Il court dans la forêt, le mercredi, c'est la journée tranquille, la dernière journée avant les nominations, c'est la journée où il peut courir. C'est aussi la journée durant laquelle tout le monde peut souffler, prendre un dernier jour off. Ghika le sait bien, il l'a compris depuis longtemps, les gens ont souvent un coup de mou pendant la semaine, et le meilleur jour pour ça est le mercredi, parce que personne n'est encore en danger immédiat, c'est aussi le jour le plus calme de la semaine niveau activité organisée par Cupidon. Bref, c'est le moment idéal pour une balade en forêt. Il ne sait pas exactement depuis combien de temps il court, peut-être un quart d'heure, peut-être une demie-heure. Il n'en sait rien, au fond ça ne compte pas beaucoup, il est seul et c'est ça qui est bon. Ghika est peut-être la personne la plus sociable de la saison treize de Fake Lover, mais après plus de trois semaines dans le nid, c'est toujours pareil. Le matin quand il se lève, trouver dix personnes dans le grand salon, quand il se couche entendre une poignée de respiration, ça finit par l'user. Cette course à pieds, c'est sa façon à lui de retrouver une vie normale. Et pourtant même dans cet instant de solitude, il peut voir quelqu'un dans la forêt. Isaac ! Tient donc, Ghika n'était pas d'humeur à de la compagnie à la base, mais l'idée d'une petite rixe avec le délinquant de l'émission ne se refusait pas. Alors qu'il est à quelques mètres de lui il ralentit, au point d'arriver à sa hauteur en marchant. « On chasse la donzelle Isaac ? » questionne-t-il déjà amusé par la situation à venir. Après un petit jogging, une petite joute verbale est exactement ce qu'il lui fallait pour le remettre sur pied.

La vie est une succession de rencontres, que Ghika aime à classer en deux genres bien spécifiques et exclusifs. Les rencontres nécessaires et celles d'opportunité. Dans le premier cercle tombent inévitablement les relations familiales et celles que l'on fait à cause des décisions d'autrui pour nous. Dans le second cercle on retrouve toutes les rencontres qui se produisent par accident, la rencontre de n'importe quelle personne que vous n'auriez en général pas eu l'occasion de rencontrer mais aussi celles qui dépendent uniquement de vos décisions ainsi que leurs conséquences. Fake Lover est le parfait exemple de ceux dernier cas. Ghika avait choisi de faire partie de l'émission entraînant une réaction en chaîne. Il a depuis lors rencontré des personnes que jamais il n'aurait croisé dans sa petite vie d'étudiant et barman à Oxford. Isaac était de ces personnes, qu'il n'aurait jamais rencontrées et jamais appréciées. Pas qu'il soit le plus grand fan du petit malfrat, mais il apprécie sa compagnie. D'une façon sado-masochiste, certes, mais tout de même, il aime discuter avec Isaac, parce que c'est une des rares personnes à avoir une vraie répartie, une de celles capables de tenir tête à la sienne. « Un hobbit ? T'aurais pu dire un elfe. Ça aurait été plus consistant avec ta théorie du coton-tige, j'veux dire je suis pas petit, joufflu et poilu... » ironise Ghika à la remarque du mannequin, producteur etc. etc. La chasse à la femelle n'est pas une pratique dont il est friand mais il a vu tellement de mecs tenter des approches sur des filles au bar qu'il est probablement meilleur à la drague qu'Isaac ne l'est, sans aucune vantardise ni mépris. « Un petit conseil, si tu chasses une damoiselle, traîner dans un coin où il n'y a pas âme qui vive ne te mènera pas loin dans ta petite compétition contre Percy. » Ce n'est pas très compliqué à comprendre, ce n'est qu'une question de logique extrêmement élémentaire. Un chihuahua comme Milou l'aurait compris, et même si Ghika ne tenait pas l'intelligence d'Isaac en très haute estime, il le pensait doté d'un minimum de jugeotte. « Alors, pourquoi tu es vraiment là ? » interroge un Ghika tout d'un coup plus sérieux.