Cette semaine, j'oscille entre la joie de pouvoir encore poursuivre cette aventure et la peur de la voir s'arrêter brutalement lors du prochain. Ma tête était une nouvelle fois mise à prix, je n'en voulais pas à mon partenaire d'avoir été trop gourmand avec la roulette russe mais je ne pouvais pas m'empêcher d'être fataliste à quelques jours du prime. Je n'ai pas pour habitude de me laisser abattre pour si peu mais la simple idée de me retrouver en dehors du nid m'angoisse terriblement. Ici, nous étions protégés des moindres petits soucis de l'extérieur et loin, bien loin de nos vies respectives. Je ne dors plus, je ne mange presque plus rien et je n'ai jamais autant dessiné que durant cette semaine. L'atmosphère du nid qui se veut chaleureuse devient lourde, je me replis le plus souvent à l'extérieur pour respirer un air plus pur. Il fait déjà nuit lorsque je décide de me rendre à la plage pour profiter de cet environnement serein. Un peu de musique dans mes oreilles pour rendre le trajet un peu moins effrayant et je suis fin prête. Je laisse les vagues et la musique me bercer créant une harmonie parfaite. C'est exactement ce dont j'ai besoin, de calme. Je laisse mes chaussures sur le sable et je vais tremper mes pieds dans l'océan sans réfléchir. L'eau est fraîche sans pour autant être glaciale. Lorsque je fais volte-face, je tombe nez à nez avec Alistair et mon coeur manque de s'arrêter. « Ok ça c'était vraiment flippant » que je lui lance en retirant mes écouteurs et en attendant que mon coeur se remette à battre régulièrement. « Tu prends ton job de stalkeur vraiment très à coeur » . Je plaisante en faisant référence à une discussion que nous avions eu il y a déjà quelques semaines. Il ne pouvait pas ne pas l'avoir oublié. « Tu vas bien ? » . Sous entendu : « Tu vas mieux depuis la semaine dernière ? ». Il avait eu une petite baisse de régime la semaine dernière et j'avais peur que les déclarations de Síomha ne l'aient poussées à se renfermer d'avantage. Il avait très bien accusé le coup pendant le prime mais peut être que ce n'était plus le cas maintenant.

Il n’est pas fatigué en ce vendredi soir et le nid commence déjà à s’endormir. Cette tranquillité l’embête pour une fois, puisque cette semaine il a tenté de renouer avec ses efforts et de faire la conversation aux autres dès que l’occasion se présentait. Et en ce vendredi soir, il est plutôt motivé à discuter, même s’il n’est toujours pas un grand bavard. Sauf qu’il n’a personne sous la main, et comme il n’est pas fatigué, il ne voit pas l’intérêt de rester à l’intérieur du nid en attendant que le temps passe. Alors il se met en chemin pour l’extérieur, marchant sur son sentier habituel qu’il suit quand il s’ennuie et ne sait pas comment s’occuper. Alistair arrive finalement près de la plage, où il distingue une silhouette les pieds dans l’eau. Dans d’autres circonstances, ça ne l’aurait pas vraiment interpellé, mais après la petite crise de déprime de Jessica en début de semaine, il préfère s’assurer que la personne qui se trouve à quelques mètres de lui va bien, d’autant plus que ce n’est pas vraiment l’heure idéale pour faire trempette, à moins qu’il s’agisse d’un bain de minuit, vu l’heure. Oh bon dieu, il espère bien que ce n’est pas cela. « Hey, ça va ? » Il demande en s’approchant un peu de l’eau. Mais il n’obtient pas de réponse et décide malgré tout de s’avancer en direction de la silhouette et tant pis pour ses chaussures qui prennent l’eau. Il arrive au niveau de l’inconnu, mais est pris par surprise quand celui-ci, ou plutôt celle-ci se retourne brusquement et manque de le heurter, au point qu’il a un mouvement de recul qui manque de le déséquilibrer. Mais plus de peur que de mal, il se reprend bien vite. Il prête ensuite attention au visage de la personne qui se trouve face à lui et il reconnait Felice, bien que sa voix l’ait déjà aiguillé sur son identité. « Désolé, je me suis inquiété. » Oui, ça lui arrive, aussi surprenant que cela puisse paraître. Elle fait ensuite référence à une conversation qu’ils ont eue il y a quelques semaines, où il s’était retrouvé affublé de la réputation de stalkeur.  « C’est le seul job qui me réussit, alors… » Alors il faut bien qu’il le prenne à cœur, hm. Il esquisse un bref sourire, histoire de ne pas être considéré véritablement comme un stalkeur si Akela a la bonne idée de diffuser ces images, sur le ton de la plaisanterie – puisqu’il s’agit bien de ça – ça passe toujours. Elle lui demande ensuite s’il va bien, et il hausse vaguement les épaules. « Ça va plutôt bien pour un cas désespéré, moche en plus de cela. » Siomha n’a pas dit explicitement qu’il était un cas désespéré, mais elle a avoué qu’elle ne faisait pas de miracle, ça veut dire ce que ça veut dire. Et oui, les paroles de l’animatrice lui tourne en boucle dans la tête, de même que celles de la question posée au détecteur sur lui et Mallaury. Déjà qu’il n’a pas une grande estime de lui-même, ce prime l’a littéralement achevé. Enfin, il doit reconnaître qu’il ne peut que donner raison à toutes ces paroles, même elles restent malgré tout blessantes, même pour lui qui est capable d’encaisser. « Je suis désolé de t’avoir embêté avec mes états d’âme la semaine dernière. » Elle a été patiente avec lui, puisqu’il a plutôt plombé l’ambiance entre la révélation de l’abandon de ses parents puis au fait qu’il sait condamner à la solitude. Elle s’est aussi confiée à lui, mais il espère qu’elle ne s’y est pas sentie obligée juste parce que lui l’a fait. En tout cas, qu’elle se rassure, il a repris un peu de poil de la bête même si ce n’est toujours pas sa semaine. « Et toi, alors ? Pas trop stressée pour lundi ? » Car oui, le prime aura lieu lundi cette semaine et s’il se souvient à l’heure actuelle, ce n’est pas impossible qu’il l’oublie le moment venu, étant chamboulé dans ses habitudes. « J’espère que tu vas rester. » C’est un mot d’encouragement comme un autre, qui fait écho à de précédentes paroles qu’ils ont pu échanger, mais c’est la vérité. Il l’aime bien, Felice. C’est un peu comme avec Gaëtane cependant, il a l’impression d’imposer sa présence, mais elles font partie des rares candidats avec lesquels il se sent bien.  

La musique, les vagues et la nuit, c'est tout ce dont j'ai envie ce soir. Pas de discussions, ni sourires ni plaisanteries, j'ai besoin de faire le vide dans mon esprit. Le calme avant la tempête. Je laisse la mélodie qui se joue dans mes oreilles me transporter à des années lumières de cette plage. Cette chanson parle d'un amour perdu, noyé dans les abysses de l'océan, d'un homme qui hurle son amour pour cette femme désormais disparue au fond de l'eau. Il y a quelque chose de saissisant, de poétique mais aussi de terriblement dramatique dans cette histoire. Je scrute l'horizon comme persuadée par l'idée que si je regarde bien je peux encore voir cette femme se débattre avant de se laisser emporter par les flots. Et puis peut être que l'homme se tient au bord de la falaise hurlant sa peine aux vagues qui se fracassent contre les rochers. C'est stupide, terriblement stupide. Je m'en rends bien compte mais au moment où je tente de faire demi-tour et de rentrer au nid, je manque de heurter de plein fouet Alistair. D'ailleurs celui-ci manque même de trebucher en essayant d'éviter la collision. Il m'a vraiment fait peur, d'ailleurs je ne manque pas de lui faire remarquer. Il s'excuse de m'avoir causé cette frayeur mais il était inquiet. « Oh. Tout va bien. » . Il n'y avait pas de raisons de s'inquiéter pour moi, je ne comptais pas me jeter dans l'océan pour disparaître entre deux vagues comme dans cette chanson. Cette situation me rappelle une conversation que nous avions eu quelques semaines auparavant lorsqu'il m'avait trouvé sur le balcon au beau milieu de la nuit. D'après lui, le métier de stalkeur est le seul où il excelle vraiment. « La promotion n'est pas loin alors ». Je continue sur le ton de la plaisanterie parce que je doute que les stalkeurs constituent un réseau interconnecté employé par un PDG plus que pervers. Hm non, j'en doute très fortement. Je préfère lui demander s'il va bien ou tout du moins mieux depuis la semaine dernière, depuis le prime de dimanche dernier où il en avait pas mal pris pour son grade. Sa réponse confirme bien mes doutes, les paroles de Síomha l'ont beaucoup plus atteint qu'il ne l'a laissé paraître pendant le prime. J'aurai été dans le même état à sa place même si je n'aurai pas pu contenir ma colère en face de la blonde. « Arrête, tu sais très bien que c'est faux » . Ce n'était pas un cas désespéré et il n'était pas moche non plus. Il n'avait rien à voir avec les types ultra-musclés du nid, non, mais il avait son propre charme. Et c'est quelque chose que les adeptes de la gonflette ne possédaient pas. Je comprenais que cette rubrique pouvait avoir détruit le peu d'estime qu'il avait pour lui-même et c'était mesquin et trop facile de la part de l'animatrice d'avoir pris pour cible ce trio. J'étais ressortie indemne de cette rubrique mais mes trois camarades ne pouvaient pas en dire autant. « J'espère que tu sauras lui prouver tôt ou tard qu'elle a eu tord » . Parce que ne rien faire c'était lui montrer qu'elle avait gagné et que tout ce qu'elle avait bien pu dire n'était rien de plus que la plus stricte vérité. Mon camarade tient à s'excuser de m'avoir imposé ses états d'âmes la semaine dernière. « Tu es pas obligé de t'excuser pour ça, pour tout. On en avait tous les deux besoin de cette discussion » . Je le rassure avec un sourire qui se veut bienveillant. Il y avait bien longtemps que je ne m'étais pas remise en question comme ça, cette discussion m'avait beaucoup plus aidé qu'elle ne m'avait blessé. Il avait dû y trouver son compte aussi dans cette histoire rien qu'en m'écoutant. Alors il n'y avait pas mort d'homme. Il finit par me demander si je vais bien et si le prime de lundi soir ne me rend pas nerveuse. « J'essaye de ne pas trop y penser parce que ça pourrait très bien être le dernier » . Mon humeur varie et mon moral se détériore d'heures en heures, plus l'échéance approche et plus je laisse mes angoisses prendre le dessus. Il souhaite me voir rester mais je ne suis pas en mesure de lui promettre que je serai toujours là mardi prochain. « Merci » . Il fait parti des candidats que j'apprécie dans ce nid parce qu'il n'a jamais chercher à m'impressionner ou à attirer mon attention par tous les moyens. Sa simple présence a suffit pour que je m'intéresse à ce qu'il avait à me dire et me révéler sur la complexité de sa personne. « Tu comptes faire quoi après tout ça ? » . Plus le prime approche et plus cette question me tourmente et je ne suis plus trop sûre de vouloir retourner à Seattle directement à ma sortie.

À voir une silhouette ainsi au milieu de l’eau, à une heure aussi tardive et avec la rencontre qu’il a eue avec Jessica quelques jours plus tôt, oui, ça l’a inquiété. Mais qu’Alistair se rassure, cela n’a pas lieu d’être, Felice va très bien, il n’a donc pas de souci à se faire, elle ne compte pas se jeter dans la mer en attendant que les vagues l’emportent. « D’accord, tant mieux. » Le voilà pleinement rassuré. Elle évoque ensuite son job de stalkeur, référence à la fois où ils se sont rencontrés sur le balcon et où ils en étaient venu à plaisanter sur ce sujet. Oui, il prend son job très à cœur, c’est le seul qui lui réussit, alors il faut bien qu’il se donne corps et âme pour ce travail. Il esquisse un bref sourire quand Felice évoque la promotion qui ne va pas tarder. « Oui, d’ici deux, trois semaines, c’est dans la poche. » Il tente, mettant cette fois-ci un peu plus de vie dans son ton habituellement si monotone. Il commence à saisir le principe d’une blague, il commence à en faire depuis quelques temps, mais le ton n’est jamais au rendez-vous et ses tentatives tombent à plat. Alors il essaie, de parler de façon un peu plus enjouée que d’habitude, même si c’est difficile pour lui qui a l’habitude de parler sur le même ton ennuyeux, préférant ne laisser paraître aucune émotion jusqu’à ce petit détail. Elle lui demande ensuite comment il va. Il tente une nouvelle fois de faire preuve d’humour, cette fois-ci plus par envie de dédramatiser une situation qui lui est tout de même pénible. Oui, ça va plutôt bien pour un cas désespéré, moche en surplus. Il ne compte pas se taillader les veines aujourd’hui malgré le fait qu’il soit un fantôme, moche et voué à vivre avec des chats. Tout va bien, donc. Felice tente de le rassurer en déclarant qu’il sait très bien que c’est faux. Pas vraiment, en fait. « Non, justement, elle a pas totalement tort. » Va falloir qu’il se cherche un job qui paie bien, d’ailleurs, s’il veut pouvoir nourrir les dizaines de chats qui seront à sa charge dans quelques années. « Enfin, je suis un piètre juge vu l’estime que j’ai pour moi-même. » Alors oui, célibataire à vie, moche en plus de cela, ça lui fait mal, mais il peut comprendre qu’on en arrive à ce raisonnement, lui-même n’ayant pas beaucoup d’espoir le concernant. Felice espère qu’il saura donner tort à l’animatrice, tôt ou tard. Il hausse légèrement les épaules, peu convaincu. « J’espère aussi, mais j’en doute. Je ne vois pas comment lui prouver le contraire. » Pour ce qui est du fantôme qui déambule dans le nid, il ne peut pas faire grand-chose, il ne compte pas se mettre plus en avant, il le fait déjà suffisamment à son goût, lui qui est d’habitude si discret. Quant au fait qu’il est un cas désespéré et qu’il est voué à finir sa vie entouré d’une cinquantaine de chats, et bien, il va bien falloir qu’il s’y fasse. « Je suis désolé qu’elle t’ait mêlé à ça, indirectement, ça m’a mis mal à l’aise. » C’est comme la question à son sujet pour Gaëtane, il ne savait pas où se mettre. Alors oui, il est un peu mal à l’aise avec Felice, grâce à la bienveillance de Siomha. En parlant d’humeur, il s’excuse de l’avoir embêtée avec ses états d’âme, la semaine passée. Mais elle ne lui en tient pas rigueur, puisqu’elle estime qu’ils avaient tous les deux besoin de cette conversation. « Oui, je dois reconnaître que cela m’a fait du bien. Merci de m’avoir écouté. » Parce que s’il s’est excusé auparavant de l’avoir embêtée avec ses états d’âme, il n’a pas encore remercié la candidate de l’avoir écoutée, sans jugement, sans enfoncer le couteau dans la plaie, car les détails qu’il a bien voulus partager, c’est lui qui a décidé d’en parler et non pas elle qui lui a forcé la main. Alors oui, il doit reconnaître que cela lui a fait du bien et qu’il est reconnaissant envers elle pour l’avoir sagement écouté alors qu’elle aurait pu prendre la poudre d’escampette. Si lui va plutôt bien aujourd’hui, qu’en est-il d’elle ? Il faut dire qu’une nomination lui pend au nez, alors n’est-elle pas trop stressée ? Sa réponse a le don de faire réaliser à Alistair qu’il s’est aventuré sur un sujet auquel, en effet, il est préférable de ne pas penser. « Oui, je comprends, désolé. Changeons de sujet. » Il comprend parfaitement qu’elle essaie de ne pas trop y penser, lui-même avait tenu des propos similaires pas plus tard que la semaine dernière avec Jessica quand la demoiselle avait évoqué sa nomination. Il tient quand même à lui dire qu’il espère qu’elle va rester. Mais il est donc préférable qu’ils changent de sujet pour ne pas trop occuper l’esprit de Felice avec cette histoire de nomination. D’ailleurs, elle ne tarde pas à lui poser une question qui ne parle pas de nominations et c’est tant mieux. Ce qu’il compte faire après tout ça ? Il y a déjà réfléchi, même s’il lui faudra attendre d’être véritablement dehors pour savoir ce qu’il compte faire, la façon dont son secret sera perçu à l’extérieur y étant pour beaucoup. « Je ne sais pas encore. J’aimerais déménager, changer de pays, c’est certain, mais je n’en aurais sûrement pas les moyens. » Il doute sérieusement d’atteindre le stade où les cagnottes sont validées, alors il ne lui restera plus que ses yeux pour pleurer la perte de sa cagnotte fictive. Même les 40’000€ qu’il affiche lui suffisent amplement, il n’a pas besoin du chèque destiné au vainqueur. Ça lui suffit pour rembourser ses parents et pour se payer un loyer quelques mois, histoire de savoir à quoi ressemble la vie avec un appartement à soi, chose qu’il n’a pas expérimentée depuis des années. « Et je vais sûrement me cacher dans un coin jusqu’à ce qu’on oublie à quoi ressemble mon visage. » Oui, s’il ne parvient pas à quitter le Royaume-Uni – et ce n’est pas seulement une question d’argent – il optera pour cette seconde option. Il se cachera, des mois s’il le faut, jusqu’à ce qu’on oublie son prénom et surtout, son secret qu’il sera bien obligé de dévoiler à un moment ou à un autre. « Et toi ? » Si elle lui pose la question, c’est qu’elle a sûrement une petite idée, pas vrai ? Et puis, elle a sûrement eu le temps d’y penser dans l’hypothèse où elle viendrait à quitter l’aventure, lui-même s’est posé la même question pas plus tard que la semaine dernière.

Il s'inquiète. C'était plutôt curieux surtout qu'il n'y avait aucune raison d'avoir peur pour moi. J'allais bien parfaitement bien, j'avais juste envie d'être un peu seule face à l'océan pour réfléchir avec de la musique dans les oreilles et la tête dans les étoiles. Je préfère le rassurer sur mon cas, il n'y a pas de raison de s’inquiéter. Ma réponse semble balayer toutes ses craintes. Pas de suicide par noyade à l'horizon qu'il se rassure. Je préfère dévier la conversation sur quelque chose de moins sérieux, de plus frivole. Alors j'évoque son boulot de stalkeur, le seul qui lui réussit si on en croit ses dires. Il le fait tellement bien que je sens la promotion arrivée, d'ici deux à trois semaines selon lui. J'esquisse un sourire face à la plaisanterie, c'est improbable, insensée comme situation.   Trêve de plaisanterie, j'ai envie qu'on parle de ce qui s'est passé au dernier prime, de voir s'il s'est remis des paroles blessantes de l'animatrice blonde à son égard. Visiblement, il n'a pas oublié un seul mot de sa chronique. Je me mets à sa place et je sais que des paroles aussi blessantes m'auraient envoyé dans les tréfonds des enfers. Alors je le rassure, je lui dis que la jeune femme a eu tord qu'il n'est pas un cas désespéré et qu'il n'est pas repoussant au point de faire fuir toutes les femmes aux alentours. Le jeune homme ne semble pas convaincu par mes paroles rassurantes. « Et elle a raison sur quoi ? ». Parce qu'aucune des paroles de la blonde ne me semblait vraie à mes yeux, tout était faux et beaucoup trop mesquin pour être la stricte vérité. Il n'avait pas d'estime pour lui-même, il le disait, il ne pouvait pas se positionner en juge dans cette histoire. « Je n'ai pas la prétention de connaître la moitié du quart du dixième de ta personne et pourtant j'ai l'intime conviction qu'elle a juste voulu te blesser  ». Mes deux autres camarades aussi. Encore une stratégie pour pouvoir agrémenter les rubriques dans le prochain prime, la production avait besoin de se mettre quelque chose sous la dent peu importe les conséquences. J'aimerai qu'un jour ou l'autre, il puisse prouver à l'animatrice qu'elle se trompe. Il n'a pas l'air de savoir comment mais je suis convaincue du contraire. « Trouve la personne qui te rendra heureux et la preuve sera toute trouvée. ». Il n'y avait pas trente-six mille solutions de montrer à Siomha qu'elle était dans le faux, il fallait juste lui montrer qu'il n'était pas un handicapé des sentiments. Il avait même confessé qu'il aimerait pouvoir s'engager corps et âme dans une relation sérieuse, ce que la blonde avait dit sur lui ne devait pas le freiner dans son entreprise. J'avais même eu ma place dans le passage concernant Alistair, si on en croyait la belle blonde j'étais celle qui allait faire chavirer le cœur de l'imperturbable Alistair. C'était gênant autant pour lui que pour moi alors je ne préfère pas y penser même s'il préfère s'excuser. « Tu n'y peux rien ». Je lance tout en haussant les épaules comme pour fermer cette parenthèse et relativiser sur cette situation. Pourtant il continue à s'excuser cette fois-ci pour la conversation de la semaine dernière où il m'avait fait part de certains détails de sa vie que j'ignorais. Qu'il ne se méprenne pas, cette conversation m'a aussi délestée d'un poids. « On y trouve tous les deux notre compte finalement. Tu n'as pas à me remercier. ». Je ne veux pas qu'il pense que je me sente obligée de l'écouter, j'en avais envie et j'en avais besoin autant que lui. Il me demande si je vais bien et si je ne suis pas stressée pour lundi et je ne peux pas lui mentir en disant que tout va pour le mieux. Non, je ne suis pas comme ça. Sentant que je ne suis pas très enthousiaste à parler de ma nomination, Alistair préfère changer de sujet. « Merci ». Depuis le début de la semaine on me parlait que de ça, de cette fameuse nomination et de cette élimination qui se profilait à l'horizon. Je préfère savoir ce qu'il compte faire à la sortie, il exprime son envie de déménager dans un autre pays pour recommencer une nouvelle vie. « Tu penses aller où ? ». Changer de vie était un projet aussi audacieux qu’ambitieux. Même s'il semblait avoir les épaules assez larges pour pouvoir s'adapter à un nouveau pays et à une nouvelle culture. Pourtant le déménagement n'est pas prévu pour tout de suite, non d'abord, il veut disparaître pendant quelques temps. « Je comprends ». Je ne compte pas non plus exploiter le peu de notoriété que cette émission m'a donné, je veux juste qu'on m'oublie et que je puisse reprendre une vie normale même si rien ne sera plus comme avant. « J'ai bien envie de voyager, d'aller en Inde, de me ressourcer loin de tout » . De s'éloigner le plus possible de toute cette  agitation pour prendre le temps de me remettre en question.    

Les paroles de l’animatrice ont tout de même eu un certain effet sur lui, il ne peut pas le nier. Pas de quoi pleurnicher toute la journée, mais suffisamment pour y repenser encore, quelques jours après. En fait, ce qui l’agace le plus dans ces propos, c’est que Siomha n’a pas tout à fait tort et que ça l’emmerde, qu’elle ait déclaré cela devant tout le monde alors que lui-même se doute du fait qu’il est un cas désespéré. Alors oui, elle n’avait pas tort comme il l’avoue à Felice, et celle-ci cherche à savoir à propos de quoi. « Je suis fait pour être célibataire. » Il préfère cette option-là à celle qui le veut devenir célibataire à vie. C’est la même issue, mais le terme est légèrement plus violent. « Les rares fois où je me suis investi dans une relation, mon secret a tout gâché, et je ne pense pas trouver quelqu’un en mesure de passer outre celui-ci. » Et cela fait déjà quelques années qu’il ne s’est pas investi dans une relation durable, privilégiant celles d’un soir. Mais il doute être en mesure de s’investir à nouveau, bien même si l’envie y est. Il lui faudrait trouver quelqu’un de vraiment tolérant. Il sait que ça existe, mais il n’a pas encore eu l’occasion de tomber sur une personne ainsi et plus le temps passe, plus il en doute. « Et puis, je doute que ce soit une partie de plaisir de me supporter tous les jours. » Il ajoute, rictus aux lèvres, histoire de dédramatiser la situation. Chaque fois qu’il parle de son secret, son humeur devient mauvaise, autant éviter cela. Ceci dit, ce n’est que la vérité, il n’a pas un caractère qui doit être facile à supporter chaque jour, il est le premier à l’admettre. « C’est insurmontable, comme elle l’a dit. » Il termine, haussant légèrement les épaules. Voilà, elle a eu raison, la blonde, c’est insurmontable. Ça l’embête de l’admettre à voix haute, mais ce n’est pas une grande surprise, au final. Il esquisse ensuite un bref sourire quand Felice reprend la parole, quand elle se lance dans une série de chiffre à titre de comparaison par rapport à comment elle le connait. Elle a l’intime conviction que l’animatrice a voulu le blesser. « Oh oui, ça j’en suis certain, c’est son gagne-pain après tout. » Oh, Siomha est mesquine, c’est pas vraiment une nouveauté. Elle leur a prouvé depuis le début de la saison qu’elle n’est pas la plus aimable des animateurs. Il aimerait bien lui donner tort, mais il ne voit pas comment lui prouver le contraire. Elle a l’air assez désespérée à son sujet et à raison. La réflexion de Felice lui provoque une légère grimace. Il a déjà de la peine à être heureux seul, il doute sincèrement qu’il puisse l’être avec une personne à ses côtés. « Je doute que ce soit faisable en trois, quatre semaines. » Il y a ce critère qui entre en compte, aussi. Parce qu’une fois l’émission terminée, il s’en fichera bien de donner raison ou non à Siomha, celle-ci ne sera plus là pour le suivre dans le cours de sa vie. Il s’excuse ensuite que Felice ait été mêlée à la rubrique de Siomha, du moins, autrement que pour parler de son cas à elle. D’ailleurs, l’animatrice a été plus sympa avec elle, elle a eu de la chance. Lui s’est retrouvé un peu gêné que Felice soit présentée comme celle capable de faire chavirer son cœur. Parce que s’il ne compte pas l’admettre face à elle ni tenter quoi que ce soit et que le terme ‘’faire chavirer son cœur’’ soit un peu extrême, il doit reconnaître qu’elle ne lui déplait pas. C’est comme Gaëtane, en fait. « Je sais. » Il finit par répondre. Il n’y peut rien, c’est certain, mais ça lui a tout de même déplu et il fallait qu’il s’en excuse à la place de l’animatrice. Il s’excuse aussi pour l’avoir embêtée avec ses états d’âme la semaine passée, mais il est rassuré quand elle lui dit qu’ils y ont chacun son compte. C’est vrai pour lui, mais il ne savait pas pour elle et n’avait aucune envie qu’elle se soit confiée pour garder une certaine égalité entre eux. Mais ce n’est pas le cas et le voilà donc rassuré. Il ne va pas non plus s’attarder plus longtemps sur le cas de sa nomination, ils n’ont qu’à changer de sujet et Felice ne tarde pas à lui demander ce qu’il compte faire après cette émission. Déménager, s’il parvient à valider sa cagnotte. Quant à où il compte aller… « Ne te moque pas, mais... » Il commence, légèrement hésitant. Les pays qu’il s’apprête à citer ne font sûrement pas parties du top de ceux où l’on souhaite aller vivre. « Le Pérou, le Népal, ou n’importe quel pays susceptible de ne pas connaître l’émission. » Quand on lui demande de citer deux pays qui semble reculés de toute civilisation, ce sont ces deux pays qui lui viennent en tête. Alors peut-être qu’il tentera un départ là-bas, mais pour cela, il lui faudrait valider sa cagnotte. En tout cas, une chose est sûre : il aimerait dire au revoir à l’Europe. Il aime l’Angleterre, ça reste son pays natal et il y est attaché, mais il ne peut pas continuer à fuir, il aimerait se poser quelque part et ce n’est pas possible en Europe. Il y a Internet, il y a la télévision, il y a la presse… Alors son visage risque de faire le tour de l’Europe une fois son secret révélé et une chasse aux sorcières s’engagera. Il pourrait tenter la Suisse aussi, ils sont neutres il parait, et ils sont incroyablement lents aussi, peut-être qu’ils reçoivent les nouvelles du monde extérieur avec quelques années de retard, hm. Déménager est donc la première chose qu’il compte faire, suivi par une disparition totale de sa personne. Il va se cacher, en priant bien sagement pour qu’on l’oublie. Felice comprend cette envie. « C’est ton plan, à toi aussi ? » Il ne serait pas surpris si la réponse est positive, sachant qu’elle ne lui apparait pas comme quelqu’un souhaitant à tout prix abuser de sa notoriété nouvellement acquise. D’ailleurs, il lui est difficile de deviner qui agira de la sorte. Elle a bien envie de voyager, d’aller en Inde et de se ressourcer loin de tout. « Ça doit être sympa, l’Inde. » Tiens, il peut l’ajouter sur sa liste de pays reculés de tout, il y a bien certaines régions d’Inde où sa présence passerait inaperçue. « Je n’ai pas vraiment envie que ça se termine, en fait. » Tout ça, Fake Lover… Il parle plus pour lui-même qu’autre chose, mais c’est un fait, l’après Fake Lover lui fait peur. Le retour à la vie réelle, à sa vie réelle qui ne lui plait pas, l’obligation de vivre comme un ermite comme il le faisait avant de venir ici. Elle est presque néfaste cette émission au final, en lui offrant la possibilité de goûter à une vie qui lui plait mais qui n’est pas envisageable à l’extérieur.  

Ce n'était jamais très agréable d'entendre quelqu'un vous dévaloriser en public, il était légitime qu'Alistair le prenne mal. Le venin que Siomha avait injecté dans ses veines faisait rage et il était maintenant convaincu qu'elle avait raison, tout du moins, en partie. Il est fait pour être célibataire et cela sonne pour lui comme une fatalité. Le destin en avait décidé ainsi et il ne pouvait rien y faire. « Alors c'est ton … destin ? ». Le destin, encore une chose à laquelle je ne croyais pas. Je me refusais à penser que tout était déjà écrit et que nous ne pouvions rien faire pour changer le cours des choses. C'était une chose à laquelle je refusais de me plier. Il clarifie la chose en m'expliquant que son secret avait toujours tout gâché dans toutes ses relations passées. Il ne pensait pas que quelqu'un puisse être capable de passer outre, non ce genre de personne n'existait pas. Son secret a l'air de lui gâcher la vie plus que je ne pouvais l'imaginer et cela me rendait curieuse. Certaines personnes acceptaient bien de se marier avec des prisonniers coupables de viol ou de meurtres alors qu'ils purgent leur peine, son secret ne pouvait pas être aussi lourd, la production ne l'aurait sûrement pas permis. « Ce n'est pas une fatalité ». C'était dur de pouvoir se prononcer sur ce sujet alors que je n'ai aucune idée de ce qu'il cache depuis tout ce temps. Alors je préfère rester neutre mais tout de même un brin rassurante. Il ajoute avec un léger rictus qu'il ne doit pas être facile à supporter au quotidien , mais au fond qui l'est vraiment ? Je n'ai jamais connu quelqu'un se comporter de manière irréprochable à toute heure du jour ou de la nuit. Je ne prétends pas le connaître mais les paroles de la blonde avaient pour seule but de le blesser et visiblement ça marche plutôt bien. C'est son métier et elle le fait plutôt bien. « Etre payée pour être mauvaise, ce n'est pas juste ». La blonde n'a pas que ses défauts, elle m'avait quand même épargné en m'adressant quelques paroles rassurantes mais j'étais bien la seule. Mallaury, Alistair et Gaetane n'avaient pas eu la même chance que moi. « Peut être que c'était un moyen de vous faire réagir ». J'ajoute visiblement convaincue par cette nouvelle idée. Il fallait trouver du noble dans des paroles si dures sinon tout était perdu. Alistair se devait de répondre aux provocations de Siomha en trouvant la personne qui saurait l'accepter tel qu'il est. Il n'a pas l'air aussi convaincu que moi, il ne voit pas comment il était possible d'y arrive en quatre semaines. « C'est pas impossible non plus. Il n'y a dont personne qui te plaît ou qui t'a plût  dans cette maison ? ». Les jolies filles ne manquaient pas dans le nid et ce même si l'effectif se réduisait de semaines en semaines. Il y avait bien quelqu'un qui avait pu retenir l'attention d'Alistair après cette neuvième semaine d'aventure. Il s'excuse ensuite que l'animatrice ait cité mon nom en évoquant son cas. Elle me voyait comme celle qui pouvait faire chavirer le cœur de l'individu si secret qui se tenait face à moi. « Je ne comprends pas, je n'ai rien fait pour qu'elle pense ça de moi, désolée si ça t'a gêné  ». Parce que le plus mal à l'aise dans cette histoire, ça restait lui. Je finis pas lui demander ce qu'il compte faire après la sortie et ses envies de déménagement coïncident plutôt avec mon envie de disparaître quelque temps. Il m'intime de ne pas me moquer. « Je ne le ferai pas ». Il veut se replier dans un pays assez reculé, le Pérou ou le Népal pour se faire oublier et reconstruire une nouvelle vie. « Tu comptes tout oublier de cette aventure une fois sorti ? ». Il veut se faire oublier, que plus personne ne reconnaisse son visage mais arrivera-t-il à faire disparaître les souvenirs liés à cette émission ? A ma sortie je ne compte pas profiter de la petite notorioté que m'a donné cette émission. Je veux qu'on m'oublie et que je puisse retourner à ma petite vie tranquille dans les quartiers de la cité émeraude. « Oui, partir loin de tout quelques temps et redevenir une anonyme ». Un petit voyage était donc nécessaire autant pour me ressourcer que pour m'aider à réflechir à tout ça, à cette émission et l'impact qu'elle avait eu sur ma vie. J'avais toujours adoré l'Inde et la culture de ce pays alors c'était un peu un rêve qui allait se réaliser. Que ma cagnotte soit validée ou non. « C'est un merveilleux pays ». Alistair n'a pas envie que l'aventure se termine et je ne pouvais que lui donner raison, j'étais bien dans ce petit cocon qui m'éloignait de cette réalité qui ne me rendait qu'à moitié heureuse. « Moi non plus ». Et pourtant la fin semble si proche, ce n'était peut être que l'histoire de quelques jours. « Ce qui va se passer après tout ça me fait peur ». C'est comme se jeter dans le vide du haut de la grande falaise. Pourtant je l'avais déjà fait une fois mais j'avais quelqu'un à mes côtés pour m'épauler. Aujourd'hui je n'avais personne si qui compter, être toute seule face à l'inconnu me terrifiait.