité. Ce n’était pas tant une coutume danoise, je l’avais plutôt adoptée lors de mes nombreux passages en Angleterre, que je considérais un peu comme ma seconde patrie. Après tout, ma mère y avait quelques origines, et certains de mes lointains parents y vivaient encore aujourd’hui. Ça expliquait peut-être mon attachement à ce pays qui n’était pas le mien. Je sirotais doucement mon doux breuvage lorsque j’aperçus mon partenaire venir dans ma direction. « Mallaury. » répondis-je sur le même ton, ce qui fit office de salutation. Il n’était pas nécessaire d’en dire plus, de toute façon, il ne fallut que quelques secondes avant que ce dernier ne reprenne la parole, et son timbre de voix, cette fois-ci, fut bien différent. Si j’étais anxieuse? Tel était sa question. Je me doutais bien qu’elle concernait ces nominations qui menaçaient bientôt de nous tomber sur la tête. Mon partenaire semblait être en paix avec cette situation, et je trouvais charmant qu’il s’inquiète ainsi de mon sort. « Non, pas tant que ça. C’est le jeu après tout. Je trouve seulement dommage de t’entrainer avec moi dans cette descente aux enfers. » D’accord, je rendais la chose bien plus dramatique qu’elle ne l’était réellement, mais s’il y avait divers avantages à notre partenariat, certains désavantages se frayaient tout de même leur chemin dans toute cette histoire. Ces voix supplémentaires qu’on m’avait attribuées lors du prime, puis à la roulette russe, n’aurait pu du toucher Mallaury. Il n’avait rien fait pour mériter ça, et à mon avis, il était relativement apprécié au sein du Nid. Si nous nous retrouvions nominés, à la fin de cette soirée, je misais tout sur sa survie. La mienne était loin d’être gagnée. Je tentais bien de me lier avec les autres, mais je ne sais pas s’il y avait quelque chose dans ma personnalité ou ma façon d’agir, mais la chose était plus ardue que je ne l’aurais imaginé. Dommage. Heureusement, il y avait mon partenaire. Sur qui je savais pouvoir compter. « C’est la vérité, je ne regrette aucunement mon choix. » J’étais même plutôt satisfaite. Il s’agissait tout de même d’un hasard, puisqu’en dehors de son nom et de sa photo, je ne connaissais rien à son sujet lorsque mon choix s’était arrêté sur lui. Il faut croire que mon instinct m’a poussé à prendre la bonne décision. J'ai eu la bonne idée de l'écouter, pour une fois. « Dis-moi, tu es satisfait de notre partenariat? » ne puis-je m’empêcher de le questionner. Il connaissait mon avis sur la question, mais j’ignorais ce qu’il en pensait. Réellement.

Les nominations me m’effraient pas. Elles font parties du processus normal de jeu et les craindre à chaque semaine ne ferait que gâcher mon aventure. À tout moment, je peux me retrouver nominée, que ce soit par le plus grand des hasards à la roulette russe, par des nominations d’office en pleine activité ou simplement par mes pairs, qui ne connaissent que peu de chose que moi. Oh, je suis consciente que le fait de ne pas m’être rapprocher de certains de mes camarades peut me porter préjudices, mais stratégiquement parlant, je ne suis pas une fille qui use de tactique. Je préfère naviguer naturellement au sein du groupe, et me lier aux personnes avec qui je me sens le plus à l’aise. Ne pas forcer les choses. Après tout, on ne peut être apprécié par tous et chacun. Le fait d’avoir écopé de plusieurs voix supplémentaires durant le prime dernier me faisait simplement comprendre que ma place n’était pas encore tout à fait acquise au sein de ce groupe hétéroclite. Mallaury semblait, malgré sa personnalité plus tranquille, s’est taillée une toute petite place, et j’en étais heureuse pour lui. Ma présence  devenait alors un handicap pour lui. Sur cette question, il ne partageait pas mon avis. «  Désolé, c’est simplement l’impression que ça me donne, c’est tout. Définitivement, tu es plus apprécié que moi dans cette maison. » Et ce n’était pas que des balivernes : la cote de popularité parlait d’elle-même. « Je m’en voudrais de causer ta perte. » Si, par le plus cruel des destins, nous nous retrouvions nominés et qu’il quittait l’aventure, alors que je restais, des sentiments contraires m’habiteraient. La joie de pouvoir continuer une semaine supplémentaire, il est évident. Mais le sentiment d’avoir manqué à mon devoir de partenaire serait encore plus fort. Je me demandais d’ailleurs si notre association lui plaisait toujours. Sa réponse ne se fit pas attendre, et je ne ressenti aucune hésitation dans sa voix. Ses explications trouvèrent écho dans mes pensées, et j’esquissais un fin sourire. Nous étions deux êtres que tout opposait, et pourtant, nous arrivions à nous entendre. C’était merveilleux, étonnant même. « Je te connais très peu, alors pour l’instant, ce n’est pas une tâche très ardue… » lui dis-je sur un ton léger, question d’apaiser l’atmosphère qui nous entouraient. À vrai dire, je doutais fortement que mon camarade soit de ceux dont le caractère était difficile à vivre. Cette tâche, en fait, me revenait de plein droit. Mais aucunement mon intention de faire des misères à mon cher partenaire. Clairement, il ne méritait pas de me connaître sous mon pire jour. « Au fait, je n’ai répondu à ta question, le premier soir…  » fis-je, sautant d’un sujet à l’autre, même si cela restait dans la continuité de cette discussion, d’une certaine façon. « Mon couple était voué à l’échec à partir du moment où mon mari a mis son bien-être personnel de l’avant plutôt que celui de notre enfant. Nous traversions une période difficile, et il s’est entêté, il refusait de voir une évidence. J’ai dû le confronter, lui imposer un ultimatum. Et tu sais quoi? Il n’a même pas hésité une seule seconde avant de claquer la porte. » À l’époque, la déchirure m’avait à peine abimé, mais la tristesse dans les yeux de mon trésor m’avait complètement détruite. Il s’agissait tout de même sa figure paternelle, même si ça n’était pas son véritable père.