raise your voice
ft. Pia & Andreja

C'était un peu l'hécatombe dans cette chambre, et si toutes ces éliminations rappelaient à tout le monde que le jeu tendait progressivement vers sa fin Andreja n'était pas non plus mécontent de dormir dans une pièce une peu moins ... surpeuplée. Ce soir particulièrement, Sacha et Adnan ne semblaient pas pressés de monter se coucher et Pia et Andreja avaient la chambre pour eux tous seuls ; Ils auraient pu en profiter pour sauter sur les lits ou mettre les affaires sans dessus dessous mais même pas, faut croire que l'un et l'autre avaient eu une journée éreintante puisqu'ils étaient tout simplement affalés sur leur lit à regarder le faux ciel étoilé au dessus de leur tête, avec cette proximité physique instaurée presque automatiquement la première semaine et qui ne les avait pas quittés ensuite. L'une des mains du serbe jouait machinalement avec un bracelet que la rouquine portait autour d'un de ses poignets, et le silence n'était plus troublé que par leur respiration à l'un et à l'autre, et par le bâillement qu'ils laissaient échapper de temps à autres. Il se sentait d'humeur légère cette semaine, contre toute attente, et alors que pourtant son détecteur de mensonges aurait du le laisser soucieux, tout comme les nomination qui sentaient clairement mauvais. Mais il ne se sentait pas particulièrement soucieux pour autant, et sans dire qu'il se sentait serein il se sentait donc au moins léger. Bâillant à nouveau il avait laissé échapper un soupir d'aise tandis qu'il s'étirait avant de retrouver sa position initiale, et brisant le silence il avait annoncé « Je décidé je faire quoi avec ma cagnotte, si je valider. Enfin, pas tout, mais un peu ... » Oh il y avait encore largement le temps avant cela, certes, le temps pour se faire éliminer sans valider un centime surtout, mais faire des plans sur la comète n'avait jamais tué personne, et il essayait de travailler son optimisme. « Je te offrir des vacances à Chicago. » Son regard avait progressivement quitté le plafond et ses étoiles factices pour venir se poser sur le profil de Pia. C'était reculer pour mieux sauter, il en avait parfaitement conscience, parce qu'il savait bien que tôt ou tard (mais il espérait tard, de préférence) tout cela prendrait fin et la routine et relation qu'il entretenait avec sa partenaire dans le nid également, mais c'était encore trop abstrait comme idée, et il n'avait pas envie de s'y résoudre. Et puisque les chances qu'il puisse venir faire du tourisme au pays des pizzas étaient plus qu'improbables, il n'y avait pas trente-six autres possibilités.

Elle est grande, cette chambre. Trop grande pour deux sans doute, mais c'est pas à ça qu'elle pense, Pia. C'est pas non plus aux fantômes de ses camarades déjà partis ni à l'absence des autres survivants à la maladie de l'élimination qui sévit dans le nid. Elle pense, en regardant le plafond, qu'elle pourrait garder ce ciel sous les yeux pendant des années, qu'elle pourrait adopter ce lit sans difficulté et surtout s'emparer de son partenaire pour être sûr qu'on le lui enlèverait pas, l'emmener elle ne sait trop où, voyager. Aller de places en places, de pays en pays, parce qu'elle veut faire le tour du monde la rouquine et qu'elle se dit que, peut être que ça pourrait être utile, un Andreja à disposition. Ses paupières aimeraient tomber mais elle les garde ouvertes, c'est comme un défi en fait, plus elle parvient à rester éveiller, plus ce souhait a de chance de se réaliser. Elle veut profiter de chaque secondes, de chaque minutes à ses côtés, parce qu'elle connait la réalité Pia. Les semaines s'étiolent, leurs chances de continuer avec et bientôt l'un ou l'autre tombera et ce sera fini d'Andreja et Pia. Une place froide dans ce lit qui était devenu le leur, maintenant. Inconcevable. Elle veut pas y songer la rousse, parce que ça fait mal, un petit pincement au cœur. Leur duo a été épargné pour ces nominations et elle s'est sentie soulagée d'un doute qui s'installait chaque semaine dans un coin de sa tête et qui s'en allait à l'annonce du banc des nominés pour revenir inlassablement, toujours, la semaine d'après. Et elle sait Pia que cette valse ne sera pas éternelle et qu'un soir ce sera le grand soir, le dernier. Pas ce soir. Pas ce soir, et c'est ce qu'elle se répète alors qu'elle vient plaquer ses pieds gelés contre les jambes de son partenaire, pour les réchauffer un peu, pour l'embêter surtout. « Je décidé je faire quoi avec ma cagnotte, si je valider. Enfin, pas tout, mais un peu ... ». Elle détourne son regard des astres pour venir le poser sur le visage de son partenaire, un sourire mutin sur les lèvres. « Tu payes la production pour qu'ils nous laissent garder le plafond ? ». Elle aimerait bien, Pia, pas sûr qu'ils acceptent cependant. « Je te offrir des vacances à Chicago. ». Elle sait pas quoi dire, Pia, parce que c'est comme un accord ça, c'est signer le contrat qu'il existera un Andreja et Pia même quand tout ça sera fini, même quand l'émission sera derrière eux et peu importe ce qui pourra se passer alors. Son sourire finit par s'étirer d'avantage, un peu comme celui d'une gamine à qui on promet la lune pour noël.  « J'te demande pas de promettre, mais j'aimerai tellement que ce soit le cas. ». On peut pas faire des promesses sur des rêves, parce qu'on ne sait pas ce qu'il adviendra. N'empêche qu'elle veut bien rêver avec lui, un peu. Personne n'est là pour les en empêcher, de toute façon. « Moi j'veux qu'on fasse le tour du monde. Mais je peux aussi te payer des chocolats, si tu préfères. ». Elle rit un peu, en s'amusant à décrire des cercles sur le dos de la main de son partenaire avec son pouce. Des projets sur la comète, ils peuvent s'en faire, personne ne pourra les leur enlever.

Il n'irait pas jusqu'à dire que cela sentait déjà un peu la fin, du moins il espérait qu'il n'y aurait aucune mauvaise surprise de cet acabit lors du prime bien qu'il ait fini par comprendre que Cupidon était capable de tout y compris du pire, mais il était impossible de nier que l'aventure tirait tout de même lentement vers sa fin plus que vers son début. Il suffisait de regarder autour d'eux, la chambre s'était énormément vidée au cours de ces dernières semaines, Sacha ne dormait même pas toujours là, quant à Adnan il finirait peut-être par migrer lui aussi, s'il rejoignait Gaëtane ... A moins qu'elle ne vienne ici, après tout elle semblait avoir toujours eu un coup de cœur pour le plafond étoilé de la chambre stellaire. Un plafond qui plaisait d'ailleurs aussi beaucoup à sa partenaire, à tel point que lorsqu'il avait annoncé à demi-mot avoir une idée de ce qu'il pourrait faire de son argent s'il venait à valider sa cagnotte, elle avait répondu « Tu payes la production pour qu'ils nous laissent garder le plafond ? » arrachant au serbe un léger rire. Mais c'est vrai, elle lui manquerait sans doute un peu cette chambre, son plafond était apaisant. Pas autant que la présence rassurante qui partageait son lit depuis neuf semaines, il aurait plus de mal à se passer d'elle que des étoiles fluorescentes au dessus de leurs têtes. « Je essayer de négocier avec Cupidon le prochain fois je buzz, si tu veux. » avait-il tout de même répondu du bout des lèvres avant de donner sa véritable réponse, à savoir le fait de lui filer un billet d'avion pour Chicago qu'elle serait forcée d'utiliser pour ne pas le vexer, au moins, huhu. La vérité c'était qu'il s'était trop habitué à cette vie ici, au fait de ne pas se poser de questions sur le reste, sur ce qui lui pesait habituellement, ici tout était trop facile et la tentation de se laisser glisser et d'oublier qu'il avait une vie dehors était grande. Une vie dans laquelle il n'y avait à priori pas de place pour qui que ce soit, pas même une Pia ou une Tilda à priori. Il n'y avait de place pour pas grand-chose en définitive. « J'te demande pas de promettre, mais j'aimerai tellement que ce soit le cas. » Frissonnant en sentant les pieds froids de la jeune femme se coller contre ses jambes il les avait resserrés autour des orteils de la jeune femme avant de tourner la tête. Un sourire s'était étiré sur son visage, de ces sourires tristes qui en disaient plus long que les mots, et parce qu'il n'y avait rien de plus à dire justement il avait gardé le silence et laissé Pia faire dériver le sujet, le rendre plus léger. « Moi j'veux qu'on fasse le tour du monde. Mais je peux aussi te payer des chocolats, si tu préfères. » Cette fois-ci il avait laissé échapper un rire, se redressant pour de bon sans pour autant retirer sa main de celle de Pia « Alors on commencer le tour du monde par le pays du chocolat. » Ce n'était même pas loin de chez elle en plus, elle ne serait pas trop dépaysée si elle n'avait que la frontière à franchir pour se rendre en Suisse. A l'heure d'aujourd'hui il n'y avait rien de plus facile que de franchir une frontière, disait-on. « Et ensuite tu me faire visiter le pays du café. » Puisqu'ils en étaient aux projets sur la comète il pouvait bien espérer la voir un jour, l'Italie. Il n'en avait rien à foutre, des contraintes de la réalité, et de l'océan qui se tenait actuellement entre lui et n'importe quel pays d'Europe, tout comme il n'en avait rien à foutre que dans quelques semaines tout au plus tout cela serait à ranger dans une petite case "souvenirs" de son esprit. Le nid, les gens, l'impression de quiétude. Fermant les yeux le serbe s'était laissé retomber sur le matelas et avait posé sa tête contre l'épaule de Pia en soupirant. C'était étrange, que ce tout petit bout de conversation puisse à la fois lui faire chaud au cœur et lui mettre le cafard.