@ALLEN - LE 30/03 À 12H50

Ce midi c’est assez vivant je trouve dans le restaurant. Je ne sais pas si c’est parce qu’on est lundi et que c’est encore le début de la semaine ou alors que le changement d’heure a bousculé les habitudes des uns et des autres mais en tout cas, il y a une bonne partie des candidats même si ça commence à se vider peu à peu. Il faut dire que je viens de finir mon plat et que là, je vais attaquer mon dessert. Je dis au revoir à Sailor qui était assise à ma table et qui m’abandonne pour une envie pressante puis je pars en direction des cuisines pour fouiller dans les congélateurs. Je reviens avec une belle glace à la vanille. Pas de cône mais un grand bâton. Je préfère ça. Toute contente de ce petit plaisir que j’apprête à me faire, je me rassois à ma table en constatant être toute seule. De là, je rejette un coup d’œil à celle où se trouve Allen et je crie presque victoire lorsque son compagnon du midi plie bagage et le laisse tout seul. Du coup, je saute sur l’occasion, glace à la main, pour aller retrouver le trentenaire. « Salut. Je te dérange pas ? » Je m’assois à sa table face à lui avec un petit sourire sans lui demander la permission. Je veux pas m’imposer mais j’ai besoin de lui parler depuis notre dernière conversation. Seulement, j’ai toujours pas trouvé l’occasion de le faire et là en voilà une, même si c’est peut-être pas le meilleur moment choisi. D’ailleurs, je n’hésite pas à couper la parole du candidat qui semble ne pas avoir bien saisi le but de ma visite. J’imagine qu’il va un peu déchanter et j’en suis déjà peinée. « Je.. je t’ai menti. » Comment casser l’ambiance en une seconde. Au moins, j’y ai été direct car il est hors-de-question que j’attende plus longtemps ou que je tourne autour du pot 150 ans. « Enfin… je t’ai plutôt laissé croire des choses que je n’aurai pas dû. » J’imagine que là il doit se poser tout un tas de question et paniquer. C’est légitime. Il faut du coup que je me lance et que j’arrête de faire durer ce suspens qui doit être pour lui insoutenable. « Jane est ma meilleure amie. » Je ne sais pas s’il comprend ou non là où je veux en venir mais au cas où, je vais essayer d’être plus claire. « Je ne sais pas pourquoi je t’ai laissé croire des choses mais.. je ne suis pas lesbienne. Désolé. » Je m’excuse pas de ne pas être lesbienne, non, je m’excuse de lui avoir laissé croire cela et de n’avoir pas démenti sur le moment. J'ai été bête et impuissante. « J’imagine que tu dois m’en vouloir. » Je baisse la tête lui laissant maintenant l’occasion de réagir réellement et de prendre la parole pour dire ce qu’il a sur le cœur car jusqu’à présent c’est plutôt moi qui ait mené la barque ou plutôt la conversation avec cette révélation.

Fraichement réinstallée à une autre table du restaurant où se trouve Allen, je m’apprête à lui faire une révélation qui ne le laissera probablement pas de marbre. Je lui ai, en effet, laissé croire des choses que je n’aurai pas dues il y a quelques jours. Je n’ai jamais eu l’occasion ou plutôt le courage de lui dire la vérité jusqu’à aujourd’hui. Mais n’est-ce pas trop tard ? Je commence à me le demander au fur-et-à-mesure de sa réaction. Il est vrai que j’aurai probablement dû réagir sur l’instant. Seulement, j’étais encore troublée par le fait qu’il était père et mari de famille mais aussi par son côté charmeur. Même s’il est très subtile et que je me fais peut-être des idées à ce sujet, j’ai voulu me protéger avec ça. Je ne lui ai pas expressément menti mais c’est tout comme. J’aurai clairement pu rectifier le tir. « Je suis désolé. » C’est le seul truc que je trouve à dire. Je crois qu’aucune explication ne justifierait le fait que j’ai laissé croire à Allen que j’étais lesbienne. Le pire, comme il le dit, c’est qu’il s’est senti mal à l’aise sur le moment et qu’il s’en voulait d’avoir eu une réaction un peu bête pour au final, rien puisque tout ce qu’il s’est imaginé était faux. Je pourrai dire que je n’ai rien affirmée et que c’est lui qui a tiré une conclusion trop hâtive mais ça serait du foutage de gueule. Bien évidemment que je me suis rendu compte qu’il allait penser que Jane était ma concubine. Mais c’était tard. Trop tard pour réaliser les conséquences de mes propos. J’imagine que maintenant Allen doit m’en vouloir. Il m’affirme que non même s’il ne comprend pas pourquoi j’ai menti. Je me mords la lèvre. « Je n’avais aucun intérêt.. je suis juste... idiote. » Je préfère autant me dégrader plutôt que de lui dire que j’ai un instant pensé que ça serait rassurant le fait qu’il me voit presque comme un mec plutôt qu’autre chose. J’imagine qu’il ne comprendrait pas de toute façon ce raisonnement. Je ne le comprends pas non plus. C’est ma barrière. Est-ce qu’il y a d’autres choses qu’il devrait savoir ? L’idée de lui dire des choses totalement improbables et fausses pour plaisanter me traverse l’esprit mais je me retiens. C’est définitivement pas le moment. « Mon secret. » J’imagine qu’il devrait être au courant de mon secret. Ça serait beaucoup plus simple. Sauf que ça n’est malheureusement pas possible. Si je le lui dis, je me fais expulser. Ce sont les règles et je peux pas aller à leur encontre. La seule solution étant donc qu’il démasque ce que je cache. « Mince, ma glace ! » Le fait que la crème coule sur mes mains et un peu sur la table me ramène à la réalité des choses. Il faut que j’attaque ma glace avant qu’elle finisse par fondre et qu’il ne me reste plus rien dans les mains.

Ce que j’apprécie particulièrement chez Allen au moment où je lui révèle tout ça, c’est son calme et sa compréhension. Je suis étonné qu’il ne s’énerve pas comme la plupart des garçons l’auraient sans doute fait à sa place et je suis également surprise qu’il cherche à comprendre pourquoi j’ai agis ainsi dans un état d’esprit presque relaxe. Je ne peux m’empêcher de me sentir coupable et mal à l’aise mais j’apprécie fortement sa maturité et le fait que malgré tout, il me rassure et ne me traite pas d’imbécile, ce que je suis au final, il faut avouer. « Merci. Je te remercie de ne pas m’en vouloir. » Je me répète peut-être mais pour le coup, je trouve qu’il assure. C’est le genre de discours qui me plait et qui me rassure aussi. Du coup, j’en viens à penser qu’il serait bien qu’il sache mon secret. Mais pour cela, il faudra qu’il le trouve ou qu’il devienne mon partenaire un jour. Ceci dit, je doute un peu de cette seconde option car pour l’instant mon partenariat avec Sailor semble aussi bien marcher que le sien avec Agata. Le mieux serait donc qu’il le découvre de lui-même. Pour autant, je reste joueuse et il n’est pas question que je lui file mon secret sur un plateau d’argent. « Parce qu’il pourrait t’aider.. à me comprendre, oui. » Je rectifie un peu ses dires à l’aide d’un seul mot qui fait toute la différence. Maintenant, je ne jette absolument pas la pierre sur mon secret. Il pourrait un peu expliquer mon attitude mais ça n’empêche que je suis fautive. Fautive de ne pas lui avoir dit aussitôt que Jane n’est que ma meilleure amie. En attendant, ma glace commence à fondre et cela semble amuser le candidat qui s’empresse de me prêter main forte avec un mouchoir en papier pour essuyer ce qui vient de couler. « Merci. » Un léger rire s’échappe de mes lèvres tandis que je m’attaque à ma glace avec mes lèvres en essayant de ne pas m’en foutre partout. Du coup, j’avale presque les ¾ de la glace en quelques secondes. Et je crois d’ailleurs que c’était un peu trop rapide puisqu’un terrible mal de crâne me prend soudainement. Conséquence du froid qui monte à la tête. « Aïe ! C’est froid ! » Je pose ma main aussitôt sur mon front comme pour le réchauffer tandis qu’Allen semble se moquer un peu de la scène. Il faut dire que je l’ai cherchée en avalant super rapidement la glace. Il en reste quand même un peu et le candidat semble volontaire pour la finir. Un « Gourmand ! » s’échappe spontanément de mes lèvres. J’avoue que je pense à lui dire non gentiment car je n’aime pas trop partager mes affaires avec des inconnus mais pour autant, j’ai envie de faire un effort et je me dis que je peux bien le lui la donner, surtout que je repasserai pas derrière lui après étant donné que c’est la fin. « D’accord. » Je tends mon bras avec la glace vers ses lèvres pour qu’il la finisse sauf qu’une idée malsaine me traverse l’esprit et je la transforme en action que j’exécute. Mon bras s’élance en un coup un peu brusque sur la bouche du candidat qui aura goûté de force à la vanille. « Oups. » Je prends un air faussement désolé en me mordant mes lèvres tout en sachant qu’il a très bien capté qu’il ne s’agissait pas là d’une maladresse mais bien d’un attentat glacé envers sa personne. Du coup, je me dis que je devrais peut-être commencer à courir si l’idée de se venger lui venait à l’esprit. Je ne sais pas s’il est joueur mais il y a des chances pour que mon action ait des conséquences.

Il paraît maintenant presque évident qu’Allen se méfiera davantage de moi et ce que je peux dire. Il n’a plus une confiance aveugle en moi. Du moins, il ne me croira plus autant qu’avant. Pourtant, c’était presque un accident de lui avoir laissé croire tout ça. Je pense pas que quelque chose du genre puisse arriver à nouveau. Et je pense pas faire regretter à Allen quoi que ce soit non plus. « Non. » Bien sûr que non, ce ne sont pas mes intentions. Je ne suis pas une menteuse. Il m’arrive de cacher la vérité et certaines choses, oui, mais comme beaucoup de monde et si je le fais c’est pour mon propre intérêt à savoir me protéger. Ici d’ailleurs, c’est pareil. J’ai un secret à conserver, au même titre que tous les candidats. Il est vrai qu’il serait bien plus simple que celui-ci soit découvert pour qu’on puisse mieux me comprendre mais je ne compte pas pour autant le donner. Ce serait de l’anti-jeu et je crois que d’ailleurs, ça serait sanctionné par Cupidon, ce qui paraît légitime quand on y pense. « On ne connait jamais assez bien une personne. » Alors oui, il est vrai que c’est perturbant cette histoire de secret. Mais j’imagine que ça l’est plus pour certains que pour d’autres. Le mien l’a toujours un peu été, même avant l’émission. Ce n’est pas quelque chose dont j’ai l’habitude de crier sur tous les toits. Seuls mes proches sont informés. Maintenant, ma situation est surement différente des autres. « Tout le monde a connaissance de ton secret en dehors du jeu ? » Enfin tout le monde, c’est un grand terme. Je parle plutôt de son entourage : ses amis, collègues, famille et voilà je crois. En tous les cas, il peut très bien ne pas répondre à cette question même si, la réponse ne me sera pas d’une grande aide dans ma recherche de secret j’imagine. Et bref, me voilà en train d’engloutir un peu trop rapidement ma glace pour ne pas qu’elle finisse fondue sur ma main et sur la table. Du coup, cet acte n’est pas sans conséquence puisque le froid me monte à la tête et que j’en deviens presque folle à m’agiter dans tous les sens pour réchauffer mon front. Une scène qui amuse Allen qui n’hésite pas à me tacler en me demandant si j’ai un train à prendre. Je lui offre une grimace presque enfantine du genre : « ahah très drôle ! » tandis que je m’empresse d’avaler la crème qui siégeait encore au fond de ma bouche. Quelques secondes plus tard, le trentenaire se propose de m’aider à finir la glace voyant surement que j’ai un peu de mal avec. Mais j’estime aussi que c’est de la gourmandise car ses yeux louchaient dessus depuis un petit bout de temps. D’ailleurs, il ne s’en cache pas et ça me fait rire. Et puis, au final, j’accepte de lui donner la fin de la glace. Sauf qu’au lieu de la lui faire goûter gentiment, je décide de me la jouer taquine et de la lui faire goûter presque de force. Il s’écrit aussitôt au scandale et je ne retiens pas mes rires. Je crois que je suis même assez fière de mon coup. C’était bien joué. « Je suis maladroite tu comprends... » J’essaye de jouer là-dessus en prenant un air de blonde effarouchée mais pour le coup, je suis une piètre comédienne. Le candidat pourra comprendre aisément que je me moque gentiment de lui. D’ailleurs, il décide sans plus attendre de se lever et de contourner la table, ce qui ne me rassure pas vraiment. Surtout quand il annonce que sa chemise m’a gardé un peu de crème glacée, tout en s’approchant de moi. Là, je crois, que je devrais partir en courant. « Non, j’ai plus faim, je t’assure. » J’essaye de reculer mais je crois que c’est un peu tard. J’aurai dû partir plus tôt.

Je pense être très bien placée pour affirmer qu’on ne connait jamais assez bien une personne. Même quelqu’un de très proche. Et c’est un piège. C’est ce qui peut mener à notre perte. Allen semble partager mon point de vue et je perçois dans sa réponse que lui aussi paraît en mesure d’affirmer ça par son expérience. Je crois qu’on a des points communs même si on ne le sait pas forcément. Je le ressens. Et c’est pourquoi je commence peu à peu à m’attacher à lui. Preuve en est, j’ai ressenti le besoin de rétablir la vérité à propos de notre dernière conversation. Je pense que je ne l’aurai pas fait si cela avait été quelqu’un d’autre. « Beaucoup de monde oui. » Je réponds avec une gêne aux questions suivantes du camarade sans pour autant assimiler que je suis dans la même situation que lui. Non, en fait, j’en suis resté à penser à ma mère quand il a évoqué la sienne. « Ma mère ne saura sans doute même pas que j’ai participé à ce jeu. Je doute qu’elle le connaisse en plus. » Déjà, je ne pense pas qu’elle soit adepte de programmes télévisés et en plus de ça, je doute fort que cette émission soit diffusée là où elle est. « De toute façon, elle ne m’a jamais prise au sérieux. » Je balance ça amèrement en pensant à des choses plus positives du genre mon père qui lui m’a toujours cru, soutenu et qui doit me regarder actuellement via internet. J’espère qu’il est fier de moi et qu’il le sera encore plus lors de la révélation de mon secret. En attendant, je me recadre et je place toutes les émotions qui commençaient à ressurgir dans un coin de ma tête. Ma glace coulant m’aidant heureusement à faire la transition. S’en suit une série d’événements qui mènent à présent à une guéguerre glacée entre Allen et moi. J’ai commencé en le barbouillant avec la fin de ma glace et il semble vouloir continuer en s’approchant dangereusement de moi. « Pur hasard. » Je sens la vengeance arrivée à plein nez. Il l’annonce même, plus de surprise. Je n’ai plus qu’à essayer de me protéger du mieux possible. Mais n’est-ce pas trop tard ? Me voilà prisonnière et presque condamnée. Sauf que contre toute attente, la glace vient se coller uniquement sur l’une de mes joues en toute délicatesse. Je souris alors pensant que j’ai évité le pire. Au moins, mes vêtements ne seront pas tachés. « Je dois avoir l’air maline maintenant. » Bon, d’accord, je l’ai bien cherché. Et la vengeance du candidat est bien gentille comparée à ce que je lui ai fait subir. J’apprécie d’ailleurs grandement le fait qu’il ne m’ait pas brusqué. « Un partout. » J’annonce comme pour m’assurer d’une trêve dans cette pseudo guerre glacée. Puis, je me décide à m’essuyer la joue à l’aide d’une serviette. « Donne-moi ta chemise, je vais aller la nettoyer. Je suis une fée du logis. » Je lui dois bien ça je crois. De toute façon, il faut que j'aille récupérer ma lessive à la laverie donc autant en profiter et faire d'une pierre deux coups.