w/jessica

La bibliothèque est un endroit qu’il n’a pas encore visité après deux semaines au sein de ce nid, alors même qu’il pourrait s’agir de l’endroit où il passera le plus clair de son temps. C’est un endroit qui lui ressemble dans un sens. Calme, peu bruyant, peu propice à la compagnie ou à la discussion. Ce qui l’intéresse le plus ici n’est pas la tranquillité du lieu, mais les livres que la bibliothèque abrite. Il n’est pas un rat de bibliothèque qui ressent le besoin de se cultiver même en ‘’vacances’’, simplement la lecture est une de ses activités favorites depuis de nombreuses années. C’est un moyen comme un autre de s’occuper, surtout qu’il n’est pas vraiment le premier à participer aux activités de groupe, il faut bien qu’il trouve un équivalent. Il ne s’intéressait pas à la lecture quand il était gosse, c’est une ‘’passion’’ qu’il s’est découvert sur le tard, et pas forcément de son plein gré, plus par obligation. Mais finalement, ça ne lui a pas déplu, et le voilà, des années après, à encore apprécier la lecture d’u bon livre en toute tranquillité. Il débarque donc dans la bibliothèque en milieu d’après-midi, et ne met pas longtemps à se choisir un livre, optant pour une valeur sûre et un livre qu’il peut relire sans jamais s’en lasser, voyage au bout de la solitude de Jon Krakauer. Certes, inspiré d’une histoire vraie, une histoire qu’il aimerait lui-même vivre. Cette capacité à s’échapper, à vivre une liberté totale et à ne vivre que pour soi est relativement éloignée de la réalité, une réalité qu’il aimerait parfois fuir même s’il ne l’avouera jamais. Il s’installe sur un fauteuil et y reste une bonne heure avant que la porte s’ouvre et qu’il prenne la peine de lever les yeux pour découvrir une candidate qu’il reconnait rapidement. « Jessica. » Il l’interpelle, non pas en lui criant dessus, mais simplement en prononçant son prénom pour qu’elle évite de continuer sa route sans lui prêter la moindre attention ce dont, il est sûr, elle serait capable. Il peut la comprendre, on ne peut pas dire qu’il se soit montré le plus sympathique du monde lors de leur première rencontre. Il évitera tout de même de lui avouer qu’elle l’avait un peu cherché, mais soit. Dès qu’il est certain d’avoir capté son intérêt, il plonge sa main dans sa poche droite pour en ressortir une boucle d’oreille qu’il dépose sur la table à côté de lui, sans en dire plus avant de retourner à la lecture de son livre. À part pour le remercier – éventuellement – il doute qu’elle ait une grande envie de lui faire la conversation, d’autant plus qu’à priori, elle ne pense pas s’entendre avec lui, autant lui éviter de gaspiller de la salive inutilement.

Je me balade un peu au hasard dans le nid, sans but précis à part celui d'en trouver un, justement. Je n'ai rien à faire mais je ne m'ennuie pas pour autant, ou du moins pas encore. Je suis du genre à me lasser vite de choses futiles, mais si je me trouve une bonne occupation je peux y passer des heures et des heures, oui, carrément. C'est comme quand je parle, parfois. Si j'ai un bon auditoire qui ne m'interrompt pas sans arrêts pour rien, qui me pose des questions pertinentes pour que je trouve un nouveau tas de trucs à dires même si c'est idiot et qui m'écoute avec le plus d'attention dont il est peux faire preuve, je suis capable de lui raconter ma vie en long, en large et en travers. Mais je sais naturellement que ça pourrait me porter préjudice, ici, de trop en dire pour la simple et bonne raison que je n'ai rien de mieux à faire. Je décide donc qu'il serait peut-être préférable de me rendre quelque part où j'ai de grandes chances de me retrouver seule et où je pourrais m'adonner à une activité. La bibliothèque me semble être l'endroit parfait. Je ne compte pas forcément lire, mais au moins faire le tour des bouquins, en tourner quelques pages, regarder les images et autres illustrations. Je sais, on dirait vraiment une gamine quand je pense comme ça. Quand j'y arrive, je pousse la porte en essayant de faire le moins de bruit possible mais elle se met déjà à grincer. En tout cas, j'avance à pas feutrés, prête à grimper sur une échelle pour aller voir les ouvrages qui se trouvent tout en haut des étagères, quand j'entends une voix prononcer mon prénom. Un frisson me parcourt l'échine jusqu'à ce que je pose les yeux sur la seule personne dans la pièce. Alistair, je ne l'avais pas vu. Je lui adresse un petit sourire avant de me rendre compte de ce qu'il vient de déposer sur une table tout près de lui. Ma boucle, ma boucle d'oreille. « Oh, merci. » Je chuchote d'un air vraiment hébété en la prenant entre deux doigts. « J'ai bien fait de garder l'autre, finalement. Si je t'avais écouté... » Je lui lance un petit regard moqueur. Je le taquine un peu, mais je ne sais pas si je fais bien, il pourrait mal le prendre, ou je ne sais quoi. « Où tu l'as trouvée ? J'espère que t'as pas glissé dessus quand même. » Non parce que ce serait bête qu'il soit tombé à cause de mon bijou, donc de moi. Je m'en voudrais presque. Mais il n'y a peut-être même pas lieu de s'inquiéter. Il aurait très bien pu ne rien avoir de mieux à faire que chercher ma boucle d'oreille disparue. J'ai bien essayé moi, pendant un temps, mais j'ai vite abandonné l'idée de revoir ma petite boucle nacrée un jour. Et pourtant, la revoilà. Ah, ce n'est pas grand chose, mais je suis contente.

Pour une fois, il n’est pas trop absorbé pour prêter attention à ce qu’il se passe autour de lui. D’habitude, il ne relève pas la tête quand il entend un bruit ou qu’on s’adresse à lui, du moins pas avant quelques secondes. Sauf que cette fois, c’est presque par automatisme qu’il a porté son regard sur la porte à défaut de son livre. Et tant mieux pour Jessica, en réalité, puisqu’il se balade avec un objet qui lui appartient depuis quelques jours. Sa boucle d’oreille égarée lors de la première semaine. Même s’il ne s’est pas montré particulièrement coopératif la première semaine, ça ne l’empêche pas de l’être un peu plus cette semaine. C’est un peu par hasard qu’il l’a retrouvée, d’ailleurs. Il emprunte les escaliers plusieurs fois par jour, mais ce n’est pas pour autant qu’il a prêté une attention particulière à l’objet perdu. À vrai dire, cette histoire lui était même sortie de la tête. Mais il y a quelques jours, son regard a été attiré par un objet brillant au sol, à moitié caché par l’escalier. Et il n’a pas tardé à faire le lien avec sa première rencontre avec Jessica. Alors il a glissé la boucle d’oreille dans sa poche dans l’éventualité où il croiserait à nouveau la candidate à l’occasion. Il ne lui a pas couru après, puisqu’elle s’est passé de son bijou durant plus d’une semaine, alors un jour de plus ou un jour de moins, hein. Sauf qu’aujourd’hui, il peut enfin la lui rendre. Il l’interpelle donc pour éviter qu’elle lui passe devant ou qu’elle fasse demi-tour, et quand il est certain d’avoir capté son attention, il dépose le bijou sur la table. « De rien. » Il marmonne quand elle le remercie. Ça ne lui a rien couté de la garder sur lui en attendant qu’ils se recroisent. « Je n’ai pas toujours de bonnes idées. »  C’est le moins que l’on puisse dire. Et sa proposition de perdre la seconde boucle d’oreille n’en est qu’une parmi tant d’autres. Il doit bien lui donner raison, elle lui en aurait voulu si elle l’avait écouté et qu’il s’était ramené quelques jours plus tard avec la boucle d’oreille. Quoi que, il ne la lui aurait sûrement pas rendue dans ce cas. En parlant de la fameuse boucle, elle souhaite savoir où il l’a trouvée et s’il n’a pas glissé dessus. Drôle d’idée, il doute qu’une boucle d’oreille puisse avoir cet effet-là, ça n’est pas une peau de banane tout de même. À cette réflexion, il se contente de hocher la tête de gauche à droite pour lui faire comprendre que la boucle n’est pas à l’origine d’une mauvaise chute. Quant à savoir où il l’a trouvée… « Coincée sous l’escalier. À peine visible. »  Il précise, puisqu’elle l’a sûrement cherchée et que l’idée d’être aveugle peut potentiellement lui traverser l’esprit. « Tu n’es pas obligée de me tenir compagnie si tu n’en as pas envie. »  Il déclare ensuite. Lui, ça ne le dérange pas, mais il ne faut pas qu’elle s’attende à une grande conversation, même s’il est d’humeur à faire des efforts. Sauf qu’il ne veut pas lui imposer sa présence simplement parce qu’il a retrouvé sa boucle d’oreille et qu’elle peut potentiellement être redevable. Il n’oublie pas ce qu’elle a dit lors de son bilan, manque de chance pour elle. Quoi que, il ne lui en tient pas rigueur.

Spoiler:

J'ai bien du mal à croire ce que je vois. Alistair a retrouvé la boucle que j'avais perdue et je la tiens à présent entre mes doigts. Je souris comme une idiote en le remerciant, puis je me rends compte que du coup, j'ai bien fait de ne pas écouter ses très mauvais conseils. J'acquisse simplement en hochant la tête quand il dit qu'il n'a pas toujours de bonnes idées. Non, ça c'est clair. J'aurais eu l'air bête s'il avait retrouvé ma boucle et que je n'avais plus l'autre que j'avais finalement décidé de jeter par dépit. Remarque, il aurait eu l'air bête aussi de me donner un tel conseil, et je pense qu'il aurait laissé la disparue où elle était, qu'il me l'aurait cachée, et plus personne ne s'en serait occupé. Je lui demande toute de même où est-ce qu'il a dû aller la chercher, et je m'inquiète de savoir s'il n'est pas tombé dessus, parce qu'après tout c'est un moyen comme un qu'il l'aurait amené à la retrouver. D'après mon père, j'ai le chic pour laisser traîner des choses dangereuses n'importe où. Enfin, "dangereuses", il parlait de mes jouets qui traînaient toujours partout dans ces différentes maisons quand j'étais môme, mais maintenant, c'est fini. Oui, maintenant je sème mes bijoux un peu partout. J'observe Alsitair qui a l'air un peu étonné par mon idée qu'il doit juger grotesque, et il fait non de la tête, ce qui me rassure. Je pousse d'ailleurs un léger soupir de soulagement en pensant que je ne suis responsable d'aucune chute. Il m'apprend qu'elle était coincée dans les escaliers, à peine visible. « Mais toi, tu as un œil lynx. » Je dis en souriant de plus belle. Moi je suis toujours nulle pour trouver des choses, à Pâques, j'étais toujours celle qui avait le moins d'œufs dans mon panier. Le candidat déclare alors que je ne suis pas obligée de lui tenir compagnie, mais le fait qu'il m'en informe me laisse à penser qu'en fait, il aimerait bien un peu de compagnie. Et je lui dois bien ça, il a retrouvé ma précieuse perle. « C'est pas que j'ai pas envie mais je voudrais pas te déranger, si tu lis. » En tout cas il avait un livre devant les yeux avant de m'interpeller, il me semble, et il l'a toujours. « C'est quoi ? T'aimes bien ? » Je demande vraiment par curiosité à son égard, pas parce que j'ai l'intention de le lire un jour, ce bouquin. Moi c'est les magazines people que je dévore d'une traite, le reste, dès que ça touche à la littérature, c'est un peu trop barbant et compliqué pour ma petite caboche alors je préfère éviter.

Si elle le connaissait un peu mieux, elle saurait pertinemment qu’il n’est pas le roi des bonnes idées, au contraire. Il est plutôt du genre à n’en avoir que des mauvaises et il est plutôt déconseillé de l’écouter. Ainsi, c’est effectivement une bonne chose qu’elle n’ait pas perdu volontairement ou jeter la boucle d’oreille survivante. Quoi que, si elle l’avait écouté, il ne lui aurait pas ramené la seconde, puisqu’elle ne lui aurait servi à rien. Mais puisqu’elle était, aux dernières nouvelles, convaincue de garder celle qui ne s’était pas échappée en souvenirs, il a donc pris l’initiative de lui rapporter celle qu’il a trouvée, histoire qu’elle puisse les réunir. Quant à savoir s’il l’a retrouvée parce qu’il est tombé dessus par inadvertance, l’idée lui parait difficilement réalisable, il ne savait pas que l’on pouvait glisser sur une boucle d’oreille. Sur un collier de perles, éventuellement, mais sur une simple boucle d’oreille… Non, s’il l’a retrouvée, c’est parce que son regard s’est posé sur celle-ci à moitié cachée par l’escalier, un peu par hasard. Peut-être que d’autres l’avaient remarquée avant lui mais n’avait pas pris la peine de la ramasser. Il a un œil de lynx selon elle. C’est possible. Il hausse simplement les épaules. Il est passé de nombreuses fois par les escaliers avant que la boucle lui saute aux yeux, on ne peut pas dire que son œil soit si affuté que cela. Par la suite, il l’invite à faire demi-tour si elle ne souhaite pas rester plus longtemps, il ne lui en tiendrait pas rigueur. « Tu ne me déranges pas. » Il pensait que c’était clair. Si vraiment elle le dérangeait, il ne se serait pas gêné pour continuer sa lecture après s’être assuré qu’elle ait repris sa boucle d’oreille. Sauf que depuis qu’elle s’est approchée, il n’a pas encore remis le nez dans son livre, c’est plutôt bon signe. Et puis, elle n’a pas l’air de s’en formaliser de savoir si elle dérange ou non, puisqu’elle ne tarde pas à lui poser des questions sur le livre qu’il tient entre les mains. À sa première question, il se retient de lui répondre ‘’un livre’’, mais il va s’abstenir, il a cru comprendre qu’il n’était pas forcément dans les bonnes grâces de Jessica et enfoncer le clou irait à l’encontre de ce pourquoi il participe à cette émission. « Voyage au bout de la solitude, de Jon Krakauer. » Il déclare dans un premier temps avant de marquer une courte pause. « C’est l’un de mes livres favoris. » Il termine ensuite. Une véritable confession de sa part, une petite part intime de lui qu’il daigne dévoiler à la candidate. « C’est lequel, le tien ? » Elle doit bien avoir un livre préféré. Et puis, le lieu se prête à ce genre de questions.

L'histoire de ma boucle d'oreille passée, il m'annonce que je ne suis pas obligée de lui tenir compagnie si je n'en ai pas envie. Mais c'est juste que je ne voudrais pas le déranger. Il m'assure que ce n'est pas le cas et je lui demande aussitôt ce que c'est, qu'il lit, et s'il aime bien. Je ne connais évidement ni le libre ni l'auteur, le contraire aurait vraiment été étonnant, mais je l'écoute d'un air intéressé. Je m'installe sur un fauteuil tout près alors qu'il dit que c'est un de ces livres préférés. « Tu en as plusieurs ? » Livres préférés, que je demande. « Tu lis beaucoup ? » Surement. Puisqu'il ne m'a pas l'air d'être très bavard, j'imagine qu'il préfère lire, écrire, voire, observer, écouter. Ou alors il n'aime faire aucune de ces choses non plus, et vu l'air désintéressé qu'il arbore en permanence, c'est l'impression qu'il donne. Il n'aime peut-être pas la vie, voilà tout. Ce serait triste quand même. Le candidat me demande ce qu'il en est du mien, de livre favori. « Heu... » Comment dire ? Je lance des petits coups d'œil aux livres qui se trouvent tout autour de nous, l'air pas tellement sûre de moi. « Je sais pas. » Je hausse les épaules. « Je lis pas souvent, en fait, ou alors c'est des magazines people, tu vois. » Donc autant dire que je suis nulle en culture littéraire. Je ne me souviens d'aucun livre que j'ai lu récemment, surement parce qu'il n'y en a aucun. Je fais toujours tellement de choses pour m'occuper, autant au quotidien chez moi qu'ici, dans le jeu, que je ne ressens jamais le besoin d'ouvrir un bouquin. Je devrais peut-être profiter de l'aventure et de cette grande bibliothèque mise à notre disposition pour lire un peu, me faire une culture et pourquoi pas trouver mon livre préféré.